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Les drones
américains ont massacré 700 civils pakistanais en 2009
Bill Van Auken
Photo: AFP/GENERAL ATOMICS - Radio Canada
Les États-Unis se servent de drones Predator comme celui-ci
pour mener leurs raids contre les repaires talibans au Pakistan.
Samedi 9 janvier 2010 Selon des données rendues publiques
cette semaine par des responsables à Islamabad, les
bombardements des drones américains, un an depuis qu’Obama a
amorcé son mandat présidentiel, ont tué plus de 700 civils
pakistanais. L’escalade de la guerre AfPak de Washington,
présentement en plein essor, entraînera le massacre de milliers
d’autres hommes, femmes et enfants en 2010.
Ce bilan terrible a été annoncé lundi dans le quotidien
pakistanais anglophone Dawn, au moment où arrivaient les
nouvelles d’une récente frappe de missile Hellfire dans un
village pauvre près de la frontière afghane.
Le missile a tué un enseignant pakistanais et son fils de
neuf ans, laissant leurs cadavres ensevelis sous les décombres
de leur maison. Selon des reportages citant des responsables du
renseignement américain, la maison de l’enseignant aurait été la
cible d’une attaque de drone Predator car des rapports avaient
mentionné qu’elle avait été fréquentée par des militants.
Qui fournit ces rapports? Comment ont-ils été vérifiés? Y
avait-il la moindre indication que l’enseignant, sans parler de
son enfant, était impliqué dans les activités des présumés
« militants »?
Le gouvernement des Etats-Unis ou la CIA, qui dirige la
majorité de ces attaques, sont peu disposés à fournir des
réponses. Cela vient réaffirmer la réputation d’Assassinat inc.
(Murder, Inc.) de l’agence du renseignement.
Washington, la CIA et le Pentagone se sont arrogé le droit
illimité de mener des exécutions extrajudiciaires où bon leur
semble, sans fournir de justification, et encore moins de
preuves. Cette pratique criminelle, entreprise sous
l’administration Bush au nom de la guerre internationale contre
le terrorisme, n’a été qu’intensifiée sous Obama.
Durant la dernière année, les drones américains ont tiré 44
fois des missiles dans les zones tribales à l’ouest du Pakistan,
soit au moins deux fois plus que le nombre de frappes aériennes
effectuées au cours de la dernière année de l’administration
Bush. Reprenant les statistiques compilées par les responsables
gouvernementaux pakistanais, Dawn rapporte que ces
frappes de missiles n’ont réussi qu’à tuer « cinq hauts
dirigeants d’Al-Qaïda ou des talibans », alors que leurs
prétendus dommages collatéraux ont coûté la vie à 708 civils
innocents.
« Pour chaque terroriste d’Al-Qaïda ou taliban tué par des
drones américains, 140 Pakistanais innocents ont dû donner leur
vie », rapporte le quotidien. « Plus de 90 pour cent de ceux qui
ont été tués dans des frappes de missiles étaient des civils »,
soutiennent les autorités.
Le journal a cité, comme l’une des rares réussites des
opérations des drones, l’attaque de missile qui a tué le
dirigeant taliban pakistanais, Baitullak Mehsud, et sa femme le
5 août 2009. Comme la journaliste d’enquête Jane Meyer l’avait
cependant fait remarquer dans le New Yorker en octobre
dernier, cela a nécessité « seize frappes de missiles, et
quatorze mois, avant que la CIA ne réussisse à le tuer ». On
croit que les attaques précédentes, ratées, auraient tué jusqu’à
321 civils innocents, terrorisant une région entière.
Aucune information provenant du gouvernement américain n’est
venue contredire la version du Dawn. La CIA maintient
« secret » son programme de drones et ne fournit aucun
renseignement sur le nombre ou l’identité des personnes qu’elle
tue. Citant des sources anonymes des services du renseignement
(ainsi que des porte-paroles de l’Armée en Afghanistan), les
médias ont l’habitude de rapporter que tous ceux tués par des
attaques de drones sont des « militants ». Ce n’est que lorsque
des témoignages décrivant les corps mutilés de femmes et
d’enfants nous parviennent des régions tribales éloignées qu’une
vérité autre peut être suggérée.
« La plupart des attaques ont été menées sur la base de
renseignement humain, qui aurait été fourni par des membres de
tribus pakistanaises et afghanes espionnant pour le compte des
forces alliées dirigées par les Etats-Unis en Afghanistan », a
ajouté l’article du Dawn.
