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El Watan
Des pressions sur Israël ne sont plus
exclues
T. Hocine
Mercredi 3 juin 2009
Le président américain Barack Obama multiple les déclarations
donnant une certaine lisibilité à ce qui pourrait devenir la
politique proche-orientale de son pays. Lui-même le laisse
entendre en affichant sa nette volonté de revoir certaines
situations que l’on croyait immuables. Ainsi, en est-il du
conflit du proche-orient, mais en aucun cas de la relation
Etats-Unis-Israël.
A propos du premier, le président américain déclare vouloir
« remettre sérieusement sur les rails » les négociations sur sa
résolution. Plus précisément, et alors que le monde se montre
réservé sur de tels propos, il affirmera, dans une interview à
la radio-télévision britannique BBC diffusée hier que les
Etats-Unis « vont être capables de remettre sérieusement les
négociations sur les rails ». Une réponse en quelque sorte aux
sceptiques et à tous ceux qui demandent à juger sur pièces,
alors que lui et son administration ont réaffirmé leur
détermination à ne plus temporiser. La raison en est bien
simple, et c’est encore lui qui l’avance : « C’est non seulement
dans l’intérêt des Palestiniens d’avoir un Etat, mais c’est
également dans l’intérêt des Israéliens que la situation se
stabilise... Et c’est dans l’intérêt des Etats-Unis que nous
ayons deux Etats vivant côte à côte en paix et en sécurité ». Il
entend se donner les moyens pour faire valoir ce faisceau
d’intérêts dont il ne doute plus de la convergence, puisqu’il
faut parler ainsi. Et là, il ne cache pas la nécessité d’une
certaine fermeté envers Israël sur la création d’un Etat
palestinien et la colonisation dans les Territoires. De tels
propos, il les a tenus à la radio publique américaine NPR.
M. Obama a justifié cette fermeté par le fait que la tendance
générale actuelle dans la région était « profondément négative »
pour les intérêts israéliens et américains. « Les Etats-Unis ont
une relation particulière avec Israël, cela ne fait aucun
doute », a dit M. Obama à la radio NPR qui l’interrogeait sur le
sentiment éprouvé par beaucoup au Proche-Orient d’un parti-pris
quasiment aveugle des Etats-Unis en faveur d’Israël. Il a évoqué
les appels régulièrement proférés dans la région à
l’annihilation d’Israël, appels d’organisations radicales ou de
dirigeants comme le président iranien Mahmoud Ahmadinejad.
« Quand on a dit cela, ce qui est également vrai, c’est qu’être
amis, cela signifie aussi être honnêtes. Et je pense qu’il y a
eu des moments où nous n’avons pas été aussi honnêtes que nous
le devrions sur le fait que la direction actuelle, la
trajectoire actuelle dans la région, est profondément négative,
non seulement pour les intérêts israéliens mais aussi pour les
intérêts américains », a-t-il déclaré. « Je ne pense pas que
nous devions modifier le soutien ferme que les Etats-Unis
apportent à Israël », a précisé M. Obama qui a pris l’avion hier
pour son premier séjour de président au Proche-Orient. Mais
« nous devons maintenir une foi constante dans la possibilité de
négociations menant à la paix. Et, selon moi, cela nécessite une
solution à deux Etats. Cela nécessite que de chaque côté,
israélien et palestinien, on honore ses obligations », a-t-il
indiqué. « J’ai dit très clairement aux Israéliens, en privé et
en public, qu’un gel de la colonisation, croissance naturelle
incluse, fait partie de ces obligations », a-t-il dit,
signifiant par là qu’il rejette l’argument de l’accroissement
démographique pour justifier une extension des colonies dans les
Territoires palestiniens.
Au moment où Israël, en guise de réponse, lui demande de
respecter les engagements pris par son prédécesseur, George W.
Bush, Obama donne la nette impression de s’en démarquer,
affichant même une certaine rupture par rapport à la politique
proche-orientale de ces dernières années. Pour la première fois
et depuis bien longtemps, un président américain a clairement
fait valoir les intérêts nationaux des Etats-Unis, et qu’il ne
permettait pas qu’ils soient compromis, même par un proche
allié. Ce qui implique l’étape suivante, et visiblement, il
n’hésite pas à dévoiler à ce qui tient lieu de stratégie de
persuasion. M. Obama a plaidé pour la patience. « La diplomatie,
c’est toujours un travail de longue haleine. Les résultats ne
viennent jamais rapidement », a-t-il répondu, indiquant
appliquer le même principe à l’Iran. « Ce que j’ai dit, c’est
qu’il est dans les intérêts du monde que l’Iran mette de côté
ses ambitions en vue de posséder l’arme nucléaire. » Le meilleur
moyen d’y arriver est d’utiliser « la diplomatie directe », a
estimé M. Obama. « Je ne veux pas fixer de calendrier artificiel
mais nous voulons nous assurer que, d’ici à la fin de l’année,
nous pourrons voir évoluer sérieusement un processus permettant
d’aller de l’avant. » Sur un autre plan, et cela constitue une
autre rupture avec la politique suivie par son prédécesseur, il
a averti que les Etats-Unis ne pouvaient pas imposer leurs
valeurs aux autres pays.
« Le danger, je pense, c’est quand les Etats-Unis ou un pays
quelconque pensent que nous pouvons simplement imposer ces
valeurs à un autre pays, qui a une histoire différente et une
culture différente », a-t-il déclaré. Mais « je pense que la
chose que nous pouvons faire avant tout, c’est donner le bon
exemple. C’est pourquoi, fermer Guantanamo, de mon point de vue,
aussi difficile que ce soit, est important », a-t-il ajouté.
Evoquant le discours très attendu qu’il prononcera demain au
Caire, M. Obama a averti qu’un « seul discours ne va pas
résoudre tous les problèmes » mais estimé que son déplacement
dans les pays musulmans représentait « une opportunité pour nous
de faire en sorte que les deux parties s’écoutent un peu plus
et, espérons-le, d’apprendre quelque chose ». Le terrain est
déblayé pour cette intervention qui se veut majeure, car là
aussi, elle intervient pour la première fois. Et parce qu’il
faut que les choses apparaissent, le monde musulman a affiché
ses attentes. La conférence ministérielle de l’OCI (organisation
de la conférence islamique) qui vient de se tenir à Damas, en a
fait l’énumération, même de manière incomplète.
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