Actualité
Israël leur a donné 10 minutes pour
sauver ce
qu’ils pouvaient. Puis 74
Palestiniens, dont 41 enfants,
se sont
retrouvés sans-abri
Amira Hass
Mardi 17 novembre 2020
Onze familles
palestiniennes se sont retrouvées sans
abri dans la vallée du Jourdain. Trouver
un abri pour les moutons et les agneaux
nouveau-nés était la tâche la plus
urgente, car ces animaux sont leur seul
moyen de subsistance. Source :
Ha’aretz, le 11 novembre 2020
Traduction :
lecridespeuples.fr
Mardi dernier,
l’administration civile a donné aux
familles vivant dans le hameau
palestinien de Khirbet Humsa, dans le
nord de la vallée du Jourdain, à peine
10 minutes pour retirer tout ce qu’ils
pouvaient sauver de leurs biens dans les
tentes qui leur servent de logis. Fatma
Awawda, 23 ans, tenait sa fille d’un an,
Larin, dans ses bras. Elle était
paralysée à la vue des jeeps militaires
et des employés de l’administration en
gilets fluorescents qui en sortaient,
paralysée par les bulldozers, par les
soldats, par tous les cris.
Résidents de
Khirbet Humsa après sa destruction,
novembre 2020
Mais elle s’est
ressaisie rapidement pour pouvoir sortir
autant de choses que possible de la
tente qui était sa maison. Que prendre
en premier ? La bouteille de gaz ? Le
berceau ? Des vêtements et couvertures ?
Les matelas ? Le poêle ? Les jouets en
plastique qui sont arrivés dans un
emballage « CARE » (aide humanitaire) ?
Les oignons et les pommes de terre ? Le
riz ? Elle a posé Larin sur le siège
arrière de la Subaru antique de la
famille. Elle y sera au chaud et en
sécurité, et j’aurai les mains libres,
se dit-elle.
Larin n’a pas été
la seule à être mise dans la voiture
pour y être abritée : quatre agneaux
nouveau-nés, encore trop jeunes pour
être envoyés paître dans les collines
avec les moutons plus âgés, ont été
placés dans le coffre. Au bout d’un
moment, l’un des employés de
l’administration civile a sorti la
petite fille emmitouflée de la voiture
et l’a remise à l’un des adultes. Les
clés étaient dans la voiture. Un soldat
est monté et a mis le contact,
commençant à conduire la voiture. Les
agneaux étaient toujours dans le coffre.
« Les hommes ont
commencé à courir après la voiture,
criant au soldat de s’arrêter », a
déclaré vendredi Awawda, trois jours
après l’exécution de l’ordre de
démolition qui a laissé 11 familles –74
personnes, dont 41 enfants– sans abri.
Les agneaux ont été sauvés. La voiture a
été confisquée.
Résidents de
Khirbet Humsa dont les maisons ont été
démolies, novembre 2020
Un autre bambin,
âgé de deux ans, a fait pipi dans son
pantalon en regardant le bulldozer
percuter les constructions de fortune
qui étaient sa maison. Les gémissements
des enfants ont été étouffés par le
bruit de la démolition. Mohammed, deux
ans et demi, a crié à un soldat :
«Va-t’en, va-t’en ! » Sa mère, Ansar Abu
al-Kabash, a déclaré que sa cousine
était née la veille. « Elle n’a pas
encore de prénom. Pendant la démolition,
j’ai fait asseoir ma belle-sœur sur le
côté, le bébé dans ses bras. Ils sont
allés ailleurs maintenant. Ils ne
pouvaient pas rester ici, dans la tente
qu’ils nous ont donnée, au milieu de
tous les débris. »
Vendredi, son fils
Ismaïl, âgé de 4 ans, ne s’était pas
encore calmé et n’arrêtait pas de
pleurer. Mohammed était toujours
furieux. Leur sœur Hadil, âgée de 3
mois, couchée dans un petit berceau dans
la tente d’urgence que la famille a
reçue, a semblé comprendre leur malheur
et a ajouté ses propres cris de colère.
