Opinion
Quand l'avocat de
Charlie Hebdo expliquait à Tel Aviv que
l'on peut caricaturer les musulmans et
les chrétiens (mais pas les juifs)
Hicham Hamza

Mardi 25 septembre
2012
Mauvaise foi.
Oumma vous propose de découvrir le
procédé rhétorique employé par l’avocat
de Charlie Hebdo pour distinguer la
(bonne) caricature anti-islam ou
anti-chrétienne et le (mauvais) dessin
antisémite.
A l’instar de ses clients, Richard
Malka est un sacré farceur. L’homme en
charge de la défense judiciaire de
Charlie Hebdo
fustige le gouvernement français,
coupable de ne pas assez soutenir la
« liberté d’expression » des
journalistes-dessinateurs depuis la
sortie, mercredi dernier, de leur
hebdomadaire anti-islam. En 2006,
Richard Malka représentait déjà l’équipe
du journal satirique lors de l’affaire
des caricatures danoises. Comme l’avait
révélé Oumma, il s’était alors réjoui,
avec l’ex-directeur Philippe Val,
d’avoir, en conséquence du procès, fait
« exploser » le Conseil
français du culte musulman.
En juin dernier, l’avocat
enjôleur et cabotin était invité à
participer à un
débat organisé par
l’ambassade française de Tel Aviv et
intitulé « Le blasphème, droit ou
délit ». Après avoir pris soin de
distinguer le fait d’attaquer une
religion et la haine contre un groupe
particulier, Richard Malka est
interpellé (à la 38ème minute) par Yaron
London, animateur du débat. La
question-piège habilement posée par ce
journaliste israélien semble prendre au
dépourvu le défenseur de Charlie Hebdo.
Q /Je peux imaginer une situation
dans laquelle un caricaturiste dit
vouloir s’en prendre à la foi juive mais
dessine des juifs très laids, bossus,
avec un grand nez et, peut-être, une
liasse de billets à la main(…) Il écrit
qu’il ne s’en prend pas au juifs mais à
la foi juive... A qui s’en prendrait-on
? A la foi ou aux croyants ?
R /C’est toujours compliqué, ces
questions-là…. Là, vous parlez de ce qui
fait beaucoup penser aux caricatures
d’avant-guerre. Quand vous dessinez un
juif avec un gros nez et une liasse de
billets, vous n’êtes pas du tout dans la
symbolique religieuse, vous êtes dans
l’incitation à la haine… Là, vous faites
un amalgame entre la religion et ceux
qui la pratiquent (…)
Q/ Et si vous dessinez Mahomet
-qui a un visage sémite- avec un turban
et une bombe, cela ne veut pas dire que
vous méprisez l’islam, cela veut dire
que vous méprisez les Arabes ! Alors,
pourquoi vous êtes prêt à défendre ceux
qui publient ces caricatures ?
R/ Je les ai déjà défendu… Mais
cela veut surtout dire qu’on s’en prend
à ceux qui posent des bombes, aux
terroristes, à ceux qui dévoient
l’islam... Ils le font au nom du
Prophète. On ne peut pas nous enlever le
rire qui est une défense et la
possibilité de caricaturer ces personnes
qui se revendiquent du Prophète.
Dans l’intégralité de cet échange,
Richard Malka tente de justifier
l’existence des caricatures danoises,
relayées alors par Charlie Hebdo, ainsi
que les récentes attaques de Madonna en
concert contre la « symbolique
chrétienne ». Prétexte invoqué : ce
ne sont pas tous les musulmans, ou tous
les chrétiens, qui seraient visés.
Pourtant, à l’inverse, le dessin
représentant de manière « laide »
un juif, fût-il intégriste ou
ultra-sioniste, serait
nécessairement considéré comme une «
incitation à la haine ».

Il n’est pas venu à
l’esprit de Richard Malka que les
dessins de Charlie Hebdo, ainsi que les
caricatures danoises, représentaient
régulièrement des musulmans, depuis la
figure du Prophète jusqu’au pratiquant
moderne, de manière « laide »,
avec un « gros nez » et,
parfois, les accessoires exotiques
d’usage telles les babouches et autres
djellabas. Pour l’avocat, il ne s’agit
pas ici de préjugés racistes mais, plus
simplement, de la liberté souveraine du
caricaturiste à exprimer sa critique de
la religion islamique. Avec un tel
aplomb dans le sophisme, nul ne peut
plus s’étonner que Richard Malka ait été
sollicité dans le passé pour défendre
une institution bancaire
aussi éthique et transparente que
Clearstream.
Hicham Hamza,
journaliste
Publié le 26
septembre 2012 avec l'aimable
autorisation d'Oumma.com
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