Europolitique
Le suicide de
l'Europe
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Samedi 13 septembre 2014
"Interroger les grands
philosophes, c'est transformer les
questions qu'on leur pose en instruments
d'approfondissement de la connaissance
du genre humain."
Jaspers
|
Avertissement
1 - La guerre entre la
philosophie et la justice
2 - Le retour de Bergson
3 - La " lance pensive d'Athéna
"(André Malraux)
4 - La dignité de la France
5 - L'esprit de vérité et
l'esprit de justice
6 - La pesée anthropologique du
sacré démocratisé
7 - Les devoirs de la
politologie de demain
Post scriptum
|
Avertissement
Le lecteur se
souvient qu'en raison de la tension
fomentée par les Etats-Unis entre la
Russie et l'Ukraine, j'avais jugé
nécessaire de retarder la diffusion de
la seconde partie de mon analyse du 23
août, consacrée à l'interprétation
anthropologique et géopolitique de
l'amende colossale infligée à un Etat
souverain, le nôtre, par le relais de la
banque BNP-Paribas.
Le cours des
événements a confirmé qu'il s'agit d'une
chute irréversible du prestige de la
France sur la scène internationale, même
si la bourde catastrophique d'avoir cédé
aux menaces de Washington et d'avoir
renoncé à livrer les Mistral à la Russie
n'aura duré que quelques heures : tout
le monde a compris que seule
l'intervention aussi sévère qu'énergique
des chefs d'état-major des trois armes a
pu ouvrir un instant les yeux sur le
monde réel à un Président de la
République étranger à la nature même de
sa fonction et aux devoirs qui y sont
attachés.
Le 4 septembre,
Le Monde traitait de la
délégitimation d'un Président de la
Ve République rejeté par quatre-vingt
sept pour cent des Français. Le suicide
probable de l'Europe me permet de
rappeler avec davantage de clarté les
traits de caractère, la tournure
d'esprit et le type d'encéphale qui
caractérisent les vrais chefs d'Etat -
ce qui exige une réflexion parallèle sur
l'empereur imaginaire du cosmos qui doit
servir de pédagogue aux dirigeants en
chair et en os de la planète.
1 - La guerre
entre la philosophie et la justice
Depuis près de
vingt-cinq siècles, la civilisation née
à Athènes sous Périclès dénonce les
tares et les salissures dont la justice
des Etats souffre en tous lieux et à
toutes les époques. Dans l'enceinte
mondiale d'une littérature et d'une
philosophie dont tous les chefs-d'œuvre
dénoncent le naufrage du rêve d'une
morale universelle, la France se
présente au premier rang des
dénonciateurs de la fausse Justice dont
notre espèce se trouve frappée depuis
les origines. Mais notre pente naturelle
nous porte également à citer au banc des
accusés la déraison native dont la
science du droit se trouve frappé à son
tour - et cela jusque dans la
falsification de ses préceptes sur le
banc d'essai du rite et de la lettre.
Du Bridoison ou du
Grippeminaud de Rabelais aux caricatures
de Daumier ou de Gavarni, le peuple
narquois brandit l'effigie d'un
fabuliste sarcastique; et cet
anthropologue moqueur lance dès les
bancs de l'école aux enfants en
apprentissage de la justice du pays les
banderilles selon lesquelles "la
raison du plus fort est toujours la
meilleure". C'est en culottes
courtes que l'on apprend l'adage
précieux: "Selon que vous serez
puissant ou misérable, la justice de
cour vous fera blanc ou noir". Et
puis, qu'était-ce d'autre que la
Révolution de 1789, sinon le déclencheur
d'un Niagara libérateur, celui d'une
invasion du monde par une Justice qui
transcenderait les verdicts
géographiques d'un droit public asservi
aux temps et aux lieux?
Mais on se remémore
également que la première offensive
d'une justice baptisée d'absolue
brandissait le sceptre d'un génocidaire
sacré: l'audace récente dont témoigne la
raison du monde lui fait dénoncer
l'iniquité et la sottise du Créateur.
Mais l'homme pensant n'a commencé
qu'avec un tragique retard d'observer la
sauvagerie de ses sosies célestes et
d'éclairer le saint Déluge à la lumière
de la pieuse férocité des premiers dieux
de l'humanité.
