RIA Novosti
La Syrie et la Russie choisissent la stabilité au Proche-Orient
Vladimir Akhmedov *
Photo RIA Novosti
Mercredi 30 mai 2007
Les résultats du récent référendum sur la réélection du
président syrien Bachar al-Assad pour un nouveau mandat de sept
ans étaient faciles à prévoir. Les Syriens ont évidemment dit
"oui" à M. Assad. Force est de reconnaître que cette
prévisibilité, tout comme la forme même de reconduite du président
pour un nouveau mandat et le référendum lui-même qui ne propose
pas d'alternative suscitent bien des doutes au regard de la démocratie
occidentale. Quoi qu'il en soit, on doit rendre justice aux
autorités syriennes qui n'ont pas proposé de jeux politiques à
la population du pays, mais ont fait preuve d'honnêteté. Il n'en
reste pas moins qu'elles ont choisi pour cela un moyen plutôt
original, en ne portant au référendum qu'une seule candidature.
Garantir la stabilité du pays est devenu l'objectif essentiel
pour les autorités syriennes et ce, d'autant plus que le
processus d'organisation de partis politiques amorcé par le président
Assad n'est pas encore achevé. Aussi aucun des partis politiques
en Syrie, à l'exception du parti au pouvoir, n'est-il tout
simplement à même de proposer un candidat alternatif crédible.
La "stabilité" est aujourd'hui un mot clé pour le
Proche-Orient. Sur toile de fond d'innombrables conflits, dans des
conditions où des Etats clés de la région, tels que l'Egypte,
l'Arabie saoudite et la Libye, se trouvent, dirait-on, au seuil
d'une relève du pouvoir, la stabilité de la situation politique
intérieure en Syrie apparaît souvent comme très importante. Or,
il ne s'agit pas seulement des Syriens eux-mêmes et de leurs
voisins régionaux pour qui la stabilité constitue la base de la
poursuite des processus de modernisation économique et de libéralisation
politique. La stabilité au Proche-Orient en général et en Syrie
en particulier répond aussi pleinement aux intérêts de la
Russie.
En effet, la Russie n'a aucun intérêt à ce que cette région
plonge dans le chaos, car Moscou se rend très bien compte qu'une
telle évolution de la situation ne manquerait pas de se répercuter
sur ses propres intérêts économiques et politiques au
Proche-Orient, mais ne tarderait pas non plus à avoir des
retentissements en Asie Centrale et Transcaucasie qui constituent
une sphère prioritaire pour les activités politiques extérieures
russes. De ce point de vue, les résultats du référendum syrien
peuvent bien servir les intérêts politiques de la Russie sur la
scène internationale, que ce soit en Syrie ou dans l'ensemble de
la région.
La coopération russo-syrienne relancée lors de la première
visite à Moscou de Bachar al-Assad en janvier 2005 doit évidemment
se développer sans marquer un seul temps d'arrêt. Et le maintien
de la stabilité en Syrie ne fera que favoriser le renforcement
des rapports bilatéraux tous azimuts.
Tout d'abord, Damas est intéressé au soutien politique et
militaire de Moscou.
En parlant politique, on pourrait évoquer à titre d'exemple
la discussion au sein du Conseil de sécurité de l'Organisation
des Nations unies sur le projet de résolution sur la mise en
place d'un tribunal international devant juger les assassins de
l'ex-premier ministre libanais Rafic Hariri. Tout porte à croire
que l'adoption du projet de résolution selon un scénario élaboré
par les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne et faisant
notamment appel à l'article 7 de la Charte de l'ONU pour créer
un tribunal international de l'ONU du type de celui qui avait été
mis en place autrefois pour la Yougoslavie et le Rwanda pourrait
provoquer une guerre civile au Liban et l'enlisement dans cette
guerre de la Syrie, d'Israël et d'autres pays de la région. Un
tel scénario est extrêmement indésirable, et la Russie pourrait
évidemment atténuer le texte de la résolution en question afin
d'éviter l'instrumentalisation du tribunal pour faire pression
sur les pays de la région.
Pour ce qui est de l'aspect militaire de la coopération
russo-syrienne, la Syrie est sans conteste intéressée à
exporter des armements défensifs russes.
Mais on ne doit pas se concentrer uniquement sur des questions
politiques et militaires. Les contacts bilatéraux doivent être
multiformes, et la coopération économique et commerciale y tient
une place de choix. Bien que ces deux dernières années, cette
coopération ait connu un développement suffisamment dynamique,
elle n'a pas encore permis aux hommes d'affaires russes et syriens
de s'implanter comme il se doit sur les marchés des deux pays.
La Russie et la Syrie ont des projets conjoints très
prometteurs dans le domaine du tourisme et le secteur énergétique,
y compris dans le nucléaire civil. N'oublions pas non plus les
projets de coopération russo-syrienne dans l'élargissement du
port de Lattaquié et le perfectionnement du réseau de chemins de
fer en Syrie. Le développement des rapports de Damas avec les régions
de la Russie, et avant tout avec les régions russes du sud, est
aussi très important.
L'adoption attendue en Syrie de lois devant octroyer à des
compagnies locales un régime plus avantageux pour pouvoir
employer des spécialistes étrangers offrirait des possibilités
supplémentaires pour l'élargissement des contacts russo-syriens.
Nul n'ignore effectivement que la Russie ne manque pas de spécialistes
de différentes industries qui maîtrisent l'arabe et possèdent
une riche expérience de travail dans des pays arabes.
Dans ce contexte, le développement des rapports bilatéraux
dans les domaines de l'information, de la culture et de la science
est en train de revêtir une importance toute particulière.
L'organisation des échanges scientifiques à une échelle plus
large pourrait incontestablement servir de base pour de gros
projets conjoints de nature économique et humanitaire.
Tout cela entend des activités plus intenses des associations
d'amitié des deux pays. Des premiers pas se font d'ores et déjà
en ce sens, mais essentiellement du côté syrien. Il ne nous
reste qu'à espérer qu'au cours du second mandat présidentiel de
Bachar al-Assad, la situation en Syrie ne fera pas que rester
stable, mais connaîtra un développement dynamique dans la bonne
direction, ce qui permettra aux relations russo-syriennes de
progresser de plus en plus et sans aucun obstacle.
* Vladimir Akhmedov, de l'Institut d'études orientales
de l'Académie des Sciences de Russie, pour RIA Novosti
Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la
stricte responsabilité de l'auteur.
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