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Parti communiste libanais
L'histoire
du Liban
Les divisions intestines, les luttes et les tutelles étrangères
Marie Nassif-Debs
22 novembre 2007
Le
Liban moderne est né en deux temps.
Le
premier temps, celui de la création du « Petit Liban »,
Al Moutasarrifiat, dura soixante ans (de 1861 à 1920) et
fut marqué par deux tutelles, brutales ou camouflées par un
simulacre d’autonomie, exercées par le Sultanat ottoman et, à
travers lui, par les grandes puissances occidentales du moment,
dont la France en premier lieu.
Le
second commença en 1920, à la suite de la première guerre
mondiale qui marqua le passage des anciennes colonies ottomanes de
la partie orientale de la Méditerranée et jusqu’à la Jazira
arabia (la Presqu’île arabique) à l’Occident triomphant.
Il fut le temps de la création du « Grand Liban »
dans ses frontières actuelles et qui passa, pendant 23 ans, sous
le mandat de la France avant de recouvrer son indépendance
politique le 22 novembre 1943.
Mais
cette naissance ne fut pas facile ; loin de là. L’histoire
libanaise, surtout celle du XIX° siècle, est marquée par des événements
sanglants, dont les plus importants sont ceux de 1840-1842 et de
1858-1860 que nous allons étudier rapidement, parce qu’ils
constituent les bases solides de ce qui se passe actuellement et
explicitent, donc, le pourquoi des choses.
●Les
événements de 1840-1842 et la création des deux caïmacamats :
Si
la crise sociale qui sévissait dans le pays avait, alors, poussé
les paysans (toutes confessions religieuses confondues) à la révolte
contre l’émirat chéhabiste, elle n’en fut pas le fait le
plus important. En effet, elle est venue s’insérer à ce
qu’on avait appelé « la question orientale », celle
des minorités religieuses présentes dans l’empire ottoman et
que les grandes puissances européennes voulaient soit disant protéger.
En d’autres termes, les forces politiques extérieures avaient
joué un rôle très négatif dans cette révolte ; ainsi, et
tandis que l’émir chéhabiste était soutenu par les armées égyptiennes
de Mohammad Ali ainsi que par la France, en partie, les
paysans recevaient, de la part de la « Sublime Porte »
et son allié britannique, armes et argent. En même temps, les
bateaux de guerre britanniques et autrichiens se massaient face à
la ville de Beyrouth qu’ils bombardèrent avant d’investir la
côte à Jounieh… Puis ce fut la division : Chrétiens et
Druzes se massacrèrent allègrement et permirent le succès de
l’intervention austro britannique qui engendra le régime des
deux caïmacamats, ou la division du Liban en deux régions :
l’une, à majorité chrétienne, située au Nord de la route de
Beyrouth-Damas ; l’autre, située au Sud de cette route, était
composée d’une majorité druze… Mais, la situation ne se décanta
pas pour autant à cause des mêmes forces qui la déclanchèrent.
Nous citerons, à ce propos, ce que disait un des leaders
maronites du moment, Youssef KARAM, dans une lettre au patriarche
maronite : « Nos affaires sont tellement liées à la
volonté de l’Angleterre et de la France que si un Libanais
frappe un de ses camarades, l’affaire se transforme vite en un
conflit franco-britannique. Il est possible que la France ou l’Angleterre
interviennent pour une tasse de café répandue ».
Ne
dirait-on pas que ces événements cités, à quelques différences
minimes, sont ceux que le Liban a revécus en 1958, lors de
« l’Alliance Turquie-Pakistan », dirigée par les
Etats-Unis, et ce qui s’en suivit, notamment le bombardement du
Liban et le débarquement des G.Is étasuniens sur les plages de
Beyrouth ou, encore, l’arrivée des « Forces
multinationales » avec leurs bateaux de guerre, en 1982, et
les bombardements du Mont Liban par le porte-avion « New
Jersey » ou, enfin, la situation actuelle, à la suite de la
dernière agression israélienne durant l’été 2006 ?
