Opinion
La Corée du Nord
dans l'œil de l'aigle américain
Robert
Bibeau
Mercredi 17 avril
2013
Première victime
de l’«Axe
du bien»
Pour comprendre et
apprécier ce qui se passe à la frontière
des deux Corées, il est indispensable de
replacer ces événements récents dans le
contexte international des douze
dernières années. Deux grandes
puissances s’affrontent l’une sur son
déclin, hargneuse, intransigeante,
vitupérant parce que se sachant en odeur
de fin de règne ; la seconde tempérante,
affable, amène et cherchant le compromis
puisque son ascension inexorable est
inscrite dans les lois de l’économie
politique. La
Chine est déjà la première
puissance économique mondiale, les
États-Unis sont déjà le canard
boiteux de l’Occident, l’homme malade de
l’Alliance Atlantique.
Le 7 octobre 2001,
les Vandales américains, dirigés par
L’État-major de l’OTAN, entrent en
Afghanistan petit pays féodal parmi les
plus pauvres de la planète (45 ans
d’espérance de vie – 585 $ de revenu
annuel moyen), n’ayant jamais attaqué ni
occupé aucun pays voisin surtout pas les
États-Unis d’Amérique hors de portée de
leurs kalachnikovs et de leurs caravanes
de chameliers.
Le malheur pour ce pays du Moyen-âge,
c’est d’avoir été le théâtre d’une
guerre néocoloniale mettant aux prises
le social-impérialisme soviétique sur sa
fin et l’impérialisme américain
–
et son allié Al-Qaïda
–
à l’amorce de leurs déclins.
Cette campagne
militaire cruelle a permis d’imposer le
gouvernement fantoche d’Hamid Karzai par
la
Force
internationale d'assistance et de
sécurité (FIAS)
sous commandement de l'OTAN[].
Le parlement de Karzai n'a que peu de
légitimité et ne contrôle que le secteur
de Kaboul[].
En
[][]
2013, ce sont environ 130 000 soldats
étrangers dont 90 000 américains qui
occupent ce pays strangulé et
[]saccagé.
Ces chiffres n'incluent pas les nombreux
mercenaires des sociétés privées (2 000
hommes de la firme britannique Saladin,
ceux
de
Blackwater - Académi). En janvier 2009,
le think-tank
International
Council on Security and Development
a estimé dans un rapport que la
résistance était active et en contrôle
d’environ 72 % du territoire afghan.
[]
Le site
National
priorities
estime à plus de 600 milliards de
dollars le coût de cette occupation par
l’armée américaine (1).
Deuxième victime
de l’«Axe
du bien»
En janvier 2003,
le récidiviste petit homme pose
fièrement devant le porte avion de la US
Navy dans son «Full Metal Jacket»
galonné trop grand pour lui. De la
hauteur qui était la sienne et à 15 000
Km du front irakien où les femmes, les
enfants et les vieillards mouraient par
milliers, la première armée du monde
moderne venait de remporter son deuxième
coup fourré; le deuxième pays de l’«Axe
du mal»
et ses puits de pétrole avaient été mis
à sa merci. Dix ans plus tard le
successeur de W. Bush – deuxième de
dynastie – devrait déchanter et avouer
que ni l’un ni l’autre de ces pays
n’étaient soumis, mais qu’à cela ne
tienne l’héroïne et le pétrole
circulaient à plein via le Golfe
Persique (2).
Le petit d’homme
s’enflamma et, après avoir sacrifié des
milliers de femmes – dont les
Femen
ne parlent pas cela n’étant pas dans
leur mandat – il proclama que sa soif de
vengeance n’était pas étanchée et que «l’Axe
du mal
devait continuer d’expier afin de
l’apaiser.
L’Afghanistan,
l’Irak, la Libye, la Syrie, la Corée du
Nord et l’Iran,
chacun leur tour, devrait être détruit
pour que lui et
ses amis
puissent se réjouir». Deux démons, amis
du dragon chinois, venaient d’être
sacrifiés et le prochain scellerait
bientôt sa destinée.
Troisième victime
de l’«Axe
du bien»
Le prétexte pour
agresser la petite Libye (6,6 millions
d’habitants, 12 000$ par habitant, 86%
urbain, 70 ans d’espérance de vie) fut
imaginé au moment où le printemps arabe
faisait rage. En février 2011, une bande
de royalistes déchus, actifs à Benghazi
sous les auspices des services secrets
américains, britanniques et français se
soulevèrent contre le Guide de la
Jamahiriya – le colonel Kadhafi.
S’ensuivit un bombardement en règle de
l’OTAN avec l’aval du
Conseil de
sécurité
et le silence du reste de l’humanité
(3).
Après des mois
d’agression armée illégale contre un
pays souverain, le peuple libyen,
exsangue, se résigna devant les
mercenaires recrutés en Afrique du Nord,
chez les berbères et dans les pays
arabes où les jeunes désœuvrés sont
pressés de s’enrôler pour n’importe
quelle équipée afin de gagner de quoi
manger.
