Opinion
Bénis soient Trump et son fanatisme
Israël Adam Shamir
©
Israël
Adam Shamir
Lundi 14 2016
Source:
http://plumenclume.org/...
Il faudrait être un
poisson taré pour se plaindre si
quelqu’un disait : « je ne mange jamais
de poisson et je n’ai pas l’intention de
manger du poisson. » Un poisson
extrêmement stupide, même, pour le
traiter de fanatique. « Quoi, il ne nous
aime pas, nous les poissons ! ». Et
pourtant c’est comme pour être à la
hauteur du poisson le plus niais que nos
amis musulmans donnent de la voix contre
Donald Trump.
J’ai déjà dit du
bien de Mr. Trump. Un de mes amis,
musulman radical et Américain, a hurlé
sur une liste de diffusion ; « Comment,
et ses remarques racistes sur les
musulmans qui ressemblent à ce qui se
disait des juifs il n’y a pas si
longtemps ? Faudra-t-il accepter une
chose pareille, sans compter ce qu’il
dit, ce malade mental, sur les femmes en
surpoids ? Comment laisser passer des
choses pareilles ! »
Il faisait allusion
à l’idée de Trump d’interdire aux
musulmans d’émigrer aux US. C’est vrai
que ça sonne mal, et ce n’est pas la
première fois qu’on fait des
rapprochements avec les juifs.
Mais je vais vous
dire ; si Trump promettait d’interdire
aux Russes, et non aux musulmans
d’émigrer aux US, ces âmes sensibles
applaudiraient vigoureusement au lieu de
le traiter de fanatique. S’il renvoyait
chez eux tous les Russes qui sont
arrivés là-bas depuis 1990, ils
créeraient des boulevards et des avenues
Donald Trump. Or d'ores et déjà, voilà
ce qui se passe :
1) L’émigration
vers les US est un vrai problème pour la
Russie, et pour toutes les autres
nations d’ailleurs. Les spécialistes les
mieux éduqués, les médecins et les
ingénieurs, les techniciens quittent
leur patrie et s’en vont offrir leur
précieux capital humain aux US.
2) Pire encore,
bien des Russes importants se préparent
à quitter les US, et tout ce qu’ils font
en attendant, chez eux, c’est en
fonction des intérêts US, au lieu d’agir
pour le bien de leur propre pays.
Prenez le cas, par
exemple, de M. Andrei Kozyrev, ancien
ministre des Affaires étrangères de la
Fédération de Russie, devenu un
florissant propriétaire en Floride.
C’était un prédécesseur du puissant
Serguei Lavrov, et un successeur de
l’homme de fer Andreï Gromyko, qu’on
appelait Mr Niet ; lui ce serait plutôt
Mr. Da (« oui », en russe).
Jamais un agent de
la CIA rémunéré dans sa position ne
serait capable de faire autant de tort à
la Russie que M. Kozyrev. C’est lui qui
avait amené l’Otan vers l’Est, en
direction de la frontière russe. C’est
lui qui a retiré l’armée russe
d’Allemagne, rompant tout lien. Il
disait que les intérêts nationaux de la
Russie ne comptent pas, en regard des
droits de l’homme (occidental). Il a
soutenu les sanctions et le tribunal
international contre la Serbie, il a mis
fin au commerce avec Cuba, il a failli
détruire Cuba. Il a bradé son pays, et
maintenant il vit aux US et conseille le
gouvernement pour faire tomber Poutine
et instaurer un « changement de
régime ».
Ce serait
merveilleux, si Mr. Trump déportait M.
Kozyrev avec ses compères et le
renvoyait dans sa mère patrie. Ce serait
une leçon pour les prochains Kozyrev,
pour leur apprendre à rester loyaux avec
leur pays. Les Russes applaudiraient
très fort le fanatisme béni du nouveau
président américain.
Ce qui est vrai
pour les Russes vaut aussi pour les
musulmans, et pour tout le monde.
L’immigration, c’est une façon
d’accepter les retournements de veste et
le détournement de cerveaux. Un bon
médecin musulman s’installe aux US :
cela veut dire qu’il travaillait depuis
des années, de fait, au profit des
Américains.
