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Opinion
Libye: Kadhafi
fragilisé par la défection des deux derniers membres de groupe
des « officiers libres » libyen
René Naba
Mardi 22 février 2011 La défection des deux derniers membres
du groupe des «officiers libres» libyens, artisan du
renversement de la Monarchie, en 1969, fragilise
considérablement le pouvoir du Colonel Mouammar al-Kadhafi, déjà
en butte à la rébellion d’une fraction des provinces libyennes,
dans l’épreuve de force qui oppose le clan Kadhafi à la
population depuis près d’une semaine.
Le colonel Abdel Moneïm Al Houni, représentant de la Libye
auprès de la Ligue arabe au Caire, a annoncé dimanche 20 février
son ralliement à «la révolution populaire» et sa détermination à
porter le combat à Tripoli, le centre névralgique du pays, dans
une démarche de défiance contre les abus de son ancien compagnon
d’armes.
M. Al Houni a été l’un des mobilisateurs de la grande
manifestation qui se déroule depuis lundi dans la capitale
libyenne. Dans des déclarations à la presse arabe, le dissident
a annoncé la mise sous résidence surveillée d’un autre compagnon
d’armes de Kadhafi, le général Abou Bakr Jaber Younes,
inamovible commandant en chef de l’armée depuis trente ans. Deux
pilotes qui se sont refugiés à Malte ont par ailleurs accusé le
colonel Kadhafi d’avoir passé par les armes des pilotes
récalcitrants à bombarder la population.
Sur fond de démission collective du corps diplomatique
libyen, notamment des représentants libyens en poste aux
Etats-Unis, aux nations Unies, en Indonésie et en Chine, la
disparition d’un autre proche collaborateur de Kadhafi pose la
question de la capacité de survie du régime.
M. Abdel Rahman Chalgham, ambassadeur de Libye aux Nations
Unies, est en effet porté disparu depuis dimanche, sans qu’il
ait été possible de savoir s’il s’agit d’une désertion de poste,
d’un enlèvement par les hommes du clan Kadhafi ou plus
simplement d’un ralliement à la contestation populaire.
M. Chalgham, ancien ministre des Affaires étrangères et
ancien ambassadeur à Rome, a été l’un des artisans du
rapprochement entre la Libye et les pays occidentaux, le
négociateur de l’accord accordant cinq milliards de dollars à la
Libye par l’Union Européenne en vue de lutter conte
l’immigration clandestine africaine à destination de l’Europe.
Dans cette épreuve de force avec ses opposants, Le Colonel
Kadhafi est handicapé par le bouleversement de la géo stratégie
régionale, avec la chite de ses deux alliés naturels, Hosni
Mouabark (Egypte) et Zine El Abidine Ben ALI et l’absence d’un
clair et ferme soutien d’un quelconque pays arabes.
Au terme d’une semaine de contestation, ci-joint un
bref descriptif de l’état des lieux de la configuration tribale
et de la lutte de pouvoir en Libye:
La zone rebelle:
Benghazi, la grande ville portuaire de l’Est du pays, zone la
plus proche de l’Egypte, d’où le coup d’Etat des officiers
libres a été annoncée le 1 er septembre 1969, chef lieu du grand
résistant libyen à l’occupation italienne, a la première fait
sécession. Sa’adi, le 4eme fils de Kadhafi, ancien footballeur
en Italie, aurait chargé de la mater.
La région orientale du pays, (Benghazi et Al-Bayda) n’a jamais
été soumise à Kadhafi. L’Emirat de Barka, qui s’étend de la
frontière égyptienne au Golfe de Syrte est demeuré fidèle aux
traditions de la dynastie senoussie, particulièrement Al Bayda,
La Blanche, ville des 250 000 habitants, au cœur du Djebel El
Akhdar, La Montagne Verte, est à égale distance à vol d’oiseau
(800 km) de Tripoli et d’Alexandrie, mais elle est plus proche
par la route de la métropole égyptienne que de la capitale
libyenne. Son nom était Al Zaouiya Al Bayda, La Confrérie
blanche, du nom du siège de la confrérie senoussie, dont le
siège domine la ville. Elle mérite aussi son nom par les
abondantes chutes de neige qui la recouvrent en hiver. Vendredi
18 février 2011, Al Bayda aurait été libérée du régime
kadhafiste, et la population, appuyée par la police locale, y
aurait pris le pouvoir, au terme d’affrontements qui auraient
fait près de 108 tués du côté des contestataires.
La zone loyaliste :
Le centre du pays, autour de Syrte abritent les deux grandes
tribus qui se sont partagés le pouvoir sous l’ère post
monarchique: Al Kazazafa (la tribu de Kadhafi) et Al Moukarfa
(la tribu d’origine d’un des membres du groupe des officiers
libres, artisan du coup d’état, le commandant Al Moukreif. Objet
de l’attention de Kadhafi et cible d’une expédition punitive
l’aviation américaine, dans la décennie 1980, pour châtier
Kadhafi de son soutien au terrorisme, la zone centrale devrait
constituer l’un des points fort du régime.
Bien que généralement loyaliste, la configuration tribale de
la zone qui comporte douze tribus parait partagée entre
loyalistes et contestataires. Les tribus Wazen, Kaba, al Badr,
tiji, selon des informations recueillies de source arabe en
relation avec l’opposition libyenne, ont gagné le camp de la
contestation et ne demeurent en lice en faveur de Kadhafi que sa
propre tribu Al kazazafa et son allié al Moukarfa.
La région capitale qui va de Tripoli à Ghadamès, dans la zone
frontalière méridionale. Elle abrite les tribus de Zentane et
Ourfala, ralliées à la révolution populaire. Une 3eme tribu
Mayaniya est demeurée fidèle à Kadhafi.
La zone du Fezzan, elle, a, dès le début des troubles,
tranché en faveur de la contestation. Zone frontalière du Mali,
du Tchad, du Niger, le trafic à destination de ces pays a été
fermé. Abritant la vile de Sebha, base arrière de la guerre du
Tchad, dans la décennie 1980, la zone a beaucoup souffert des
hostilités et des variations d’humeur du colonel Kadhafi dans sa
politique à l’égard de la main d’œuvre africaine.
Au vu de ce tableau, la bataille décisive devrait se porter
sur le contrôle de l‘agglomération de Tripoli, qui abrite la
caserne d’al Aziziya, la résidence officielle du Colonel
Mouammar Kadhafi.
Un tournant pourrait être pris dans ce conflit avec la grève
de l‘industrie pétrolière, poumon du régime, où le boycott des
produits pétroliers par l’Europe.
La Libye exporte 80% de son pétrole vers l’Europe, qui a
considérablement participé au renflouement politique du
dictateur avec sa réception officielle notamment en France par
le président Nicolas Sarkozy, en décembre 2007.
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Publié le 22 février 2011 avec l'aimable autorisation de René Naba.
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