Opinion
L'Algérie sur le
net
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 12 octobre
2011
C'est tout
nouveau, ça ne fait pas longtemps que ça
a commencé, ça se passe sur le Net, où
les articles et autres réflexions
hostiles à l'Algérie ou au pouvoir font
désormais l'objet de commentaires qui
détonnent fortement avec ceux que l'on
avait l'habitude de lire. Ils sont
nombreux, bien écrits, sans insultes, ni
emportement, ils sont posés et s'en
tiennent à une position critique. En
examinant de près le phénomène et en
essayant de comprendre les raisons d'une
telle contre- offensive des internautes,
on se rend d'abord compte que tous sont
convaincus que c'est leur pays qui est
visé et non pas leur gouvernement contre
lequel, ce faisant, ils ne manquent pas
de reproches. En lisant les textes
récriminés on s'aperçoit qu'ils puisent
généralement dans le même répertoire. En
dehors des éternelles lamentations sur
cette «indépendance ratée» (avec parfois
une pointe de regret de la période
coloniale), sur ce «peuple pauvre» dans
un «pays riche», sur la corruption, il y
a surtout la dénonciation de la
dictature, de l'Etat policier et de
l'ombre omniprésente du DRS. Il y a
aussi fréquemment des comparaisons avec
les pays voisins. «On voudrait vivre
comme au Maroc ou en Tunisie», répondait
un célèbre écrivain, bien de chez nous,
à un hebdomadaire. Dans les textes il y
a aussi et surtout cet étonnement que
l'Algérie soit le «seul» pays dont le
peuple n'ait pas fait son «printemps».
Etant entendu que ce «printemps» était
vécu comme un événement inéluctable. On
comprend dès lors la réaction des
Algériens qui ne voient qu'une
propagande de diabolisation sans autres
objectifs que de justifier, le cas
échéant, le chaos propice à une atteinte
à la souveraineté nationale. Les
prémices sont claires. L'Algérie n'est
pas le «seul» pays sans «printemps». Il
y a tous les pays du Golfe, la Jordanie
et le Maroc au moins, qui ne font pas
l'objet de tant de sollicitude. Les
«printemps tunisien et égyptien» ne sont
pas aussi séduisants que ce qu'en dit la
presse. Les deux peuples sont encore sur
leur faim et le départ des deux
présidents n'a rien changé à leurs
conditions de vie et ce sont toujours
les mêmes qui gouvernent. Pour les
Libyens c'est une tout autre affaire.
Ces remarques des commentateurs ont la
pertinence du constat suivant : «se
soulever, payer quel prix et pour quelle
finalité ?» Ils ont tout à fait raison,
une révolution n'est pas un défilé de
mode. Il n'y a rien de plus sérieux, ça
ne relève pas de la génération spontanée
et surtout ça n'obéit pas à n'importe
quelle sirène. Et puis le modèle qui est
proposé est lui-même en fort discrédit.
D'après ce que nous en disent les
dizaines de millions de victimes de la
libre-entreprise et de la finance
débridée, il y a mieux à faire que ce
que décrit, pour la Libye, Eric Zemmour
: «Insurrections populaires encadrées
par les services secrets occidentaux ;
troupes rebelles formées à la hâte par
des instructeurs français ;
bombardements de l'aviation pour user la
résistance des adversaires ; discours
ronflants sur la démocratie, les droits
de l'homme, le sang des civils épargné ;
tyran diabolisé, ostracisé...». Pour
notre part, si révolution il faut faire
c'est celle qui fera voler en éclats
toutes les compromissions avec le
«marché» et qui mettra le peuple au
centre de tout, de la démocratie comme
de l'économie. Rien moins que ce que
demandent, aujourd'hui les manifestants
de Wall-Street, de Madrid, d'Athènes, de
Bruxelles et de toutes les
«démocraties». Cette révolution
n'intéresse pas évidemment ceux qui
parlent le plus de «révolution». C'est
ce que les Internautes algériens
semblent avoir compris.
Article publié sur
Les Débats
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