En termes de nombre
de sans-abri, il s’agit de la plus
grande opération de démolition menée par
l’administration civile depuis 2010. En
termes de nombre de structures démolies,
il s’agit de l’opération de démolition
la plus étendue depuis 2016, abattant 11
tentes et cabanes utilisées comme
quartiers d’habitation, 29 tentes et
abris pour moutons (environ 1000
animaux), plus 10 bergeries, trois
hangars, neuf tentes utilisées comme
cuisines, 10 toilettes portables, deux
panneaux solaires, 23 réservoirs d’eau,
ainsi que des étables et des auges pour
les moutons.
De l’eau précieuse
a été renversée. Des sacs d’aliments
pour animaux ont été déchiquetés. Deux
tracteurs et la Subaru d’Awawda ont été
confisqués. La déclaration du
Coordonnateur des activités
gouvernementales dans les territoires
(COGAT) concernant « une action
coercitive contre sept tentes et huit
enclos pour animaux » ne décrivait en
rien l’ampleur réelle des destructions.
Certains habitants
de Humsa disent que le convoi de jeeps
militaires est apparu à 10 heures du
matin. D’autres pensent que c’était à 11
heures. Certains se souviennent avoir vu
six bulldozers et pelleteuses, d’autres
pensent qu’il y en avait quatre.
Certains disent que la force de
démolition a fait son premier arrêt au
deuxième des quatre campements de tentes
qui composaient cette communauté de
bergers. Les campements sont répartis
d’ouest en est, avec environ deux
kilomètres les séparant. D’autres disent
que la force est arrivée au troisième
campement et s’est ensuite séparée.
Mais tous se
souviennent que la première chose que
les hommes de la communauté ont faite a
été de courir vers tous les corrals et
de mener les moutons vers les collines
environnantes. « Le problème est que
c’est la saison de l’agnelage », a
déclaré Abu al-Kabash. «
Qu’arrivera-t-il aux agneaux ? Où
allons-nous les garder ? Comment
allons-nous nous en occuper ? »
Des enfants
jouent dans les ruines de Khirbet Humsa
après sa démolition, novembre 2020
Certains moutons
ont ensuite mis bas dans les collines.
Trouver un abri pour les moutons et les
agneaux nouveau-nés était la tâche la
plus urgente, car les moyens de
subsistance des familles dépendent des
moutons. C’est leur mode de vie, qu’ils
n’abandonneront pas.
Voir
Néga-sionisme : la guerre totale
d’Israël contre l’histoire palestinienne
La recherche de
zones de pâturage est ce qui a amené les
familles Awawda et Abu al-Kabash,
originaires du village de Samu’a dans le
sud des collines d’Hébron, au nord de la
vallée du Jourdain. La migration vers le
nord a commencé dans les années 1970 et
1980, lorsque les pâturages près de
Samu’a et Yatta ont commencé à se
rétrécir et que l’accès est devenu plus
difficile en raison des interdictions
militaires et de la construction
israélienne. En 1948, les familles de
Samu’a ont déjà perdu une grande partie
de leur terre qui restait du côté
israélien de la Ligne verte. En raison
de la croissance démographique, de
l’approvisionnement limité en eau
qu’Israël autorise aux Palestiniens, de
la sécheresse croissante et de
l’expansion des colonies, davantage
d’éleveurs de moutons de Samu’a se sont
déplacés vers le nord vers la région de
Jénine et de Tubas.
Ismaïl et
Muhammad Abu Al-Kabbash à Khirbet Humsa,
novembre 2020
Les familles Abu
al-Kabash et Awawda louent des terres
appartenant à des habitants de Tamun et
Tubas. Sur ces terres, ils ont érigé
leurs habitations de fortune, et ils
cultivent aussi du blé et de l’orge pour
leurs propres besoins.
