Tendances de l'Orient - La Syrie
Maigre récolte du
Ramadan pour l'opposition
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Le président al-Assad
effectue la prière de la fête d'al-Fitr
dans la mosquée Hafez al-Assad à Damas
Photo: Sana
Mercredi 31 août 2011
Les Etats-Unis et leurs alliés européens
et arabes avaient placé tous leurs
espoirs dans le mois du Ramadan en
pensant que la contestation contre le
pouvoir syrien culminerait et serait
tellement étendue que le gouvernement
serait débordé de toutes parts. Mais
entre les espoirs et la réalité sur le
terrain, les calculs étaient bien
différents. Malgré les moyens financiers
et médiatiques gigantesques mis en œuvre
et la recrudescence des actions armées
des extrémistes, le nombre de
manifestants et les points où ont lieu
les manifestations ont sensiblement
baissé. Le dernier vendredi du Ramadan,
le 26 aout, les médias engagés contre la
Syrie (Al-Jazeera, Al-Arabiya, BBC
etc…) ont été atteints d’une véritable
hystérie. Toute la journée, ils ont
prétendu que d’immenses manifestations
se déroulaient à l’intérieur de Damas,
notamment sur les places des Abbassides,
des Omeyyades et de Kfar Soussa.
Toutefois, les caméras d’autres
télévisions, présentes dans ces
endroits, n’ont pas montré l’ombre d’un
manifestant. La vie s’y déroulait
normalement. Après l’échec de la
bataille du Ramadan, les ennemis de la
Syrie, déçus, sont passés à une autre
tactique: les pressions politiques et
diplomatiques. Le président français
Nicolas Sarkozy a annoncé, à la suite de
concertations avec la chancelière
allemande Angela Merkel, début aout,
qu'il faudrait accentuer les pressions
sur Bachar el-Assad via la Ligue arabe
et la Turquie. Les Arabes et les Turcs
ont immédiatement obtempéré. En l’espace
de quelques jours, les pressions
diplomatiques se sont considérablement
accrues. Le roi saoudien Abdallah ben
Abdel Aziz a tenu un discours bizarre,
appelant aux réformes en Syrie, lui qui
interdit aux femmes de conduire, et qui
a envoyé ses forces envahir le Bahreïn
voisin. C'est lui, aussi, qui accorde un
asile doré au président tunisien déchu
Zin el-Abidine ben Ali.
Il semble que l'Occident, affaibli
économiquement et usé militairement en
Afghanistan et en Irak, ait décidé de
jouer ses toutes dernières cartes. Il a
mobilisé le Conseil de sécurité, la
Ligue arabe et son valet turc. A New
York, l’offensive occidentale a été
stoppée par une manœuvre russe
inattendue avec un projet de résolution
proposé par surprise par le délégué de
la Russie. Ce projet ne comporte pas de
sanctions contre la Syrie et ses
dirigeants et demande à l’opposition
syrienne de dialoguer avec le pouvoir
pour mener à terme les réformes mises
sur les rails par le président Assad.
Moscou dépêche à Damas ce lundi le
vice-ministre des Affaires étrangères,
Mikhaïl Bogdanov, pour des concertations
avec les dirigeants syriens.
La Ligue arabe, qui ne s’est même pas
réunie lorsque l’aviation israélienne a
tué et blessé des dizaines de personnes
à Gaza la semaine dernière, s’est
mobilisée à la demande de l’Occident
pour débattre de la question syrienne.
La Ligue a publié un communiqué appelant
les autorités syriennes à «respecter les
aspirations légitimes du peuple syrien à
des réformes politiques et sociales.»
Le gouvernement syrien a jugé le langage
du communiqué «inacceptable et biaisé».
Et le secrétaire général de la Ligue,
Nabil El-Arabi, n’avait toujours pas
obtenu, dimanche soir, le feu vert pour
visiter Damas. La Syrie estime que le
communiqué de la Ligue constitue «une
violation claire des principes de la
charte de la Ligue et des fondements de
l'action arabe conjointe.» Elle agit
«comme si ce communiqué n'a pas été
publié.»
La Turquie n’était pas en reste. Le
président turc a affirmé que «la
situation en Syrie a désormais atteint
un tel niveau que tout est trop infime
et trop tardif.» «Nous n'avons plus
confiance», a déclaré Abdullah Gül.
Ignorant tout ce verbiage, le président
syrien a signé dimanche une loi sur les
médias, dans le cadre des réformes qu'il
a annoncées. La nouvelle législation
libéralise le secteur des médias et
inaugure une nouvelle ère dans le pays.
Selon Elias Mrad, président de l'Union
des journalistes syriens, elle supprime
les peines de prison auparavant prévues
pour les journalistes reconnus coupables
d'avoir attaqué «le prestige et la
dignité de l'Etat, l'unité nationale et
le moral de l'armée, l'économie et la
monnaie nationale». «Il s'agit d'une loi
plus moderne qui donne la possibilité
aux médias et aux journalistes syriens
de jouer un rôle plus global pour
présenter la vérité.»
L’intensification des pressions
occidentales sur la Syrie à travers les
Arabes et les Turcs est intervenue après
l’élimination par les autorités
syriennes de la majorité des groupes
armés. Les Arabes du Golfe,
l'Occident et les Turcs comptaient sur
ces groupes pour déstabiliser le
pouvoir.
Sur le plan militaire, il est peu
probable que la Turquie mène une action
militaire contre la Syrie dans un proche
avenir. Le plan d'incursion limitée aux
alentours de Qamechli n’est pas
définitivement écarté, mais ses
conséquences demeurent incertaines,
surtout que l'armée syrienne se trouve
maintenant à la frontière avec la
Turquie, et y a déployé des batteries de
missiles sol-air et des unités d’élite.
Furieux de l’échec de la bataille du
Ramadan, Recep Tayyeb Erdogan pourrait
être tenté de lancer une aventure
guerrière. Mais reste à avoir s’il est
capable de la terminer.
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