Décodage
anthropologique de l'histoire
contemporaine
Talleyrand aujourd'hui
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Vendredi 17 mars 2017
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1 - Talleyrand dans
la tourmente
2 -Un collaborationnisme
messianisé
3 - Sorciers et magiciens
4 - Le gaullisme et le mythe
démocratique
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1 - Talleyrand dans
la tourmente
Le 30 janvier 1649,
le grand peuple anglais exécutait son
roi, Charles 1er pourtant censé avoir
été choisi par le ciel. Le 21 janvier
1793, la France décapitait à son tour un
roi réputé avoir été désigné par la
volonté expresse du créateur de
l'univers.
Pour comprendre une
révolution psychobiologique de ce
calibre, il suffit de se représenter le
traumatisme cérébral que serait de nos
jours l'exécution, par la volonté du
peuple souverain, du roi du Maroc, tenu
pour le continuateur du prophète
Muhammad. Aussi, en 1814, la victoire
sur la France des dynasties sacrées de
toute l'Europe avait-elle servi d'assise
anthropologique à la guerre contre la
Révolution française.
Il était donc
décisif de savoir si, à la suite de la
défaite de Napoléon à Waterloo, les
vainqueurs de 1814 valideraient derechef
le principe de la légitimation divine
des monarchies de l'époque.
Prendraient-elles la suite d'Attila, des
Huns, des Mongols, des Wisigoths, pour
se repaître de la victoire de leurs
armes sur une France vaincue? Se
montreraient-elles fidèles au combat
dont ces monarchies avaient affiché
ostensiblement l'emblème depuis un quart
de siècle? Piétineraient-elles leurs
propres principes de légitimation divine
du pouvoir politique, et cel au seul nom
de la victoire de leurs armes sur le
champ de bataille?
L'actualité
mondiale de Talleyrand au XXIe siècle
tiendra au fait qu'il a aussitôt pris
appui sur un principe, celui, à l'époque
de la légitimité dite céleste de la
dynastie des Capétiens. Il a fermement
opposé cette mythologie aux alliés
victorieux. Allaient-ils porter le
harnais de la trahison de leur propre
principe et le fardeau de la peur d'un
éventuel retour des idées républicaines?
Plieraient-ils l'échine face à la loi de
fer des barbares triomphants?
2 -Un
collaborationnisme messianisé
Oui ou non la
victoire américaine de 1945
légitime-t-elle l'occupation éternelle
de l'Europe par cinq cents bases
militaires? L'Europe écoutera-t-elle la
voix d'un Talleyrand d'aujourd'hui?
Rappellera-t-il à l'Europe asservie que
"tout ce qui est excessif est
insignifiant" et que le joug du
Pentagone sur l'Occident européen depuis
soixante-dix ans sera condamné à
l'insignifiance?
Insignifiance de la
décision de réunion des quatre nations
les plus peuplées d'Europe: l'Allemagne,
la France, l'Espagne, l'Italie et
demain, du Portugal à son tour, d'aller
de l'avant, puisqu'aussi longtemps que
le principe de la présence militaire
éternelle des armées d'occupation du
Nouveau Monde sur le continent européen
exclut toute possibilité sérieuse de
conduire un jour la civilisation de
Copernic et de Darwin aux retrouvailles
avec sa souveraineté.
L'Europe
d'aujourd'hui, dirait Talleyrand, ne
sera jamais que l'otage du premier
empire militaire mondial, puisque le
principal ressort de la capitulation de
la civilisation de la pensée logique
n'est autre que sa volonté
ostensiblement affichée ou feutrée de
brandir son propre assujettissement sous
le masque d'une Liberté trompeusement
universalisée. "Le débarquement du 6
juin 1944, ç'a été l'affaire des
Anglo-Saxons, d'où la France a été
exclue. Ils étaient bien décidés à
s'installer en France comme en
territoire ennemi ! Comme ils venaient
de le faire en Italie et comme ils
s'apprêtaient à le faire en Allemagne",
confiait le Général de Gaulle à Alain
Peyrefitte, alors ministre de
l'information.
