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Quand la politique tue : les morts
brutales ou suspectes de la vie
politique française
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Mardi 3 mars 2015
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# QUAND LA POLITIQUE TUE
Auteur:
Dominique Labarriere
Editeur:
La Table Ronde
« Le bon politicien a pour tâche
d’éduquer et d’unir les hommes trop
tempérants et trop fougueux pour les
amener à la juste mesure et par là en
faire de bons citoyens, capables de
suivre les lois ou de les critiquer,
s’ils possèdent la science le leur
permettant, en vue du meilleur »
- Platon.
Hier, le ministre français Laurent
Fabius exigeait toute la lumière du
président russe Poutine sur l’exécution
de l’opposant libéral Nemtsov à Moscou
ce 28 février. Le Président français
Hollande sa joignant à cette demande
impérieuse. La Russie serait une espèce
de trou noir de la démocratie mondiale.
Mais Hollande et Fabius sont-ils bien
placés pour exiger quoi que ce soit en
ce domaine ? Car les morts brutales,
suspectes ou mystérieuses sont aussi
l’apanage de la politique française.
Rappelons les dossiers des Bérégovoy,
Boulin, de Broglie, Fontanet et autres
Grossouvre. Tous ministres ou barons de
la Ve République …
Ils ont perdu la vie alors qu'ils
étaient au faîte du pouvoir et des
honneurs. Et avant eux les Carnot,
Jaurès et Doumer sont morts pour des
idées, assassinés par des anarchistes ou
des illuminés. Salengro s'est donné la
mort pour défendre son honneur après une
terrible campagne de diffamation, comme
Bérégovoy et Boulin, salis l'un et
l'autre par la presse. Ayant franchi la
ligne jaune, de Broglie a fait l'objet
d'un contrat ; Joseph Fontanet a commis
l'erreur de se trouver au mauvais
endroit au mauvais moment ; Grossouvre,
enfin, semble avoir choisi le suicide
par dépit.
Un livre sorti en octobre 2014 , QUAND
LA POLITIQUE TUE, évoque des infamies
médiatiques, explore l’énigme de morts
étranges et lève le mystère de certaines
d’entre elles. Surtout, il raconte des
tragédies, humaines avant d’être
politiques. Le livre raconte la fin
brutale de neuf personnages de premier
plan. De l'assassinat de Sadi Carnot en
1894 au suicide de François de
Grossouvre en 1994, un siècle de crises
politiques aigües défile d'un chapitre à
l'autre.
Ce n'est pas la moindre qualité de ce
livre que de restituer, avec précision
mais sans se noyer dans les détails, le
contexte propre à chacun de ces drames.
On sait tous que Jaurès a été assassiné,
mais après les dix pages qui lui sont
consacrées, on saisit mieux l'enjeu de
cette mort. Et c'est sans doute, avec le
contemporain Bérégovoy, le destin le
plus connu. Mais qui se souvient
vraiment de cette terrible campagne de
calomnie sur sa prétendue désertion en
1915, qui poussa Roger Salengro au
suicide ? Et que sait-on aujourd'hui des
dossiers brûlants que Robert Boulin a
emportés avec lui, dans sa mort brutale
et toujours suspecte ? En neuf chapitres
qui se lisent comme autant de
mini-polars, Dominique Labarrière
convainc le lecteur : la politique
française est décidément plus violente
que la fiction.
LES MORTS TRAGIQUES D’HIER …
La place éminente occupée par eux sur le
devant de la scène publique et leur
disparition subite sous forme d’un
rendez-vous inopiné avec la mort sont
les marques premières qui les
assemblent. A des degrés d’implication
différents mais avec une même
appartenance au monde politique, tous
également se sont révélés par une
notoriété ressortie du contexte français
de la République. A partir de là, mais à
des moments distincts et pour des motifs
séparés, se voit leur convergence vers
un sort unique : une mort non point
scellée par la maladie ou l’accident
fatidique, celle que réserva autrement
la brutalité du suicide ou de
l’attentat.
Ils sont alors ces hommes que les
honneurs élevèrent tout d’abord plus ou
moins haut sur les marches glorieuses de
la société nationale lors du siècle
échu, mais qu’un destin tragique frappa
soudainement, souvent sans beaucoup
crier gare. Tour à tour et derrière
elle, chaque victime aura ainsi laissé,
non point de seules évocations
douloureuses, plutôt et surtout d’assez
vivaces suspicions relatives aux causes
ou aux analyses de son décès. Grâce à un
exposé synthétique et clair de la
position de ces acteurs remis au-devant
de leur funeste mésaventure, le
journaliste Dominique Labarrière
explore, une à une et en de saisissantes
chroniques, les circonstances
particulières ayant amené ces ruptures
de vie qui perpétuent encore derrière
elles incertitudes et interrogations.
