Tendances de
l'Orient - La Syrie
Fermeté et
réformes, face aux ingérences étrangères
New
Orient News
Bachar al-Assad
- Photo: Sana
Lundi 11 juillet 2011
Face aux ingérences étrangères,
notamment occidentales, qui prennent des
formes de plus en plus outrageuses, la
Syrie œuvre sur deux fronts: lutter
contre les groupes extrémistes armés qui
sèment la terreur dans certaines villes.
Et aller de l’avant dans le processus de
démocratisation et de modernisation du
pays. Sur le premier plan, le ministère
des Affaires étrangères a convoqué,
dimanche, les ambassadeurs des
Etats-Unis et de France à Damas, Robert
Ford et Eric Chevallier, pour exprimer
«sa forte objection» pour leur visite,
jeudi et vendredi dans la ville de Hama,
sans autorisation préalable, ce qui
constitue une violation flagrante de la
convention de Vienne. Ils sont allés
dans cette ville, un bastion des frères
musulmans, pour inciter les gens à
manifester contre le pouvoir central.
Sur le second plan, la rencontre du
dialogue national s’est ouverte
dimanche, pour examiner le mécanisme des
réformes décidées par le président
Bachar el-Assad.
Ces réformes comprennent, entre autres,
la révision de la Constitution, y
compris l’article 8 instaurant le
monopole du pouvoir pour le parti Baas,
en prévision de la rédaction d’une
nouvelle loi fondamentale; l’adoption
d’une loi sur le multipartisme, assurant
un climat propice à des élections
législatives basées sur le pluralisme
politique; l’élaboration d’une nouvelle
loi sur les médias, garantissant la
liberté d’expression selon les normes
internationalement reconnues; la
préparation d’une nouvelle loi
électorale moderne, offrant la meilleure
représentation populaire; la rédaction
d’une nouvelle loi sur les collectivités
locales, accordant plus de pouvoir et
d’autonomie aux conseils municipaux et
aux gouverneurs des provinces. Autant de
principes que le vice-président syrien,
Farouk Chareh, a réaffirmé dans son
allocution inaugurale (Voir des extraits
du discours).
Une centaine de personnalités
indépendantes et proches du régime, ou
opposantes ont pris part à cette
réunion. Parmi les opposants qui étaient
présents figure le célèbre intellectuel
Al-Tayyeb Tizini. D’autres, comme Michel
Kilo, Aref Dalila, Luay Hussein et Fayez
Sarah, ont décliné l’invitation,
refusant tout dialogue avant le retrait
de l’armée des villes.
Mais leur exigence
parait irréaliste à un moment où des
mouvements islamistes intégristes,
composés de courants au sein des Frères
musulmans et de groupes takfiristes
d’obédience salafiste et wahhabite,
exacerbent les dissensions
confessionnelles et alimentent les
haines sectaires, à travers un discours
venu du Moyen-âge, véhiculé par des
médias audiovisuels au financement
occulte. Tel est notamment le cas du
cheikh salafiste Adnane al-Arhour, à
travers sa chaine de télévision
satellitaire al-Wissal, basée en Arabie
saoudite. Ces mouvements rejettent le
principe même du dialogue et semblent
vouloir plonger la Syrie dans une guerre
civile interreligieuse. Pour cela, ils
n’ont pas hésité à recourir à la
violence armée contre les forces de
sécurité, mais aussi contre les
manifestants pacifiques, dans le but de
faire couler le sang afin d’instituer un
cercle vicieux.
Pendant des semaines,
les médias occidentaux ont complètement
occulté l’apparition de groupes armés,
bien que 400 militaires aient été tués
et 1300 autres blessés depuis le début
des troubles, le 15 mars. Il a fallu que
l’AFP publie des images
d’insurgés armés, non loin de la
frontière syro-turque, et que l’agence
de presse américaine UPI rapporte
des nouvelles sur des attaques contre
les forces de sécurité, pour que
l’opinion publique commence à réaliser
que l’image qu’elle recevait sur les
événements de Syrie était partiale et
partielle. Le plus éloquent reste,
cependant, le reportage publié par le
Sunday Times, le 18 mai, sur la
région de Maarrat el-Nahman, où son
reporter a vu de ses propres yeux les
groupes armés en pleine activité pendant
les manifestations pacifiques.
