Opinion
Les Occidentaux ne
renoncent pas... Les Russes non plus
Louis
Denghien
Medvedev
et Bachar à Damas (mai 2010) :
apparemment le couple fonctionne
toujours
Lundi 22 août 2011
On sait qu’à défaut de pouvoir
obliger le peuple syrien à changer de
gouvernement, les Américains et leurs
affidés européens et arabes font le
forcing, ces derniers jours, pour
stigmatiser diplomatiquement et surtout
économiquement le pays. Aux exigences de
démission de Bachar émanant des
Euro-américains, aux rappels
d’ambassadeurs arabo-atlantistes
(Saoudiens, Qataris, etc), à la
publication d’un rapport d’une
commission d’enquête de l’ONU concluant
à la possibilité d’une action
internationale contre Damas pour « crime
contre l’humanité », à l’envoi sur
place d’une « mission
humanitaire » mandatée par le « conseil
des droits de l’homme » de l’ONU et
aux menaces de saisine de la Cour pénale
internationale, se sont ajoutées de
nouvelles mesures de rétorsion
économique : à Bruxelles, les
représentants de 27 gouvernements
européens ont décidé de préparer un plan
d’embargo sur les importations de
pétrole syrien en Europe : selon des
sources françaises, 95% des exportations
de pétrole syrien vont vers l’Europe, ce
qui représenterait un tiers des recettes
commerciales du pays ! Et, histoire de
ne pas s’arrêter en si bon chemin, les
mêmes ont voté – à mains levées ? – la
suspension de l’aide de la Banque
européenne d’investissement à Damas.
Très clairement, les
Européens, ou plutôt les Eurocrates
parient sur l’asphyxie économique du
pays, pour relancer l’agitation
politique. C’est une idée, mais
une idée qui n’a jamais marché, ni en
Irak, ni en Yougoslavie, pays qui ont
été « réduits » par une intervention
armée, les boycotts et blocus
économiques s’étant révélés inefficaces,
bien que douloureux pour les
populations.
Il faut aussi rappeler que les
principaux clients de la Syrie à
l’exportation demeurent ses voisins
irakien (30% des exportations en 2009)
et libanais (12,21%) ; les partenaires
européens qui comptent sont l’Allemagne
(8,90% des exportations en 2009) et
l’Italie (4,93%). La capacité de
nuisance de l’Union européenne est donc,
dans ce domaine, réelle mais
relativement limitée.
De tout cela il ressort au moins une
bonne nouvelle, pour les fédéralistes
européens : l’intégration européenne, ça
existe, mais c’est une intégration par
le bas et l’inféodation à l’empire
américain : 27 pays et Obama/Clinton ne
voient qu’une seule tête, bien inclinée
devant eux !
La Russie soutient – plus que
jamais – Bachar et sermonne l’opposition
Décidément fourmillant d’idées pour
domestiquer la Syrie – à défaut d’en
avoir pour sortir leurs peuples de la
crise – les dirigeants européens
repartent à l’attaque au Conseil de
sécurité de l’ONU, espérant obtenir une
résolution imposant des sanctions,
telles qu’embargo sur les armes, gel
d’avoirs syriens et interdictions de
déplacements à l’étranger pour les
dirigeants syriens. Une constance dans
l’effort qui mériterait d’être
« récompensée » !
Las ! La Russie a réaffirmé, vendredi
19 août, par la bouche du porte-parole
du ministre russe des Affaires
étrangères, son soutien au gouvernement
syrien et son opposition à toute
condamnation de celui-ci au Conseil de
sécurité : « Nous ne
partageons pas le point de vue des
Etats-Unis et de l’Union européenne à
l’égard du président Bachar al-Assad »
a déclaré le diplomate russe, qui s’est
même payé le luxe de faire la leçon à
l’opposition syrienne, l’exhortant « à
mener un dialogue avec les autorités et
prendre ses distances avec les
extrémistes ». On ne
saurait mieux dire sur le sujet, et
cette « force tranquille » de la
diplomatie russe en dit long sur sa
juste perception des motivations
américaines et sur son analyse des
rapports de force à l’intérieur de la
Syrie. En d’autres termes,
Moscou, qui se sait appuyé dans cette
affaire par Pékin, Delhi, Brasilia,
Pretoria, Beyrouth et Téhéran, sans
parler d’un certain nombre de capitales
latino-américaines, n’a pas l’intention
de changer son fusil d’épaule et de
lâcher Damas.
Il faut souhaiter à présent que la
Syrie puisse « amortir » les effets d’un
éventuel embargo pétrolier sur son
économie, et donc sa population. Et
espérer qu’à défaut de bon sens et
d’équité, les gouvernements européens
retrouvent le sens bien compris de leurs
intérêts commerciaux et énergétiques,
qui ne coïncident que rarement avec ceux
des Américains. Oui, c’est peut-être ça
la chance des Syriens : l’inconstance et
l’inconsistance chroniques des
diplomatie française et européenne !
Publié le 22 août
2011 avec l'aimable autorisation d'Info
Syrie
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour
|