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Adieu la cause palestinienne
La normalisation de la Syrie
Pr Chems Eddine Chitour
Lundi 8 février 2010
«Réveille-toi Saladin, nous sommes de
retour. Ma présence ici consacre la victoire de la croix sur le
croissant.»
Le général français Henry Gouraud entra à Damas en juillet 1920.
Après avoir frappé sur le tombeau de Saladin.
La Syrie est un pays arabe du Moyen-Orient (Asie occidentale).
Elle se nommait au XIXe siècle Bilad al-Cham Dans la ville
excavée d’Ebla, dans le nord-est de la Syrie, les archéologues
ont découvert en 1975 les vestiges d’un grand empire sémite, qui
va du nord de la mer Rouge jusqu’en Turquie et à l’est jusqu’en
Mésopotamie. Cet empire datant de 2500 à 2400 ans av. J.-C. fait
de la langue d’Ebla la plus ancienne langue sémitique du monde.
Damas a été fondée plus de 10.000 ans av. J.-C.; elle est une
des villes les plus anciennes du monde et a été habitée le plus
longtemps sans interruption Ethniquement, les Syriens font
partie du peuple sémitique originaire du Levant. L’Histoire du
peuple syrien est plusieurs fois millénaire. Ce peuple et cette
terre ont connu différentes invasions, différents brassages et
différentes acculturations. Après l’entrée des musulmans en
Syrie, la ville est devenue la capitale de l’Empire omeyyade,
elle atteint ainsi un prestige et une puissance encore inégalés
dans l’histoire syrienne. Cet empire s’étendait de l’Espagne à
l’Asie centrale (661 à 750 apr. J.-C). En 1260, Damas est
devenue la capitale provinciale de l’empire des Mamelouks. Elle
sera occupée par les Ottomans pendant cinq siècles jusqu’en
1918.
Les relations avec Israël
L’histoire de la Syrie du XXe siècle est celle de la rapine des
deux impérialismes britannique et français, qui se sont acharnés
sur l’Empire Ottoman L’homme malade de l’Europe. Un homme: le
général Gouraud, Haut commissaire de la République française en
Syrie, laissera une trace indélébile. Les troupes anglaises du
général Allenby entrent le 1er octobre 1918 à Damas, et celles
de Fayçal le 3 octobre. Le 8 janvier 1919 a lieu la Conférence
de Paris où Lawrence assiste Fayçal. Les promesses faites aux
Arabes se heurtent aux intérêts franco-britanniques pour le
partage du Proche-Orient. En avril 1920, la conférence de San
Remo en Italie, confirmant les accords Sykes-Picot modifiés
(accords sur les pétroles), donne à la France les mandats sur le
Liban et la Syrie, à l’Angleterre les mandats sur la Palestine,
la Syrie du sud (Transjordanie) et l’Irak. Les incidents se
multiplient. Le 14 juillet 1920, le général Gouraud lance un
ultimatum à Fayçal. Le 24 juillet 1920, l’armée française livra
un violent combat à Khan Meiseloun et fit son entrée à Damas, le
25 juillet 1920, déposa l’émir Fayçal. Le général Gouraud entra
à Damas en juillet 1920. Après avoir frappé sur le tombeau de
Saladin à l’intérieur de la Mosquée des Omeyyades, Gouraud
s’écria: «Réveille-toi Saladin, nous sommes de retour. Ma
présence ici consacre la victoire de la croix sur le croissant.»
Dans le même ordre, au cours de l’automne 1917, le général Sir
Edmund Allenby a envahi la Palestine et, le 11 décembre, lui et
ses officiers sont entrés dans la ville sainte de Jérusalem par
la porte de Jaffa. Le Premier ministre Lloyd George considérait
cela comme un cadeau de Noël et écrivit que la chrétienté avait
repris «possession de ses lieux Saints». Cet antagonisme
entre la croix et le croissant a été amplifié par un troisième
venu, l’étoile de David. Après l’indépendance totale du pays en
1946, Hachem al-Atassi devient le premier président de la
République syrienne.