Le troisième
pigeon de «
l’Axe du bien
» venait de tomber dans l’escarcelle
occidentale peu de temps après que le
colonel ait été reçu à l’Élysée dans un
ultime effort pour l’arracher à son
nouvel allié, qui, inconscient du
danger, laissait ses affidés se faire
avaler sans broncher.
« Le mois dernier (mars 2013), une
explosion a détruit dans la banlieue de
Tripoli, un édifice et mausolée
religieux Soufi du 15e siècle... Le
second anniversaire de l’intervention de
l’OTAN aux côtés des rebelles libyens
contre Mouammar Kadhafi n’a quasiment
pas été mentionné par les gouvernements
et les médias étrangers qui
s’inquiétaient tant pour la sécurité et
les droits humains du peuple libyen en
2011. Cela ne devrait pas nous
surprendre parce que la Libye actuelle
est de toute évidence en train de se
désagréger et que les Libyens sont
devenus les proies des miliciens qui
affirmaient autrefois vouloir les
protéger » (4).
Quatrième victime
de l’«Axe
du bien»
La proie suivante
de l’«
Axe du bien
américain
» allait être
difficile à
faire tomber, car cette fois la Russie –
puissance impérialiste en reconstruction
avec la bénédiction de son compagnon –
n’allait pas sacrifier son allié où se
trouve implantée depuis des années une
base militaire en Méditerranée. Quand
les impérialismes
étatsunien,
français et britanniques agressifs et
affamés se tournèrent vers la Syrie
(quatrième démon de l’«
Axe du mal
») pour y fomenter un coup d’État, l’axe
russo-chinois s’interposa et mit un holà
à la complicité du
Conseil de
sécurité
onusien.
Le 15 mars 2011,
le montage bien rodé, établi après un
suivi attentif des révoltes spontanées
survenues dans les pays arabes
limitrophes, une manifestation de
l’opposition largement médiatisée en
Occident donna le coup d’envoi à
l’ingérence extérieure dans les affaires
intérieures de la Syrie pour soutenir un
mouvement de déstabilisation du
gouvernement de Bachar Al-Assad (5).
Cette fois,
aucun aval
du
Conseil de
sécurité
pour accomplir le carnage que
la «
Communauté
internationale » des sept pays
impérialistes en déclin (États-Unis,
France, Allemagne, Royaume-Uni, Canada,
Pays-Bas, Belgique) adoubés par la
Turquie intégriste, l’émirat de Doha
salafiste et l’Arabie Wahhabite, tous
larbins, appelés en service commandé
accompagné de leurs djihadistes pour
porter le message de liberté de la
Charia islamiste ; un jour amis des
impérialistes, le lendemain repris de
justice et aujourd’hui complices des
sévices assénés au peuple syrien; c’est
selon l’inspiration du moment et les
besoins de la politique étrangère
américaine (6).
Ces multiples agressions et occupations
des puissances déclinantes visent
strictement à renverser les dirigeants
en place et à y substituer partout des
gouvernements fantoches à la solde de
l’Occident, puis, à dévier le flot du
pétrole en direction des pays amis sous
contrôle étatsunien, ou simplement à
récupérer un marché étranger peu importe
les sacrifices imposés aux populations «
libérées » de l’influence du dragon.
Au tour du cinquième de cordée de l’«Axe
du mal»
Et voici venu le
tour du cinquième de cordée –
juste avant
l’Iran
que l’impérialisme américain croit
pouvoir mettre au ban de sa communauté.
Les premiers complots ayant réussi,
pourquoi pas celui-ci ? En effet, la
paix et le progrès ne sont jamais le but
visé par ces échauffourées supposées
apporter la «liberté et de la
démocratie» des riches.
« Malgré une mise
en garde de son allié chinois, la
Corée du Nord
a procédé, mardi 12 février, à son
troisième essai nucléaire, après ceux de
2006 et 2009,
"avec succès"
et
"pour
protéger la sécurité nationale et la
souveraineté du pays"
(souligné par nous NDLR),
a affirmé l'agence officielle KCNA. Peu
après la condamnation par le Conseil de
sécurité des Nations unies, le 22
janvier, du tir début décembre d''une
fusée Unha-3 porteuse d''un satellite
(météorologique NDLR), considéré comme
une violation des résolutions
antérieures de l'ONU, la RPDC avait
annoncé
"renforcer
sa capacité militaire, y compris sa
force de dissuasion nucléaire"
(souligné par nous NDLR)».
« Le Conseil de
sécurité devait, de nouveau, se réunir
en urgence mardi, Pékin, Moscou et
Washington s'étant concertés depuis
quelques jours. Le secrétaire général de
l'ONU, Ban Ki-moon a condamné un essai
nucléaire
"profondément déstabilisateur".
