Communiqué
Togo : Vague de
répression contre les opposants
politiques
Amnesty
International
Vendredi 22 février
2013 Depuis plus
d’un mois, 25 membres ou proches de
partis d’opposition sont arrêtés et
détenus par la gendarmerie dans ce qui
semble être une nouvelle vague de
répression contre des opposants
politiques à quelques mois des élections
législatives prévues pour cette année.
Ces arrestations ont eu lieu dans le
cadre d’une enquête sur les incendies
des marchés de Kara et Lomé qui ont eu
lieu entre le 9 et le 12 janvier 2013.
Ces incendies sont survenus alors que le
Collectif Sauvons le Togo (CST,
coalition de partis politiques et
d’organisations de la société civile)
avait appelé à trois journées de
manifestation pour demander l’ouverture
d’un réel dialogue entre le gouvernement
et l'opposition en préalable à
l’organisation des élections
législatives. Si quasiment toutes ces
personnes ont été arrêtées dans les
jours qui ont suivi ces incendies, l’une
d’elles, Napo Tchein un militant de l'Alliance
nationale pour le changement (ANC),
qui voyageait à bord de son véhicule a
été arrêté hier à Bafilo (à 400 km au
nord de Lomé). Il est détenu depuis lors
à la gendarmerie de Kara.
Vingt personnes sont détenues dans trois
lieux de détention à Lomé : la direction
générale de la gendarmerie, la Brigade
antigang et un autre lieu relevant de la
gendarmerie appelé « La réserve ». Ce
dernier se trouve dans une zone en
chantier de la banlieue de Lomé. Quatre
autres personnes sont détenues à la
prison de Kara et une à la gendarmerie
de Kara. Amnesty
International a pu s’entretenir avec 17
de ces détenus et a recueilli des
informations sur leurs conditions de
détention. Plusieurs
responsables de l’opposition ont été
arrêtés dans les jours qui ont suivi ces
incendies et accusés de «
tentative et complicité de destruction
de biens publics et groupement de
malfaiteurs ». C’est le cas
notamment de l’ancien Premier ministre
Agbéyomé Kodjo, président de
l'Organisation pour bâtir
dans l’Union un Togo solidaire (OBUTS).
Celui-ci a été interpellé, le 16 janvier
2013, à son domicile par des éléments de
la gendarmerie sans mandat.
La quasi-totalité
des arrestations ont été effectuées sans
présentation de mandat d’arrêter ou
d’amener. Ainsi, un militant de l’ANC,
Dick Logo, a été arrêté, le 14 janvier
2013, dans une zone proche de la plage
de Lomé, à Bè Beach, par des gendarmes
en civil qui n’ont présenté aucun mandat
d’arrêt. Par
ailleurs, si certains détenus ont été
accusés d’« organisation de
manifestation ayant occasionné
l’incendie du grand marché de Lomé » ou
de destruction de biens publics, plus de
la moitié des personnes rencontrées par
Amnesty International ont déclaré
qu’elles n’avaient pas été clairement
notifiées des motifs de leur
arrestation. Amnesty
International s’inquiète également des
conditions de détention de ces individus
qui sont contraires au droit
international. C’est le cas notamment de
Jean Eklou, le dirigeant des jeunes de
l'Alliance
nationale pour le changement
(ANC), détenu à la Direction générale de
la gendarmerie et qui a été menotté
pendant les deux premiers jours de sa
détention aux pieds et aux mains jour et
nuit et obligé de dormir dans cette
position. Ces conditions de détention ne
respectent pas les garanties mises en
place par l’Ensemble
de règles minima des Nations unies pour
le traitement des détenus qui prévoit
que «
les
instruments de contrainte tels que
menottes, chaînes, fers et camisoles de
force ne doivent jamais être appliqués
en tant que sanctions ».
Un député de l’ANC, Ouro Akpo, arrêté le
28 janvier, est resté 48 heures privé de
nourriture et détenu dans un lieu qui
n’était pas connu de ses proches.
Certaines
personnes, détenues au lieu
dénommé « la Réserve » ont dormi à même
le sol alors que d’autres qui sont
malades n’ont pas eu accès à un médecin.
C’est le cas d’Athirey Apollinaire,
chauffeur de Jean Pierre Fabre,
président de l’ANC, qui a des problèmes
à la hanche et qui marche difficilement
à l’aide d’une béquille.
Par ailleurs, les détenus rencontrés par
Amnesty International Togo ont affirmé
avoir eu des difficultés à être assistés
par un avocat. La gendarmerie a même
brièvement interpellé deux avocats qui
étaient venus pour tenter d’assister
Adja Gérard, vice président de l’OBUTS.
Les autorités de gendarmerie refusent
que les détenus bénéficient de
l’assistance des avocats membres du CST,
qu’ils considèrent apparemment comme
juges et parties.
Amnesty International est très
préoccupée par le non-respect des
garanties essentielles en matière de
détention et estime que ces arrestations
pourraient être
politiquement motivées afin de
réprimer certains dirigeants et membres
de l’opposition.
Depuis plus de six mois, des partis
d’opposition ont organisé des
manifestations
exprimant tout à la fois des
revendications économiques et
politiques. Ces manifestations ont
souvent été interdites « dans les lieux
à forte activité économiques » à Lomé,
les autorités invoquant des risques pour
la sécurité publique.
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