Actualité
Ce qui n’a
pas été révélé de la rencontre orageuse
Bandar-Poutine
Al
Manar
Mercredi 21 août 2013
Le quotidien libanais asSafir a
publié sur son site internet les détails
de la réunion orageuse qui a eu lieu à
Moscou au mois de Juillet entre le
président Poutine et le chef des
services de renseignements saoudiens le
prince Bandar ben sultan.
La réunion qui a eu lieu le 30
juillet dans la maison de Poutine située
à la périphérie de la capitale russe,
a duré quatre heures au cours de
laquelle il a été question des
relations bilatérales et d’un
certain nombre de dossiers régionaux et
internationaux communs.
Les relations
bilatérales
Bandar a insisté sur l'importance de
développer les relations bilatérales
entre les deux pays, soulignant que la
mise en valeur des intérêts peut fournir
de grands domaines de coopération en
citant comme exemples les domaines de
l'économie, de l’investissement, du
pétrole et de l'armée.
«Il y a beaucoup de valeurs et de
buts communs, notamment la lutte contre
le terrorisme et l'extrémisme dans le
monde. La Russie et les Etats-Unis,
l'Union européenne et les Saoudiens se
rencontrent sur la question de la
promotion et de la consolidation de la
paix et la sécurité internationales. La
menace terroriste s’est développée suite
au «printemps arabe» . Nous avons perdu
des régimes et en contre partie nous
avons récolté les expériences des
terroristes comme l'expérience des
Frères musulmans en Egypte et celle des
groupes extrémistes en Libye » a affirmé
Bandar.
Et d’ajouter: «A titre d’exemple, je
peux vous offrir une garantie de
protection des Jeux olympiques d'hiver
de Sotchi qui aura lieu sur la mer Noire
la prochaine année. Nous savons que les
groupes tchétchènes menacent la sécurité
des Jeux, nous les contrôlons, ils ne se
rendent en Syrie qu’après
coordination avec nous. Ces groupes ne
nous font pas peur. Nous les utilisons
en face du régime syrien, ils n’auront
aucun rôle ou influence dans l'avenir
politique de la Syrie ».
Aprés avoir remercié le prince Bandar
pour sa visite et saluer le roi
Abdallah, le président Poutine affirme
d’un ton qui annonce déjà une mauvaise
tournure de la rencontre : «Nous savons
que vous soutenez les groupes
terroristes tchétchènes depuis plus
d'une décennie, et ce soutien vous
l’avez bien exprimé en toute franchise
tout juste maintenant. Et donc, je ne
pense pas que nous partageons les mêmes
objectifs en matière de la lutte contre
le terrorisme universelle. Nous sommes
intéressés par le développement de
relations amicales selon des principes
clairs et nets ».
Bandar a déclaré que « la question ne
se limite pas au royaume, il y a des
pays qui ont dépassé leurs rôles définis
, par exemple le Qatar et la Turquie ».
Il a précisé: «Nous avons dit
directement aux Qataris et aux
Turcs que nous refusons leur soutien
illimité aux Frères musulmans en Égypte
et ailleurs. Le rôle des Turcs
aujourd'hui est devenu semblable au rôle
du Pakistan pendant la guerre afghane.
Nous ne sommes contre les régimes
extrémistes religieux : nous souhaitons
instaurer des régimes modérés dans la
région. L’expérience de l’Egypte est
enrichissante et il faut que la Russie
la suive de prés. Nous allons
continuer à soutenir l'armée et nous
allons soutenir le général Abdel Fattah
al-Sisi, surtout qu’il maintient de
bonnes relations avec nous . Nous vous
conseillons de rester en contact
avec lui et de le soutenir. Nous sommes
prêts à signer avec la Russie des
contrats d'armement dans l’intérêt de
ces régimes et surtout l'Egypte.
