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actualités du droit
Syrie : Armer les
criminels ? Hollande risque la prison
Gilles Devers
Une exécution sommaire de
prisonniers, qui ont été torturés
Samedi 7 septembre 2013
Si vous n’avez jamais vu ce qu’est un
crime de guerre, regardez. Si vous
redoutez la scène du crime, ne regardez
pas, car c’est la violence totale. Cette
vidéo est incontestable : filmée en
avril 2012, et publiée hier par le
New York Times, elle a été
transmise par un candidat djihadiste à
qui elle était présentée comme gage de
détermination des groupes combattant
l’armée syrienne.
On voit, au premier
rang, sept soldats de l’armée nationale
syrienne. Ils sont alignés, le torse nu,
le visage plaqué au sol. Sur leur dos,
les traces des coups : des tortures.
Au second rang, les
combattants de la démocratie, du groupe
Jund al-Cham. Ils sont sept, postés
derrière les soldats qui s’apprêtent à
mourir, et sur le côté droit, le chef,
Abdul Samad Issa.
C’est lui qui livre
l’arrêt de mort : « Nous le jurons
devant Dieu, nous nous en faisons la
promesse, nous nous vengerons. Votre
sang coulera deux fois plus que le nôtre
».
Les balles
retentissent, et on voit ensuite les
corps des soldats, jetés dans une fosse.
Livrer des armes
aux rebelles
Voici une dépêche
de l’AFP du 15 mars 2013.
« À la veille des
deux ans de la révolte contre Bachar el-Assad
en Syrie, la France est prête à "prendre
ses responsabilités" et n'exclut pas de
livrer des armes à l'opposition
syrienne, si elle ne parvient pas à
convaincre ses partenaires européens, a
affirmé jeudi François Hollande : "Nous
avons comme objectif de convaincre nos
partenaires à la fin du mois de mai, et
si possible avant. Nous allons employer
notre sens de la diplomatie. Si
d'aventure, il devait y avoir un blocage
d'un ou deux pays, alors la France,
elle, prendrait ses responsabilités", a
déclaré le chef de l'État, au cours
d'une conférence de presse à l'issue de
la première journée du sommet européen à
Bruxelles ».
Si d’aventure…
La III°
Convention de Genève
Le respect des
prisonniers de guerre est une règle
coutumière du droit international
humanitaire, reprise par la III°
convention de Genève, aux articles 13 et
14.
Article 13
« Les prisonniers
de guerre doivent être traités en tout
temps avec humanité. Tout acte ou
omission illicite de la part de la
Puissance détentrice entraînant la mort
ou mettant gravement en danger la santé
d'un prisonnier de guerre en son pouvoir
est interdit et sera considéré comme une
grave infraction à la présente
Convention. En particulier, aucun
prisonnier de guerre ne pourra être
soumis à une mutilation physique ou à
une expérience médicale ou scientifique
de quelque nature qu'elle soit qui ne
serait pas justifiée par le traitement
médical du prisonnier intéressé et qui
ne serait pas dans son intérêt.
« Les prisonniers
de guerre doivent de même être protégés
en tout temps, notamment contre tout
acte de violence ou d'intimidation,
contre les insultes et la curiosité
publique.
« Les mesures de
représailles à leur égard sont
interdites ».
Article 14
« Les prisonniers
de guerre ont droit en toutes
circonstances au respect de leur
personne et de leur honneur.
« Les femmes
doivent être traitées avec tous les
égards dus à leur sexe et bénéficier en
tous cas d'un traitement aussi favorable
que celui qui est accordé aux hommes.
« Les prisonniers
de guerre conservent leur pleine
capacité civile telle qu'elle existait
au moment où ils ont été faits
prisonniers. La Puissance détentrice ne
pourra en limiter l'exercice soit sur
son territoire, soit en dehors, que dans
la mesure où la captivité l'exige ».
Le statut de la
Cour Pénale Internationale
La Cour Pénale
internationale sanctionne évidemment de
tels faits.
Si, vu le nombre de
combattants enrôlés et financés par
l’étranger, on considère le conflit
comme international, jouent quatre
textes
« 2a i) L’homicide
intentionnel ;
« 2a vi) Le fait de
tuer ou de blesser un combattant qui,
ayant déposé les armes ou n'ayant plus
de moyens de se défendre, s'est rendu à
discrétion ;
« 2a vi) Le fait de
priver intentionnellement un prisonnier
de guerre […] de son droit d'être jugé
régulièrement et impartialement ;
« 2a xxi) Les
atteintes à la dignité de la personne,
notamment les traitements humiliants et
dégradants. »
Si considère qu’il
s’agit d’un conflit armé interne,
peuvent s'appliquer trois textes :
« 2c i) Les
atteintes à la vie et à l'intégrité
corporelle, notamment le meurtre sous
toutes ses formes, les mutilations, les
traitements cruels et la torture ;
« 2c ii) Les
atteintes à la dignité de la personne,
notamment les traitements humiliants et
dégradants ;
« 2c iv) Les
condamnations prononcées et les
exécutions effectuées sans un jugement
préalable, rendu par un tribunal
régulièrement constitué, assorti
des garanties judiciaires généralement
reconnues comme indispensables.
Responsable… et
coupable
Si l’on trouve des
armes françaises entre les mains de ces
criminels, une plainte pour complicité
de crime de guerre sera déposée contre
celui qui a décidé de ces livraisons
d’armes, « prenant ses
responsabilités », devant la Cour Pénale
Internationale, car la France a ratifié
le Traité, texte qui ne connaît pas les
immunités des chefs d’Etat.
La prison
de Scheveningen (La Haye) et
une cellule du quartier pénitentiaire de
la CPI
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