Tout le monde sait
que l’immigration fait du tort aux
travailleurs locaux, mais l’immigration
est aussi catastrophique pour les pays
d’origine. Si j’étais un musulman
américain (je ne suis ni l’un ni
l’autre), je voterais pour Mr. Trump à
cause de sa promesse d’interdire
l’immigration musulmane. Si je me
faisais du souci pour le Mexique, je
voterais pour Trump, pour sa promesse de
construire un mur entre les deux pays.
C’est par cette frontière poreuse que
les US siphonnent les Mexicains les plus
dynamiques.
Bon d’accord, mais
alors les juifs ? Eh bien, les US se
porteraient bien mieux avec moins
d’immigration juive : moins de Nuland et
de Kagan, moins de néo-cons, moins de
militants de l’AIPAC et d’agents de
l’ADL. Vous imaginez les US échappant à
l’influence d’Abe Foxman, Hollywood sans
les navets holocaustiques, les US sans
dévastation de l’Irak, les US sans lobby
israélien ? Quel rêve ! Et il
faudrait en rester à la déploration du
fanatisme, alors qu’on pourrait viser un
pareil programme ?
De toute façon, le
fanatisme, c’est le nouvel anathème à la
mode, dont nos aïeux n’avaient que
faire, pour leur plus grand bien. C’est
une invention récente. C’est vrai que
les vieux colonels anglais, attaqués par
le soleil de l’Inde, étaient qualifiés
de fanatiques, mais ce n’était pas un
épithète qui portait, ce n’était guère
plus sérieux que « bouffon ». Les juifs
ne sont jamais fanatiques : ils ne
permettent même pas aux Palestiniens
d’emprunter les mêmes autoroutes que les
juifs dans leur Etat juif, mais il ne
saurait s’agir de fanatiques, à Dieu ne
plaise. Ce qualificatif vaut péché
mortel pour les goys seulement, et ce,
pour une raison simple : si un goy
s’avisait de traiter un musulman ou un
noir de fanatique, demain il serait
capable de traiter un juif de juif. Que
Dieu nous épargne pareille épreuve !
Où est le problème,
si on parle de noirs, d’anglos ou de
juifs ? Ce sont là des communautés
vénérables, anciennes, et qui hélas se
désintègrent en ce moment sous
l’avalanche des migrations de masse et
le saccage néolibéral généralisé.
Chacune a donné les meilleurs de ses
fils et de ses filles pour le bien
commun, tandis que leurs pires éléments
essayaient de détourner pour leur propre
profit ce qu’ils pouvaient. Il faut être
très bête pour monter sur ses grands
chevaux chaque fois qu’on entend
mentionner sa communauté autrement qu’en
termes flatteurs.
J’ai été
impressionné par l’hésitation de Trump à
conspuer David Duke, l’homme dont la
condamnation est de rigueur parce que,
il y a quarante ans, il était membre
encarté du Ku Klux Klan. Quarante ans,
c’est long, mais David Duke est privé de
parole à jamais parce qu’il a été un
dirigeant du Ku Klux Klan, tandis que
Yossi Halevy, qui était membre du gang
de Kahane (tout aussi raciste) écrit
pour le New Republic.
Amitai Etzioni,
professeur honoraire de l’université
Geoge Washington, a appelé à la guerre
mondiale nucléaire. David Duke n’a
jamais atteint ce niveau dans la
bestialité, mais il est rayé de la carte
alors qu’eux ne le sont point. Trump est
vraiment quelqu’un de solide et de
courageux, pour avoir hésité une seconde
avant de condamner Duke. Après cela, il
est capable d’avaler des serpents
venimeux et du liquide enflammé.
