Entretien avec le magazine serbe
Geopolitika
Thierry Meyssan :
« Des terroristes syriens
ont été formés par l'UCK au Kosovo »
Dimanche 2 décembre
2012
Geopolitika
:
Monsieur Meyssan,
vous avez acquis la célébrité mondiale
quand vous aviez publié le livre
L’Effroyable imposture qui met en
cause la version officielle des
autorités états-uniennes concernant
l’attaque terroriste du 11 septembre
2001. Votre livre a encouragé d’autres
intellectuels à émettre leurs doutes sur
ce tragique évènement. Pourriez vous
brièvement dire à nos lecteurs ce qui
s’est réellement passé ce 11 septembre,
qu’est-ce qui a touché ou explosé dans
le bâtiment du Pentagone : c’était un
avion qui s’est écrasé ou bien autre
chose ? Que s’est-il passé avec les
avions qui se sont écrasé sur les tours
jumelles, surtout avec le troisième
immeuble à coté de ces tours ? Quel est
le contexte plus profond de cette
attaque, qui a eu des répercussions
mondiales et a beaucoup changé le monde
? Thierry Meyssan : Il
est étonnant que la presse mondiale ait
relayé la version officielle d’une part
parce quelle ci est absurde, d’autre
part parce qu’elle ne parvient pas à
expliquer une partie des événements.
L’idée selon laquelle un fanatique,
basé dans une grotte en Afghanistan, et
une vingtaine d’individus, munis de
cutters, auraient pu détruire le World
Trade Center et frapper le Pentagone
avant que l’armée la plus puissante du
monde ait eu le temps de réagir, n’est
pas même digne d’un Comics. Mais, plus
l’histoire est grotesque, moins les
journalistes occidentaux posent de
questions.
Par ailleurs, la version officielle
ne rend pas compte des spéculations
boursières sur les compagnies victimes
des attentats, de l’incendie de l’annexe
de la Maison-Blanche, ni de
l’effondrement d’une troisième tour du
World Trade Center dans l’après-midi.
Autant d’événements qui ne sont pas même
mentionnés dans le rapport final de la
Commission d’enquête présidentielle.
Sur le fond, on ne parle jamais de la
seule chose importante ce jour là :
après l’attaque du World Trade Center,
le plan de continuité du gouvernement a
été illégalement activé. Il existe une
procédure en cas de guerre nucléaire. Si
l’on constate l’annihilation des
autorités civiles, un gouvernement
militaire alternatif prend le relai.
Vers 10h30, ce plan a été activé bien
que les autorités civiles soient
toujours en capacité d’exercer leurs
responsabilités. Le pouvoir a échu aux
militaires qui ne l’ont restitué que
vers 16h30 aux civils. Durant cette
période, des commandos sont allés
chercher la presque totalité des membres
du Congrès et des membres du
gouvernement pour les mettre en sécurité
dans des abris anti-atomiques. Il y a
donc eu un coup d’État militaire de
quelques heures, juste le temps
nécessaire pour que les putschistes
imposent leur ligne politique : état
d’urgence permanent à l’intérieur, et
impérialisme global à l’extérieur.
Le 13 septembre, le Patriot Act
a été déposé au Sénat. Il s’agit non pas
d’une loi, mais d’un épais Code
anti-terroriste dont la rédaction avait
été conduite en secret durant les deux à
trois années précédentes. Le 15
septembre, le président Bush a avalisé
le plan de la « matrice mondiale »,
instituant un vaste système
d’enlèvements, de prisons secrètes, de
tortures et d’assassinats. Lors de la
même réunion, il a avalisé un plan
prévoyant les attaques successives de
l’Afghanistan de l’Irak, du Liban, de la
Libye, de la Syrie, de la Somalie, du
Soudan et de l’Iran. Vous pouvez
constater que la moitié du programme a
déjà été réalisée.
