Opinion
La CPI cet
acronyme bien à propos
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 29 mai 2013
Le
président de l'Union africaine (UA) a
rappelé ce qu'il fallait à qui il
fallait. Son prédécesseur avait déjà
signalé qu'«on a l'impression que la
Cour pénale internationale ne vise que
les Africains. Cela signifie-t-il que
rien ne se passe par exemple au
Pakistan, en Afghanistan, à Ghaza, en
Tchétchénie ? Ce n'est pas seulement en
Afrique qu'il y a des problèmes. Alors
pourquoi n'y a-t-il que des Africains
qui sont jugés par cette Cour ?» C'est
une toute petite chose, eu égard à ce
qui doit être fait et aux turpitudes
africaines, mais c'est déjà ça. Le fait
d'accuser de racisme la Cour pénale
internationale (CPI) est d'une audace
certaine. Non pas que les Africains ne
commettent pas de crimes, mais parce
qu'à les traduire seuls devant des
tribunaux est un peu trop de la moitié.
Du moins, si cette réaction est due à
l'assurance d'avoir beaucoup donné par
ailleurs, pour mériter plus d'égards,
elle a le mérite de mettre fin à un
silence coupable. La CPI n'a jusqu'ici,
depuis sa création, poursuivi et inculpé
que des Africains, soit une trentaine de
personnalités. Et ce, sous divers chefs
d'accusation. Ce qui lui a valu, ici
dans de précédentes chroniques, de
figurer sous l'appellation non usurpée
de Cour pour indigènes, sous le même
acronyme. Le président de l'UA n'a pas
été plus loin. Il ne peut manifestement
pas aller au-delà de ce qu'il a osé
faire. On peut lire dans «la chasse
raciale», les mots qu'il a utilisés, la
suggestion qu'il existe des criminels
d'une autre envergure et dans des
continents autres que l'Afrique. Surtout
chez ceux qui se sont érigés en
conscience surarmée du monde.
Officiellement, la CPI est chargée de
promouvoir le droit international, de
juger les individus coupables de
génocide, de crimes de guerre, de crimes
contre l'humanité ou de crimes
d'agressions. Dans ces missions, il
n'est pas spécifié la nationalité des
justiciables. Il n'est pas précisé que
les dirigeants étatsuniens, européens ou
ceux qui font partie de leur monde
devraient bénéficier d'une quelconque
immunité. Du coup, les arguments ne
doivent pas manquer aux Africains pour
exiger que la CPI ne s'occupe plus de
leurs affaires. Ils n'ont qu'à se
baisser pour en ramasser à la pelle. Ils
pourraient commencer par demander des
explications sur la différence de
traitement qu'il y a entre Omar
El-Béchir, le président soudanais sous
le coup de poursuites, et Barack Obama,
le président des Etats-Unis, qui ne se
cache pourtant pas de faire des cartons,
avec ses drones, sur des populations
sans défense. Il dit même que «le
recours aux drones est sévèrement
encadré», preuve que les centaines
d'enfants déchiquetés en Afghanistan ou
au Pakistan sont ses victimes directes,
sans que la CPI ne pipe mot. Alors que
MM. Uhuru Kenyatta et William Ruto,
président et vice-président du Kenya,
sont passibles d'être jugés pour leur
présumé rôle dans les violences
consécutives aux présidentielles
kényanes de décembre 2007. La CPI a eu
tout de même une réponse, elle ne
réagira pas aux résolutions de l'Union
africaine. Elle a tout dit.
Devrait-elle-même se sentir obligée de
répondre ?
Article publié sur
Les Débats
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