Trump a dit que les
musulmans avaient dansé de joie lors du
11 septembre. Mais ils n’ont pas été les
seuls, le monde entier en dehors des US
a adoré la chute des Tours jumelles ! Le
penseur français Jean Baudrillard avait
réagi : « Nous en avions tous envie »,
disait-il. Voici ce que j’avais écrit à
ce moment :
« Les kamikazes
pouvaient être pratiquement n’importe
qui : des nationalistes américains, des
communistes américains, des chrétiens
fondamentalistes américains, des
anarchistes américains – tous ceux qui
rejettent les dieux siamois du dollar et
du M-16, tous ceux qui haïssent la
bourse des valeurs et les interventions
outre-océan, tout ceux qui rêvent d’une
Amérique aux Américains, qui en veulent
pas soutenir la croisade visant à la
domination mondiale. Il peut s’agir
d’Aborigènes américains désireux de
revenir à Manhattan, ou
d’Afro-Américains qui n’ont pas encore,
jusqu’ici, reçu de compensations pour
l’esclavage.
Cela pouvait être
des étrangers de pratiquement n’importe
quelle condition, étant donné que Wall
Street et le Pentagone ont bousillé la
vie de très nombreuses personnes, dans
le monde entier. Les Allemands peuvent
se souvenir de l’holocauste terrifiant
de Dresde, avec ses centaines de
milliers de réfugiés sans défense
incinérés par l’aviation de guerre
américaine. Les Japonais ne sont pas
près d’oublier l’holocauste nucléaire
d’Hiroshima. Le monde arabe souffre
encore aujourd’hui de l’holocauste
rampant en Irak et en Palestine. Les
Russes et les Européens orientaux
ressentent la honte infligée à Belgrade.
Les Latino-américains pensent aux
invasions américaines de Panama et de
l’île de la Grenade, au Nicaragua
dévasté et à la Colombiedéfoliée. Les
Asiatiques comptent leurs morts, soit
dans la guerre du Vietnam, dans les
bombardements du Cambodge, dans les
opérations militaires au Laos, par
millions. Même un présentateur télé
russe pro-américain n’a pas pu
s’empêcher de dire : « Désormais, les
Américains commencent à comprendre ce
qu’on a pu ressentir, à Bagdad et à
Belgrade… » (« Orient Express »,
http://www.israelshamir.net/French/orient.shtml,
passage repris en 2008 dans « Noam
Chomsky et les Croisés du 11 septembre »
http://www.alterinfo.net/Noam-Chomsky-et-les-Croises-du-11-septembre_a22088.html
)
Les Justiciers
auraient pu être n’importe quel
emprunteur dont la maison aurait été
confisquée par les banques, n’importe
quel employé qui aurait été « dégraissé
» de son boulot, déclaré sous-homme (Untermench)
par le nouveau Peuple des Seigneurs (Herrenvolk).
Ils eussent pu être des Russes, des
Malais, des Mexicains, des Indonésiens,
des Pakistanais, des Congolais, des
Brésiliens, des Vietnamiens, les
économies de tous ceux-ci ayant été
détruites par Wall Street et le
Pentagone. Ils auraient pu être
n’importe qui, et ils sont tout le
monde. Leur identité n’a strictement
aucune importance, car leur message est
autrement plus important que leur
personnalité, et leur message peut être
lu, à haute et intelligible voix, dans
le choix des cibles. »
Donc, Mr Trump ne
croyait pas si bien dire, au final : des
millions de musulmans, parmi beaucoup
d’autres, ont été heureux ce jour-là.
Sûrement pas tous les musulmans, mais il
n’a jamais dit « tous », non, jamais.
Si j’étais un
musulman américain avisé, quelqu’un qui
veut le bien de l’islam, je me
demanderais lequel des candidats ferait
le moins de tort à l’Oumma, au monde
musulman. Devrais-je soutenir la dame
qui jouissait sordidement de suivre à la
télé la mise à mort atroce d’un
dirigeant musulman, Mouammar Kadhafi ?
Devrais-je soutenir la dame qui sera la
star cette semaine, à la conférence de
l’AIPAC, pour jurer allégeance à Israël
pour les quatre prochaines années ? Ou,
pour la même raison, devrais-je
applaudir Ted Cruz qui prend ses ordres
à Tel Aviv ? Ne devrais-je pas plutôt
soutenir celui que Cruz a accusé d’être
un ennemi d’Israël ?
C’était certes une
accusation déplacée : Trump a des
gendres juifs ; n’empêche que personne
n’a encore accusé les autres candidats
de jamais avoir enfreint le bon plaisir
d’Israël.
