Tunisie
Jawhar Ben MʼBarek
raconte son «samedi noir» à Souk El-Ahad
Zohra Abid
Mardi 24 avril 2012
«Ils m’ont mis à
genoux, tiré par les cheveux en arrière
et demandé à leurs camarades d’apporter
un couteau pour m’égorger», raconte
Jawhar Ben M’Barek, sa mésaventure,
vendredi, à Douz. Et le lendemain,
encore un «samedi noir» à Souk El Ahad.
Par Zohra Abid
Le leader de Doutourna, qui
participait à une rencontre, lundi à El
Téatro, a raconté aux présents le film
d’horreur, comme il l’a vécu, vendredi à
Douz et le lendemain à Souk El Ahad,
lorsque des Salafistes ont perturbé la
réunion à laquelle il participait et
l’ont violemment agressé.
«Ils étaient 40 ou 50 jeunes
déchaînés. Ils étaient en majorité des
gamins, 15, 16, 18 ou tout au plus 20
ans. Ils sont venus tous en ma direction
en criant Allahou Akbar. Tous étaient
munis d’armes blanches, de matraques en
fer, ou en bois. J’ai été sauvé par les
membres de l’Union des Sans emploi, qui
ont évacué un passage pour que nous
puissions prendre nos voitures, dont
toutes les vitres ont été brisées. Parmi
nos sauveurs, il y a eu des blessés, je
m’excuse pour ce qui leur est arrivé et
je les remercie», raconte encore M. Ben
M’Barek. Et d’ajouter, la voix cassée,
que son agression a été programmée et
qu’il n’ y a pas le moindre doute sur
l’existence d’un plan et d’une
coordination entre certaines parties
pour le tuer.
M. Ben M’Barek qui traînait sa jambe
(blessée par le jet des chaises, les
coups de bâtons et de pieds) n’est resté
qu’une trentaine de minutes dans la
conférence organisée en guise de soutien
et de condamnation par ses collègues
universitaires, des défenseurs des
droits de l’Homme, des avocats, des
représentants de l’opposition, d’autres
de la société civile, de l’Union des
Sans emploi, de l’Union générale
tunisienne du travail (Ugtt), du
Syndicat national des journalistes
tunisiens (Snjt), d’Amnesty
international…
Hachemi
Ben Fraj, Jawhar Ben M'Barek et Zohra
Triki témoignent.
La parole a été ensuite cédée aux
témoins mais aussi à quelques militants
de Doustourna comme Zohra Triki, qui a
reçu des coups à la tête et un peu
partout sur le corps. Et elle n’était
pas la seule à en recevoir. D’autres
femmes, par pudeur (et orgueil), ont
préféré ne pas donner leur témoignage.
Dans la salle d’El Téatro, les
présents (l’intelligentsia de la
Tunisie, la crème de la crème du pays)
ne sont pas restés insensibles. Surtout
après avoir entendu les témoignages des
uns et des autres. Chacun a passé en
revue une partie de ce qu’il a vécu à
Kebili.
Dans son intervention, Hachemi Ben
Fraj a déclaré qu’il n’existe qu’une
seule solution pour arrêter les
violences. «Ces groupes fanatiques
doivent être arrêtés par les autorités
sinon ils vont poursuivre
progressivement les agressions. Le
gouvernement est appelé à protéger les
personnes et les leaders politiques.
Mais, il semble que ce même gouvernement
est incapable de le faire», a-t-il
déploré.
Vers la fin, les universitaires, les
avocats, les représentants de la société
civile, les politiques (dont plusieurs
constituants), indignés, ont pris des
recommandations et décidé de faire le
nécessaire. Pour que le gouvernement
agisse au plus tôt avant qu’il ne soit
trop tard.
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Publié le 24 avril 2012 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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