Centre Palestinien
d'Information
Les changements démographiques entre la mer et le fleuve
Dr. As'ad Abdou Ar-Rahman
Photo CPI
26 mai 2008
Depuis la fin des années soixante, la religion
est revenue sur la scène internationale, après le recul des
idéologies laïques, nationales et socialistes. Désormais, c'est
un nouveau Monde. L'Occident s'attache au christianisme. Israël
au judaïsme. Les organisations islamiques à l'Islam.
Par contre, cette vision ne flotte pas à la
surface pour une raison spirituelle, loin de là. C'est tout
simplement pour donner une sorte de légitimité à quelques
politiques visant à mettre la main sur le Monde. Cette tendance
religieuse ajoute une nouvelle difficulté à la question
palestinienne dont la solution est trop loin à atteindre. Et un
« Etat juif » est pratiquement irréalisable. En effet, la
« nationalité juive » n'a rien à voir avec le terme de la
nationalité.
Raja Kamal, professeur à l'université de
Chicago, a réalisé une étude intitulée « L'inquiétude
démographique d'Israël ». Il y écrit : « Les deux partis
s'attachent de plus en plus fortement à des croyances
religieuses, dans la politique de l'un envers de l'autre. Ce qui
fait plus peur, c'est qu'en Israël, le zèle religieux se montre
fort autour de ces changements démographiques qu'Israël
connaît ».
Ces changements pourront être le défit le plus
fort pour ceux qui cherchent une solution pacifique au conflit
palestino-israélien. Désormais, deux changements démographiques
affectent les politiques israéliennes. Le premier : les
habitants orthodoxes et extrémistes sont de plus en plus forts.
Le deuxième : le départ incessant des savants, des chercheurs et
des intellectuels d'Israël.
Selon les statistiques du gouvernement
israélien, le niveau de natalité chez les Juifs fondamentalistes
est estimé à 7,6 enfants pour une femme, trois fois plus élevé
que la moyenne nationale. Ainsi, dans une société si divisée
comme Israël, un petit parti religieux pourra fortement
influencer un gouvernement relativement faible.
La politique d'incessante colonisation, en
dépit du refus international, en est l'image probante, de cette
influence. Cette politique est adoptée par des petits partis,
Chass en tête. Et le faible premier ministre ne peut y rien
faire.
Quant à l'émigration des savants et des
chercheurs, Israël les chassent. 25% d'entre eux vivent
désormais aux Etats-Unis.
Parmi les éléments qui les chassent se
trouvent les rémunérations trop basses, croit Dan Ben David,
professeur à l'université de Tel-Aviv. Il y a aussi le manque de
laboratoires.
Selon le quotidien hébreu Yadiot Ahranot, pour
deux raisons, des savants et des académiciens bien connus
quittent le pays pour aller s'installer aux Etats-Unis. La
première, c'est qu'Israël ne peut plus faire contrepoids face au
billet vert américain. La deuxième réside dans la situation de
sécurité tendue à longueur de temps. Et Israël, qui ne veut
perdre aucun élément de sa population, voit dans cette
émigration un échec de sa politique consistant à attirer vers
elle les Juifs du Monde, et non le contraire. C'est un vrai
danger démographique, surtout face à la croissance des habitants
palestiniens.
Sont nombreux ceux qui croient qu'Israël sera
bientôt perdante, démographiquement parlant. Bientôt, les
Palestiniens seront majoritaires. La tendance est bien claire
pour le chercheur démographique israélien Sérjo Do La Birgola :
« Avant la fin de l’actuelle décennie, les Juifs seront
minoritaires dans les territoires comprenant Israël, la
Cisjordanie et la bande de Gaza ».
Les Juifs d'entre la méditerranée et le fleuve
du Jourdain sont très faiblement majoritaires, ajoute-t-il.
Il est important de noter que le mouvement
sioniste, à son départ, voyait que les grands problèmes des
Juifs sont l'intégration dans les grandes sociétés, les crises
économiques et les oppresseurs qui les frappent. Il croyait que
la solution se trouvait dans le rassemblement en un seul lieu.
Mais soixante ans après la création d'Israël, ce rêve reste
inachevé ; deux tiers des Juifs du Monde vivent encore à
l'extérieur d'elle.
Par ailleurs, la tendance religieuse ne marque
pas uniquement "Israël". Les nouveaux conservateurs des
Etats-Unis s'attachent, pour leur part, au patrimoine
judéo-chrétien. Et chez nous, en Palestine, nous avons le Hamas
et le Djihad Islamique. Au Liban, il y a le Hezbollah. Et
partout dans le monde Arabe, le mouvement des Frères Musulmans
s'étend. Et dans beaucoup de pays musulmans, les
fondamentalistes islamiques ne sont pas peu nombreux. Partout
dans le monde, les mouvements qui mélangent la politique et la
religion ne cessent de s'accroître en nombre. Et monsieur George
Bush ne fait que mettre de l'huile sur le feu avec sa politique.
Revenons à Israël où le fondamentalisme
extrémiste n'est plus qu'un mur. Il divise les Juifs entre eux
et fait barrage face aux Palestiniens et aux Arabes. Mais ce qui
est plus dangereux, c'est que s'est ratée la volonté de
rassembler les Juifs autour de notions comme la citoyenneté,
l'égalité, la démocratie, la diversité dont la diversité
religieuse, les intérêts économiques, culturels, historiques...
Pour se rassembler, les Israéliens n'ont plus que l'animosité
avec les Palestiniens et tous les Arabes. La démographie était
et restera alors un élément très important pour tout règlement
entre les Palestiniens et Israéliens.
Article
rédigé par Dr. As'ad Abdou Ar-Rahman, résumé et traduit par le
CPI
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