Opinion
La ministre de la
Culture, des équivoques et le reste
Nazim
Rochd
Khalida
Toumi
Samedi 20 avril
2013
Après les boulets rouges de ce qui fait
office de «démocrates», contre sa
«trahison», voilà les islamistes qui se
mettent de la partie contre Khalida
Toumi. Les premiers lui reprochent
d'avoir bradé ses engagements passés, de
s'être vendue au «pouvoir», d'avoir
changé de discours et d'avoir adopté
l'arabo-islamisme pour accéder et se
conformer à son statut de ministre de la
Culture. Même d'être devenue la
«gardienne du temple de Bouteflika» en
s'opposant, selon certains, au mouvement
amazigh. Ils ne se gênent pas, non plus,
dans leur cabale de porter des coups à
son intégrité morale, à propos de sa
gestion des deniers publics. Rien ne lui
est épargné. Ce qui peut être considéré
comme étant de bonne guerre, contre un
reniement très mal accepté. Les
islamistes, eux, qui ont une grille
d'analyse très différenciée, ne croient
pas un mot sur le changement reproché.
Ils lui ressortent les positions
publiées dans son livre «une Algérienne
debout» où le profil qu'elle donne
d'elle-même pourrait se heurter à la
disposition constitutionnelle selon
laquelle «l'Islam est la religion de
l'Etat». Si l'on évacue les dessous
politiques de l'offensive, dans un
contexte propice à ce courant, qui
trouve de plus grâce auprès de
«démocrates», très inspirés par le
«printemps» dit arabe, qui ont
publiquement déclaré que le FIS était
préférable au pouvoir actuel, se posent
certaines questions fondamentales. La
première concerne l’égalité de tous les
Algériens devant l’accès aux postes
supérieurs de l’Etat. La deuxième se
rapporte à la liberté de culte et
d’opinion. Une autre, non des moindres,
porte sur cette propension au
totalitarisme, dominante dans la société
algérienne. N’importe quel quidam est-il
autorisé à s’ériger en censeur, au nom
de la religion, des valeurs ou d’une
tribu virtuelle frileuse à l’excès
vis-à-vis de la différence ? Sans ironie
aucune. Si à la première question il est
répondu non, religieusement parlant, la
ministre devrait faire sa profession de
foi en direct à la télévision, soit pour
entrer en Islam, soit pour confirmer son
appartenance à cette religion. Sinon, il
peut être fait appel à la jurisprudence
puisée dans l’histoire islamique où des
conseillers de souverains ou des
ministres pouvaient être juifs ou
chrétiens et, semble-t-il, athées. Si la
réponse à la deuxième question est non,
il faudra prévoir dans le futur
remaniement de la Constitution de
préciser que la société algérienne est
hiérarchisée selon des critères
religieux et d’opinion. Si à la dernière
question il est répondu oui, il sera
nécessaire d’institutionnaliser la
censure et de lui donner force de droit,
afin de ne pas la laisser à l’arbitraire
de la rue et pour que le candidat à
l’infraction des règles soit averti. Le
tout étant de ne rien laisser à des
interprétations qui peuvent s’avérer
dangereuses, au sein de démembrements de
l’Etat. On a pu en mesurer les effets,
chez des agents de police, à propos du
ramadhan ou dans la récente vérification
de la virginité de jeunes filles. Ceci
fait, l’Algérien ne sera plus confronté
à ces terribles équivoques qui lui
empoisonnent la vie et saura réagir en
connaissance de cause. Le pouvoir aura
gagné de ne pas faire dans la duplicité.
Nazim Rochd
Publié sur
Le Jour d'Algérie
Le dossier
Algérie
Les dernières mises à jour
|