Coopération
économique et pétrole
Le prince Bandar ben Sultan a d’abord
présenté un exposé des différents
domaines de coopération potentiels
entre les deux pays si un accord se
réalisait sur un certain nombre de
dossiers en particulier la Syrie. Il
s'arrêta longuement sur le pétrole et la
coopération d'investissement: « Etudions
ensemble une stratégie russo-saoudienne
commune concernant le
pétrole. L'objectif est de se mettre
d’accord sur les quantités de pétrole à
produire et le prix du baril afin
de maintenir les prix du pétrole sur les
marchés mondiaux stables ».
« Nous comprenons votre intérêt pour
le dossier du pétrole et du gaz dans la
Méditerranée depuis Israël en passant
par Chypre vers le Liban et la
Syrie jusqu'à la Russie. Nous
comprenons aussi ce que représente le
pipe-line de gaz russe vers l'Europe, et
nous ne sommes pas en concurrence avec
vous. Nous pouvons coopérer dans
ce domaine comme dans les domaines de
raffineries et de la pétrochimie. Le
royaume esten mesure de fournir un
énorme investissement de plusieurs
milliards de dollars dans divers
domaines au marché russe. Mais, il est
important de conclure une compréhension
politique sur un certain nombre de
dossiers, notamment la Syrie et l'Iran
».
Poutine a répondu que « les
idées avancées au sujet de la
coopération en matière de pétrole et de
gaz aussi en matière
d'investissement méritent une étude
de la part des ministères compétents des
deux pays ».
Mais avant
tout..la Syrie
Le chef des services de
renseignements saoudiens s’est
longuement exprimé sur le dossier
syrien faisant valoir la position de
l’Arabie depuis le premier incident en
Syrie à Deraa jusqu'à aujourd’hui:
«Le régime syrien est terminé pour nous
et la majorité du peuple syrien ne
permettra pas à Bachar al-Assad de
rester au pouvoir. La clé pour les
relations entre nos deux pays réside
dans la compréhension de notre
approche envers la crise syrienne. Et
donc, vous devez cesser votre
soutien politique, en particulier au
Conseil de sécurité des Nations unies,
ainsi que votre soutien militaire et
économique, et nous vous garantissons
que les intérêts de la Russie en Syrie,
sur la côte méditerranéenne ne seront
point affectés d'un iota. La Syrie
sera dirigée par un régime
modéré et démocratique directement
parrainé par nous et qui sera tenir
compte des intérêts de la Russie et de
son rôle dans la région ».
Le dossier
iranien
Dans le dossier iranien, Bandar a
dénoncé le rôle de l'Iran
régional, en particulier en Irak, en
Syrie, au Liban, en Palestine, au Yémen
et à Bahreïn et dans d’autres pays,
souhaitant à ce que" les Russes
comprennent que leurs intérêts et ceux
des pays du Golfe sont communs face aux
ambitions nucléaires de l’Iran".
Poutine a répondu en exposant la
position de la Russie envers les
conséquences du «printemps arabe»,
surtout après ce qui s'est passé en
Libye: «Nous sommes très préoccupés par
l'Egypte, et nous comprenons la réaction
de l'armée égyptienne, mais nous
sommes très prudents envers la façon
dont est gérée la crise égyptienne, car
nous craignons que l’Egypte glisse
vers une guerre civile qui serait
trop coûteuse pour les Egyptiens, les
Arabes et la communauté internationale.
J'ai voulu faire une visite rapide en
Egypte .. La question est toujours en
cours de discussion ».
En ce qui concerne l'Iran, Poutine a
rappelé à son hôte saoudien que « l'Iran
est un voisin et que les deux pays sont
liés par des relations bilatérales
depuis des siècles, et donc il y a des
intérêts communs et enchevêtrées depuis
des siècles ».
