Carnets du diplo
Consensus américain sur
l’Irak et l’Iran
Alain Gresh
30 septembre 2007
Dans 16 mois, l’administration Bush arrivera au terme de son
mandat. Dans l’intervalle, il lui est encore possible
d’accomplir quelques exploits, comme une attaque contre
l’Iran. Mais l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle
administration changera-t-il la politique étrangère américaine ?
La question mérite d’être posée, tant le 11-Septembre semble
avoir profondément modifié la vision internationale des élites
américaines ; et tant les démocrates apparaissent timorés
sur l’engagement militaire au Proche-Orient, malgré une opinion
publique très hostile à la présence de l’armée en Irak.
Plusieurs déclarations récentes des candidats démocrates qui
aspirent à la nomination pour l’élection présidentielle le
confirment. Dans un article « Democrats
signal capitulation on Iraq – and Iran » sur le site
Antiwar.com, Justin Raimondo reproduit ces réponses à la
question de savoir si les candidats démocrates s’engagent à ce
que en 2013, à la fin de leur mandat, il n’y ait plus de
troupes américaines en Irak, voici leurs réponses
Barack Obama : « Il est difficile de se projeter
si loin dans les quatres prochaines années. Ce serait
irresponsable. Nous ne savons pas ce qui peut se passer d’ici là. »
Hillary Clinton : « Je suis d’accord avec
Barack. C’est très difficule de savoir ce dont nous allons hériter. »
Edwards : « Je ne peux pas prendre un tel
engagement. »
Par ailleurs, le site « Loubnan ya loubnan »,
revient sur une importante information passée sous silence par
les médias, le projet de partition de l’Irak, sous le titre
« La
partition ? Quelle Partition ? »
Le Sénat américain a approuvé le mercredi 26 septembre par
75 voix contre 23, le plan, parrainé par le sénateur démocrate
et candidat à la Maison Blanche Joseph Biden et qu’il présente
comme... la clé politique pour permettre un retrait des troupes
américaines tout en prévenant le chaos. Ce plan prévoit la
division de l’Irak en trois entités (sunnite, chiite et kurde),
unies de manière très superficielle par une autorité fédérale.
75 voix (sur les 100 sénateurs), cela veut dire un large
consensus entre démocrates et républicains.
Cette résolution a soulevé un tollé en Irak et a été
critiquée par de nombreux responsables et forces politiques, dont
le premier ministre Al-Maliki. Voir l’article de Qassim
Abdul-Zahra dans le Washington Post du 28 septembre, Al-Maliki
Criticizes Senate Proposal
Pour prolonger sur l’idée de la partition, on lira
l’excellent texte de l’universitaire Roger Owen, paru dans International
Herald Tribune des 29-30 septembre, « Chaos
and unity in a fragmented Iraq ». L’auteur explique
comment la politique américaine sur le terrain alimente les
divisions ethniques, régionales et confessionnelles et crée une
dynamique de fragmentation qui échappe à tout contrôle. Dans le
même journal, le même jour, Gary Langer (« What
they’re saying in Anbar »), s’inscrit en faux contre
le discours de Bush qui fait de la province d’Al-Anbar (où
l’armée américaine collabore avec des chefs tribaux contre
Al-Qaida) un exemple de succès. Langer rappelle que les sondages
d’opinion indiquent que 72% de la population n’ont aucune
confiance dans les troupes américaines et qu’une large majorité
souhaite leur départ.
Par ailleurs, dans un vote survenu le même jour (mercredi 26
septembre), le sénat, par 76 voix contre 22 a appelé
l’administration Bush à qualifier le corps des Gardiens de la révolution
(qui fait partie de l’armée régulière iranienne) d’« organisation
terroriste étrangère ». La sénatrice Hillary Clinton
a voté pour ce texte. Parallèlement, la chambre des représentants
a voté de manière presque unanime (408 voix contre 6) pour le
Iran Sanctions Enabling Act. Ce texte prévoit des sanctions
contre les compagnies étrangères qui investiraient plus de 20
millions de dollars dans le secteur iranien de l’énergie.
Rappelons que ce type de texte, contraire au droit international,
avait déjà été adopté dans les années 1980 contre la Libye
et l’Irak. En France, le gouvernement de Nicolas Sarkozy n’a
pas attendu ce texte pour demander à Total
de ne plus investir en Iran.
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