Info Palestine
Irak :
Nadjaf sous le feu
Nermeen Al-Mufti
1er février 2007
« La bataille pour Nadjaf met à mal
l’idée selon laquelle seuls les Sunnites résistent en Irak »,
écrit Nermeen Al-Mufti.
« Un jour ordinaire à Bagdad est une journée
au cours de laquelle près de 40 civils perdent la vie du fait
d’actes de violence, alors que d’autres jours le tribut prélevé
par la mort peut facilement atteindre 100 victimes. Le monde des médias
propose des noms spéciaux pour des jours hors du commun :
« le jour des voitures piégées », « le jour
des corps non-identifiés » , etc.
La semaine dernière le massacre diminua aux
alentours de 40 tués chaque jour. Au cours d’un seul incident,
une école préparatoire pour jeunes filles, dans un quartier à
majorité sunnite de Bagdad, fut prise sous le feu et cinq étudiantes
furent tuées. Au cours d’un autre incident, une école primaire
d’Al-Dawrah fut bombardée et trois élèves ainsi qu’un
enseignant moururent.
Voulant rester anonyme, une enseignante dit à
« Al-Ahram weekly » qu’elle pensait quitter le pays,
au bout de vingt-trois ans de carrière. « J’ai peur de
rejoindre mon école d’Haïfa Street », dit-elle. Selon un
rapport gouvernemental, environ 400 enseignants et 300 élèves
ont été tués l’an passé.
Pendant ce temps, le Parlement a décidé de réduire
les allocations de dépenses dans des domaines variés. Des députés
kurdes ont quitté le Parlement pour protester contre le refus du
gouvernement de réserver un budget pour les peshmergas, ou forces
de sécurité kurdes. Ces députés affirment que les Peshmergas
sont « des forces kurdes agissant sous les ordres du Ministère
de la Défense. » Le Ministre se permet de ne pas partager
cet avis. Et un haut fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur
ajouta que les forces kurdes ne prennent pas exactement leurs
ordres du gouvernement central.Quand le ministre avait décidé
qu’il était temps pour le chef de la police kurde de Kirkouk de
prendre sa retraite - à l’âge légal de 60 ans - celui-ci
refusa, disant qu’il ne prenait ses ordres que des autorités du
nord.
Le Parlement n’a pas discuté du rationnement du
fuel ou de l’annulation de livraisons de pétrole. Mais il a
approuvé le nouveau plan de sécurité. Selon le Premier Ministre
Nouri Al-Maliki, « le plan a pour objectif d’assurer la sécurité
à Bagdad en combattant tous les hors-la-loi, sans considération
de leur affiliation doctrinale ou politique. » Alors que des
milliers de nouveaux soldats américains commencent à arriver à
Bagdad, le Président Bush a téléphoné à Maliki pour lui réaffirmer
son soutien à ce plan de sécurité. Nancy Pelosi, la nouvelle présidente
de la Chambre des Représentants, est arrivée à Bagdad pour une
visite d’une journée ; elle a dit que les Irakiens
devaient prendre en charge eux-mêmes leur propre sécurité. Le rôle
des troupes américaines, ajouta-t-elle, devrait changer, du
combat à l’entraînement et la supervision. Le Congrès a
l’intention de voter contre la nouvelle stratégie du Président
Bush, selon Nancy Pelosi, mais il ne bloquerait pas les moyens
financiers pour de nouvelles troupes.
En attendant, Maliki a dit à plusieurs reprises
qu’il voulait que les troupes irakiennes reçoivent l’entraînement
et l’équipement nécessaires pour prendre la relève des
missions de sécurité en Irak. Le Président des Etats-Unis peut
bien avoir réitéré son « soutien politique » au
gouvernement Maliki, mais le représentant des Nations-Unies en
Irak, Ashraf Qazi, a décrit ce gouvernement comme « sectaire »
et non-représentatif de toutes les couches de la population
irakienne. Qazi, toutefois, pousse au soutien du plan de sécurité
Bush.
