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La normalisation turco-syrienne
désormais envisageable
Mikhail Gamandiy-Egorov
© Sputnik.
Mikhail Voskresensky
Lundi 6 mars 2017
Source:
Sputnik
La méfiance est encore vive entre les
pouvoirs syrien et turc, qui continuent
à se critiquer mutuellement. Néanmoins,
les premiers petits pas vers une future
normalisation des relations ont bel et
bien commencé. Il y a encore
incontestablement du chemin à faire,
mais les jalons sont posés.
Évidemment, la normalisation entre Damas
et Ankara va prendre encore du temps,
mais certains signes de détente entre
les deux pays ne trompent pas. À
commencer par le tout récent crash de
l'avion MiG-21
de l'armée syrienne, abattu par les
terroristes salafistes d'Ahrar al-Sham,
dont le pilote a réussi à s'éjecter et
s'est posé en territoire turc, dans la
province de Hatay. Les sauveteurs turcs
se sont rapidement rendus sur les lieux
et ont secouru le pilote, qui a été
transféré dans un hôpital turc pour être
soigné. Il sera vraisemblablement remis
à la Syrie dans les prochains jours.
Mais
ce n'est pas tout. On sait que le
gouvernement syrien critique ardemment
la présence turque au nord de la Syrie
dans le cadre de l'opération Bouclier de
l'Euphrate. Au début de l'opération,
Damas avait clairement indiqué qu'elle
portait atteinte à la souveraineté
syrienne. Mais depuis, la tension a
diminué entre les deux capitales.
Avec
l'accord de Damas, les aviations russe
et turque mènent des frappes conjointes
contre les terroristes de Daech dans le
nord de la Syrie. Une coordination qui a
beaucoup contribué à la libération
récente de la ville d'Al-Bab, dernier
fief de l'EI dans cette partie de la
Syrie, par les troupes turques. Après
avoir chassé Daech de cette ville, le
président turc a indiqué que sa
prochaine « cible » sera la ville de
Manbij, à moins que les forces kurdes
qui la contrôlent ne s'en retirent. Et
c'est là justement que le plus
intéressant commence.
Les
États-Unis, qui collaborent activement
avec certains représentants des forces
kurdes, ont de fait ignoré les demandes
turques en ce sens. Coup de théâtre, un
accord vient d'être annoncé avec la
médiation de Moscou, qui prévoit que
cette zone, dont Manbij, jusqu'ici tenue
par les forces d'autodéfense kurdes sera
désormais défendue par l'armée syrienne.
La
réaction d'Ankara ne laisse pas de
surprendre. En effet, le Premier
ministre turc, Binali Yildirim, a
déclaré : « Nous ne considérons pas le
fait que les forces du régime syrien
rentrent à Manbij en ce moment et que
les unités d'autodéfense kurdes quittent
la ville, soit une évolution négative.
La terre syrienne doit appartenir aux
Syriens ». Il a en outre indiqué que
Manbij représente « la clé pour
résoudre le conflit syrien ».
Certainement la clé du point de vue
d'Ankara, qui n'a jamais caché que son
opération dans le nord de la Syrie vise
aussi bien Daech que les forces kurdes
du YPG, que le gouvernement turc
considère être associé au Parti des
travailleurs du Kurdistan (PKK),
qualifié de terroriste en Turquie. Quoi
qu'il en soit, cette déclaration
confirme le consensus qui se dessine en
Syrie et dans lequel la Russie semble
jouer un rôle de premier plan.
En
effet faut-il rappeler que dans le
triangle Syrie-Russie-Turquie, Moscou
partage des relations d'alliance avec
Damas et de partenariat stratégique avec
Ankara ? Un partenariat stratégique qui
se traduit par une collaboration de haut
niveau dans la sphère
économico-commerciale, mais depuis la
normalisation annoncée en août dernier
entre la Russie et la Turquie, également
une coordination au niveau politique.
Il ne
faut évidemment pas croire que la
normalisation Damas-Ankara aura lieu du
jour au lendemain. Mais les tout
derniers développements montrent que
quand les puissances multipolaires
agissent avec un esprit de
responsabilité, la détente, voire la
réconciliation entre pays antagonistes
est possible. Et dans le cas des
relations Syrie-Turquie, une
normalisation devient effectivement
envisageable dans un futur pas si
lointain. Cela ne pourra qu'être
fortement positif, aussi bien pour les
citoyens des deux pays que pour cette
région en général.
P.S.
Recep Erdogan est attendu avec une
importante délégation turque le 9 et 10
mars prochain en Russie (sa deuxième
visite officielle en une demi-année),
dans le cadre de la réunion du Conseil
de coopération de haut niveau
Russie-Turquie. La poursuite de la
coordination dans la lutte
antiterroriste en Syrie sera également
discutée.
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Publié
le 8 mars 2017 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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