L’attentat suicide de la semaine dernière qui a tué sept
agents de la CIA et un agent du service du renseignement
jordanien à la base opérationnelle avancée Chapman à l’est de
l’Afghanistan a indiqué dans quelle mesure ces renseignements
pouvaient être fiables. Les agents de la base Chapman été
directement impliqués dans la sélection de cibles pour les
drones Predator. Le kamikaze, considéré comme l’un de leurs
meilleurs « atouts », leur a servi de fausses informations
durant plus d’un an avant de les convoquer, y compris l’agent de
la CIA qui dirigeait l’opération, à une réunion afin de les
tuer.
La campagne de drones au Pakistan est un exercice de longue
date de « meurtres ciblés » et d’assassinats de masse exécutés
contre le peuple d’un pays avec lequel les Etats-Unis ne sont
supposément même pas en guerre. Cela dépeint tout ce qui est
criminel et réactionnaire dans la campagne impérialiste
américaine d’agression militaire en Asie centrale et dans le
Golfe Persique.
Les fonctionnaires de la CIA et les sous-traitants militaires
(c.-à-d. des mercenaires bien payés) s’assoient devant leurs
écrans à Langley en Virginie et utilisent des télécommandes pour
envoyer des missiles contre des maisons de villageois
pakistanais. Après avoir passé une journée à tuer des hommes,
des femmes et des enfants situés à plus de 11 000 kilomètres de
distance, ils retournent en voiture jusqu’à leur maison pour
revoir leur famille et prendre le repas.
Entre le secret maintenu par la CIA et l’interdiction par le
régime pakistanais que les médias pénètrent dans les zones
tribales, le carnage créé par ces attaques est essentiellement
masqué au peuple américain. Dans la mesure où une justification
est présentée à la population, c’est au nom de la lutte contre
le terrorisme.
Considérant la sombre équation fournie par l’article du
Dawn — 140 civils pour chaque présumé « terroriste » tué par
le missile d’un drone Predator — cela apparaît clairement comme
un prétexte. Les 44 frappes de missiles de l’an dernier n’ont
rien fait pour enrayer le terrorisme. Plutôt, elles ont donné à
des milliers, si ce n’est à des dizaines de milliers de gens une
raison pour contre-attaquer sur les Etats-Unis pour la mort de
leurs familles, de leurs amis et de leurs voisins.
Les attaques de drones font partie d’une explosion du
militarisme américain qui a des objectifs très différents que de
combattre le terrorisme ou d’assurer la sécurité à la population
américaine. Elle est poussée par la crise du capitalisme
américain et par la tentative de la classe dirigeante américaine
de renverser cette crise par des moyens militaires — d’abord et
avant tout en imposant l’hégémonie des Etats-Unis sur les
régions stratégiquement vitales et riches en ressources
énergétiques du Golfe Persique et de l’Asie centrale.
Les 700 personnes et plus tuées sous les ordres d’Obama dans
les attaques de drones l’année dernière n’est que le
commencement. Dans le cadre de l’ « escalade » militaire mise de
l’avant par son administration, les responsables américains ont
demandé que le gouvernement pakistanais lance une offensive pour
supprimer l’appui à la lutte afghane contre l’occupation menée
par les Etats-Unis. Washington a menacé qu’à moins qu’Islamabad
ne prenne des actions décisives, les Etats-Unis vont agir
unilatéralement, possiblement par des frappes de missiles contre
Quetta, une ville de plus d’un million d’habitants où les
leaders talibans se sont supposément réfugiés.
Chaque escalade des opérations américaines au Pakistan
discrédite davantage le gouvernement, qui est complice des
crimes de Washington, et menace de déclencher une guerre civile
contre un pays armé de la bombe nucléaire et de déstabiliser
toute la région.
L’armée et les services du renseignement ont adopté les
attaques de drones comme une réponse technologique au problème
du déclenchement d’une guerre qui est opposée par la majorité du
peuple américain. Elles n’entraînent pas directement de morts ou
de blessés américains et la souffrance humaine qu’elles
infligent demeure largement cachée du public.
Elles créent néanmoins les conditions pour une conflagration
militaire plus large qui, si elle n’est pas arrêtée, sera
terrible pour les travailleurs aux Etats-Unis et partout dans le
monde.
(Article original paru le 5 janvier 2010)
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Publié le 9 janvier 2010 avec l'aimable autorisation du WSWS
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