Al-Khalil – CPI
Derrière les barreaux
de la prison, la discussion avec Abdou Al-Khaleq, leader
éminent dans le mouvement de la résistance islamique
Hamas, a un autre goût.
C’est
dans la prison que notre Centre Palestinien d’Information
(CPI) a réalisé l’interview avec An-Natcha qui nous a fait
un tour d’horizon de la scène palestinienne. En voici la
traduction d’extraits :
CPI :
Voudriez vous nous
parler des situations médicales, alimentaires et des mesures
sécuritaires ?
An-Natcha :
Tout d'abord, nous
saluons notre peuple. Nous présentons également toutes nos
condoléances aux familles des martyrs. Et nous implorons
Allah le Tout Puissant de venir en aide à notre peuple.
Quant à la position de la prison, elle a
trois volets. Premièrement, la situation intérieure, Dieu
merci, la relation entre les factions enfermées dans cette
prison de Hadarim est excellente. Fraternité et
respectabilité réciproque.
Mais quant à la nourriture, la situation
est très mauvaise, comme dans toutes les prisons d'ailleurs.
Qualité comme quantité. De plus, cela fait longtemps que
l'argent payé pour la cantine par le ministère des captifs
est bloqué. Ce mois, nous en avons reçu une petite partie
seulement. Et concernant la situation sécuritaire, la
situation dépend du groupe sioniste Matsada qui pourrait
semer les troubles à tout moment dans les prisons. Ici, à
Hadarim, la situation serait un peu plus calme qu'ailleurs.
Et pour ce qui est de la santé, il y a
une négligence médicale déclarée, généralement dans toutes
les prisons.
CPI :
Les relations entre les captifs, entre les factions, ici à
l'intérieur de la prison, comment les qualifiez-vous ? Y
a-t-il à l'horizon une tentative de votre part de résoudre
les différences entre le Fatah et le Hamas ?
An-Natcha :
Comme je viens de le dire, les relations sont excellentes,
ici dans la prison de Hadarim. C'est dans les prisons où
l'occupation sépare les factions les unes des autres qu'il
n'y a pas de contact entre les captifs. De la part des
frères du Fatah, il y a des efforts pour rassembler les
captifs entre eux.
En ce qui concerne la situation hors des
prisons, nous souffrons pour ce qui se passe sur la scène
palestinienne, conflits et douleurs des familles. J'aurais
espéré voir le gouvernement d'unité nationale et l'accord de
la Mecque avec plus de temps afin de réussir. Ce ne serait
pas trop tard, si tout le monde dont Abou Mazen assumait sa
responsabilité pour donner au peuple et à sa terre leur
unité. C’est beaucoup plus important que ces négociations
qui ne ramènent ni sécurité, ni liberté, ni indépendance...
CPI :
Quelle est votre
position envers la republication des dessins profanant la
dignité du Messager (P), par la presse danoise ? Et quelle
réaction attendez-vous des ministres arabes de l’information
?
An-Natcha :
Il est vraiment
regrettable de voir, sous le prétexte de la liberté
d'opinion, faire du mal à un milliard et demi de Musulmans !
Je me demande pourquoi on fait tout cela à notre prophète, à
notre nation islamique ! En fait, à notre époque, on ne voit
que la faiblesse de la nation (arabo-islamique), que
l’hégémonie des régimes injustes (sur leurs peuples) et que
la dépendance humiliante de ces régimes à l'Occident. Cette
faiblesse est la cause principale de cette agression contre
l'Islam. Les ministres arabes de l'information, au lieu de
s'accorder à bâillonner l'opinion, doivent mettre un terme à
ces humiliations. Ils doivent mettre les médias arabes et
islamiques au service d'un soutien fort au messager d'Allah
(P)...
CPI :
Beaucoup de données
indiquent l'existence d'un grand projet visant la sainte
mosquée d'Al-Aqsa. Quelles seront les conséquences de ce
projet au moment où la scène palestinienne est tellement
divisée ?
An-Natcha :
Quelques responsables du
peuple palestinien courent pour contacter l'occupation
sioniste, s'attachant aux solutions dites pacifiques sans de
véritables résultats. Ce fait encourage l'occupant à plus
d'agressions contre notre terre et nos lieux saints. Il est
aussi encouragé par la dispersion de la nation
arabo-islamique dont les dirigeants ne veulent que
normaliser les relations avec l'occupant. Nous appelons
alors le peuple palestinien à s'unifier et à arrêter ces
négociations inutiles. Nous appelons également la nation
arabo-islamique à tendre la perche au peuple palestinien et
à faire de la libération d'Al-Quds et de toute la Palestine
sa priorité. Si nous restons à ce stade de passivité, Al-Quds
perdra tous ses aspects particuliers, cette ville sainte qui
mérite de nous tout effort et tout sacrifice.