Mais Israël a
déclaré la zone «
zone de tir » et c’est l’explication
fournie par le COGAT pour justifier la
démolition massive, comme c’est le cas
pour nombre des
récentes démolitions et restrictions
imposées par Israël à la construction et
aux déplacements palestiniens en
Cisjordanie. La seule zone de tir 903,
où se trouve Humsa, a pris 80 000 dunams
(environ 80 kilomètres carrés) de terres
aux Palestiniens du nord de la
Cisjordanie. Depuis 2018, les habitants
de Humsa ont dû évacuer au moins 20 fois
en raison d’exercices militaires dans la
région. « Israël ne nous a laissé aucune
terre à cultiver. Sans nos moutons, nous
deviendrons des mendiants », déclare
Yusef Abu Awad. « Israël ne veut pas que
nous ayons notre propre source de
revenus. Il veut que nous travaillions
pour les Israéliens. »
Voir
Hébron : plus de 19 familles
palestiniennes vivent dans des grottes
pour échapper à l’oppression d’Israël
La démolition de
chaque campement a duré environ une
demi-heure. Aïcha Abu al-Kabash, 60 ans,
la belle-mère d’Ansar, qui a du mal à
marcher, dit que les employés de
l’administration civile ont enlevé une
partie du contenu de ses tentes dans le
deuxième campement. Tout ce qu’ils n’ont
pas enlevé a été démoli ou enterré sous
les restes des tentes. Umm Walid
al-Kabash, du troisième campement, dit
en larmes : « Si seulement ils nous
avaient informés à l’avance. Nous
aurions pu sauver plus de choses. Le
taboun pour la cuisson du pain a
également été détruit. »
Des proches des
habitants de Humsa qui vivent non loin
de là ont essayé de venir en voiture
voir ce qui se passait dès qu’ils ont
été informés, mais ont été arrêtés par
des soldats. Leurs enfants ont traversé
les collines à pied pour se rapprocher
de la scène. Les photographes ont
également été arrêtés par des soldats,
et il n’y a donc pas d’images de la
démolition elle-même. Seul subsiste le
témoignage muet de l’amas des débris :
monticules de tiges et de toile
froissée, feuilles de contreplaqué,
filets, débris de meubles simples,
tissus, parcs pour bébé (depuis mardi
ceux-ci ont été mis à l’intérieur des
tentes de secours qui ont été données à
la communauté), grains de maïs
(nourriture pour les moutons) éparpillés
ça et là sur le sol. Les familles se
sont empressées d’emballer leur
nourriture et certains de leurs effets
personnels dans d’épaisses feuilles de
plastique pour les protéger de la pluie
qui a commencé à tomber cette nuit-là.
Après que les
scènes de la démolition de grande
ampleur aient été rendues publiques,
vendredi, une importante délégation de
l’UE est venue visiter le site. Les
ministères des Affaires étrangères de
Belgique, de la Grande-Bretagne,
d’Irlande et du Luxembourg ont émis des
condamnations et ont déclaré que la
démolition était en violation du droit
international. Mais Ansar a déclaré : «
Quoi de nouveau là-dedans ? Ils ne
savent pas ce qu’est Israël ? Ils ne
savent pas qu’Israël veut se débarrasser
de nous et amener plus de colons ici à
la place ? »
Pour rappel,
voir la
prophétie apocalyptique de Nasrallah,
qui mettra bientôt un point final à plus
de 70 ans de massacres, de rapines et de
terreur :
J’appelle
aujourd’hui en premier lieu tous les
Juifs hormis les sionistes à détacher
leurs considérations des calculs
sionistes qui se conduisent eux-mêmes à
la destruction finale. Et j’appelle tous
les Juifs qui sont venus en Palestine
occupée, croyant aux promesses qu’ils
trouveraient la terre du lait et du
miel, à la quitter. Je les appelle à
quitter la Palestine et à retourner dans
les pays d’où ils sont venus afin de ne
pas être un combustible dans toute
guerre à laquelle les mènerait le
gouvernement de Netanyahou l’abruti.Car si
Netanyahou lance une guerre dans cette
région, il n’y aura peut-être plus le
temps pour eux de quitter la Palestine,
et il n’y aura pour eux aucun endroit
sûr en Palestine occupée.
Le gouvernement
ennemi doit savoir que les temps ont
changé, tout comme il doit savoir que
ceux avec qui il espère une alliance
seront un fardeau pour lui, car ils ont
besoin qu’on les défende eux-mêmes (et
ne peuvent aider personne).
Et l’ampleur des
massacres commis par Israël contre le
peuple palestinien et les peuples de la
région son partenariat avec Daech et sa
complicité ouverte dans le projet de
partition de la région à travers son
soutien ouvert et empressé à la
sécession du Kurdistan, tout cela fera
que les peuples de la région rendront un
verdict capital à leur encontre.
Pour soutenir
ce travail censuré en
permanence et ne manquer aucune
publication, faites
un don, partagez cet article et
abonnez-vous à la Newsletter.
Vous pouvez aussi nous suivre sur Facebook et Twitter.
Le sommaire d'Amira Hass
Les dernières mises à jour
|