Sadi Carnot en 1894 et Paul Doumer en
1932 furent deux présidents de la
République française assassinés pendant
l’exercice de leur mandat. L’un à Lyon,
l’autre à Paris incarnaient probablement
au jour de leur exécution ces décideurs
ultimes détenant avec eux la clé de tout
espoir d’un soulagement social et
populaire, celui du redressement
possible et solennel de certaines
iniquités. Distingués alors par des
aptitudes mentales sans comparaison et
ainsi que les présente D. Labarrière,
leur assassin respectif, Santo Ironimo
Caserio pour le premier, Pavel Gorgoulov
pour le second avaient en commun tout
d’abord une naissance étrangère. Non
point qu’il y ait en cela sujet à
détecter la source d’une nuisance
inéluctable, se révèle pourtant sous ce
signal extérieur la flagrance d’un
symbole d’exemplarité longtemps reconnu
à la nation française. Sous le regard du
monde, ne figura-t-elle en effet jamais
cette terre promise à la justice
sociale, à la démocratie et aux moyens
économiques de survie garantis à tous ?
Le premier meurtrier se dévoila
anarchiste quand celui du président
Doumer apparut tel un dérangé mental,
cependant activiste antibolchévique du
Caucase. Ces deux distinctions, que rien
ne semble rattacher absolument,
s’insèrent pourtant au cœur d’un schéma
de société unique et en lequel
probablement toutes deux reflètent le
produit dévastateur des exaltations nées
des pauvretés ambiantes, furent-elle
d’esprit ou plus étroitement
matérielles. C’est bien en tout cas ce
qu’un rapprochement entre ces deux
attentats suggère par la lorgnette
politique.
… ET CELLES MYSTERIEUSES OU SCANDALEUSES
CONTEMPORAINES
Bientôt, de Jaurès à Salengro et jusqu’à
Boulin, Fontanet ou encore Grossouvre,
s’étend ce travail d’enquête qui, sans
les associer directement, les relie
pourtant d’un même genre de préjudice
rencontré. Dans une commune mesure en
effet, tous ces exemples se voient
résolus de morts suspectes ou par des
traitements indélicats quand encore, et
sans doute réside en cela le point
crucial, le spectre général de la
politique leur procure un cadre
d’illustration non moins récurrent que
sous-jacent.
Controverses nées de l’instant ou
résurgentes, orientations d’enquêtes
immédiates ou à contretemps,
spéculations durables autour des
responsabilités, évolutions sensibles
des perceptions liées aux disparitions
tout encore entourées de mystères
énumèrent ainsi cette part conséquente
du contenu auquel l’auteur consacre ses
recherches quelquefois confondantes.
Avec une écriture persuasive sont alors
déployés les récits de ces instants
rocambolesques ou délétères, à travers
lesquels l’avidité de lecture engendrée
par le poignant descriptif des
situations reste accrochée solidement.
LA MORT DU MINISTRE SALENGRO EXEMPLAIRE
ET EXEMPLATIVE
En mauvaise posture à l’Assemblée face à
son virulent persécuteur, Roger Salengro
essuie bientôt dans une prostration
touchante et sous la traduction vibrante
de l’auteur les assauts agressifs du
chef de file de ses accusateurs : «
Epuisé, tant physiquement que
moralement, il fait pâle figure dans
l’hémicycle tandis que le député
Becquart développe son argumentation,
qu’il maîtrise à la virgule près. Il
prépare ses attaques depuis si longtemps
! D’emblée, il donne les noms de ceux,
simples soldats, sous-officiers ou
officiers, dont les témoignages sont
accablants pour le ministre » (p.47).
Le suicide en 1932 et consécutif du
réputé maire de Lille, également membre
éminent du gouvernement de Léon Blum,
n’aura par la suite trompé personne.
Mensonges et calomnies sur son rôle lors
de la précédente guerre furent le plus
sûrement les recours utilisés par les
détracteurs du ministre réputé. Les
attaques du dénommé Becquart apparurent
plus tard par instigation d’une
vengeance plutôt personnelle et tandis
que le verdict des urnes l’avait
auparavant débouté d’une accession
jalouse à la mairie de la grande ville
du Nord…
L’AUTEUR :
Dominique Labarrière est l’auteur de
nombreux romans dits « de gare ». A
enseigné la philosophie. Écrit aussi
sous le pseudonyme « Jacques de Saint
Paul » commun à plusieurs auteurs
d’ouvrages dans la Collection Cécile et
Jean aux Éditions Media 1000 et sous le
pseudonyme « Christian Laurac » commun à
plusieurs auteurs d’ouvrages dans les
collections Aphrodite, Cupidon, Diane,
etc. aux Éditions Eurédif. Responsable
de la rédaction d’un groupe de
périodiques du centre de la France (en
1988). Chroniqueur judiciaire, Dominique
Labarrière a écrit de nombreux ouvrages,
romans d’investigation et essais. Il a
signé, en 2003, Cet homme a été
assassiné… La mort de Bérégovoy, une
enquête sur la disparition du Premier
ministre parue aux éditions de La Table
ronde, ainsi qu’en 2010, L’affaire
Jacques Viguier, publié chez Alphée.
160 pages
ISBN : 9782710371724
EODE
/ 2015 03 02 /
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