«Nous soutenons le dossier
nucléaire iranien à des fins pacifiques
et nous avons aidé les Iraniens à
développer leurs sites nucléaires
dans ce sens. Bien sûr, nous allons
reprendre les négociations avec eux dans
le cadre du groupe des cinq plus un, et
je compte rencontrer le président Hassan
Rohani, en marge du sommet de l'Asie
centrale et nous étudierons un grand
nombre de dossiers bilatéral, régional
et international. Et je compte
bien réitérer la position russe
opposée pleinement à de nouvelles
sanctions contre l'Iran au Conseil de
sécurité de l'ONU. Nous croyons que ce
qui a été entrepris auparavant comme
sanctions est injuste contre l'Iran et
les Iraniens et nous refusons de
répéter l'expérience ».
Erdogan à
Moscou en Septembre
Pour ce qui est de la Turquie,
Poutine a parlé de son amitié avec le
Premier ministre Recep Tayyip Erdogan,
en déclarant: «La Turquie est aussi un
voisin et nous sommes liés par des
intérêts communs et nous sommes désireux
de développer nos relations avec ce pays
dans divers domaines. Dans les
rencontres russo-turques, nous avons
procédé à un inventaire des questions
dans lesquelles nous nous opposons et
celles dans lesquelles nous nous
entendons. Et nous avons constaté
qu’il existait beaucoup de convergence
sur un grand nombre de dossiers
J'ai informé les Turcs, et je vais
répéter ma position à mon ami Erdogan,
que ce qui se passe en Syrie a besoin
d'une approche différente de leur part.
La Syrie baigne dans un bain de sang et
la Turquie n’est pas à l’abri.. Les
Turcs doivent être plus
entreprenanst dans le sens de trouver
une solution politique à la crise
syrienne. Nous sommes convaincus qu'un
règlement politique en Syrie est
inévitable, il revient à eux d'alléger
les dégâts. Notre différend avec
eux dans le dossier syrien est politique
et n’influence pas les autres dossiers
de coopération économique et
d'investissement, et, récemment, nous
leur avons dit que nous sommes prêts à
coopérer avec eux pour leur construire
deux réacteurs nucléaires et cette
question sera incluse à l'ordre du
jour lors de la visite du Premier
ministre turc à Moscou en Septembre
prochain ».
Poutine:
Notre position envers Assad ne changera
point
Dans la question syrienne, la réponse
du président russe à Bandar était sans
équivoque : « notre position envers le
régime en Syrie ne changera jamais. Nous
pensons que le régime actuel est le
meilleur régime que puisse bénéficier le
peuple syrien, certainement pas un
régime dévoreur de cœur. A Genève
1 nous nous sommes mis d’accord avec les
Américains sur un certain nombre de
questions et ils ont accepté.
Voire la question de garder le régime
syrien au pouvoir était acceptée
dans le cadre d’un certain compromis.
Plus tard, ils ont décidé de se
retourner contre Genève 1 .. Dans
toutes les réunions entre des experts
russes et américains, nous avons
réitéré notre position, et le ministre
russe des Affaires étrangères Sergueï
Lavrov compte reconfirmer lors de la
prochaine réunion avec son homologue
américain John Kerry, l'importance de
faire tous les efforts possibles pour
parvenir rapidement à un règlement
politique afin de mettre un terme à
l'effusion de sang en Syrie ».
Suite à ce discours, Bandar a mis en
garde contre la mauvaise tournure des
négociations qui risque d’envenimer la
situation, en particulier dans la crise
syrienne, regrettant que les Russes
n’aient pas compris la position de
l’Arabie-saoudite en Egypte en
refusant de soutenir l'armée égyptienne
en dépit de leurs craintes sur l'avenir
de l'Egypte.
Le chef du renseignement saoudien a
conclu sur un ton belliqueux estimant
que le désaccord dans le dossier syrien
mène à la conclusion que «l'option
militaire est inévitable , elle
est la seule option actuellement
disponible à la lumière d'un blocage
d'un règlement politique, et nous
croyons que la convocation à la
Conférence de Genève 2 sera très
difficile dans ce climat orageux».
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