A mon sens, les
fautes habituellement imputées à Mr.
Trump sont franchement mineures. Un
bouffon, un ego démesuré, un fanatique ?
Mais on n’en a rien à faire. La
prochaine fois, vous direz qu’il n’a pas
une hygiène corporelle parfaite, et
qu’il pète en public. Des griefs fondés
à la rigueur si vous l’invitiez à passer
le week end chez vous.
Nous sommes devant
deux grosses affaires d’envergure bien
différente. Et les ongles sales ou les
vents sonores compteront pour du beurre,
car le nouveau président US devra faire
face à d’autres enjeux.
Le Pentagone
demande trois petits milliards de
dollars pour créer une nouvelle
génération d’armes nucléaires. Ils
appellent ça une « mise à jour », mais
les experts disent qu’il s’agit de
nouveaux systèmes, plus mortifères, plus
précis et plus susceptibles d’être mis
en œuvre. C’est un nouvel Hiroshima qui
se prépare, et cette fois, ce
seront peut-être les Russes qui seront
écorchés vifs dans la fournaise
nucléaire, tandis que les Américains
seront incinérés par la nouvelle
génération de missiles russes. Le
président Obama, Dieu le bénisse, n’a
pas encore donné son feu vert pour cela.
Nous, je veux dire le monde entier, pas
les écrivaillons fragiles, devons
absolument arrêter ce programme sans
attendre. Donald Trump est capable
d’arrêter ce délire. S’il peut le faire,
qu’il me traite de youpin à longueur de
journée, si ça lui chante.
L’administration US
a lancé trois programmes :
TISA, TPP, TTIP; s’ils les
mènent à bien, ils asserviront
l’humanité et en finiront avec les
vestiges de démocratie dont nous
jouissons encore. Les démocrates d’Obama
poussent dans ce sens. C’est encore plus
dangereux que les armes nucléaires de
nouvelle génération. Il faut arrêter
cette monstruosité. Trump est capable de
le faire, parce que ces programmes sont
l’aboutissement de ce contre quoi il
s’est battu jusqu’à aujourd’hui.
Voilà deux sujets
bien plus urgents et importants que tout
ce qu’on peut reprocher à Trump. Il
n’aime pas les femmes obèses ? Et
alors ? Elles se passeront bien de
l’adoration de Mr. Trump, s’il
arrive à bloquer ces desseins atroces.
Trump président ne
devrait pas poursuivre les manœuvres en
Corée du sud, ce préambule explosif
à une guerre nucléaire. Des dizaines de
milliers de soldats US s’entraînent en
Corée du sud pour abattre le président
de la Corée du nord. Je ne plaisante pas
et je n’exagère pas. C’est le but
explicite des manœuvres, elles rendent
fou le président de la Corée du nord.
Après le film produit par Sony et
influencé par le Département d’Etat
mettant en scène son assassinat, cela
n’a rien d’étonnant. Si Trump oublie la
Corée du nord, c’est bien lui, le
président que je préfère.
Il a dit qu’il
n’allait pas déchirer l’accord avec
l’Iran, ni attaquer jusqu’au dernier
Syrien pour dégager Bashar al Assad.
S’il le fait, qu’il dégoise tant qu’il
voudra sur les grosses, même dans les
termes les plus choquans. Ma tante, qui
est médecin, disait qu’il n’y avait pas
de grosses dans les camps de
concentration, ce qui prouve que ça
n’est pas une maladie. Pour le mauvais
goût, on peut difficilement faire mieux.
Je ne suis pas sûr
qu’il y ait d’argument assez puissant
pour contrer les milliards de dollars
que les super riches investissent dans
leurs pubs contre Trump. Mais
réfléchissez : ces super riches ne sont
pas réputés pour leur bienveillance.
S’ils sont prêts à claquer autant de
fric pour arrêter Trump, peut-être
est-ce une raison pour le soutenir ?
Traduction : Maria
Poumier
Israël Shamir peut
être joint sur adam@israelshamir.net
Original publié sur
The Unz Review
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