Ces attentats, ce coup d’État, et les
crimes qui ont suivi ont été organisés
par ce qu’il convient d’appeler l’État
profond (au sens où on emploie cette
expression pour décrire le pouvoir
militaire secret en Turquie ou en
Algérie). Ces événements ont été conçus
par un groupe très fermé : les
straussiens, c’est-à-dire les disciples
du philosophe Leo Strauss.
Ce sont les mêmes individus qui
avaient poussé le Congrès US à réarmer,
en 1995, et qui ont organisé le
démembrement de la Yougoslavie. Nous
devons nous rappeler à titre d’exemple
qu’Alija Itzetbegovic avait comme
conseiller politique Richard Perle,
comme conseiller militaire Oussama Ben
Laden, et comme conseiller médiatique
Bernard-Henri Lévy.
Geopolitika :
Votre livre et votre attitude
antiaméricaine, que vous avez librement
exprimée sur votre réseau indépendant
Voltaire, ont été la source de problèmes
que vous avez eus personnellement avec
l’administration de l’ancien président
français, Nicolas Sarkozy. Pourriez-vous
nous en dire un peu plus ? En effet,
dans l’article que vous aviez écrit sur
M. Sarkozy, intitulé «
Opération Sarkozy : comment la CIA a
placé un de ses agents à la présidence
de la République française » vous
avez publié des informations délicates
qui nous rappellent des thrilleurs
politico-criminels.
Thierry Meyssan : Je
ne suis pas anti-américain. Je suis
anti-impérialiste et je pense que le
peuple des États-Unis est lui aussi
victime de la politique de ses
dirigeants.
Concernant Nicolas Sarkozy, j’ai
révélé qu’il avait été élevé durant son
adolescence, à New York, par
l’ambassadeur Frank Wisner Jr. Ce
personnage est un des plus importants
cadres de la CIA, laquelle a été fondée
par son père Frank Wisner Sr. Il
s’ensuit que la carrière de Nicolas
Sarkozy a entièrement été façonnée par
la CIA. Il n’y a donc rien d’étonnant à
ce que, devenu président de la
République française, il ait défendu les
intérêts de Washington et non pas ceux
des Français.
Les Serbes connaissent bien Frank
Wisner Jr. : c’est lui qui a organisé
l’indépendance unilatérale du Kosovo en
qualité de représentant spécial du
président des États-Unis.
J’ai expliqué tout cela en détail
lors d’une intervention à l’Eurasian
Media Forum (Kazakhstan) et on m’a
demandé de le développer dans un article
pour Odnako (Russie). Il se
trouve que, par un hasard de calendrier,
il a été publié pendant le guerre de
Géorgie, au moment où Sarkozy venait à
Moscou. Le Premier ministre Vladimir
Poutine a posé le magazine sur la table
avant de commencer à discuter avec lui.
Cela n’a évidemment pas amélioré mes
relations avec Sarkozy.
Geopolitika :
Monsieur Meyssan, quelle est la
situation actuelle en Syrie, la
situation sur le front et la situation
dans la société syrienne ? Est-ce que
l’Arabie Saoudite et le Qatar, ainsi que
les pays occidentaux qui veulent faire
tomber le système politique du président
Bachar El Assad de force, sont proches
de l’accomplissement de leur objectif ?
Thierry Meyssan :
Sur 23 millions de Syriens environ 2 à
2,5 millions soutiennent des groupes
armés qui tentent de déstabiliser le
pays et d’affaiblir son armée. Ils ont
pris le contrôle de quelques
agglomérations et de vastes zones
rurales. En aucun cas ces groupes armés
ne seront en mesure de renverser le
régime.
Le plan occidental initial prévoyait
que des actions terroristes
engendreraient un cycle de
provocation/répression justifiant une
intervention internationale, sur le
modèle du terrorisme de l’UCK et de la
répression par Slobodan Milosevic,
suivis de l’intervention de l’OTAN.