Pourquoi l'épopée
cérébrale qui caractérise la France du
fabuliste rieur culmine-t-elle dans
l'ironie, pourquoi, depuis la plus haute
antiquité, aucun chef-d'œuvre dans
aucune langue ne chante-t-il la justice
des Etats? Et pourtant, seul un tribunal
prudemment délocalisé dans les nues est
censé échapper à l'arbitraire résolu des
Etats domiciliés sur la terre - et nous
venons de constater, hélas, que le ciel
lui-même s'installe énergiquement dans
l'arbitraire des nations. Aussi, le
peuple de la pensée cartésienne met-il
le Zeus des tortures éternelles sur le
gril de la pensée critique: depuis trois
siècles, c'est Voltaire et non les
Eglises qui rappellent aux chrétiens que
les héros les plus illustres de
l'histoire du genre humain furent à la
fois les victimes des piétés sauvages de
la justice régionalisée de leur temps et
les vengeurs de la justice sanglante du
ciel.
2 - Le retour de
Bergson
D'Antigone à nos
jours, les théologies occidentales se
veulent les défenderesses officielles
d'une éthique universelle. Quant aux
philosophes, ils plaident, eux aussi, à
la barre d'une raison réputée sans
frontières. Pourquoi le christianisme,
d'un côté et la pensée rationnelle de
l'autre se relaient-ils à défendre les
deux condamnés à mort les plus
représentatifs de l'histoire de notre
évolution cérébrale - Socrate et Jésus?
Pourquoi Sophocle dit-il, avec tout
notre XVIII siècle, que la justice
véritable n'est pas celle qui a frappé
un Œdipe tétanisé par la sottise aveugle
que les dieux appellent la fatalité et
que la raison tient autant que le cœur
les rênes d'une Justice ascensionnelle?
Mais si les
effigies de l'Olympe muet d'Athènes ne
présidaient pas le tribunal des
guerriers d'une vraie justice, encore
faut-il expliquer pourquoi, en grec,
tetanos signifie rigide, et pourquoi un
adage romain disait Summum jus, summa
injuria - "Le comble du droit est
le comble de l'iniquité". La pesée
de la nature et des droits de la
lucidité sommitale dont ne bénéficient
que quelques rares spécimens noyés dans
la multitude des évadés de la zoologie a
donc précédé de quelques siècles la
pesée de l'idée bancale de justice qui
sévit dans les tribunaux; et si la
pensée philosophique pèse ses arguments
sur les plateaux d'une logique de la
droiture d'esprit, cette logique-là se
veut ascensionnelle. La vraie Justice
est donc fondée sur l'alliance que les
grandes civilisations concluent avec le
souffle élévatoire des intelligences
dérigidifiées. En conséquence,
demandons-nous ce qui rend juste un
entendement délivré des bandelettes
d'une logique étriquée, dès lors que la
plus haute raison obéit à une
inspiration logique qualifiée de
"spirituelle" précisément à ce titre.
On voit la
profondeur de l'intuition créatrice de
Bergson, qui avait compris en
anthropologue de la tétanisation
simiohumaine que l'abaissement de la
raison dans les rites des "sociétés
closes" assèche les âmes et les prive
d'une logique qualitative: seule une
alliance de l'interprétation rationnelle
de l'évolution cérébrale de notre espèce
avec une réflexion nouvelle sur la
surréalité d'une justice élévatoire
permettra, pensait-il, de formuler une
philosophie de la désincarcération des
sociétés ouvertes.
Voir: -
Mon Panthéon 2 , 18 janvier
2014
Car aussi bien la
capitulation financière de la France
abaissée que sa suffocation dans la
vassalisation économique américaine nous
renvoient à une raison semi-animale et
emprisonnée.
Voir: -
La capitulation de BNP-Paribas et la
géopolitique - L'âme de l'Europe et
l'esprit de justice , 23 août
2014
3 - La " lance
pensive d'Athéna " (André Malraux)
Observez la peur et
les tremblements de la France ligotée à
l'empire américain, observez
l'effarement de ce trembleur sous la
haire et la discipline des
professionnels de la Démocratie
atlantiste! Le désarroi économique et
diplomatique des Etats bégayants nous
enseigne que le fondement politique
d'une véritable intelligence de l'idée
de justice n'est autre que le courage
d'une logique supérieure, celle de
proférer le seul sacrilège qui délivrera
le singe vacillant des bandelettes du
rite et de la lettre. Mais seul un
regard encore à conquérir, celui que les
anthropologues de demain porteront sur
les sacrilèges créateurs nous informera
des sources ultimes du courage spirituel
des nations.
