Russie politics
Navalny : quand la France et l'Allemagne
font perdre
sa patience légendaire à la
Russie
Karine Bechet-Golovko
Vendredi 9 octobre 2020
La France et
l'Allemagne prennent la direction d'une
ligue régionale contre la Russie. Et le
cirque autour de cet étrange
empoisonnement de Navalny prend tout son
sens : l'important est d'avoir un
prétexte, pour ensuite pouvoir
l'exploiter. Ce qui est plus inquiétant,
est que l'Organisation pour
l'interdiction des armes chimiques
(OIAC) ait "trouvé" du Novitchok dans
les échantillons de Navalny. Les
médecins russes étant clairs sur le
sujet, soit une infime dose a été
injectée à Navalny déjà en Allemagne et
en milieu clos (puisqu'il n'y a aucune
victime collatérale), soit l'OIAC
falsifie ses résultats. Pendant ce
temps, Paris et Berlin accusent et
menacent Moscou, avec la hargne du
fanatisme. C'est-à-dire en criant
d'autant plus fort que l'on ne veut pas
avoir à répondre à des questions
dérangeantes. De son côté, la Russie
siffle la fin du jeu : non, il n'est
plus possible de faire comme si de rien
n'était.
Nous avons déjà souligné à plusieurs
reprises l'étrangeté de l'affaire
Navalny, soi-disant empoisonné avec une
arme chimique, dont il ressort vivant et
qui, bien que volatile, ne touche que
lui dans un avion ou un aéroport (voir
notre texte ici). L'absurdité de la
situation est telle que, logiquement, la
Russie voit en cela une opération menée
par des services étrangers (voir
notre texte ici).
Or,
l'OIAC a déclaré avoir trouvé des
traces de novichok:
L'OIAC a confirmé
que les échantillons de sang et d'urine
d'Alexeï Navalny contenaient un «inhibiteur
de la cholinestérase», similaire à
deux substances chimiques de type
Novitchok interdites par l'organisation
en 2019.
Il y a donc
trois possibilités :
- soit la
Russie est assez stupide
pour empoisonné un
opposant à 2% de cote de popularité
et ensuite aider à son départ
du pays, alors que les frontières
sont fermées et qu'il est sous le
coup d'une enquête pénale (ne devant
donc pas, formellement, lui
permettre de quitter le
territoire);
- soit
Navalny a été empoisonné après
- donc en Allemagne et en milieu
stérile, puisqu'il n'y a aucune
victime collatérale, ni dans
l'aéroport, ni dans l'avion, ni dans
l'hôpital russe;
- soit
l'OIAC joue le jeu
globaliste et falsifie les
résultats.
Lorsque l'on voit
les proportions que prend cette affaire,
la Russie n'y a aucun intérêt. En
revanche, la machine s'est parfaitement
mise en route, soutenant localement
l'action globale. Les dernières
déclarations des ministres des
Affaires étrangères français et allemand
démontrent cette ligne :
"La France et
l’Allemagne réitèrent leur ferme
condamnation de l’empoisonnement de
M. Alexeï Navalny intervenu sur le
territoire russe, au moyen d’un agent
neurotoxique militaire appartenant à la
famille des « Novitchok » développé par
la Russie. Hier, l’Organisation pour
l’interdiction des armes chimiques
(OIAC) a confirmé les résultats des
analyses effectuées par nos deux pays.Comme nous avons eu
l’occasion de le souligner dans un
communiqué conjoint du 4 septembre,
cette terrible tentative d’assassinat
constitue une atteinte aux principes
élémentaires de démocratie et de
pluralisme politique. C’est aussi un
nouvel emploi choquant d’une arme
chimique, deux ans après l’utilisation
par la Russie d’une telle arme sur le
territoire britannique à Salisbury, le 4
mars 2018.
Une tentative
d’assassinat est intervenue sur le
territoire russe, contre une figure de
l’opposition russe, au moyen d’un agent
neurotoxique militaire développé par la
Russie.
Dans ces
circonstances, la France et l’Allemagne
ont demandé à plusieurs reprises à la
Russie de faire toute la lumière sur les
circonstances de ce crime et sur ceux
qui l’ont perpétré. Aucune explication
crédible n’a pour le moment été apportée
par la Russie. Nous considérons dans
ce contexte qu’il n’existe pas d’autre
explication plausible à l’empoisonnement
de M. Navalny qu’une responsabilité et
une implication russes."
Il en suit,
évidemment, des menaces de sanctions.
C'est l'impasse du clan globaliste : il
n'a aucune intention de mener un
véritable conflit à son terme logique -
le conflit armé direct, qui par ailleurs
épurerait la situation. Les sanctions
sont censées faire plier les
gouvernements, sans faire les frais
d'une guerre militaire. Mais ces
sanctions ont une limite d'efficacité et
il semblerait qu'elles l'aient atteinte.
Sans compter l'effet positif d'un tel
comportement ouvertement anti-russe :
l'affaiblissement intérieur du clan
globaliste russe, discrédité, car
l'ampleur des concessions faites au
globalisme n'entraîne qu'une
concentration des attaques contre la
Russie, en vue d'une "victoire finale".
Le
ministère russe des Affaires
étrangères a d'ailleurs répondu :
aucune réaction n'a suivi aux
demandes d'informations récurrentes de
la Russie concernant les analyses faites
sur Navalny, à la place de quoi la
France et l'Allemagne se lancent dans
une coalition antirusse, alors qu'il y a
peu ces pays parlaient encore de
coopération.
"Dans ce cas,
nous allons en tirer les conclusions qui
s'imposent. Faire du business l'air de
rien avec Paris et Berlin nous semble
désormais impossible dans ces conditions."
Comme l'avait, il y
a quelques jours, rappelé Vladimir
Poutine lors de sa rencontre avec
les chefs de partis politiques, la
Russie ne peut exister que souveraine et
indépendante des injonctions des
organismes internationaux. Encore un
pas et l'on pourra se souvenir de cette
déclaration attribuée à l'Empereur
russe Alexandre III, au 19e siècle,
affirmant que la Russie n'a que
deux alliés, son armée et sa flotte.
Le temps est venu de réellement en tirer
les conséquences, puisque certaines
constantes ne changent pas à travers les
siècles. Ce qui, d'ailleurs, en fait des
constantes.
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