L'art de la guerre
L’invité de pierre à la table
Italie-Russie
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 30 octobre 2018
“Je considère qu’il est très
important de nous confronter avec un
partenaire stratégique comme la
Fédération Russe, nécessaire pour
déterminer des solutions aux principales
crises régionales” : c’est ce qu’a
déclaré le premier ministre Conte à la
conférence de presse conjointe au terme
de la rencontre avec le président
Poutine, le 24 octobre à Moscou. Une
question fondamentale à résoudre -a-t-il
souligné- est “la crise en Ukraine, qui
a mis en discussion les fondements du
rapport entre Union européenne et
Russie”. Mais, “malgré la permanence des
raisons qui ont conduit aux sanctions
européennes, instrument qui doit être
dépassé le plus tôt possible”, l’état
des rapports bilatéraux Italie-Russie
est “excellent”.
Déclarations qui
rappellent celles du premier ministre
Renzi, à une table ronde avec le
président Poutine à Saint Petersburg en
2016 : “Le mot guerre froide est sorti
de l’histoire et de la réalité. Ue et
Russie doivent être d’excellents
voisins”. Déclarations qui sont
diplomatiquement reprises et amplifiées
par Moscou, dans la tentative de
détendre les tensions : “Conte à Moscou,
l’alliance avec la Russie toujours plus
forte”, titre le 25 octobre l’agence
russe Sputnik, parlant de “visite à 360
degrés”. En réalité cela a été une
visite à 180 degrés, parce que Conte
(comme Renzi en 2016) s’est présenté en
tant que chef de gouvernement d’un pays
de l’Union européenne, finalisant la
visite à des accords économiques avec la
Russie. Le premier ministre a éludé le
fait que l’Italie fait partie de l’Otan
sous commandement des États-Unis, pays
que le gouvernement Conte considère
comme un “allié privilégié”, avec lequel
il a établi “une coopération
stratégique, quasiment un jumelage”.
À la table
Italie-Russie siégeait donc, comme
invité de pierre, l’”allié privilégié”
dans le sillage duquel se place
l’Italie. Ainsi est passé sous silence
le fait que le 25 octobre -lendemain du
jour où à Moscou le premier ministre
Conte avait qualifié d’”excellent”
l’état des rapports bilatéraux
Italie-Russie- les forces armées
italiennes commençaient sous
commandement USA, avec celles des autres
pays Otan, l’exercice de guerre Trident
Juncture 2018, dirigé contre la Russie.
Exercice dans lequel les commandements
et les bases USA/Otan en Italie jouent
un rôle de première importance. Passé
sous silence aussi le fait que le 25
octobre - lendemain du jour où à Moscou
le premier ministre Conte avait défini
la Russie comme un “partenaire
stratégique”- à Bruxelles son
gouvernement participait au Conseil
Atlantique Nord qui à l’unanimité
accusait la Russie, sur la base
d’”informations” fournies par les USA,
de violer le Traité FNI avec “un
comportement déstabilisant pour notre
sécurité”.
Le gouvernement Conte
soutenait ainsi dans les faits le plan
étasunien de sortir du Traité FNI et de
déployer à nouveau en Europe (Italie
comprise) des missiles nucléaires à
moyenne portée pointés sur la Russie.
Ceux-ci s’ajouteraient aux nouvelles
bombes nucléaires B61-12 que les
États-Unis commenceront à déployer à
partir de mars 2020 en Italie,
Allemagne, Belgique, Pays-Bas et
probablement dans d’autres pays
européens, dans une fonction
anti-Russie.
À la conférence de
presse, répondant à un journaliste,
Poutine a bien clarifié : les pays
européens qui accepteraient de déployer
des missiles nucléaires USA à moyenne
portée sur leur propre territoire
mettraient en danger leur propre
sécurité, parce que la Russie serait
prête à la riposte. Conte a assuré que
“l’Italie vit avec inquiétude ce conflit
et fera tout son possible pour qu’une
fenêtre de dialogue reste ouverte sur
celui-ci”.
Chose qu’il est en
train de faire en se préparant à
accueillir et à utiliser sous
commandement étasunien les nouvelles
bombes nucléaires B61-12 à capacité
pénétrante pour détruire les bunkers des
centres de commandement russes.
Édition de mardi 30 octobre 2018
de il manifesto
https://ilmanifesto.it/il-convitato-di-pietra-al-tavolo-italia-russia/
Traduit de l’italien par M-A P.
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