Jénine : commémoration d'un massacre
Quatre ans sont passés depuis ce massacre, commis par l'armée de
l'occupation israélienne, dans le camp de Jénine : fidèle à
son idéologie coloniale, raciste et négationniste, l'Etat d'Israël
a commis ce massacre, en direct, devant la communauté
internationale. Les résistants du camp de Jénine avaient
lancé des appels et s'étaient exprimés aux télévisions
du monde entier, mais le massacre a eu lieu. Les Palestiniens du
camp et leurs résistants poursuivent, quatre ans après, leur
travail de mémoire, pour écrire sur le papier, ce que les résistants
ont tracé avec leur sang, ce qu'ils appellent l'épopée
du camp de Jénine.
CIREPAL présente, en signe de commémoration et d'hommage aux
martyrs et prisonniers du camp de Jénine, des articles traduits,
retraçant la vie actuelle et la résistance exemplaire de ce
camp, situé au nord de la Cisjordanie.
2 - Le camp de Jénine : une épopée
inoubliable
Rami D'aybes, Jénine
Quiconque circule aujourd'hui dans les ruelles du camp de Jénine,
même sans vraiment savoir ce qui s'y est passé, il n'y a pas si
longtemps, réalise parfaitement qu'un événement terrible s'y
est déroulé, surtout si ce visiteur était déjà passé par là,
cinq ans ou plus, auparavant.
Les photos des martyrs ornent les murs et les poteaux, les visages
des habitants du camp racontent en toute sincérité la souffrance
vécue, ses nouveaux immeubles renferment des histoires et des récits
devant être recueillis pour écrire l'histoire héroïque du
peuple palestinien qui a tracé, avec son sang, les plus belles
pages de l'héroïsme, écrivant cette épopée d'une rare
intensité.
Au cours d'une nuit pluvieuse et orageuse, après une longue
attente de la part des habitants et résistants du camp, qui s'y
étaient préparés, mais aussi de la population de toute la ville
de Jénine et de ses environs, le réseau palestinien des
communications s'est tout à coup effondré sous le nombre des
coups téléphoniques passés lorsque les premières troupes de
l'occupation israélienne ont commencé à encercler la ville et
le camp de Jénine. Dans la plus grande opération menée depuis
l'occupation de la Cisjordanie, la bande de Gaza et des
territoires arabes, en 1967, les forces de l'occupation ont occupé
les environs de Jénine. Le but était de détruire la résistance
palestinienne. L'occupant avait nommé le camp de Jénine
"nid de guêpes" à cause de la farouche résistance qui
s'y trouvait.
Mais les habitants du camp n'avaient pour toutes armes pour défendre
leur camp que la foi, la détermination et quelques fusils. En
face, l'armée de l'occupation était armée de manière
sophistiquée, avec les armes les plus modernes, des chars, des
avions, des armures et des armes de toutes sortes. Les
soldats étaient nombreux, des centaines de soldats pour briser la
volonté des habitants du camp.
Ils s'avançaient et encerclaient le camp. Peut-être
pensaient-ils que ses résistants allaient se soumettre, s'en
aller, abandonner, ou que sa population allait lever l'étendard
blanc. Mais la population était déterminée, la volonté
palestinienne était là, résistant à une des armées les plus
puissantes du monde, et résistant pendant treize longues journées.
Plusieurs tentatives d'infiltration furent mises en échec. Le
gouvernement de l'occupation était indécis, face à cette résistance.
Le chef de l'état-major ennemi est venu lui-même, sur ce carré
résistant pour ordonner la destruction du camp.
C'est ce qui fut fait. Du jour au lendemain, une partie du camp
fut entièrement effacée. Plus rien. Les maisons furent détruites,
écrasées par les bulldozers. Le terrain fut aplati, là où les
maisons se tenaient les unes collées aux autres. Il n'y avait
plus rien... Un terrain qui n'est même pas propice à un terrain
de foot, à cause du matériel laissé par l'armée d'occupation.
Une nouvelle étape pour l'exil palestinien commence, mais vers
des lieux proches, et pour un temps limité, en attendant la
construction de nouveaux bâtiments offerts par les Emirats arabes
Unis. Une nouvelle étape commence, pour les habitants du camp,
mais toujours avec la même détermination, la même foi, la même
volonté inébranlable, malgré toutes les souffrances et les
drames vécus.
Jusqu'à présent, le camp de Jénine reste une citadelle face à
l'occupation. Les dirigeants sionistes ont plusieurs fois déclaré
qu'ils souhaitaient pouvoir dormir et se réveiller sans entendre
parler de Jénine et de ses résistants qui continuent à
s'opposer à toute attaque du camp.
Jénine reste une légende, à cause de sa résistance, alors que
d'autres lieux sont tombés, au cours des attaques de 2002.
Quatre ans après le massacre qui a suivi les actes héroïques de
la résistance dans le camp de Jénine, les récits de tous ces
instants vécus alimentent la mémoire des habitants du camp, récits
qui doivent être transmis de génération en génération, pour
que le Palestinien demeure à tout jamais acteur de l'histoire.
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