●Les
événements de 1858-1860 :
Ces
événements commencèrent par une nouvelle révolte paysanne qui
se propagea bientôt dans une large région à majorité chrétienne,
d’abord. Cette révolte, représentée par deux Communes bien
connues, celle d’Antélias et de Lehfed, dans le
Metn et le Kesrouan, gagna rapidement vers le Sud du « Petit
Liban », vers les régions druzes et se transforma en une
guerre civile à visage confessionnel dans laquelle les féodaux
des deux groupes poussèrent leurs « vassaux » à des
crimes atroces les uns contre les autres. Les massacres se
multiplièrent et les morts se comptèrent par dizaines de
milliers. Des villages entiers furent rasés et la destruction était
partout. L’exemple libanais passa bientôt la frontière vers
Damas, où plus de 5 000 chrétiens furent massacrés, et en
Palestine des villages chrétiens devinrent musulmans pour échapper
à la mort…
Pour
résoudre ce nouveau conflit et mettre un terme aux massacres
qu’elles ont laissé se produire, les représentants des Grandes
puissances occidentales à Beyrouth (La Grande Bretagne, la
France, la Russie, l’Autriche et la Prusse) décidèrent de
constituer un « Comité international » afin de
statuer sur la réorganisation politique et démographique du
Liban. Les pourparlers durèrent huit mois, tandis que massacres
et violences se poursuivaient, et aboutirent à ce qu’on appela
le « Règlement organique » (An-nizam al-assassi)
selon lequel le Liban avait une certaine autonomie tout en restant
un sandjaq (une province) de l’empire ottoman.
Le
« Règlement organique » prévoyait que le « Petit
Liban » serait gouverné par un Moutasarrif
catholique venant de l’une des provinces ottomanes.
Ce
déroulement des faits nous rappelle la guerre civile déclanchée
en 1975 et tout ce qui s’y rattache. Comme il nous rappelle
aussi les allées et venues, pendant les semaines passées, des délégués
des différentes puissances arabes et, surtout, internationales,
afin d’imposer aux Libanais leurs vues sur les élections présidentielles.
●Tragédie
ou farce ?
L’HISTOIRE
se répète, comme disait Karl Marx. Mais, elle se présente
toujours au Liban sous la forme d’une tragédie, jamais sous la
forme d’une farce… Ou, si nous voulons reprendre (presque) les
mêmes mots de Marx, nous dirons : elle se répète sous la
forme d’une farce tragique.
Luttes
fratricides et intestines, guerres civiles confessionnelles,
alliances allant des Etats-Unis à la France et à la Grande
Bretagne, mais aussi à l’Egypte ou la Syrie… Telle est, en résumé,
l’histoire du Liban. Mais, c’est aussi une histoire faite de
luttes de classes dégénérant presque toujours en divisions
confessionnelles, depuis les Communes paysannes d’Antélias et
de Lehfed, entre 1857 et 1860 et jusqu’à nos jours. Et,
c’est, surtout, une lutte dans laquelle les grandes puissances,
d’aujourd’hui comme d’antan, ont joué le rôle de déclencheur,
à partir du « soutien » apporté par chacune
d’elles à une confession religieuse, à travers le zaïm
(le chef) de cette confession qu’elles mettent sous leur coupe.
Tutelle
directe ou indirecte : ainsi va la contradiction qui, à chaque
tournant important, risque d’entraîner vers l’abîme ce petit
pays de 10 453 kilomètres carrés qui suffit à peine à
contenir ses 4 millions 500 000 habitants, sans oublier les
350 000 Palestiniens et les centaines de milliers de Syriens
et autres Arabes qui y trouvent refuge ou qui y travaillent pour
vivre.
●Le
régime politique instauré par la France en 1943 :
Cette
tutelle et cette inféodation à l’étranger, tantôt occidental
et tantôt arabe, furent renforcées par le régime politique
instauré par les Français avant leur reconnaissance de l’indépendance
du Liban, en 1943, et leur retrait du pays, deux ans après.
Une
« formule » non écrite stipulait la division du
pouvoir entre un triumvirat :
-Un
président de la République maronite, qui avait de larges
prérogatives sans être « responsable » devant le
parlement qui l’élit (bien que la Constitution écrite disait
clairement que « le Liban était une République
parlementaire »).
-Un
président du conseil sunnite qui avait peu de pouvoirs.
-Un
président de la chambre chiite dont les pouvoirs étaient
très limités.
Cette
« formule » (as-sighat) orale était renforcée
par un contenu très confessionnel des articles de la Constitution
écrite, dont le fameux « article 6 bis » qui prévoyait
« pour une période transitoire » la répartition des
fonctions dans l’administration publique à égalité entre Chrétiens
et Musulmans, en tenant compte aussi des confessions dans chaque
religion. Sans oublier que cette même Constitution prévoyait
aussi que la part des Chrétiens au parlement serait de 54 sur 99
(contre 45 sièges pour les Musulmans).