Signalons au passage qu’il est attesté
que des groupes combattants en Syrie ont
été formés au terrorisme par des membres
de l’UCK sur le territoire du Kosovo.
Ce plan a échoué parce que la Russie
de Vladimir Poutine n’est pas celle de
Boris Eltsine. Moscou et Pékin ont
interdit à l’OTAN d’intervenir et
depuis, la situation pourrit.
Geopolitika : Que
veulent obtenir les États Unis, la
France, la Grande Bretagne, l’Arabie
Saoudite et le Qatar en faisant tomber
le président el-Assad ?
Thierry Meyssan :
Chaque État membre de la coalition a son
propre intérêt dans cette guerre et
croit pouvoir le satisfaire, alors même
que ces intérêts sont parfois
contradictoires entre eux.
Au plan politique, il y a la volonté
de briser « l’Axe de la Résistance au
sionisme »
(Iran-Irak-Syrie-Hezbollah-Palestine).
Il y a aussi la volonté de poursuivre le
« remodelage du Moyen-Orient élargi ».
Mais le plus important est au plan
économique : on a découvert d’immenses
réserves de gaz naturel au sud-est de la
Méditerranée. Le centre de ce gisement
est prés de Homs en Syrie (plus
précisément, à Qârâ).
Geopolitika :
Pourriez-vous nous en dire un peu plus
sur la rébellion d’Al Qu’aida en Syrie,
dont les relations avec les États Unis
sont pour le moins contradictoires, si
on regarde leurs actions sur le terrain
? Vous avez dit dans une interview que
les relations entre Abdelhakim Belhadj
et l’OTAN étaient quasiment
institutionnalisées. Pour qui Al-Qu’aida
fait la guerre en réalité ?
Thierry Meyssan :
Al-Qaida n’était au départ que le nom de
la base de données, du fichier
informatique, des moujahidines arabes
envoyés se battre en Afghanistan contre
les Soviétiques. Par extension, on a
nommé Al-Qaida le milieu jihadiste dans
lequel ces mercenaires étaient recrutés.
Puis, Al-Qaida a désigné les combattants
autour de Ben Laden et par extension,
tous les groupes dans le monde qui se
réclament de l’idéologie de Ban Laden.
Selon les périodes et les besoins,
cette mouvance a été plus ou moins
nombreuse. Durant la première guerre
d’Afghanistan, la guerre de Bosnie et
les guerres de Tchétchénie, ces
mercenaires étaient des « combattants de
la liberté », car ils luttaient contre
des Slaves. Puis, lors de la seconde
guerre d’Afghanistan et de l’invasion de
l’Irak, ils étaient des « terroristes »,
parce qu’ils s’en prenaient aux GI’s.
Après la mort officielle de Ben Laden,
ils sont redevenus des « combattants de
la liberté » durant les guerres de Libye
et de Syrie parce qu’ils se battent aux
côtés de l’OTAN.
En réalité, ces mercenaires ont
toujours été contrôlés par le clan des
Sudeiris, la faction pro-US et
archi-réactionnaire de la famille royale
saoudienne, et plus précisément par le
prince Bandar Ben Sultan. Celui-ci, que
George Bush Père a toujours présenté
comme son « fils adoptif » (c’est-à-dire
comme le garçon intelligent dont il
aurait aimé être le père), n’a cessé
d’agir pour le compte de la CIA. Même
lorsque Al-Qaida a combattu les GI’s, en
Afghanistan et en Irak, c’était encore
dans l’intérêt bien compris des
États-Unis parce que cela permettait de
justifier leur présence militaire.
