Le gouvernement israélien a imposé un boycott
à l’Autorité Palestinienne avec l’objectif d’affaiblir
le Hamas, et un an et demi plus tard cette brillante politique a
donné ses fruits : le Hamas est devenu plus fort. S’il y
a une leçon à tirer de ce fiasco, la voici : affamer, assécher
et bloquer l’aide ne nuit pas à la conscience et
n’affaiblit pas les mouvements politiques. Bien au contraire.
La réalité a réfuté le chorus des experts et
des commentateurs qui prêchaient en faveur de la politique du
boycott. Cette notion stupide qu’il est possible de renverser
un gouvernement élu en appliquant une pression sur une
population impuissante a subi un échec total. Le monde a
boycotté le gouvernement d’union nationale qui aurait peut-être
pu empêcher les scènes violentes à Gaza s’il avait été
autorisé à gouverner, et par conséquent nous avons obtenu
l’alternative : le contrôle total de Gaza par le Hamas
dans un coup d’état, séparant Gaza de la Cisjordanie. Voici
donc la mauvaise nouvelle.
Il est possible de faire une liste des erreurs
fatales commises par Israël, les Etats Unis et le Fatah, qui
ont conduit vers ce qui vient de se passer, mais la question à
laquelle nous sommes confrontée maintenant est vers où aller
à partir d’ici ?
Allons-nous continuer la politique de boycott
jusqu’à ce qu’un gouvernement plus extrémiste et plus
dangereux se forme à Gaza, comme le djihad ou Al-Qaïda ?
Ou allons-nous prendre en compte le fait que la force ne pourra
réussir, qu’il est impossible de revenir au statu quo précédent
sur le dos de cette faible population et que nous devons changer
de direction ?
Israël et les Etats-Unis sont en train
d’embrasser Mahmoud Abbas. Il y a beaucoup d’hypocrisie et
de caractère moralisateur dans tout cela. Il n’y pas
longtemps il était considéré comme un chef « déplumé ».
Toutes ses requêtes et demandes étaient rejetées, l’une après
l’autre, et tout était fait pour saper son gouvernement.
Alors qu’est ce qui a changé maintenant ?
Il n’y a pas de fondement à prétendre que le discours
concernant le besoin de renforcer Abbas est conçu pour nuire au
Hamas. Gaza est perdu. Le Fatah n’effectuera aucun retour
prochainement à Gaza après que ces chefs aient fui à
Ramallah, abandonnant son peuple à la merci de Hamas. C’est
très mauvais que le Hamas ait pris le contrôle de Gaza et
Abbas doit en effet être renforcé, mais les limites de cette
approche doivent être reconnues : les choses ne seront
jamais comme avant.
Nous avons maintenant deux Corées : la
Cisjordanie comme Corée du Sud et Gaza comme Corée du Nord.
Malgré la diabolisation du Hamas et la glorification du Fatah,
les deux mouvements sont problématiques. Gaza est tombée comme
un fruit mûre dans les mains du Hamas principalement à cause
de la différence socioéconomique entre Gaza et la Cisjordanie.
Gaza est plus pauvre, et ainsi est devenue plus
radicale. L’idée que la faim exacerbante supportée par ses
leur fera changer d’avis et fera d’eux des amoureux de Sion
et des Etats-Unis est erronée : cela les rendra de plus en
plus radicaux. Il n’y a pas d’alternative à l’adoption
d’une approche presque égale aux deux entités qui se sont
formées : nous devons les aider toutes les deux. Avec ou
sans le Hamas, seulement un Gaza prospère pourra changer sa
direction.
Le Hamas essaie maintenant de stabiliser son règne
après le coup brutal qu’il a conduit. Les journalistes étrangers
qui ont visité Gaza récemment rapportaient qu’il y avait le
calme dans les rues, très peu d’hommes armés et de points de
contrôle ; et même une directive qui interdit aux hommes
de se promener avec les visages masqués. Même les guerres des
clans, qui ont divisé Gaza les derniers mois, se sont calmées
un peu. Le nouveau commandant de police nommé par le Hamas à
Jabaliya, Mohammed Abu Sisi, a déclaré en fin de semaine que
ces forces étaient capables, plus que les autres, de mettre un
terme à l’anarchie. Apparemment, c’est exact.
Maintenant nous devons aussi demander que la
nouvelle direction mette une fin absolue au lancement des
missiles Qassam sur Israël et réussisse à relâcher Alan
Johnston et Gilad Shalit. S’ils font ceci, Israël et le monde
devraient lever le boycott et commencer à permettre à Gaza de
vivre.
En Cisjordanie, bien entendu, une série de
larges pas en avant devraient être faits sans délai : un
cessez-le-feu total, la suppression de tous les points de contrôle
internes, et une libération massive des prisonniers. Peut-être
rien d’agréable ne sortira de Gaza, mais tous les efforts
devraient être déployés pour adoucir l’amère pilule.
L’intérêt israélien est de laisser Gaza vivre, même si la
direction n’est pas à notre goût.