C'est pourquoi le
Général refusa toujours de commémorer le
débarquement "américain" du 6 juin 1944,
en dépit de la pression du Premier
Ministre, Georges Pompidou: "La
France a été traitée comme un
paillasson! Churchill m'a convoqué comme
un châtelain sonne son maître d'hôtel",
ajoutait le Général de Gaulle. (Cité par
Alain Peyrefitte, C'était
de Gaulle, tome 2, Édition de
Fallois, Fayard 1997 - pages 84 à 87
Lorsque l'actuel
Président de la République française, M.
François Hollande, en visite d'Etat aux
USA le 11 février 2014, a été menacé
publiquement, lors d'une conférence de
presse "commune", qu'une "tonne
de briques" se déverserait sur sa
tête s'il n'obéissait pas aux ordres de
l'administration américaine qui
interdisait à la France tout commerce
avec l'Iran, il n'a pas bronché et
l'Airbus présidentiel est sagement
demeuré sur le tarmac dans les heures
suivantes.
Le génie de
l'empire militaire américain aura été de
proclamer démocratique un
collaborationnisme européen ennemi du
patriotisme et de la dignité des nations
du Vieux Monde. En patriote lucide, le
Général de Gaulle, dénonçait
l'humiliation de la France en ces
termes: "Ils avaient préparé leur
AMGOT qui devait gouverner
souverainement la France à mesure de
l'avance de leurs armées. Ils avaient
imprimé leur fausse monnaie, qui aurait
eu cours forcé. Ils se seraient conduits
en pays conquis " (Général de
Gaulle, Ibid)
Voir :
Naissance, croissance et agonie de
l'Europe américaine , 20 janvier
2017
3 - Sorciers et
magiciens
Prenons l'exemple
de l'omniprésence et de l'omnipotence du
cinéma américain en Europe: deux films,
Le Voleur de bicyclette de
Vittorio de Sica et Affreux, sales
et méchants d' Ettore Scola ne
doivent pas faire illusion sur le fond.
C'est de sa propre volonté de s'asservir
que l'Italie a produit des "westerns
spaghetti" depuis quatre générations,
c'est de sa propre volonté de s'asservir
que le festival annuel du film américain
de Deauville est souverainement dirigé
sur le territoire français par un
Américain, au reste porteur de nos jours
de la casquette d'agent électoral
d'Hillary Clinton.
Quel serait
l'apport décisif d'un Talleyrand du XXIe
siècle à une anthropologie critique
digne d'une politologie enfin
scientifique, donc dotée de la
distanciation philosophique d'une
science des relations entre des Etats
souverains?
Cet apport
commencerait par renouveler le gaullisme
lui-même qui souffre d'une insuffisance
de la réflexion anthropologique sur la
guerre et la paix de l'homme du 18 juin;
car le Général de Gaulle ne cesse de
décrire sur le ton de l'étonnement ou de
l'indignation qu' "un chat est un
chat et Rollet un fripon", comme
l'écrivait Boileau, précisément en tant
qu'historiographe officiel de Louis XIV
Voltaire disait que
la religion est née de la rencontre d'un
fripon avec un imbécile. Mais il
ignorait encore que le fripon évoqué
est, au premier chef, un sorcier et que
la première sorcellerie est celle des
fripons dont la forte personnalité leur
fait proclamer qu'ils sont informés des
ultimes secrets du cosmos. A ce titre,
le fripon de Voltaire se révèle un
magicien de première force et qui
exécuterait fidèlement les volontés
d'une divinité. L'empire américain
repose sur la friponnerie d'un magicien
proclamé au service de l'absolu. C'est
pourquoi Voltaire croyait encore en
l'existence d'un " horloger " minutieux
du cosmos.
