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Nouvelles d'Irak
Eau,
électricité: les Irakiens se révoltent
Gilles Munier
Gilles Munier
Dimanche 4 juillet 2010
Le 18 juin, une famille de la région d’Abou Ghraib – homme,
femme, enfants - a été décimée par des tueurs. L’officier
de police chargé de l’enquête affirme que Fayçal Hassan, le père
– âgé de 40 ans – employé au département
gérant l’irrigation des fermes environnantes, n’était affilié à
aucun parti politique ou groupuscule sectaire. « Le mobile
des meurtres » - dit-il - « c’est l’eau ». Trois
fonctionnaires de cet organisme ont été assassinés pour le même
motif les mois précédents (1).
Le marasme politique provoqué par le renversement de Saddam
Hussein a accentué la dégradation des services étatiques déjà
mis à mal par 13 ans d’embargo, la corruption quasi
institutionnalisée, les agents gouvernementaux qui arrondissent
comme ils le peuvent leurs salaires trop bas, sont à l’origine
de mécontentements populaires grandissants. Selon un rapport de
la Croix-Rouge internationale qui fait référence à des
statistiques étatiques, un Irakien sur quatre n’a pas accès à
l’eau potable.
Soulèvements en perspective
Les systèmes de purification des eaux du Tigre et de l’Euphrate,
polluées par les égouts, bourrées de bactéries, sont hors
service depuis longtemps. Rien de sérieux n’est fait pour les
remettre en état. Les comprimés qui permettraient de désinfecter
l’eau manquent ou sont à un prix inabordable pour la majorité de
la population. A cela s’ajoute pour les paysans, la salinisation
des terres qui s’est accentuée depuis l’embargo décrété en 1990,
notamment à la suite de l’interdiction faite aux Irakiens
d’importer du matériel d’aspersion et de drainage. La
disparition d’un pouvoir fort à Bagdad a laissé les mains libres
à la Turquie de gérer le fonctionnement de ses barrages (2),
et de déverser – en aval - des reliquats
chimiques utilisés pour fertiliser les terres irriguées.
Des soulèvements spontanés ou tribaux, provoqués par
l’injustice, la misère ou la soif, sont prévisibles à plus ou
moins brève échéance, en particulier dans le sud du pays, touché
de plein fouet par la sécheresse. Dans la région de Diwaniya,
par exemple, à 200kms au sud de Bagdad, la patience du cheikh
Ali Ismaïl al-Zoubeidi, est à bout. L’eau qui devrait revenir à
sa tribu est siphonnée en amont par des paysans disposant de
pompes alimentées par des générateurs électriques. «Les
agents gouvernementaux sont incapables de réguler la
distribution », dit-il, «soit parce qu’ils sont
corrompus, soit qu’ils ont peur pour leur vie ». Il
prévient qu’il défendra les droits ancestraux de sa tribu, y
compris par les armes (3).
La colère monte à Bassora : deux morts
A Bassora, l’été, la température dépasse 53°, avec un taux
d’humidité très élevé. Dans les quartiers défavorisés, les
habitants n’ont qu’une heure d’électricité par jour, ou
paient jusqu’à 100 dollars par mois une alimentation par
générateur, une fortune pour la plupart d’entre-eux, sans
emploi. Des militaires montent la garde près des poteaux
électriques pour protéger les employés qui déconnectent les
branchements illégaux sur le réseau. Dans les hôpitaux, sans
climatisation, les malades dorment la nuit dehors. Les patients
ayant des problèmes de mobilité souffrent dans les locaux
surchauffés. En 2009, l’UNESCO, estimait que plus de
100 000 Irakiens avaient quitté leur région depuis l’invasion en
raison du manque d’eau (4). Le pays est en voie de
désertification.
Fin juin, une manifestation de protestation a été durement
réprimée sur ordre de Nouri al-Maliki. Bilan officiel : deux
morts (5). Pour calmer la colère populaire, Karim
Waheed, ministre de l’Electricité, a démissionné, et Al-Maliki a
fait de l’énergie sa priorité. Il a promis de rétablir la
situation dans deux ans, s’il est réélu ! En attendant, les
Irakiens se souviennent qu’en 1991 le Président Saddam Hussein
avait fait réparer les dégâts causés par les bombardements
américains en quelques mois, en dépit de l’embargo. Sept ans
après son renversement, la clique pro-iranienne au pouvoir et
les mafias qui la soutienne, sont accusées d’incompétence et de
se remplir les poches.
Source :
Lire :
http://www.france-irak-actualite.com/pages/guerre-de-l-eau-au-pays-des-deux-fleuves-mai-2006--1982344.html
http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=32537&Cr=drought&Cr1
http://www.heraldsun.com/view/full_story/8017236/article-Public-fury-over-power-outages-a-test-for-Iraq
© G. Munier/X.Jardez
Publié le 4 juillet 2010 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
Le dossier la «Flottille de la Liberté»
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