Edit
: Il semblerait qu’un homonyme,
ayant seul laissé des traces
visibles sur internet, ait été
mépris pour le Rami Abdel Rahmane
que nous essayons de trouver. Nous
ne sommes pas capables de démêler
ici le vrai du faux, étant donné
qu’il n’existe pas de données
fiables sur l’informateur des médias
européens, et que l’homonyme
travaille dans un domaine
sensiblement le même. Soyez donc
prévenus qu’il peut s’agir d’une
confusion, indépendante de notre
volonté.
Mais cela renforce notre conviction
que les noms que nous dénonçons dans
nos pages ne sont que des avatars
d’une officine étrangère, chargée de
porter le fer et le feu dans les
plaies syriennes.
Depuis des semaines, un nom revient assez souvent dans les articles consacrés par la grande presse française à la situation en Syrie : celui de Rami Abdel Rahmane. Et pour cause, il est l’un des principaux fournisseur de « nouvelles » des agences de presse et chaînes d’info occidentales - et arabes du Golfe – sur tout ce qui a trait à l’agitation en Syrie : les estimations du nombre de manifestants anti-Bachar – ces derniers temps le compteur est bloqué à « plusieurs centaines de milliers » – c’est lui ; le nombre des victimes – civiles, forcément civiles – des forces de l’ordre du régime, c’est lui. Lui et son « Observatoire syrien des droits de l’homme » qui a apparemment des yeux, ou des télescopes, dans tout le pays.
Ici Londres : un Syrien
suédois
parle pour les Syriens aux
Occidentaux
Il est normal et même
déontologique de s’intéresser à un
si efficient personnage, fournisseur
quasi-exclusif de toutes les
statistiques relatives à la
« révolution » syrienne.
D’abord, une première précision qui
a son importance, l’Observatoire de
R.A.Rahmane est basé à Londres,
son directeur vivant, lui, en Suède.
Celui-ci est – tiens ? – un expert
en informatique, spécialisé dans la
formation de jeunes internautes
arabes d’Afrique du Nord et du
Proche-Orient, bref cette
fantastique « génération Facebook »
censée incarner – virtuellement – la
révolution démocratique en terre
d’Islam. Ecoutons sur ce point
précis les claires explications de
R.A. Rahmane : « J’essaie
d’aider de jeunes Arabes en Europe
et au Moyen-Orient à sortir de leur
milieu socio-politique et culturel
et à étendre leurs horizons et voir
les choses sous un angle mondial »
; on peut même, en l’espèce, parler
d’angle « mondialiste américain »
C’est en tout cas depuis Londres, par ailleurs QG européen des Frères musulmans, qu’émet l’Observatoire en question. Avec un gros succès médiatique, puisque l’OSDH s’est arrogé un quasi-monopole de l’ »information » sur la Syrie auprès d’une foultitude de médias. Il n’est que de recenser, en France simplement, les mentions – quasi-obligatoires – de son nom et de son sigle -dans le cours des articles du Monde, de Libération, du Figaro ou du Nouvel Observateur consacrés à la Syrie ces derniers mois. Autant de médias dits « sérieux » qui sont incapables de fournir des informations précises et un peu développées sur leur principal informateur !
C’est vrai que l’Observatoire ne facilite pas la tâche de ses « clients » car son site n’est rédigé qu’en arabe (on a quand même une date « occidentale » sur la page d’accueil). Il est pour le moins curieux qu’un site ayant vocation à informer le monde entier des turpitudes du régime baasiste ne dispose pas au moins d’une version en anglais, non ?
L’OSDH et son jeune patron ont bâti leur crédit sur le fait qu’ils puiseraient leurs informations directement en Syrie, grâce à un équipement très « pro » en téléphone portable ou I-pad, plus internet, performant et branché sur la Syrie 24 heures sur 24. De fait, on lui doit la diffusion d’une bonne part de ces « reportages de portables » sur les manifestations, manifestations dont il est impossible d’apprécier l’ampleur véritable, ou la localisation précise dans le temps et l’espace. Et, bien sûr, l’Observatoire a beaucoup fait pour exploiter le cadavre du malheureux Hamza, adolescent de Deraa tué par une balle perdue dans une manifestation en avril dernier, et dont le cadavre décomposé est devenu l’emblème de la cruauté du régime de Damas.