Après la guerre israélo-arabe de 1948, le colonel Adib Chichakli
procède en 1949 à un coup d’État. Les Américains, dans l’espoir
qu’il signe un traité de paix avec Israël, lui offrent par
ailleurs une aide étrangère considérable. Mais en contrepartie,
les États-Unis voudraient que le gouvernement syrien, fasse des
réfugiés palestiniens des Syriens à part entière: durant les
négociations entre les États-Unis et la Syrie en 1952, le
gouvernement américain va jusqu’à proposer la somme de 400
millions de dollars pour intégrer dans le pays - dans les
plaines fertiles de Djézireh - 500.000 Palestiniens. Nous
remarquons que les drames humains des réfugiés palestiniens ont
toujours été traités par les Occidentaux alliés inconditionnels
d’Israël, comme un problème mineur. D’un côté, Israël refuse aux
réfugiés de retourner chez eux dans les 22% restants, de
l’autre, elle scanne la planète pour chercher d’hypothétiques
juifs dont l’«Alya», le retour vers Israël sera financé
par l’Aiapc. Dans cet ordre, on apprend qu’Israël vient de
découvrir dans les confins de l’Inde une tribu juive...
En 1967, la guerre des Six-Jours, perdue par les Égyptiens et
les Syriens, affaiblit le gouvernement de Salah Jedid. Le 13
novembre 1970, le ministre de la Défense Hafez el-Assad procède
à un coup d’État, il devient président jusqu’à sa mort en 2000.
Le 21 novembre 1972, 6 Mig syriens sont abattus au cours de la
plus grande bataille aérienne depuis la guerre des Six Jours.
Pendant la guerre de Ramadhan-Kippour 1973, 13 Mig syriens sont
abattus au cours d’une bataille aérienne. Le 24 septembre 1979,
dans une bataille aérienne, l’armée de l’air abat 4 avions de
chasse syriens Le 18 avril 1995 Shimon Pérès déclare qu’Israël
est prêt à revenir à la frontière internationale sur le Golan en
échange d’une paix complète entre Israël et la Syrie. Le 13
décembre 1999, Barak annonce à la Knesset qu’en échange d’un
prix territorial élevé, un accord avec la Syrie est possible
d’ici quelques semaines. Le 15/12/1999 et le 16/12/1999:
pourparlers entre Israël et la Syrie à Washington. Du 03/01/2000
au 10/01/2000, à Shepardston, en West Virginian aux Etats-Unis,
des discussions ont lieu entre Barak et Farouk Ashara, ministre
des Affaires étrangères syrien. Ils ne parviennent pas à un
accord. Les Etats-Unis annoncent le gel des discussions.
Commence alors la décennie Bush qui fut une décennie noire pour
la paix.(1)
En janvier 2000, la Syrie et Israël étaient au bord de la paix.
Alain Gresh écrit à ce propos: Avec la signature d’un traité
entre Israël et la Syrie, c’est une page de l’histoire du
Proche-Orient qui se tournerait, celle ouverte par la première
guerre israélo-arabe de 1948-1949. (...) Certes, rien n’est
encore réglé. Personne, dans cette région troublée, ne peut
écarter l’imprévisible.(...) C’est évidemment l’avenir du Golan
qui a longtemps formé la pierre d’achoppement la plus lourde.