Quant
aux statuts de la personne, ils furent répartis sur des tribunaux
« religieux », interdisant ainsi toute possibilité
d’égalité entre un citoyen et un autre et, surtout, entre les
Libanais et les Libanaises.
Le
contenu de la Constitution, ajouté à la sighat,
transformait le Liban en une mosaïque de groupes hétéroclites
qui avaient, chacun ses tribunaux, ses lois et ses chefs. Ces
groupes avaient, surtout, un droit de veto qu’ils pouvaient
utiliser s’ils voyaient que ce qui se dit et se fait pouvait être
en contradiction avec leurs intérêts représentés par ceux de
leurs chefs (tant religieux que civils).
Ainsi,
le colonialisme sortant avait laissé une faille par laquelle il
pouvait s’introduire : il suffisait de fomenter des
troubles confessionnels ou de dire qu’il y a un déséquilibre
dans les rapports des forces confessionnels au pouvoir pour voir
apparaître les armadas ou les diplomates de telle ou telle
puissance, à commencer par la France, longtemps appelée par les
Maronites « notre mère compatissante », l’Egypte ou
l’Arabie saoudite (selon le moment) dont les Sunnites du Liban
constituaient l’avant-bras.
La
nation libanaise était, donc, née sur une base instable.
D’ailleurs, dans la déclaration islamo chrétienne commune lors
de l’indépendance, il fut dit que les Chrétiens délaisseraient
leur rêve de faire partie de l’Occident tandis que les
Musulmans délaisseraient leur rêve de s’unir à la nation
arabe. Ce qui fit dire à un grand journaliste bien connu, Georges
Naccache : « deux négations ne font pas une nation ».
Et il avait bien raison. Parce que chaque changement dans le monde
environnant avait ses répercussions directes sur le Liban et les
Libanais, que ce soit dans la première guerre civile après
l’indépendance, en 1958, ou, encore, dans celle qui fut déclanchée
en 1975.
La
première avait pour cause mineure la volonté du président
Camille Chamoun de briguer un second mandat de 6 ans,
contrairement à ce que la Constitution prévoit ; mais, elle
avait pour cause majeure la volonté de la Grande Bretagne et des
Etats-Unis de faire adhérer le Liban au « Pacte de Bagdad »
puis au « Pacte Turquie-Pakistan » tandis que sur un
autre front l’unité entre l’Egypte, dirigée par Nasser, et
la Syrie poussait les « arabisants » à chercher aide
et assistance auprès de leur voisine pour contrecarrer les
projets de pactes.
Quant
à la seconde, elle fut déclanchée par suite de la division sur
le problème palestinien et la présence de l’OLP au Liban, présence
acceptée par l’Accord du Caire, à la fin des années soixante,
tandis que l’ouragan des projets étasuniens pour « pacifier »
la région et normaliser les relations arabes avec Israël, à
commencer par le « Projet Rogers » suivi par celui préconisé
par Henry Kissinger et dans lequel nous retrouvons, à quelques détails
près, le « Projet du Grand Moyen Orient » que
l’administration étasunienne de George W. Bush voudrait
appliquer dans notre région et qui fut, après la guerre contre
l’Irak, à l’origine de l’agression israélienne contre le
Liban durant l’été 2006 préconisée par le vice-président
des Etats-Unis avec l’aide de certains responsables civils et
militaires israéliens et supervisée par Condoleeza Rice,
ministre des Affaires étrangères de ces mêmes Etats-Unis, qui
s’écria devant les journalistes qui lui demandaient, lors de
son passage en Italie, de mettre fin aux massacres de civils et,
surtout, d’enfants libanais : « Ce sont les douleurs
qui annoncent la naissance prochaine d’un nouveau Moyen Orient »…
●« Le
nouveau Moyen Orient »
Quel
est ce nouveau Moyen Orient ? Et quel rôle assigne-t-on au
Liban?
Si
nous prenons en considération le projet mis au point par
Kissinger, au début des années soixante-dix, mais aussi les réunions
faites en Turquie, en Egypte et, même aux Etats-Unis, à la suite
de la chute du mur de Berlin, en tant que symbole de la victoire
du capitalisme sur le camp soviétique, nous pouvons le définir
comme suit :
Le
« Grand Moyen Orient » se définit par l’implosion
du Monde arabe en une myriade de minis Etats sur des bases
confessionnels et, aussi, ethniques (surtout avec la présence des
Kurdes et des Turkmènes en Irak, des Berbères au Maghreb…).