Il se trouve que dans les dernières
années, les Libyens sont devenus
majoritaires au sein d’Al-Qaida. L’OTAN
les a donc naturellement utilisés pour
renverser le régime de Mouammar
el-Kadhafi. Dès que cela a été fait, ils
ont nommé le numéro 2 de l’organisation,
Abdelhakim Belhaj, gouverneur militaire
de Tripoli, bien qu’il soit recherché
par la justice espagnole pour sa
responsabilité présumée dans les
attentats de Madrid. Par la suite, ils
l’ont transféré avec ses hommes pour se
battre en Syrie. Pour leur transport, la
CIA a utilisé les moyens du
Haut-Commissariat aux Réfugiés grâce à
Ian Martin, le représentant spécial de
Ban ki-Moon en Libye. Les prétendus
réfugiés ont été emmenés en Turquie dans
des camps qui leur ont servi de base
arrière pour attaquer la Syrie et dont
l’accès a été interdit aux
parlementaires turcs et à la presse.
Ian Martin aussi est connu de vos
lecteurs : il fut secrétaire général
d’Amnesty International, puis
représentant du Haut Commissaire pour
les Droits de l’homme en
Bosnie-Herzégovine.
Geopolitika : La
Syrie est le lieu, non seulement d’une
guerre civile, mais aussi d’une guerre
médiatique et de manipulations. Nous
vous demandons en tant que témoin
direct, quelqu’un qui est sur le
terrain, que s’est-il vraiment passé à
Homs et à Houla ?
Thierry Meyssan : Je
ne suis pas témoin direct de ce qui
s’est passé à Houla. Par contre, j’ai
été tiers de confiance lors des
négociations entre les autorités
syriennes et françaises durant le siège
de l’Émirat islamique de Baba Amr. Les
jihadistes s’étaient retranchés dans ce
quartier de Homs dont ils avaient chassé
les infidèles (chrétiens) et les
hérétiques (chiites). En fait seules une
quarantaine de familles sunnites étaient
restées sur place, au milieu d’environ 3
000 combattants. Ces gens avaient
instauré la charia, et un « tribunal
révolutionnaire » a condamné plus de 150
personnes a être égorgées en public.
Cet Émirat auto-proclamé était
secrètement encadré par des officiers
français. Les autorités syriennes
voulaient éviter de donner l’assaut et
ont négocié avec les autorités
françaises pour que les insurgés se
rendent. En définitive, les Français ont
pu quitter nuitamment la ville et
s’enfuir au Liban, tandis que les forces
loyalistes sont entrées dans l’Émirat et
que les combattants ont capitulé. Le
bain de sang a ainsi été évité, il y a
eu en définitive moins de 50 morts
durant l’opération.
Geopolitika : À part les
Alaouites, les chrétiens sont aussi des
cibles en Syrie. Pourriez-vous nous dire
un peu plus sur la persécution des
chrétiens dans ce pays et pourquoi la
soi-disant civilisation occidentale,
dont les racines sont chrétiennes, ne
montre aucune solidarité avec ses
coreligionnaires ?
Thierry Meyssan :
Les jihadistes s’en prennent en priorité
à ceux qui leur sont les plus proches :
d’abord les sunnites progressistes, puis
les chiites (incluant les alaouites), et
seulement ensuite les chrétiens. D’une
manière générale, ils torturent et tuent
assez peu de chrétiens. Par contre, ils
les expulsent systématiquement et volent
tous leurs biens. Dans la région proche
de la frontière nord du Liban, l’Armée
syrienne libre a donné une semaine aux
chrétiens pour fuir. On a assisté à
l’exode brutal de 80 000 personnes. Ceux
qui n’ont pas fui à temps ont été
massacrés.
Le christianisme a été fondé à Damas
par Saint Paul. Les communautés
syriennes sont antérieures à celles
d’Occident. Elles ont conservé les rites
anciens et une foi extrêmement forte. La
plupart sont orthodoxes. Celles qui se
sont rattachées à Rome ont conservé
leurs rites ancestraux. Lors des
croisades, les chrétiens d’Orient se
sont battus avec les autres arabes
contre les soudards envoyés par le Pape.
Aujourd’hui, ils se battent avec leurs
concitoyens contre les jihadistes
envoyés par l’OTAN.