Le vice-président irakien Tarek Al-Hashemi, du
« Bloc de la réconciliation (sunnite) », dit que le
plan de sécurité devrait être mis en œuvre « d’une façon
équilibrée ». Adnan Al-Duleimi, président de ce même
« Bloc de la réconciliation », a demandé au
gouvernement irakien de aire cesser le bombardement de zones résidentielles
sunnites.
Le « Bloc Sadr » donna son soutien au
plan et ordonna à l’Armée du Mahdi de ne pas résister aux
forces américaines et irakiennes. Le porte-parole du groupe
parlementaire du « Bloc », Nassar Al-Rubeyi, dit de
son côté que le « Bloc » avait indiqué au
gouvernement les noms des personnes appelées à remplacer les
ministres actuels du « Bloc Sadr » au sein de ce même
gouvernement. « Nous souhaitons contribuer à l’amélioration
des performances du gouvernement et faire la preuve de notre
engagement dans le processus politique. », dit-il.
Jusqu’à présent, le nombre de morts parmi les
soldats américains s’élève à 3079, y compris quatre soldats
qui furent enlevés dans le bâtiment du gouvernement à Kerbala,
dans le sud de l’Irak, et dont les corps furent retrouvés plus
tard. L’enlèvement de ces quatre soldats a été décrit comme
l’œuvre de professionnels, parce que les kidnappeurs portaient
des tenues américaines et parlaient couramment anglais, ce qui
leur permit de passer au travers de multiples checkpoints.
Troisième incident de ce type en deux semaines,
un hélicoptère américain a été abattu à Nadjaf et son équipage
a été tué. Qui a abattu cet appareil, ce ne fut pas immédiatement
clair, mais Asaad Abu Gulal, gouverneur de Nadjaf, émit
l’opinion selon laquelle les coupables étaient des combattants
sunnites, « venus dans la ville pour mener des attaques
durant la fête chiite de l’Ashoura. » Selon des sources
indépendantes, des combattants loyaux à l’ouléma (érudit
religieux) chiite Ahmad Al-Huseini, qui s’oppose au
gouvernement, ont été attaqués par les forces de sécurité
irakiennes à Al-Zarquaa, au nord-est de Nadjaf. De féroces
affrontements se produisirent, au cours desquels l’armée américaine
prêta son concours aérien aux forces irakiennes.
Selon la Sécurité irakienne, près de 300
miliciens d’un groupe dénommé Jund Al-Samaa (« Soldats
du Paradis ») ont été tués lors d’affrontements dans la
partie nord de Nadjaf. Selon le chef de la police de cette ville,
500 combattants de la Jund Al-Samaa avaient établi leurs
positions dans huit fermes d’Al-Zarquaa et commencé à
accumuler d’importants stocks d’armes. Cinq soldats irakiens
ont été tués lors de batailles auxquelles avions, hélicoptères
et tanks américains participèrent également.
Le récent Discours sur l’état
de l’Union, au cours duquel le Président Bush s’engagea
à poursuivre sa guerre contre le terrorisme, n’a eu aucun écho
dans le public, en général. Mais les leaders chiites ont été mécontents
de voir Bush avoir tendance à mettre en parallèle l’Armée du
Mahdi et Al-Quaida. La plupart des (leaders) Sunnites approuvèrent
ce jugement, l’un d’eux mettant en avant le fait que le président
américain « avait raison » pour une fois.
Légende photo : Des chiites
irakiens participent à une procession en commémoration de l’Ashura,
le jour où Hussein, petit-fils du Prophète Mahomet, fut tué par
les forces du Calife sunnite Yazid à Kerbala. Les pèlerins
portent une image de la tête décapitée d’Al-Hussein, sur le
site même de Kerbala qui devient chaque année la destination de
milliers de chiites en deuil.
Al Ahram Weekly - Vous pouvez
consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/830...
Traduction : Michel Zurbach
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