Ces minis Etats, antagonistes de par les contradictions qui les
ont créés, se feront une guerre sans merci. Et, pour ce faire,
ils doivent avoir recours à la seule Grande puissance des temps
modernes, les Etats-Unis, dont les grandes sociétés militaires
leur fourniront armes et munitions tandis que les sociétés pétrolières
étasuniennes mettraient la main sur les importantes sources d’énergie
que recèlent les terres arabes, de la Presqu’île arabique au
Darfour dans les pays arabes de la Méditerranée, dont le Liban.
Sinon,
pourquoi l’Irak fut-il divisé par l’administration républicaine
et pourquoi le Congress étasunien, de tendance démocrate, a-t-il
voté un projet de partition de ce pays en trois Etats
confessionnels et ethniques ?
Il
est vrai que l’administration étasunienne a connu un échec
cuisant en Afghanistan. Il est vrai aussi qu’elle n’a pas réussi
à « pacifier » l’Irak, malgré les quelques 250 000
soldats qui s’y trouvent. Cependant, elle a réveillé,
volontairement, des démons que les peuples de la région avaient
enfermés depuis longtemps, à savoir : les terrorismes de
toutes sortes et la guerre civile.
Cette
dernière fut l’arme la mieux utilisée dans la fuite en avant
de George W. Bush et de son équipe ; et cette forme de
guerre est plus meurtrière et plus destructrice, parce que ses séquelles
restent à jamais gravées dans les mémoires des survivants.
Donc,
même si les Etats-Unis seront, bientôt, obligés de quitter les
territoires irakiens, les luttes fratricides se poursuivront,
comme se poursuivront les luttes tribales en Afghanistan et les
luttes confessionnels, séquelles du colonialisme britannique en
Inde et au Pakistan…
●Le
Liban dans ce « Nouveau Moyen Orient »
Quant
au Liban, ancienne voie de passage ou de transit des produits étasuniens
et occidentaux en général, durant la période de coupure entre
les nouveaux régimes arabes et l’Occident colonialiste et pro
israélien (1952-1970 : entre la Révolution de juillet en
Egypte, et tout ce qui s’ensuivit comme changements en
Irak,Syrie et autres, et la mort de Nasser qui mit en avant Anouar
Sadate, c’est-à-dire le début de l’ère étasunienne), il
avait pris un nouveau visage, différent de celui que les grandes
puissances voulaient.
Des
développements brusques l’avaient bouleversé :
D’une
part, le renforcement du mouvement palestinien armé (OLP), qui
avait permis à une gauche florissante de développer son propre
mouvement face aux violations israéliennes du territoire
libanais.
D’autre
part, un grand mouvement de revendications à caractère laïc était
né et déferlait dans les écoles, les universités, mais surtout
parmi la classe ouvrière et les paysans, et même parmi les
religieux, toutes confessions confondues.
Il
fallait, donc, en finir avec ce mouvement en mettant, à nouveau,
la guerre civile au premier plan. Une guerre encore plus meurtrière
que les précédentes et appuyée par des agressions israéliennes
dans le Sud et dans la capitale même.
Que
veut-on du Liban, répondront certains, puisqu’il n’a ni pétrole
ni sources d’énergie, tout en étant un petit pays ?
-Le
Liban a, d’abord, l’eau dont Israël et, avec elle, les
nouveaux maîtres du monde, les Zionist-Christians et autres
fanatiques appuyés par les capitalistes du nouveau monde ont
besoin pour vaincre le désert et pouvoir rassembler de nouveaux
colons dans une « Terre promise » vidée de ses
habitants.
-Le
Liban, donc, a ensuite le plus fort rassemblement de Palestiniens
qu’il « doit garder » au détriment de ses intérêts
et de ceux du peuple palestinien. N’a-t-on pas, en 1993, acheté
des millions de mètres carrés à Qoraïaa (sur la route
de Saïda) afin d’y rassembler tous les camps palestiniens du
Liban en un seul ?
-Le
Liban a aussi du pétrole, dit-on. Un immense lac de pétrole dans
ses eaux territoriales.
-Le
Liban, enfin, est voisin, non seulement d’Israël, mais aussi de
la Syrie dont il avait constitué le « ventre mou »
pendant assez longtemps.