"C'est une violation claire et grave des
résolutions du Conseil de sécurité",
a déclaré son porte-parole.
Le président
américain Barack Obama a appelé à une
réaction internationale
"rapide et crédible"
» (7).
Qui agresse qui dans l’affaire coréenne
?
Participant
effrontément à la psychose de guerre la
presse internationale, propriété des
milliardaires des médias à la solde,
s’est aussitôt émue. Le 13 avril 2013 le
quotidien Le Monde titre : «
Pékin et
Washington s'allient pour dénucléariser
la Corée du Nord
». En réalité, le chapeau de l’article
annonce plutôt que « Les chefs des
diplomaties chinoise et américaine, le
conseiller d'Etat Yang Jiechi et le
secrétaire d'Etat John Kerry ont déclaré
samedi 13 avril vouloir œuvrer ensemble
à la
dénucléarisation
de l’ensemble de la péninsule coréenne
(…) » la Chine attestant par là que les
tensions sont dues à l’occupation
américaine nucléarisée au Sud de la
péninsule coréenne (8).
Voilà qui est très
différent.
Dans le
compte rendu de la rencontre il est
admis par le représentant américain que
c’est la dénucléarisation de toute la
péninsule coréenne qui doit être
envisagée et non pas de simplement
désarmer la Corée du Nord afin de la
placer à la merci de l’impérialisme
américain qui a déjà envahi et détruit
le pays en 1950-1953 (presque 2 millions
de morts et menace d’attaques
nucléaires). Comprenez l’effroi des
Nord-Coréens de voir resurgir l’assassin
sous le masque du pacificateur aux dents
de loup. D’autant que les chinois, pas
plus que les coréens, ne stockent aucune
de leurs armes nucléaires à proximité du
territoire étatsunien, à l’inverse des
américains (9).
Un État menacé a-t-il le droit de se
défendre ?
Le principe en
cause dans l’affaire coréenne n’est pas
de savoir si le troisième de lignée de
la dynastie du Parti de Kim Il Sung est
un bon bougre. C’est là une question
intérieure qui ne concerne que le peuple
de la Corée du Nord. Les français sont
administrés par Hollande et ils s’en
accommodent ; les
canadiens
subissent Harper et c’est leur triste
problème…idem au Royaume-Uni et en
Égypte, etc.
La véritable
question est de savoir si un petit pays
a le droit de se protéger et de s’armer,
jusqu’à et y compris d’armes de
dissuasion nucléaire, s’il est pointé du
doigt par une grande puissance nucléaire
surarmée – arsenal de 3 500 ogives
nucléaires aux mains des États-Unis,
seul pays ayant utilisé ces armes de
destruction massive pour exterminer des
populations civiles non nucléarisées
(Hiroshima
et Nagasaki) – ? À l’évidence, c’est le
droit et le devoir d’un pays souverain
de s’armer pour se protéger de ces
visées.
Ne soyez donc pas
surpris si demain l’Iran se questionne à
propos de ces armes de dissuasion
massive,
voyant se dérouler ces menaces à
l’encontre d’un petit pays nucléarisé
qui tient tête aux expansionnistes
américains qui d’une main interdisent
aux autres de se nucléariser et de
l’autre tentent de déstabiliser leur
gouvernement, fomentant des invasions,
cherchant à diriger leur politique
intérieure et extérieure et accroissant
le nombre d’ogives nucléaires à leurs
frontières.
D’autant que
l’Iran sait déjà qu’elle est le sixième
larron de l’«
Axe du mal
» désigné à la vindicte d’un criminel de
guerre au lourd passé de récidiviste
comme l’histoire nous l’enseigne depuis
douze ans.
VISITEZ LE SITE
http://WWW.ROBERTBIBEAU.CA/PALESTINE.HTML
(1)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d'Afghanistan_(depuis_2001)
(2)
http://www.france-irak-actualite.com/article-l-avenir-de-la-libye-s-annonce-sombre-et-les-medias-s-interessent-a-autre-chose-117087636.html
(3)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_civile_libyenne
(4)
http://www.france-irak-actualite.com/article-l-avenir-de-la-libye-s-annonce-sombre-et-les-medias-s-interessent-a-autre-chose-117087636.html
(5)
Pourquoi Al-Qaïda
dévoile son implication dans la guerre
en Syrie.
http://observers.france24.com/fr/content/20130411-pourquoi-al-qaeda-choisi-devoiler-son-implication-guerre-syrie
(6)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_civile_syrienne
(7)
http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2013/02/12/condamnations-unanimes-apres-le-troisieme-essai-nucleaire-nord-coreen_1830735_3216.html
(8)
http://www.lemonde.fr/japon/article/2013/04/12/pyongyang-menace-le-japon-de-represailles-nucleaires_3158945_1492975.html
(9)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Cor%C3%A9e
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