Les gouvernements israéliens successifs ont toujours mis en
avant le caractère «vital» de ce plateau pour la «sécurité»
du pays (... Un an après son accession, en 1992, au poste de
Premier ministre, Itzhak Rabin accepte le principe de la
rétrocession du Golan. Son agrément est transmis aux dirigeants
syriens par M. Warren Christopher, alors secrétaire d’Etat
américain, en août 1993. Mais le président Assad réclame un
éclaircissement: jusqu’où s’effectuera le retrait israélien? Il
obtient la précision un an plus tard, comme le raconte M.Uri
Savir: «Après avoir parlé avec Rabin en mai 1994, Christopher
avait expliqué aux Syriens que, selon les Etats-Unis, à
condition que tous ses besoins soient satisfaits, Israël serait
prêt à effectuer un "retrait total", ce qui impliquait un recul
jusqu’à la ligne du 4 juin 1967.»(2)
La Syrie est un pays majoritairement aride, elle reçoit de plus
son eau des pays voisins: 50% des réserves proviennent de
Turquie, 20% du Liban. D’ailleurs, pour insister sur
l’importance de l’eau, l’un des rares moyens d’Israël de faire
face à sa pénurie d’eau, est l’importation par tankers. En août
2002, Israël et la Turquie ont signé un accord portant sur 50
millions de m3 d’eau douce par an pendant vingt ans, pour une
valeur d’environ un milliard d’euros. (...) Autre sujet brûlant,
la sécurité. (..) Il fallut plusieurs mois pour aboutir, le 22
mai 1995, à un document intitulé «Aims and Principles of
Security Arrangements» («Buts et principes des
arrangements de sécurité»), le seul texte sur lequel les
deux délégations se soient mises d’accord. (...) Les deux autres
dossiers - normalisation et calendrier d’application - ne
présentent pas de complications particulières. (...) Les grands
perdants de la longue bataille israélo-arabe sont les
Palestiniens. Mme Madeleine Albright a cherché à les rassurer en
proclamant, à la veille de la reprise des négociations
israélo-syriennes, que «les problèmes de la Palestine sont
des problèmes centraux si l’on veut aboutir à une paix globale».(2)
L’enjeu de l’eau
Pendant les deux mandats de Bush, il ne se passa rien
d’exceptionnel. Ce fut entre Israël et la Syrie «une paix
armée» On se souvient, cependant, du black-out syrien qui a
entouré l’attaque par Israël d’une cible syrienne et la
non-riposte. L’affaire a éclaté après les déclarations d’un
responsable américain de la sécurité nationale devant le Congrès
sur la destruction d’un réacteur nucléaire en construction en
Syrie par un raid aérien israélien le 6 septembre 2007. Ce
réacteur était sur le point d’être achevé mais n’avait pas
encore été muni de combustible à l’uranium, selon les
Américains. La Maison-Blanche avait expliqué qu’elle avait
toutes les raisons de croire que le réacteur, qui a été
endommagé au-delà du réparable le 6 septembre, n’était pas
destiné à des fins pacifiques»..(3)
Par ailleurs, le Maariv cite la chaîne américaine de télévision
ABS, qui a fait savoir que les photos présentées lors du débat
au Congrès ont vraisemblablement été prises par un espion
israélien qui oeuvrait depuis le réacteur nucléaire syrien. Le
président syrien, Bachar el Assad, affirmait que le raid ciblait
«un bâtiment militaire désaffecté». La situation a
considérablement évolué en près de dix ans. Si Washington, écrit
Yassine El Hadj Saleh, garantit la survie de son régime, Bachar
el Assad serait prêt à signer un accord avec Israël, même
déséquilibré. On parle à nouveau de l’éventualité d’un accord
[de paix] entre la Syrie et Israël. Celui-ci normaliserait leurs
relations bilatérales et permettrait le retour de la
souveraineté syrienne sur le plateau du Golan, tout en
permettant aux Israéliens de contrôler ses ressources
aquifères.4)
Par ailleurs, un calendrier de retrait courant sur cinq à quinze
années prévoit de faire du Golan une zone démilitarisée. Les
négociations ont été menées de manière indirecte en Turquie et
en Suisse, et le résultat a été qualifié par Ibrahim Süleyman,
un homme d’affaires américain d’origine syrienne, de «formule
belle et simple». (...). Autrement dit, la normalisation
diplomatique avec Israël pourrait permettre la normalisation
politique avec sa propre population. Ce serait le seul moyen de
surmonter les oppositions que susciterait la signature d’un
accord injuste avec Israël. (...) Selon Alon Liel,
l’interlocuteur [israélien] d’Ibrahim Süleyman, «Ehoud Olmert
ne peut signer d’accord avec Damas s’il n’obtient pas de
garantie sur la fin de l’alliance entre la Syrie et l’Iran».
Cela est vrai. Mais, de son côté, la Syrie ne peut signer
d’accord avec Israël si elle n’obtient pas de garantie sur la
pérennité de son régime. C’est pour cette raison que les
Etats-Unis s’opposent à un tel accord. Et c’est pour cette même
raison que les Syriens posent comme condition d’obtenir des
garanties américaines. Selon Liel, «un accord de paix doit
faire partie d’un ensemble. Si un régime doit passer du camp
iranien au camp occidental, c’est aux Etats-Unis d’en décider».