A
tout cela s’ajoute la présence d’une forte résistance
(populaire et armée) contre toute normalisation des relations
avec Israël, tant que celui-ci rejettent les Palestiniens, vole
l’eau et viole toutes les lois internationales. Résistance qui
fut créée par la Gauche libanaise, les Communistes notamment, à
partir de 1969 et qui se poursuit, actuellement, à travers le
Hezbollah, grand ami de l’Iran.
Et,
le Liban est facilement inflammable, comme nous venons de voir.
Le
projet du « Nouveau Moyen Orient » vise, donc, le
morcellement du Liban, à l’exemple de l’Irak, en trois
minuscules cantons confessionnels. Et, à partir de ce
morcellement, la partition de la Syrie aussi.
Ce
qui transformera du tout au tout la région arabe moyen-orientale
et permettra au « Grand Israël » de se former afin de
continuer, pour les cent ans à venir, l’objectif de servir
Washington et le grand capital international et d’aider les
grandes compagnies pétrolières étasuniennes à contrôler les
sources et les voies de transport de l’énergie vers le monde
entier, puisque avec le contrôle de l’Irak, de la Jazira
arabia, ainsi que du pétrole présent dans différents pays
du Maghreb arabe et de l’Afrique, les Etats-Unis mettront la
main sur 80% de l’énergie mondiale.
●Une
nouvelle guerre civile ?
Sur
la base de telles données, une nouvelle guerre civile se prépare
sous le couvert des élections présidentielles et de la nécessité
de redistribuer les parts du gâteau libanais entre les
confessions religieuses. Une guerre qui ne sera pas, cette fois,
entre Chrétiens et Musulmans, mais entre Musulmans eux-mêmes, à
l’exemple de l’Irak.
C’est
ainsi que nous comprenons la formation par Condoleeza Rice du
« Groupes de pays arabes modérés » qui englobe l’Arabie
Saoudite, l’Egypte, les Emirats arabes unies et la Jordanie.
C’est ainsi aussi que nous comprenons les interventions étasuniennes
et jordaniennes concernant le projet iranien de former un « croissant »
chiite qui passerait par le Sud de l’Irak pour arriver au Liban,
à travers les régions alaouites de Syrie.
Le
Liban est préparé pour être, une fois de plus, l’arène
sanglante où se jouerait l’avenir de la région entre le projet
étasunien précité et un autre projet irano syrien qui lui
barre, en partie, le chemin.
Il
pourra être l’arène, parce que tous les facteurs sont là :
Israël et la Syrie, mais aussi les Européens (la FINUL renforcée),
les Palestiniens (armés) dans les camps, le Hezbollah et, même,
tous les groupuscules terroristes sunnites (formés jadis par la
CIA) qui constituèrent l’alibi de George W. Bush en
Afghanistan.
Peut-on
mettre en échec ce projet ?
Difficilement,
il est vrai. Mais, il y a toujours quelques lueurs d’espoir.
Ces
lueurs consistent dans la présence, même affaiblie, de la Gauche
libanaise, des intellectuels, du mouvement syndical, des jeunes et
des femmes, de tous ceux qui continuent à dire non.
Nous
pensons qu’il faut aller de l’avant sur une voie de
rassemblement de tous ceux qui refusent la guerre civile sur les
bases d’un programme d’envergure patriotique, mais aussi régionale.
Le
premier point de ce programme sera, dans l’immédiat, de créer
toutes chances possibles devant un consensus national au Liban,
suivi, rapidement, par des réformes politiques stables, dont une
nouvelle loi électorale et l’application des articles de la
Constitution (renouvelée à la suite de l’Accord de Taëf)
concernant la suppression du confessionnalisme, non seulement du
parlement et du gouvernement, mais aussi de toutes les lois.
Le
second point sera de s’opposer à ce que les pays arabes invités
à la conférence d’Annapolis sur le conflit israélo
palestinien puissent encore céder sur des points essentiels, dont
le non-retour des Palestiniens dans leur pays.
Est-ce
une gageure ? Peut-être.
Mais
a-t-elle la chance de réussir ? Oui, même si cette chance
est minime…
Marie
NASSIF-DEBS
Barcelone
le 22 novembre 2007
Références
-Histoire
du Liban, de Philippe Hitti
-Histoire
du Liban moderne, de Kamal Salibi
-The
Druzes and the Maronites under Turkish rule,
de Charles Henry Churchill
-Articles de Marie Nassif-Debs parus, entre 2002 et 2007, dans
plusieurs journaux et revues libanais et européens.
-Publications
et rapports du Parti Communiste libanais (notamment ceux du Second
et Troisièmes congrès).
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