4 - Le gaullisme
et le mythe démocratique
Depuis des siècles,
aucun Etat ne conteste l'existence de
Jahvé, revendiquée par le peuple hébreu,
l'existence d'Allah postulée par les
peuples du Coran, l'existence réclamée
par les chrétiens d'un Dieu composé de
trois "personnes": ils "font avec",
comme on dit aujourd'hui. Bien plus, les
théologiens respectifs sur lesquels ces
trois divinités prennent appui se
contentent de rogner subrepticement les
prérogatives et les apanages de leurs
divinités respectives, afin d'augmenter
les pouvoirs de leurs fidèles et
d'aboutir à un modus vivendi de nature à
satisfaire les intérêts des deux
parties.
Rien de tel avec
les négociations que l'Angleterre ouvre
en ce moment avec l'Europe : la question
des relations de tout ce bea u monde
avec l'OTAN sera purement et simplement
effacée des tablettes de Clio. La
vassalisation du Vieux Continent se
trouve tellement avancée que personne ne
soulèvera la question de nos attaches
avec le sceptre et le joug du Pentagone.
Telle est la
question que Talleyrand pose fermement
et même rudement aux successeurs
aveugles du Général de Gaulle, telle est
la question qui se posera
inévitablement, à l'Europe parce qu'il
n'a jamais existé de politique réelle
qui ne se trouve contrainte de préciser
la nature et le statut des nations.
Aujourd'hui,
Talleyrand nous rappellerait qu'aux yeux
du pseudo apostolat démocratique
américain, l'empire du dollar et du
Pentagone sont les nouveaux horlogers de
l'univers. Si le "Diable boiteux"
avait guidé les pas du Général, il
aurait expliqué aux Français combien il
est naturel et inévitable, hélas, qu'un
vainqueur exploite au mieux sa victoire
et que la vraie victoire de l'empire
américain n' est autre que le
consentement de tout le monde au
débarquement dans les consciences d'un
messianisme faussement protecteur et
d'une démocratie prétendument
salvifique.
Non, aurait dit un
de Gaulle à l'écoute de Talleyrand,
l'histoire n'est pas un théâtre du salut
universel, l'histoire réelle du monde
n'est pas celle d'un apostolat mondial
du concept de démocratie.
L'histoire réelle est celle qu'écrivent
les grands visionnaires et les grands
réalistes du destin des nations. Mais si
vous ne connaissez pas les ressorts
psychobiologiques de l'adversaire,
comment vous défendriez-vous? Le Général
chinois Sun-Tsu faisait de la
connaissance de l'adversaire la clé de
la victoire.
Au lieu de cela,
les pseudo gaullistes d'aujourd'hui ne
cessent de démontrer que de Gaulle était
gaulliste au sens qu'ils donnent à ce
mot aujourd'hui, c'est-à-dire au sens
limité d'un gaullisme soumis au seul
concept de démocratie auquel le
pseudo "libérateur américain" serait le
modèle. A leurs yeux, l'Amérique serait
devenue impériale et impérieuse par on
ne sait quelle dérive inexplicable de
ses idéaux originels.
En vérité, le
premier exemple du baptême de la
démocratie dans une théologie se trouve
dans Tite-Live: après avoir assassiné
leur roi Numa Pompilius, le Sénat romain
l'avait fait descendre des nues sous les
traits d'une divinité chargée de
prophétiser l'avenir planétaire de
l'empire romain et, depuis lors, on a vu
les empereurs se légitimer à seulement
proroger d'année en année leur titre
officiel de premier Consul.
La réflexion sur le
génie politique de Talleyrand nous
conduira bien au-delà du gaullisme
falsifié d'aujourd'hui: à un regard
transfreudien sur la condition humaine
en tant que telle et à une psychanalyse
anthropologique des mythes religieux que
j'ai explicitée le 12 avril 2005 à
propos de la mort du pape Jean-Paul II.
Voir :
A propos de la mort sacrificielle de
Jean Paul II, 12 avril 2005
Il n'est plus
possible de retarder l'aiguille du temps
sur l'horloge du monde qu'on appelle
l'histoire: dans quinze jours
j'évoquerai les ressorts financiers et
bancaires d'un Occident divisé entre
l'empire des Rothschild et celui d'une
banque américaine, dirigée par Mario
Dragui, ancien cadre de Goldman Sachs,
et baptisée banque centrale européenne.
Le 17 mars 2017
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