Et de garantir la pérennité et la stabilité du régime en
question. Tout le reste relève du détail, y compris le plateau
du Golan(4)
On comprend dans ces conditions les avances de Bachar el Assad:
La Syrie dit-il, est prête à entretenir des relations «normales»
avec Israël. Le président syrien se dit disposé à des échanges
d’ambassades et des traités bilatéraux avec Israël, si un accord
de paix entre les deux pays est conclu. Le chef d’Etat
s’exprimait sur la chaîne télévisée Al Jazeera. «Dès le début
du processus de paix, nous avons parlé de relations normales»
à établir avec Israël dans le cadre d’un accord de paix, a
expliqué Bachar el Assad dans l’entretien diffusé par la chaîne
du Qatar. Bachar el Assad avait émis le souhait que Washington
et Paris puissent «contribuer» à un accord de paix
israélo-syrien, mais avait exclu des négociations de paix
directes avec Israël avant l’installation de la prochaine
administration américaine.(5)
Le dialogue, bien qu’indirect, se trouve à haut niveau. Israël
et la Syrie ont repris des négociations indirectes en mai 2008.
En 2009 il y eut toujours la négociation indirecte avec la
Turquie et on se souvient qu’en décembre 2009 «Selon
Nétanyahou, la Syrie est prête à reprendre sans condition les
négociations», titre le quotidien Ha’aretz de Tel-Aviv. Le 7
décembre, le Premier ministre israélien a annoncé devant la
Knesset que Damas, prêt à reprendre les négociations, avait
retiré ses exigences préalables d’un retrait israélien du
plateau du Golan. Israël aurait demandé la médiation française.
Brusque montée de la tension entre les deux pays en février
2010, le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor
Lieberman, au cours d’une conférence à l’Université Bar Ilan, a
ouvertement menacé le chef de l’Etat syrien dans le cas où la
Syrie entrerait en conflit avec Israël. Répondant manifestement
à un constat dressé la veille par Bachar el Assad devant le
ministre des Affaires étrangères espagnol, Miguel Angel
Moratinos, dans lequel le président syrien estimait qu’Israël
poussait le Moyen-Orient à la guerre, Lieberman a déclaré «Assad
doit savoir que s’il attaque, il ne perdra pas seulement la
guerre. Et que ni lui ni sa famille ne demeureront au pouvoir.
Notre message doit être le suivant: si son père a pu perdre une
guerre contre nous mais rester au pouvoir, il n’en ira pas de
même pour le fils. Une attaque lui coûtera son régime.»
(...) «La Syrie doit comprendre qu’elle doit abandonner ses
revendications sur les hauteurs du Golan.» Pour rappel, le
26 janvier, Ehoud Barak avait déclaré devant des lycéens
israéliens: «Si nous devons affronter la Syrie, nous ne
craignons rien, nous les vaincrons.»(6)
Tout est dit. Il est à prévoir que la cause palestinienne sera
une fois de plus trahie, le régime syrien abandonnera le Golan
mais restera au pouvoir... Nous sommes loin de l’utopie de
Djabhat soumoud ouatassadi: Le Front du refus de Boumediene, El
Assad et d’El Gueddafi...A qui le tour?
1.http://www.histoiredesjuifs.com/articles.php?lng=fr&pg=821
2.Alain Gresh: Israël et la Syrie au bord de la paix. Le Monde
Diplomatique-janvier 2000
3.http://www.ledevoir.com/international/187019/
4.Yassine El-Haj Saleh: Israël/ Syrie: Le Golan, un simple
détail Al Hayat.12 juillet 2008
5.La Syrie prête à entretenir des relations «normales» avec
Israël NouvelObs.14.07.2008
6.Israël-Syrie: la provocation de Lieberman. AFP NouvelObs;
05.02.2010
Pr Chems Eddine Chitour, Ecole nationale
polytechnique, enp-edu.dz
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Publié le 8 février 2010 avec l'aimable autorisation de l'Expression
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