Tendances au Moyen-Orient
Les raisons
profondes du soutien russe à la Syrie
Ghaleb Kandil
Vladimir Poutine - Photo: RIA
Novosti
Lundi 19 mars 2012
La propagande américano-occidentale et
les outils de la guerre médiatique
contre la Syrie évoquent la possibilité
d'obtenir un changement de la position
de la Russie sur la crise syrienne grâce
à des marchandages proposés par le camp
du bellicisme américain dans le but de
pousser Moscou à faire preuve de plus de
flexibilité. Les tentatives occidentales
d'influencer l'attitude de la Russie se
poursuivent sans relâche depuis le
premier double véto qui a compromis les
plans de guerre coloniale contre la
Syrie, en octobre dernier. Toutefois,
toute ces tentatives ont été vouées à
l'échec et la Russie n'a accordé aucune
importance aux "assurances" et autres
"garanties" fournies par l'Occident
concernant la prise en compte de ses
intérêts en contrepartie du
déverrouillage du Conseil de sécurité en
éloignant le spectre du véto.
Le conflit entre la Russie et les
Etats-Unis a des causes profondes et ne
supporte plus des compromis partiels et
incomplets. Depuis des années, Moscou
s'efforce de mettre un terme à
l'hégémonie unilatérale exercée par les
Etats-Unis sur les relations
internationales. La crise syrienne a
fourni une fenêtre d'opportunité pour
aller de l'avant et établir de nouveaux
rapports de forces plus équilibrés.
La composition de la force économique
russe est semblable à celle des
Etats-Unis et dispute aux Américains les
marchés mondiaux des armes et de
l'énergie. Il est connu que les cartels
militaro-énergétiques constituent la
colonne vertébrale des intérêts
américains dans le monde et dictent les
principaux choix diplomatiques de
Washington.
Le caractère impérial de la force de la
Russie a toujours marqué l'histoire
récente et ancienne de ce pays slave,
considéré comme le cœur de la chrétienneté orthodoxe. Cela explique
les liens géopolitiques entre la Russie
et l'Europe de l'Est qui était inclue,
de l'époque des Tsars à l'Union
soviétique, dans la zone d'influence
russe. La Russie renaissante, sous le
leadership de Vladimir Poutine,
ambitionne de récupérer cette région
tombée depuis sous le contrôle des
Etats-Unis.
Les ingérences américaines et
occidentales dans les affaires internes
russes et dans les anciennes Républiques
soviétiques, considérées comme la chasse
gardée de Moscou, constituent une menace
pour la sécurité nationale de la Russie.
Ces agissements nécessitent aux yeux de
la Russie des ripostes décisives,
portées au cœur de l'hégémonie
américaine. Cela passe par une
confrontation au Moyen-Orient dans le
but de limer les ongles des Etats-Unis
et de juguler leurs pulsions
dominatrices et leurs velléités
interventionnistes.
La Syrie occupe une position centrale et
décisive dans les nouveaux équilibres.
L'alliance syro-russe offre à Moscou un
accès aux eaux chaudes de la
Méditerranée et empêche que cette mer de
devienne un lac atlantiste. Mais ce
n'est pas tout. Des experts révèlent
l'existence d'un projet
américain-européen-israélien, avec la
coopération de l'Arabie saoudite, du
Qatar et de la Turquie, visant à
construire un gazoduc géant pour
transporter le gaz et le pétrole vers
l'Europe. Ce gazoduc doit traverser la
Méditerranée au niveau du Liban et de la
Syrie. Un tel projet constituerait un
coup fatal pour l'économie russe qui
compte beaucoup sur les exportations des
hydrocarbures vers l'Europe.
Les stratèges qui planifient ce genre de
projet savent pertinemment qu'aussi bien
la Résistance au Liban que l'Etat
résistant en Syrie, ne permettront
jamais la réalisation d'un tel plan
"turco-israélo-golfien".
L'exécution de ce projet explique en
grande partie la guerre de 2006 et la
création de la Finul navale, ainsi que
les pressions et complots dirigés contre
la Syrie depuis l'invasion de l'Irak, en
2003.
Dans ce contexte, on comprendra que
l'affaire syrienne constitue pour la
Russie, une question de sécurité
nationale. Et pour toutes les raisons
précitées, Vladimir Poutine l'a utilisé,
à la veille des élections
présidentielles, comme exemple pour
illustrer la politique étrangère de la
Russie, anti-impérialiste et favorable
aux forces et pays résistants à
l'hégémonie occidentale.
Cette réalité, prouvée ces derniers
mois, montre que les rêves de
l'hégémonie américaine sur le
Moyen-Orient et sur le monde, se
brisent, encore une fois, sur le rocher
syrien.
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