PANAMZA
Qui peut encore digérer le dîner du Crif
?
Hicham Hamza
Photo:
D.R.
Lundi 7 mars 2016
Addition
salée pour la cohésion nationale. Ce
lundi soir, le Conseil représentatif des
institutions juives de France (Crif)
organise son dîner annuel en présence de
membres éminents de la classe politique.
Une opportunité pour les convives de
goûter les sermons du président Roger
Cukierman et de savourer la finesse de
ses injonctions.
The-place-to-be : plus
attrayant qu’une soirée caritative pour
célébrités désœuvrées, le
rendez-vous annuel du dîner du Crif est
devenu, pour sa 31ème édition, un moment
incontournable de la vie publique.
Ce lundi 7 mars, ils seront environ 700
invités, triés sur le volet, à
vouloir en être et y paraître. Acteurs
politiques, décideurs économiques,
personnalités religieuses et sociétaires
du spectacle se rendront à cette
cérémonie d’un genre particulier : celle
durant laquelle, selon ses
porte-paroles, la communauté juive
délivre son message à la République. Et
peu importe aux convives si de plus en
plus de citoyens juifs contestent au
Crif, comme bon nombre de leurs
compatriotes musulmans à l’endroit du
Cfcm, toute légitimité pour les
représenter. Les jeux de rôles sont
d’ores et déjà attribués.
La dérive droitière, entamée en
2010 avec l’arrivée de
Gilles-William Goldnadel et ses
comparses au comité directeur du Crif,
s'est confirmée avec le retour à la présidence de
l'ex-banquier d'affaires Roger Cukierman,
âgé aujourd'hui de 79 ans. Ces dernières
années ont d'ailleurs vu apparaître une
forme inédite de repli identitaire au
sein de la communauté juive,
particulièrement parmi les plus jeunes. Des
intellectuels vont même jusqu’à dénoncer
cette crispation idéologique : ainsi, le
journaliste Jean Daniel n’avait pas
hésité à comparer les responsables du
Crif à des "représentants français
du Likoud" tandis
que
Rony Brauman et
Elizabeth Lévy, pour une fois
d’accord, qualifiaient cette institution
de "seconde ambassade d’Israël". Même
le philosophe
Alain Finkielkraut, surnommé jadis
"le porte-flingue d’Ariel
Sharon", semble parfois, lui
aussi, excédé quand il en vient à juger
comme étant "légèrement grotesque" le
rendez-vous annuel du Crif, ce "tribunal dînatoire" qui
s’apparente à une "convocation du
gouvernement". Des jugements sévères
de la part de personnalités de
l’intérieur de la communauté, d’ordinaire
plus accommodantes avec leurs
représentants autoproclamés.
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