L'anthropologie
critique nous introduit dans la
postérité respirante de Bergson. Elle
observe la France ficelée à sa fausse
Justice, abêtie par son culte de la
Lettre et livrée à l'illogisme des
démocraties étêtées par le langage même
de leur vassalisation.
4 - La dignité de
la France
N'avons-nous pas
progressé de quelques enjambées dans la
connaissance des âmes partagées entre
une justice dégradée et une pensée
asservie au glaive de l'étranger?
Sophocle et Socrate nous enseignent
d'une même voix que l'âme d'une vraie
Justice a rendez-vous avec le tragique
d'une métazoologie et que ce tragique-là
n'est autre que celui dont la pesée
requiert la balance d'une hiérarchie des
valeurs informée de l'évolution
cérébrale de la bête, celle qui appelle
l'Europe de la raison à un apprentissage
de la pesée des grandes âmes - et les
grandes âmes sont responsables de la
balance à peser les intelligences.
Que faut-il
entendre par la responsabilité
bancale dont la médiocrité proprement
cérébrale des hommes politiques
ordinaires se fait une vertu? Antigone
se veut responsable
intellectuellement et politiquement de
l'enracinement originel des lois
d'Athènes dans les droits des morts,
Socrate se veut politiquement et
intellectuellement responsable
des relations que la cité des lois
entretient avec l'autorité de la pensée
logique. La France des sacrilèges, la
France trans-temporelle, la France de la
plus haute logique se veut politiquement
responsable du tragique de la
capitulation cérébrale de la
civilisation occidentale devant un
empire de la sottise politique qui
entend l'asservir à sa justice de
conquérant des marchés mondiaux. Quelle
chance, pour une France de la raison
politique et spirituelle confondues que
de prendre rendez-vous avec ses vrais
juges, ceux que les grandes
civilisations convient à présider le
tribunal de la vie et de la mort de
l'intelligence!
Mais si la justice
véritable fait appel aux âmes sommitales
et si la vocation des suppliciés de la
pensée rationnelle appelle les guerriers
de l'intelligence à un trépas
testimonial, la France de Paribas
est-elle digne de la France des
hauteurs? Nous n'aurons pas explicité
l'essentiel de la politique de la
justice et de la raison confondues si
nous ignorons pourquoi Socrate le
suicidaire refuse catégoriquement de
sauver sa peau - on veut humilier sa
carcasse à lui offrir un refuge douillet
à Mégare. Mais qu'adviendrait-il de la
dignité du combat de sa charpente s'il
acceptait un marché aussi déshonorant?
Si le rendez-vous
de la France avec la plus haute justice
est socratique, à quelle dignité
spirituelle la nation abaissée doit-elle
élever son squelette, à quelle dignité
spirituelle doit-elle hausser sa classe
dirigeante, de quelle dignité
spirituelle doit-elle témoigner à la
face du monde? Si la France
métazoologique ne prenait pas le relais
de la réflexion sur le "spirituel", il
n'y aurait pas lieu de s'étonner de
l'avortement de la pensée mondiale dans
un humanisme étêté; car la vie
spirituelle de la raison est suicidaire
et les grandes âmes se donnent à tuer.
5 - L'esprit de
vérité et l'esprit de justice
Pour tenter
d'élever le débat à la pesée de la
dignité ou du déshonneur politiques des
Etats, donc à la question de l'élévation
au courage ou de l'abaissement de leur
justice sur la scène internationale,
demandons-nous ce qu'il en est de la
guerre entre les deux juridictions
parallèles auxquelles l'histoire entière
sert de théâtre, celle de l'âme
souveraine des suicidaires de la justice
et celle des trahisons d'un droit public
livré à la médiocrité apeurée des jours.
Car, depuis la nuit des temps, les
classes dirigeantes se font un devoir
craintif, donc un brevet de compétence
politique élémentaire de s'abaisser à
défendre des tribunaux effarouchés et
fondés sur des magistratures
professionnellement asservies à
l'arbitraire. Il se trouve, de surcroît,
que, c'est toujours et en tous lieux une
justice au masque d'ange - donc
auto-sanctifiée par son infidélité à ses
idéaux - qui chasse la justice héroïque
de l'enceinte des tribunaux. Dans quel
abîme d'une anthropologie de la
servitude Pascal nous précipite-t-il à
soutenir que "faire l'ange" est la clé
de l'animal humain? Il faudra nous
interroger sur la spécificité cérébrale
d'une animalité auto proclamée
vertueuse, celle qu'illustre la
sauvagerie inhérente à l'angélisme
simiohumain.