Essayons donc d’en savoir un peu
plus. Selon le site
« altermondialiste » Infoguérilla
qui a enquêté à travers la toile sur
son cas, Rami Abdel Rahmane – ou
Abdul Rahman – se présenterait comme
un « journaliste indépendant »
originaire
d’Amman en Jordanie – où il a
étudié, avant de travailler pour des
agences de presse ou des médias du
Proche-Orient dont le
Jordanian Times.
Il aurait aussi pigé pour
Reuters TV,
couvrant les événements de cette
région.
Etabli
depuis quelques temps en Suède, à
Stockholm, Rami Abdel explique sur
internet qu’il a notamment, dans ce
pays, une activité de conférencier.
A quel propos ? « Les
médias d’information« . Il se
définit aussi, bien sûr, comme
journaliste, un journaliste qui a
créé sa propre maison de production,
dont les activités s’étendent de la
radio à la télévision, en passant
par la musique et les « médias
sociaux » genre Facebook et Twitter.
Parmi les clients de sa boîte, la
radio d’Etat suédoise. Et c’est pour
l’Institut suédois de Stockholm
qu’il a réalisé ou co-réalisé des
programmes de mise à niveau internet
estampillés « Young
Leaders Visitors Program (YLVP)« ,
conçus – là c’est Rami qui parle –
« pour fournir
aux participants – jeunes faiseurs
d’opinion de Suède et de pays
sélectionnés dans la région MENA
(Proche-Orient et Afrique du Nord -
(…) qui oeuvrent
activement pour un changement social
dans leurs contextes respectifs
(…) des outils
innovants pour façonner l’opinion
publique dans les médias
d’avant-garde« . Ces « outils
innovants » étant, toujours
selon Rami Abdel Rahmane, les fameux
« médias sociaux »
informatiques, « outils
de changement positif. » Rami
est vraiment débiteur de la Suède
puisque c’est là qu’il a poursuivi
ses études, présentant – à
l’université d’Orebro – une thèse
sur les services d’information sur
internet au Proche-Orient.
On
s’étonnera un peu plus, au passage,
qu’un individu aussi actif – et
branché nouvelles technologies -que
Sami Abdel Rahmane soit aussi
discret sur la toile : apparemment,
la seule photo disponible de notre
super-internaute démocrate, roi de
Facebook et émir de Tweeter, est une
capture d’écran de sa présentation
de son programme YLVP (voir photo).
En regard de l’immensité d’internet,
c’est assez peu.
Déstabilisation – et désinformation – assistée par ordinateur
Bref, on l’aura compris, Rami
Abdel Rahmane est, comme dirait ses
amis et clients anglo-saxons, « the
right man in the right place »
pour faire la révolution, ou au
moins la déstabilisation, à
distance, en Syrie plutôt qu’en
Arabie Saoudite -
ou en Suède. A ce degré de
limpidité, on peut parler de
« complot à ciel ouvert » ! Sami
Abdel Rahmane gagne sa vie en
pratiquant la « déstabilisation
assistée par ordinateur ».
Evidemment
« démocrate », R.A. Rahmane se
définit aussi comme conservateur. Et
même, bien que résidant en Suède,
comme conservateur jordanien, qui
soutient « les réformes » engagés en
principe par le roi Abdallah,
confronté lui aussi à la
contestation populaire, une
contestation qui a la particularité
de ne pas bénéficier des conseils de
pro de Rami. La Jordanie étant, au
passage, accusée par des
responsables syriens d’être, dans le
sillage des Saoudiens – dont la
jeunesse ne bénéficie pas non plus,
semble-t-il, de la formation YLVP –
derrière les manifestants anti-Bachar
les plus radicaux et les mieux
organisés.
Encore une fois, on est pris d’un sentiment de vertige quand on mesure l’importance prise, dans le façonnage du regard international sur les événements de Syrie, par une officine dont ne sait presque rien et son patron dont on sait qu’il se voue officiellement à aider au « changement social » dans les pays arabo-musulmans qui déplaisent à Washington et ses alliés, et uniquement ceux-ci. Dans ces conditions, nos médias, par paresse, hâte ou bonne conscience idéologique se prêtent volontairement à une désinformation de grande échelle, et aux conséquences imprévisibles.