L'art de la guerre
Hong Kong, le Traité de Nankin
revient
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci - Capture
d'écran PalSol
Mardi 1 septembre 2019
Des centaines de jeunes Chinois,
devant le Consulat britannique à Hong
Kong, chantent “God Save the Queen” et
crient “Grande-Bretagne sauve Hong
Kong”, appel recueilli à Londres par 130
parlementaires qui demandent qu’on donne
la citoyenneté britannique aux résidents
de l’ex-colonie. Ainsi fait-on
apparaître la Grande-Bretagne à
l’opinion publique mondiale, en
particulier aux jeunes, comme garante de
légalité et droits humains. Pour le
faire on efface l’Histoire.
Il est donc nécessaire, avant
toute autre considération, de connaître
les épisodes historiques qui, dans la
première moitié du 19ème
siècle, amènent le territoire chinois de
Hong Kong sous domination britannique.
Pour pénétrer en Chine,
gouvernée alors par la dynastie Qing, la
Grande-Bretagne recourt à l’écoulement
de l’opium, qu’elle transporte par mer
de l’Inde où elle en détient le
monopole. Le marché de la drogue se
répand rapidement dans le pays,
provoquant de graves dégâts économiques,
physiques, moraux et sociaux qui
suscitent la réaction des autorités
chinoises. Mais quand celles-ci
confisquent à Canton l’opium emmagasiné
et le brûlent, les troupes britanniques
occupent avec la première Guerre de
l’Opium cette ville et d’autres cités
côtières, contraignant la Chine à signer
en 1842 le Traité de Nankin.
À l’Article 3 il stipule :
“Comme il est évidemment nécessaire et
souhaitable que des sujets britanniques
disposent de ports pour leurs navires et
leurs magasins, la Chine cède pour
toujours l’île de Hong Kong à Sa Majesté
la Reine de Grande-Bretagne et à ses
héritiers”. À l’Article 6 le Traité
stipule : “Comme le Gouvernement de Sa
Majesté Britannique a été contraint
d’envoyer un corps expéditionnaire pour
obtenir le dédommagement des dégâts
provoqués par la violente et injuste
procédure des autorités chinoises, la
Chine consent à payer à Sa Majesté
Britannique la somme de 12 millions de
dollars pour les dépenses encourues”.
Le Traité de Nankin est le
premier des traités inégaux par lequel
les puissances européennes
(Grande-Bretagne, Allemagne, France,
Belgique, Autriche et Italie), la Russie
tsariste, le Japon et les États-Unis
s’assurent en Chine, par la force des
armes, une série de privilèges :
la cession de Hong Kong à la
Grande-Bretagne en 1843, la forte
réduction des taxes sur les marchandises
étrangères (au moment même où les
gouvernements européens érigent des
barrières douanières en protection de
leurs industries), l’ouverture des
principaux ports aux navires étrangers
et le droit d’avoir des aires urbaines
sous leur propre administration (les
“concessions”) soustraites à l’autorité
chinoise.
En 1898 la Grande-Bretagne annexe à Hong Kong la péninsule de Kowloon et
les dits News Territories, concédés par
la Chine “en location” pour 99 ans.
Le vaste mécontentement
pour ces impositions fait exploser vers
la fin du 19ème
une révolte populaire - celle des
Boxer-
contre laquelle intervient un corps
expéditionnaire international de 16
mille hommes sous commandement
britannique, auquel participe aussi
l’Italie (et la
France, NdT).
Débarqué à Tianjin (T’ien Tsin) en août 1900, il saccage Pékin et
d’autres villes, détruisant de nombreux
villages et y massacrant la population.
Par la suite, la Grande-Bretagne prend
en 1903 le contrôle du Tibet, tandis que
la Russie tsariste et le Japon se
partagent la Mandchourie en 1907.
Dans la Chine réduite à
l’état colonial ou semi-colonial, Hong
Kong devient la principale porte des
trafics fondés sur le saccage des
ressources et sur l’exploitation
esclavagiste de la population. Une masse
énorme de Chinois est contrainte à
émigrer surtout vers les États-Unis,
l’Australie et le Sud-Est asiatique, où
elle est soumise à des conditions
analogues d’exploitation et de
discrimination.
Une question surgit spontanément : sur quels livres d’histoire étudient
les jeunes qui demandent à la
Grande-Bretagne de “sauver Hong Kong” ?
Édition de mardi 17 septembre 2019
de il manifesto
https://ilmanifesto.it/hong-kong-torna-il-trattato-di-nanchino/
Traduit de
l’italien par M-A P.
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