Souvenons-nous de
ce que les mesures de rétorsion
économiques décidées par la Russie en
représailles aux sanctions prises à son
encontre par l'Europe vassalisée, ont
sincèrement étonné et pris de court les
chancelleries du monde de la "vertu" et
que l'Australie s'en est étonnée de
bonne foi. Comment une géopolitique dite
démocratique, mais qui se veut punitive
non seulement à bon droit, mais à titre
dévot et vertueux, comment une telle
géopolitique, dis-je, ne
déclarerait-elle pas ses adversaires
coupables d'illégalité du seul fait
qu'ils seront condamnables et censés
mériter des châtiments réputés pieux par
définition?
La méta-zoologie
révèle que la bête aux gènes d'ange
préside un tribunal calqué sur les
neurones de la divinité devant laquelle
elle se prosterne depuis des générations
et dont le modèle primitif, donc local,
s'est à la fois répandu et fossilisé.
Une France abaissée par l'angélisme
démocratique de son apparence d'Etat et
agenouillée devant une justice
squelettique, elle aussi, puisque placée
à son tour sous le joug d'un Etat
étranger, une telle France se trouve,
dans le même temps, humiliée sur la
scène des trois idoles en exercice dans
le siècle. N'oublions pas que Jahvé,
Allah et le dieu romain sont tenus pour
des chefs d'Etat du cosmos par des
milliards de vivants. Que la France
laïque fasse pâle figure face à leur
sceptre n'est pas indifférent - et sa
classe dirigeante en est responsable. La
fausse justice américaine devant
laquelle notre nation s'est humblement
inclinée nous conduira-t-elle pourtant à
boire l'eau d'une fontaine de jouvence?
On cherche la source vive des blasphèmes
ressuscitatifs. Observons de plus près
la justice d'un Dieu de la honte qui
fait l'ange, lui aussi. Ne tient-il pas
dans une main son ciel aux ridicules
gâteries et l'éternité de ses tortures
infernales dans l'autre!
6 - La pesée
anthropologique du sacré démocratisé
Décidément, si la
justice ascensionnelle crucifie les
grandes âmes sur la croix d'une histoire
animale de la politique, il nous faudra
enfanter un dieu inconnu, celui d'une
France responsable de l'histoire de
l'intelligence du monde. Jamais nous ne
le trouverons si nous suivons à la trace
le chef d'un camp de concentration
souterrain Décidément, le rendez-vous
politique d'une justice d'en-haut
avec la pensée socratique nous initie à
la connaissance des religions
auto-angélisées par leurs masques sacrés
et nous conduit à l'examen simio
anthropologique de leurs relations avec
la politique internationale de la bête.
Qu'en est-il des séraphins verbifiques
dont se grise l'Europe pseudo
démocratique d'aujourd'hui?
Car il se trouve
que, dans toutes les sociétés
semi-animales actuelles, le territoire
chichement concédé à l'expression d'une
vérité trans-zoologique - celle
des grands suicidaires de la justice -
demeure précautionneusement enfermé dans
l'enceinte d'une politique de village.
Qu'en est-il de l'arène du bimane
angélisé par ses masques religieux et
rendu respectueux de ses droits et de
ses pouvoirs d'apostat de la démocratie?
J'évoquais tout à l'heure l'indignation
d'une Australie censée pieuse et
vertueuse devant l'audace qualifiée de
luciférienne de la Russie, celle de
refuser les verdicts au petit pied du
Beau, du Juste et du Bien dont l'Europe
l'a frappée. Il faut en conclure que
l'orthodoxie de l'autorité
administrative qu'exercent sur eux-mêmes
les corps constitués n'exprime que leur
instinct de conservation bureaucratique
et que les Etats spécularisés par leurs
propres organes protègent leurs plumages
narcissiques, donc "la sainteté" de
leurs appareils de coercition. La
religion les hypertrophie sous la terre,
la démocratie les totémise au grand
jour.
