La Voix de la Russie
Palestine :
nouveau statut, vieux problèmes
Sergeï Duz
Photo: EPA
Lundi 3 décembre
2012 L’Assemblée générale de l’ONU a
octroyé à la Palestine le statut
d’Etat observateur. Selon Moscou
(qui a voté pour) l’octroi de ce
statut contribuera à la reprise du
dialogue entre les Palestiniens et
les Israéliens. Les opinions des
experts sont cependant partagées.
Les Palestiniens
fêtent une victoire. Pour eux il n’y
a qu’un pas à franchir pour accéder
à un Etat pleinement souverain. Mais
en réalité, le principal obstacle à
la création d’un Etat de Palestine,
ce sont les Palestiniens eux-mêmes.
En fait, l’Autorité palestinienne
représente seulement l’un de leurs
deux territoires : la Cisjordanie où
les rênes du pouvoir sont tenues par
le Fatah créé en 1957 par Yasser
Arafat. D’ailleurs, ce dernier
insistait toujours sur le caractère
laïc d’un futur Etat palestinien.
Le Hamas de la bande
de Gaza est l’adversaire du Fatah.
Ce mouvement se fixe pour objectif
de créer un khalifat musulman et de
chasser les sionistes de la
Palestine.
Le Fatah et le Hamas
poursuivent donc des buts
différents. Les partisans du Hamas
sont plutôt nationalistes
d’aspiration laïque. Les partisans
du Fatah sont des internationalistes
islamistes pour qui la création d’un
Etat palestinien importe peu. Il
s’agit là d’une divergence d’ordre
idéologique.
Un autre point
important, c’est que la Palestine
vit grâce aux aides financières
israéliennes et américaines. Mais
les Palestiniens n’ont pas eu peur
de possibles conséquences négatives
de leurs actes qui irritent
certainement Washington et Tel-Aviv.
Opinion de Fedor Loukianov,
rédacteur en chef de la revue
La
Russie dans la politique globale
:
«
Ramallah est pleinement consciente
de ce que la situation est en train
de se changer rapidement. Et qu’il
faut essayer d’en profiter d’une
façon ou d’une autre. Parce que,
d’une part, la Palestine se trouve
paradoxalement au cœur de tous les
événements. D’autre part, à dire
vrai les pays arabes n’ont pas
besoin d’elle. La Palestine, c’est
un bon argument dans les
discussions. Mais le destin du
peuple palestinien ne les préoccupe
point. La triste ironie du sort,
c’est que le statut de la Palestine
est valorisé alors que le projet
d’Etat Palestine est mort. En tout
cas, sous la forme qu’il avait il y
a vingt ans lorsqu’il était né et
élaborée – c’est ce qu’on appelle le
processus de paix. La guerre à Gaza
a une fois de plus démontré que,
primo, un Etat ne serait pas créé
là-bas, secundo, Mahmoud Abbas
n’était plus au centre de
l'attention. J’ai comme un
pressentiment que le problème
palestinienne, si on décide de le
résoudre, sera résolu d'une manière
totalement différente et en rapport
avec un Etat autre que celui dont
parle la Jordanie. Il ne fait aucun
doute que les tensions sont
artificiellement montées : les
salafistes sont à l’œuvre. Le Qatar
aide, les « frères musulmans »
considèrent le pays comme leur
prochain trophée. Mais qu’est-ce que
c'est que la Jordanie ? C’est un
Etat composé à 70 % de Palestiniens.
C’est cela, un triste paradoxe.
D’une part, on continuera à
s’avancer vers la reconnaissance de
cette Palestine qu’on a créée de
toutes pièces sur la pelouse devant
la Maison Blanche (tout en se voyant
remettre le Prix Nobel pour l’avoir
fait). D’autre part, la vraie
Palestine, il semble qu’elle sera
créée ailleurs avec de grands
conflits et des conséquences
imprévisibles ».
La communauté
internationale ne peut pas faire une
croix sur le processus de paix au
Proche-Orient. Car cette région est
une région clé pour la stabilité du
monde entier. Espérons que le
nouveau statut de la Palestine (et
les conséquences que cela implique –
peu prévisibles pour le moment mais
qui n’en deviennent pas moins
graves) vont pousser le monde à y
réfléchir sérieusement.
© 2005-2012 La
Voix de la Russie
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