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Libération

Détenu depuis 2005, ce Franco-Palestinien a été condamné sans preuves en avril. Le Quai d’Orsay et l’Elysée restent muets

Israël : un Français aux oubliettes
Christophe Ayad

Qui a entendu parler de Salah Hamouri ? Quasiment personne. Pourtant, ce Franco-Palestinien de 23 ans est emprisonné depuis trois ans et demi en Israël, où il a été condamné à une lourde peine (sept ans) par un tribunal militaire, sans aucune preuve matérielle. En revanche, le cas Hamouri est bien connu des autorités françaises, alertées par la famille du jeune homme et par plusieurs parlementaires, mais peu pressées, semble-t-il, de soulever le problème auprès de l’Etat d’Israël. En désespoir de cause, sa famille et ses proches ont décidé de lancer une campagne afin d’obtenir sa libération.

Salah Hamouri a été arrêté le 13 mars 2005 sur la route de Ramallah. Deux heures plus tard, la police israélienne retournait l’appartement de ses parents, à Jérusalem-Est, à la recherche de preuves. «Ils ont tout retourné, saisi le disque dur de son ordinateur. Ils sont allés jusqu’à démonter les lavabos», se souvient Denise Hamouri, la mère de l’étudiant en sociologie de l’université de Bethléem. Pendant que son fils est détenu pendant trois mois à la prison de la Moskobieh, à Jérusalem, elle apprend dans la presse qu’il est censé avoir participé à un complot visant à assassiner le rabbin Ovadia Yossef, chef spirituel du parti Shas (ultra-orthodoxe séfarade). Il est aussi accusé d’appartenir au FPLP. Pendant les trois années qui suivent, Salah Hamouri est maintenu en détention administrative, comme la grande majorité des 11 600 prisonniers palestiniens, c’est-à-dire sans supervision de la justice civile. La routine en Israël. A tel point que sa famille ne songe même pas à protester.

Résident. Salah, parfaitement francophone et qui a passé le bac chez les frères de Lasalle, n’a que le passeport français en plus de sa carte de résident de Jérusalem. Sa mère Denise, originaire de Bourg-en-Bresse, vit depuis vingt-quatre ans à Jérusalem avec son mari Hassan, restaurateur. Outre Salah, elle a deux autres enfants et enseigne le français dans un collège catholique. Ce n’est que lorsque Denise Hamouri voit à la télévision les autorités françaises se mobiliser pour faire libérer le soldat franco-israélien Gilad Shalit, retenu en otage à Gaza depuis juin 2006, qu’elle commence à frapper à toutes les portes officielles. Sans grand succès. Bernard Kouchner, de passage dans la région, la reçoit en coup de vent au consulat français de Jérusalem le 16 février 2008. Elle a à peine le temps de lui dire «j’estime que trois ans de prison sont plus que suffisants». Selon un témoin, le ministre comprend qu’elle veut un «procès rapide». «Je vais faire passer le message», promet-il. Deux jours plus tard, l’avocate israélienne de Salah Hamouri, Lea Tsemel, connue pour ses engagements aux côtés des Palestiniens, est contactée par le procureur militaire, qui lui propose un marché : si Salah reconnaît les faits, il prendra sept ans de prison ; sinon, ce sera quatorze. Le dossier est pourtant mince : aucune preuve matérielle, ni armes, ni mail, ni plan, ni écoutes. Les seules «preuves» sont les témoignages, aussitôt rétractés, de détenus palestiniens et l’aveu de Salah, qui a reconnu être passé en voiture devant la maison du rabbin avec un ami, accusé lui aussi. L’avocate conseille à la famille d’accepter car les juges militaires suivent toujours les réquisitions. En tant que Palestinien de Jérusalem, Salah n’a droit à aucune remise de peine. Il ne peut pas faire appel.

«Regrets». Le 10 avril, le jeune homme plaide donc coupable, comme 95 % des prévenus palestiniens. Et le piège se referme : dès lors, les autorités françaises se retrancheront systématiquement derrière la décision de justice et derrière cet aveu de culpabilité. Dans un courrier, Rama Yade va jusqu’à reprocher à Salah Hamouri de ne pas avoir exprimé de «regrets» au procès. Lors de sa rencontre avec Denise Hamouri, fin mai, la secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme semble découvrir le dossier. L’ambassadeur spécial aux Droits de l’homme, François Zimeray, est aux abonnés absents. Tout comme l’Elysée. En juillet, Israël annonce une prochaine libération groupée de prisonniers palestiniens. La famille Hamouri et son comité de soutien suggèrent à Paris de faire pression pour inclure Salah. En vain. «Ces libérations sont politiques, explique Jean-Claude Lefort, ex-député communiste et fin connaisseur de la Palestine. 

Quand l’Etat israélien veut faire un geste, il s’assoit sur les décisions de justice. La justice militaire israélienne est une mascarade de justice. Tout est question de volonté politique.» 
Jean-Claude Lefort, député honoraire

Lefort est l’un des rares à avoir pu visiter Hamouri en prison. Ses parents sont autorisés à le voir deux fois par mois, à travers la vitre blindée du parloir.

Début septembre, Denise Hamouri vient en France, à l’invitation de l’Humanité et des comités France-Palestine. Bien avant son arrivée, elle sollicite une entrevue avec Nicolas Sarkozy, comme les parents de Gilad Shalit. Elle a reçu une réponse le 13 octobre : «emploi du temps trop chargé». Le Quai d’Orsay jure agir dans la «discrétion» pour une «issue humanitaire» ou une mesure de «clémence». Une tiédeur qui contraste avec les mots de réconfort du père de Gilad Shalit, qui avait su trouver les mots pour répondre à la lettre que lui avait envoyé Denise Hamouri en souhaitant la libération de leurs deux enfants. Même s’ils conviennent que leurs situations sont totalement différentes.

© Libération

Publié sur Libération, le 18 octobre 2008
http://www.liberation.fr/



Source : Jean-Claude Lefort


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