Décidément,
l'esprit de raison qui conduit une vraie
politique de la justice nous porte à
proférer le plus ressuscitatif des
blasphèmes, celui de demander à nos
sciences humaines asphyxiées par
l'irréflexion qui protège leur douillet
abaissement, de préciser quelle est
l'animalité partagée du Zeus des
tortures d'un côté, et de la créature,
de l'autre - car Adam s'est calqué sur
les blasons vertueux de son ciel. Une
psychanalyse de l'acéphalie dont souffre
l'humanité faussement dévote du XXIe
siècle nous enseignera à pratiquer la
vivisection des théologies
auto-angélisées et à autopsier
l'apostasie de type démocratique. Puis,
il nous faudra disséquer leurs
catéchismes suicidaires au scalpel
d'Isaïe, dont nous verrons plus loin
quel regard d'anthropologues les
prophètes portent sur les idoles de leur
temps. Car voici que
l'auto-vassalisation suicidaire de la
France des idoles verbales contribue à
angéliser la justice verbifique de la
démocratie mondiale et prend appui sur
elle en retour, ce qui nous renvoie à
l'examen et à la pesée des ressorts du
sacré simiohumain.
7 - Les devoirs
de la politologie de demain
Quoi qu'il en soit
des relations fécondes que les âmes
sommitales entretiennent avec le suicide
en altitude dont elles se réclament, la
question des fondements subrepticement
angélisés du suicide de l'Europe dans
les basses eaux de la démocratie a
soudainement débarqué dans la pesée de
la politique "religieuse" des apostats
de la Liberté. Observons de plus près le
statut et la nature d'un esprit de
justice qui transcenderait les verdicts
des tribunaux bureaucratiques. Qu'en
est-il de la justice transadministrative
qui a permis à Rabelais, Montaigne,
Molière ou au Racine des Plaideurs
de prendre, leur vie durant, le relais
des sacrilèges de Socrate ou d'Antigone?
Car les magistratures administratives de
l'Europe se vantent bien à tort d'avoir
conservé leur souveraineté d'autrefois
et de se placer encore sous l'aile d'une
logique universelle de la justice, alors
que la législation américaine a réduit
en miettes le moule du droit
international.
Il en résulte que
la gestion de la politique des
Etats-vassaux de l'OTAN s'est fondée sur
un formalisme juridique qui anéantit en
retour l'identité, donc l'honneur des
nations. Les vrais chefs d'Etat savent
que les nations sont des personnes et
que les grands Etats sont des
personnages, les vrais chefs d'Etat
savent que s'ils tentent d'abaisser un
grand personnage sur la scène
internationale, ce sera eux-mêmes qu'ils
abaisseront, les vrais chefs d'Etat
savent que les nations ne sont pas des
garnements en culottes courtes et qu'on
met au piquet, les vrais chefs d'Etat
savent que les citoyens bénéficient de
la dignité de leur nation sur le théâtre
du monde.
Il en découle que
l'honneur des petits Etats n'a pas la
même taille que celui des grands, parce
que les peuples se mettent à l'échelle
de leurs Etats. Les Suisses ne se
sentent pas déshonorés de ce que leur
pays ait livré à la justice américaine
les noms de plusieurs centaines de
déposants qui avaient fait confiance à
la Constitution helvétique, qui garantit
le secret bancaire aux étrangers, parce
qu'on ne demande pas la même hauteur
d'âme et le même sentiment de l'honneur
aux nains et aux géants. En revanche, la
France demeure de taille à se trouver
déshonorée par la trahison de son Etat,
dont la félonie démocratique a trahi les
idéaux, parce que les Français ne sont
pas encore assez petits pour se rouler à
terre devant un maître. On voit que la
réflexion sur la Justice conduit à la
réflexion sur l'honneur des peuples, des
Etats et des nations.
La France
vassalisée mettra-t-elle cul par-dessus
tête les règles de conduite civilisées
et les usages de la géopolitique? Nous
en débattrons la semaine prochaine.
Post Scriptum
J'écrivais le 25
juillet:
"A partir de cette date, et compte-tenu
qu'on ne luttera efficacement contre le
naufrage de la langue française que si
le Président de la République et le
Premier Ministre se voient nommément mis
en cause, je relèverai quelques-unes de
leurs fautes."
- M. Valls ignore
qu'on ne dit pas par contre, mais
en revanche.
- M. Hollande
ignore qu'on ne débute pas
quelque chose.
Reçu de l'auteur pour publication
Le sommaire de Manuel de Diéguez
Les dernières mises à jour
|