Cette opposition
violente mène une intense campagne
politique et médiatique contre le régime
syrien dans les capitales occidentales,
et plaide pour une intervention
militaire de l’Otan en Syrie. C’était en
substance l’objectif des opposants
syriens réunis à St-Germain, à Paris.
Cette attitude irresponsable ignore le
fait que toute guerre contre la Syrie
risquerait de déborder et de provoquer
un embrasement généralisé de la
situation au Proche-Orient, dont les
conséquences seraient incalculables.
De plus, le démembrement
de l’Etat syrien, comme cela s’est
produit en Irak à cause de l’invasion
américaine, offrira aux groupes
intégristes affiliés à Al-Qaïda, une
nouvelle «Terre de Jihad», aux
frontières de l’Europe. Le terrorisme
islamique aura une chance inespérée pour
se régénérer, en présentant une
éventuelle attaque de l’Otan contre la
Syrie comme une Croisade des temps
modernes contre «Dar el-Islam», la terre
de l’Islam.
L’affaiblissement du
pouvoir central en Syrie et l’émergence
d’une mouvance islamiste radicale et
active constitue un danger direct pour
les deux millions de chrétiens syriens.
Conscient de cette réalité indiscutable,
le Vatican a réagi avec beaucoup de
prudence à l’égard des événements en
Syrie. Le pape et d’autres prélats de
l’Eglise romaine ont exprimé à plusieurs
reprises leur profonde inquiétude. Dans
une homélie prononcée le 16 mai, le pape
Benoît XVI a dit: «Ma pensée va à la
Syrie, où il est urgent de rétablir une
coexistence basée sur la concorde et
l’unité. Je demande à Dieu qu’il n’y ait
pas de nouvelle effusion de sang dans
cette Patrie des grandes religions et
des grandes civilisations». Benoît XVI a
souhaité le retour à la paix intérieure
en Syrie où les chrétiens sont une
minorité bien intégrée. C’est l’une des
plus anciennes communautés chrétiennes
du Proche et du Moyen-Orient.
De son côté, le
patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a
affirmé que le projet du nouveau
Moyen-Orient vise à diviser le monde
arabe en entités confessionnelles et
sectaires. Lors d’une conférence
prononcée au Vatican, fin juin, le
prélat a exprimé sa crainte au cas où
des «régimes radicaux arrivaient au
pouvoir dans les pays de la région».
Pour sa part, le père
Paul Karam, directeur des Œuvres
pontificales missionnaires au Liban, a
déclaré que les minorités chrétiennes de
Syrie courent un grave risque «si le
régime de Bachar el-Assad venait à
tomber. En effet, on pourrait voir se
répéter ce qui s’est passé en Irak après
la chute de Saddam Hussein». Pour le
père Karam, au vu de la croissance du
fondamentalisme sunnite et du fanatisme,
si le cadre politique devait
radicalement changer, il est possible
que les chrétiens deviennent une cible.
Il est donc urgent de poser la question
de l’avenir des communautés chrétiennes
en Syrie et dans les pays qui vivent le
«Printemps arabe».
Au vu de toutes ces
réalités, il est étonnant que des pays
européens continuent d’avoir une
attitude irrationnelle, voire
suicidaire, à l’égard de la crise en
Syrie. L’intérêt de l’Europe n’est-il
pas d’avoir à ses frontières une
République démocratique et civile,
stable et pacifiée, plutôt qu’un pays
déchiré par la guerre civile, et devenu
un foyer d’exportation du terrorisme
islamique ?
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour
|