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CCLJ
La
conférence d'Annapolis
Ilan Greilsammer 
Mahmoud Abbas et Ehoud Olmert
7 novembre 2007
Nous, qui avons tant espéré
la reprise du processus de paix, après les affres de l’intifada
et la victoire du Hamas à Gaza, ne pouvons que nous réjouir à
l’annonce de la Conférence internationale d’Annapolis
(Maryland). Mais nous savons également que le risque d’échec
est malheureusement au moins aussi élevé que l’enjeu.
La question cruciale, la question fondamentale
reste posée : que peut-on attendre de ce sommet dans les
circonstances présentes ? Les trois personnages-clé vont arriver
au sommet, alors que chacun d’eux se trouve dans une situation
d’extrême faiblesse : George W. Bush à cause de l’Irak,
Ehoud Olmert à cause des poursuites judiciaires, et Mahmoud
Abbas, après sa déroute face au Hamas à Gaza.
Si en définitive, le sommet annoncé est repoussé aux calendes
grecques à la dernière minute, cela sera interprété comme un
échec cuisant, et les colons, main dans la main avec le Hamas,
danseront de joie !
Le conflit israélo-palestinien repose, qu’on le veuille ou non,
sur un certain nombre de controverses fondamentales qui doivent
trouver une solution, ou au moins un début de solution, pour
qu’on puisse parler d’une « reprise » du processus de paix.
Un début de solution au problème des réfugiés palestiniens de
1948 et de 1967, un début de solution pour Jérusalem et sa
redivision éventuelle et problématique, les frontières du futur
Etat palestinien, et surtout la question de l’avenir des
colonies juives dans les territoires occupés. Or, on le comprend
bien, toute « avancée » même déclaratoire dans ces différents
domaines suscitera immédiatement la révolte des éléments extrémistes,
tant du côté israélien que palestinien.
Des protagonistes très affaiblis
Au sein de la coalition gouvernementale israélienne, les voix «
de droite » se multiplient, mettant en garde contre tout accord.
Il suffit qu’Ehoud Olmert laisse entendre, comme il le fit dernièrement,
qu’il n’avait peut être pas été « judicieux » de la part
d’Israël d’annexer en 1967 certains quartiers arabes excentrés
de Jérusalem, comme le camp de réfugiés de Shu’afat, pour
qu’aussitôt, les ténors de la droite de son gouvernement se déchaînent
! En outre, il ne fait aucun doute que les courants de droite, au
sein de Kadima, se renforcent actuellement. Le ministre Avigdor
Libermann, chef du parti populiste « Israël Notre Maison »,
membre de la coalition, a averti Condoleezza Rice que si les
Etats-Unis faisaient pression sur Olmert, le gouvernement israélien
tomberait à coup sûr. Même Ehoud Barak, le chef des
Travaillistes, fait la moue : il est hors de question, a-t-il
affirmé, qu’Israël accepte à la Conférence de limiter
l’action de ses services de sécurité dans les villes de
Cisjordanie ! Si Israël avait aujourd’hui à sa tête un homme
comme Rabin ou Sharon, peut-être que celui-ci eût été capable
de conserver sa coalition gouvernementale à peu près intacte.
Mais Ehoud Olmert…
Du côté palestinien, Mahmoud Abbas est encore plus affaibli. Il
ne gouverne que la Cisjordanie, et encore, en partie seulement
puisque le Hamas tient toujours ses positions et que les services
de sécurité israéliens interviennent sans répit dans les
villes palestiniennes pour arrêter les terroristes. Quelle
concession pourrait-il faire à la Conférence sans s’attirer
les foudres de son propre mouvement, le Fatah ? Dès lors, on ne
peut qu’être sceptique quant au résultat du sommet. Et un échec
n’enterrera-t-il pas pour longtemps les chances de voir renaître,
enfin, le processus de paix ?
***
Qu’en pensent les Israéliens ?
D’après les sondages de divers instituts d’enquête israéliens,
51 % des Israéliens approuvent les pourparlers qui ont lieu
actuellement entre Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas, en préparation
de la conférence d’Annapolis, mais seulement 30 % des Israéliens
s’attendent à ce que le sommet suscite une reprise du processus
de paix… Il est vrai que la proportion de ceux qui trouvent la
performance politique d’Olmert satisfaisante reste très faible
: 15 % seulement, contre 74 % qui se disent mécontents.
Ilan Greilsammer
Correspondant israélien
© CCLJ 2005
Publié le 8 novembre 2007 avec l'aimable autorisation du CCLJ
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