CPI :
Le blocus, les agressions, la judaïsation d'Al-Quds, que
doivent faire à cet égard les Arabes et les Musulmans ?
An-Natcha :
Il est très regrettable
de voir quelques-uns, parmi nous, qui participent à ce
blocus. Il est primordial de stopper toutes négociations
avec l'occupant jusqu'à ce qu'il arrête son blocus. Les
régimes politiques doivent prendre une position ferme pour
venir au secours des millions qui souffrent de famine et
meurent sans raison. Ces régimes doivent faire le minimum en
retirant leurs ambassadeurs de l'Entité sioniste... Je
m'adresse à nos frères égyptiens, en leur disant que nous
respectons la souveraineté égyptienne. Nous défendons même
la sécurité nationale égyptienne. Nous les appelons
toutefois à prendre une position ferme pour briser le
blocus.
CPI :
Quelles sont les portées
dans la région de l'assassinat d'Imad Moghnia, un grand chef
de la résistance libanaise ? Et cet assassinat serait-il la
cause d'une nouvelle guerre ?
An-Natcha :
L'assassinat du chef Moghnia est catégoriquement
condamnable. Cet assassinat pourrait, à mon avis, laisser la
porte grande ouverte pour une nouvelle guerre. Cette guerre
serait menée par les Etats-Unis, l'Entité sioniste et leurs
alliés contre la résistance des peuples arabes et
islamiques. Cet assassinat n'est qu’un prélude pour de
nouveaux assassinats. Je sollicite alors les chefs nationaux
et islamiques, à l'intérieur comme à l'extérieur, pour
prendre leur précaution.
CPI :
Et pour ce qui est de
la transaction de Chalit ?
An-Natcha :
L'enlèvement du soldat Chalit a sans aucun doute donné
l'espoir aux captifs. Je ne dévoile pas un secret en disant
que tous les captifs comptent sur cette transaction comme
une introduction pour une libération totale de tous les
captifs, en particulier les anciens, les malades, les
personnes âgées, les condamnés à de lourdes peines.
CPI :
En prenant en égard les pressions pratiquées sur le Hamas en
Cisjordanie, que dites-vous des informations qui courent sur
les tentatives de réparation de l'état de division que
connaît la scène palestinienne ?
An-Natcha :
Les frères du Fatah et
ceux de l'autorité ne doivent attendre du Hamas qu'il
brandisse le drapeau blanc. Les deux partis doivent prendre
en considération au premier abord l'intérêt de leur peuple,
de leur cause, de leur terre. C'est vraiment illogique de
s'imposer des conditions l'un à l'autre, au moment où on
court derrière ces négociations inutiles. J'exhorte Abou
Mazen à mettre un terme à toutes les pratiques négatives
menées contre les membres de notre mouvement en
Cisjordanie...
Nous, membres du Hamas, nous insistons
toujours sur la nécessité du retour au dialogue, un dialogue
basé sur les accords du Caire et de la Mecque, ainsi que sur
le document d’entente nationale. Nous croyons que
l'occupation israélienne ne fait que semer la zizanie entre
les membres du même peuple. Les captifs croient que
l'occupant ne rend rien. Et le gouvernement de l'occupation
est trop faible pour qu'il puisse rendre au peuple
palestinien une partie de ses droits...
CPI :
Etant vous-même un captif, le ministère des captifs du
gouvernement inconstitutionnel de Fayyad fait-il son devoir
au service des captifs ?
An-Natcha :
En réalité, je parle
avec amertume. Tout le monde sait que les captifs vivent
dans des conditions catastrophiques. Je dirais au ministère
de Fayyad que les précédents gouvernements n'avaient jamais
retardé l'argent de la cantine. Pourquoi alors actuellement,
plusieurs mois passent sans que nous ayons un sou. Et
lorsque l'argent arrive, certaines factions seront
privilégiées...
Et en ce qui concerne le rôle de ce
ministère dans l'affaire des captifs sur le niveau
extérieur, je trouve qu'il y a une négligence de ce sujet si
important. Je crois qu’il faut activer cette affaire. Nous
sommes plus de onze mille captifs et on ne fait un pour cent
de l'effort que fait l'occupant pour libérer deux ou trois
de ses captifs ! Ce ministère, avec qui que se soit à sa
tête, doit faire de l'affaire des captifs sa priorité. Il
doit mettre en place des commissions juridiques chargées
d'évoquer le sujet des captifs sur la scène internationale.
Toutes les ambassades palestiniennes du monde doivent
exposer cette affaire pour que toutes les institutions des
droits de l'homme et de la société civile en prennent
connaissance et travaillent pour libérer nos captifs.
Enfin, toutes les organisations
palestiniennes doivent faire de l'affaire des captifs leur
première priorité. Elles ont donné leur effort et de longues
années de leur vie pour la cause et pour la patrie.