Geopolitika :
Est-ce qu’on peut s’attendre à une
attaque de l’Iran l’année prochaine, et
dans l’hypothèse d’une intervention
militaire, quel serait le rôle d’Israël
? Est-ce que l’attaque des installations
nucléaires est le vrai objectif de
Tel-Aviv, ou est-ce qu’Israël est poussé
dans cette aventure par une structure
mondialiste, intéressée par une large
déstabilisation des relations
internationales ?
Thierry Meyssan : Il
se trouve que l’Iran est porteur d’une
Révolution. C’est aujourd’hui le seul
grand pays qui propose un modèle
d’organisation sociale alternatif à l’American
Way of Life. Les Iraniens sont un
peuple mystique et persévérant. Ils ont
enseigné l’art de la Résistance aux
arabes et s’opposent aux projets du
sionisme, non seulement dans la région,
mais dans le monde.
Ceci dit, malgré ses rodomontades,
Israël est bien incapable d’attaquer
l’Iran. Et les États-Unis eux-mêmes ont
renoncé à l’attaquer. C’est un pays de
75 millions d’habitants où chacun
ambitionne de mourir pour sa patrie.
Tandis que l’armée israélienne est
composée de jeunes gens dont
l’expérience militaire se borne à
ratonner des Palestiniens, et que
l’armée US est composée de chômeurs qui
n’ont pas l’intention de mourir pour une
solde de misère.
Geopolitika :
Comment voyez-vous le rôle de la Russie
dans le conflit syrien et comment
voyez-vous le rôle du président de
Russie, Vladimir Putin, qui est
largement diabolisé par la presse
occidentale ?
Thierry Meyssan : La
diabolisation du président Poutine par
la presse occidentale est l’hommage du
vice à la vertu. Après avoir redressé
son pays, Vladimir Poutine entend lui
rendre sa place dans les relations
internationales. Il a basé sa stratégie
sur le contrôle de ce qui devrait être
la principale source d’énergie au XXIe
siècle : le gaz. D’ores et déjà Gazprom
est devenue la première compagnie
mondiale de gaz et Rosneft la premère
pour le pétrole. Il n’a évidemment pas
l’intention de laisser les États-Unis
faire main basse sur le gaz syrien, ni
d’ailleurs de laisser l’Iran exploiter
son propre gaz sans contrôle. Par
conséquent, il se devait d’intervenir en
Syrie et de faire alliance avec l’Iran.
En outre, la Russie est en train de
devenir le principal garant du Droit
international, alors que les Occidentaux
revendiquent au nom d’une morale de
pacotille de violer la souveraineté des
nations. Il ne faut donc pas craindre la
puissance russe, car elle sert le Droit
et la Paix.
En juin dernier, Sergey Lavrov a
négocié un plan de paix à Genève. Il a
été ajourné unilatéralement par les
États-Unis, mais devrait en définitive
être mis en œuvre par Barack Obama
durant son second mandat. Il prévoit le
déploiement d’une Force de maintien de
la paix de l’ONU, composée
principalement de troupes de l’OTSC. De
plus, il admet le maintien au pouvoir de
Bachar el-Assad si le peuple syrien le
décide par la voie des urnes.
Geopolitika : Que
pensez-vous de la situation en Serbie et
du chemin difficile parcouru par la
Serbie ces deux dernières décennies ?
Thierry Meyssan : La
Serbie a été épuisée par la série de
guerres à laquelle elle a dû faire face,
particulièrement la conquête du Kosovo
par l’OTAN. Il s’agit en effet d’une
guerre de conquête puisqu’elle se conclu
par l’amputation du pays et la
reconnaissance par les membres de l’OTAN
de l’indépendance unilatérale de camp
Bondsteel, c’est-à-dire d’une base de
l’OTAN.
Une majorité de Serbes a cru devoir
se rapprocher de l’Union européenne.
C’est ignorer que l’Union européenne est
la face civile d’une pièce unique dont
l’OTAN est la face militaire.
