Entretien
- La Voix de
la Russie
La crise se
poursuit :
qu'est-ce qui ruine la France
aujourd'hui ?
Anna
Karpova
© Collage
: La Voix de la Russie
Vendredi 18 octobre 2013
Dans son livre
publié en 2011
Ces mythes qui
ruinent la France Alain
Mathieu, docteur ès sciences économiques
et président de l’association
Contribuables Associés nous en cite une
bonne trentaine. Parmi « ces mensonges
économiques véhiculés par les politiques
ou les médias » on trouve l’idée que «
la relance par la consommation assure la
croissance » ou celle de stéréotypes
imposés comme « notre modèle social
protège les pauvres », ainsi que « les
fonctionnaires ne sont pas des
privilégiés. »
L’auteur a tristement constaté que l
‘Hexagone n‘a eu qu‘une seule bataille à
gagner depuis trente ans, celle des
prélèvements obligatoires : si
l’Allemagne n’a que 55 taxes
obligatoires, la France en a plusieurs
centaines. Le niveau du PIB par habitant
est cinq fois plus bas que dans les pays
voisins, les entreprises nouveau-nées
ont une vie trop courte, la courbe du
chômage est en hausse plus au moins
constante depuis les années 1970. Nous
avons prié Alain Mathieu de dresser le
bilan économique de la première année du
quinquennat de François Hollande et de
répondre à la question essentielle qui
préoccupe tous les français : comment
faire pour échapper à ce déclin.
Alain Mathieu. С‘est
difficile à dire. Ce qui est sûr c‘est
qu‘il faut faire des reformes importants
en France. Tous les organismes
internationaux que ce soit la Commission
européenne, CDE et FMI disent tous qu‘il
y a des réformes importantes à faire en
France et qui ne sont pas faites. Quand
on compare avec l‘Allemagne on aperçoit
qu’il y a 11 % du PIB des dépenses
publiques supplémentaires en France par
rapport à l‘Allemagne dont la moitié
sont les frais personnels des
fonctionnaires et des retraités. Tout
cela sont les charges très lourdes qui
pèsent sur les entreprises françaises
puisque le prélèvement des entreprises
françaises représente 6 % de PIB,
quelques fois de plus que les
entreprises allemandes. Et c‘est
vraiment un grand problème qui est dû à
un manque de contrôle des dépenses
publiques. L‘année prochaine, par
exemple, nous avons 22 milliards comme
montant de la hausse des prélèvements
obligatoires. Les plus touchés sont les
ménages, à 17,2 milliards d’euros.
LVdlR. Selon vous
quelles réformes sont nécessaires pour
changer la situation ?
Alain Mathieu. Si on prend
le problème le plus important qui est la
rémunération des fonctionnaires il faut
noter que le nombre des fonctionnaires
en France et en Allemagne est différant
– il y en a beaucoup plus en France et
ils travaillent moins puisqu‘ils sont à
35 heures par semaine tandis qu‘en
Allemagne c‘est 41 heures. Pour les
enseignants c‘est encore beaucoup plus.
En Allemagne ils ont le temps plein de
présence en école et en France dans le
secondaire ils ont une obligation de
présence pour 16 ou 18h par semaine. En
faisant les dépenses pour l‘éducation en
France sont beaucoup plus importantes à
l’égalité de nombre d‘élèves. Il y a
aussi les retraites qui sont très
différentes : les retraites des
fonctionnaires sont à 70 % beaucoup plus
élevées que celles du secteur privé.
Tout cela peut être corrigé pendant
quelques années si on adaptait par
exemple les mêmes 41 heures qu‘en
Allemagne ou bien les horaires de
présence des enseignants. Mais c‘est
très difficile de faire pour le
gouvernement socialiste français parce
que la bonne partie de ses électeurs
sont dans le secteur public et notamment
dans l’enseignement ainsi que le grand
nombre de ses ministres. Donc ils ont
beaucoup de mal à faire ces reformes que
tous les pays voisins ont réussi à faire
et que tous les instituts internationaux
nous conseillent de faire.
LVdlR. La
baisse de la courbe du chômage en août,
ce qui constituait l'un des engagements
les plus spectaculaires de François
Hollande, a fait parler de la reprise en
France. Partagez-vous cet optimisme ?
Alain Mathieu.
C‘est vrai que la France donne toujours
préférence à son secteur public en
négligeant le secteur privé qui est une
vache à lait pour faire vivre le secteur
public. Et c’est pas François Hollande
qui a très envie de changer cela. En ce
qui concerne la baisse de chômage, cela
n‘améliore que fictivement. Après, cela
s’aggravera bien entendu. Pour que le
chômage baisse significativement dans
l‘avenir il faut créer un grand nombre
des emplois dans le secteur privé. Et
cela n‘est pas le cas. Les entreprises
se ferment aujourd‘hui et le nombre de
chômeurs accroît. Plus généralement, si
l’économie ne se dégrade pas plus que
prévu, ce sont plus de 160.000 emplois
qui disparaîtront cette année, contre
près de 100.000 en 2012.
© 2005—2013
La Voix de la Russie
Publié le 19 octobre 2013
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