Historiquement l’Union européenne a été
créée en application des clauses
secrètes du Plan Marshall, elle a donc
précédé l’OTAN, mais elle n’en est pas
moins un élément du même projet de
domination anglo-saxon.
Il se peut que la crise de l’euro
conduise à une dislocation de l’Union
européenne. Dans ce cas des États comme
la Grèce et la Serbie se tourneront
spontanément vers la Russie avec
laquelle ils partagent de nombreux
éléments culturels et une même exigence
de justice.
Geopolitika : On
suggère à la Serbie de façon plus ou
moins directe de renoncer au Kosovo pour
pouvoir rentrer dans l’Union Européenne.
Vous avez une grande expérience dans les
relations internationales, et nous vous
demandons sincèrement si vous pouvez
nous donner un conseil sur ce que les
Serbes devraient faire en politique
intérieure et extérieure ?
Thierry Meyssan : Je
n’ai de conseils à donner à personne.
Pour ma part je déplore que certains
États aient reconnu la conquête du
Kosovo par l’OTAN. Depuis, le Kosovo est
surtout devenu la plaque tournante pour
la diffusion en Europe des drogues
cultivées en Afghanistan sous la
protection vigilante des troupes US.
Aucun peuple n’a gagné quoi que ce soit
à cette indépendance et certainement pas
les Kosovars désormais asservis par une
mafia.
Geopolitika : Il
existait entre la France et la Serbie
une alliance forte qui a perdu son sens
quand la France a participé dans les
bombardements de la Serbie en 1999 dans
le cadre de l’OTAN. Cependant, en France
et en Serbie, il existe toujours des
personnes qui n’oublient pas « l’amitié
par les armes » de la Première Guerre
mondiale, et qui pensent qu’il faudrait
redonner de la vie ces relations
culturelles brisées. Est-ce que vous
partagez cette vue ?
Thierry Meyssan :
Vous savez que l’un de mes amis, avec
lequel j’ai écris
Le Pentagate relatif à l’attaque
du Pentagone le 11-Septembre avec un
missile et non pas un avion fantôme, est
le commandant Pierre-Henri Bunel. Il a
été arrêté durant la guerre par l’OTAN
pour espionnage au profit de la Serbie.
Par la suite, il a été restitué à la
France qui l’a jugé et condamné à deux
ans de prison ferme au lieu de la
perpétuité. Ce verdict montre qu’il
avait agi en réalité sur ordre de ses
supérieurs.
La France, membre de l’OTAN, a été
obligée de participer à l’attaque de la
Serbie. Mais elle l’a fait en traînant
les pieds et en aidant secrètement plus
souvent la Serbie qu’elle ne l’a
bombardée.
Aujourd’hui la France est dans une
situation pire encore. Elle est
gouvernée par une élite qui, pour
protéger ses acquis économiques, s’est
mise au service de Washington et de
Tel-Aviv. J’espère que mes compatriotes,
qui partagent une longue histoire
révolutionnaire, finiront par chasser du
pouvoir ces élites corrompues. Et que
dans la même temps la Serbie aura
retrouvé son indépendance effective.
Alors nos deux peuples se retrouveront
spontanément.
Geopolitika :
Merci beaucoup pour votre temps.
Document joint
:
(PDF -
199.1 ko)
Thierry
Meyssan
Intellectuel français,
président-fondateur du
Réseau Voltaire
et de la conférence
Axis for Peace.
Professeur de Relations internationales
au Centre d’études stratégiques de
Damas. Dernier ouvrage en français :
L’Effroyable imposture : Tome 2,
Manipulations et désinformations
(éd. JP Bertand, 2007).
Article sous licence creative commons
Vous pouvez
reproduire librement les articles du
Réseau Voltaire à condition de citer la
source et de ne pas les modifier ni les
utiliser à des fins commerciales
(licence
CC BY-NC-ND).
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