Religion
Le discours du Cheikh Tamimi et le pacte d'Omar
Le cheikh Tayssir al-Tamimi - Photo: UAM
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Le jeudi 3 septembre 2009
Le lundi 11 mai 2009 s’est déroulée au centre Notre Dame à
Jérusalem une rencontre interreligieuse en présence du Pape
Benoit XVI. La presse française ne s’est pas étalée sur cette
rencontre mais a fait part d’un
incident où un dignitaire musulman, le cheikh Tayssir al-Tamimi,
chef des tribunaux islamiques palestiniens, s'était emparé du
microphone, demandant au pape de faire « pression sur le
gouvernement israélien pour qu'il stoppe son agression contre le
peuple palestinien » et rapporte que le Pape « Benoît XVI
a alors immédiatement quitté la salle, le Vatican exprimant peu
après son mécontentement ».
Le père Michel Remaud, présent à la rencontre
rapporte l’événement tel qu’il a vécu. Il semble que dans
cette rencontre seuls le Pape et un représentant de l’Eglise
anglicane devaient prendre la parole devant un auditorium plein
à craquer par des prêtres, des religieuses, des rabbins et des
délégués de la communauté musulmane.
Selon le récit du père, l’intervention du Cheikh n’était pas
prévue, mais il semble qu’il avait demandé la parole
discrètement au patriarche latin Fouad Twal, et dès que le Pape
et l’ecclésiastique anglican ont terminé leurs discours, le
Cheikh Tamimi s’est rendu au pupitre, a pris le micro et
commencé son allocution qui a duré presque cinq minutes. Le
Cheikh est allé courageusement jusqu’au bout de son discours
malgré au moins une tentative de le faire arrêter par le
patriarche Twal.
Les propos anti-israéliens du Cheikh semblent avoir embarrassé
le Vatican. Dans un communiqué
officiel du Vatican,
son porte-parole, le Père Federico
Lombardi, déplore que
« cette intervention
a été une négation du dialogue » et souhaite que « le
dialogue interreligieux en Terre Sainte ne soit pas compromis
par cet incident »
Vous trouvez ci-dessous la traduction du discours du Cheikh
Tamimi et que vous pouvez
écouter en Arabe sur le site de l’UAM 93 :
Au nom du Dieu le Miséricordieux, le Tout Miséricordieux. Je
souhaite la bienvenue à sa sainteté le Pape dans la ville de
Jérusalem, la capitale éternelle de la Palestine sur les plans
politique, national et spirituel, centre du voyage céleste de
notre prophète Muhammad (PBSL) et berceau de notre seigneur le
Christ (PSL).
Elle a été ouverte par le commandeur des croyants, Omar Ibn
al-Khattâb, le Calife [deuxième] successeur du Prophète Muhammad
(PBSL) envoyé comme miséricorde pour les Mondes, sans qu’une
seule goutte de sang n’y soit coulée.
Il a rédigé un traité de sécurité
et de paix, le Pacte d’Omar*, en se basant sur les
enseignements révélés au Prophète Muhammad (PBSL).
Il y a instauré les fondations du vivre-ensemble entre les
musulmans et les chrétiens. Il a garanti aux chrétiens la
sécurité de leurs églises, leurs croix, leurs biens et leurs
vies, ainsi que la liberté de leur culte. Et nous continuons le
chemin à sa lumière dans une relation distinguée dont nous nous
enorgueillissons dans le monde.
Nous luttons ensemble, nous subissons ensemble l’injustice de la
colonisation israélienne et ces mesures arbitraires et
oppressives, et nous aspirons ensemble à la liberté, à
l’indépendance et à établir l’état palestinien indépendant avec
Jérusalem comme sa capitale éternelle avec ces lieux saints. Car
c’est la terre des prophéties et des révélations et c’est le
berceau des civilisations.
Elle a été libérée par Salah-uddîne avec son armée qui a
rassemblé les musulmans et les chrétiens côte à côte, et elle a
continué comme le symbole de la tolérance et de la paix jusqu’à
ce qu’elle soit tombée sous l’occupation israélienne en 1967.
Il [l’occupant israélien] l’a annexée à son état en défiant les
messages divins, en profanant son statut spirituel et en
transgessant les traditions et les lois internationales. Il a
fait preuve de mépris envers toutes les valeurs humaines en
détruisant ses maisons et en usurpant des dizaines de milliers
de dounums (un dounum = 1000 mètres
carrés, NdT), où il a construit des colonies pour y loger des
colons étrangers après avoir expulsé des milliers des habitants
autochtones de leurs terre (à
cet instant la voix du patriarche dit au Cheikh que le temps est
terminé, mais le Cheikh poursuit), il l’a isolée avec le mur de l’apartheid qui l’a transformée
en une grande prison et il a interdit aux musulmans et aux
chrétiens d’y entrer pour faire la prière dans ses églises et
ses mosquées. Il a creusé sous les fondations de la mosquée
al-Aqsâ afin de la faire écrouler et la détruire pour construire
le prétendu temple à sa place. Il a construit des synagogues
tout autour, il a pillé le patrimoine islamique, il a détruit et
profané les tombes et il a agressé les fidèles voulant prier et
les moines au Saint Sépulcre aux Pâques.
Il a même transgressé le Shabbat, jour sacré selon la religion
juive, et il s’est basé sur l’avis des rabbins pour tuer des
femmes, des enfants et des vieillards. Il a démoli des dizaines
de mosquées et des milliers de maisons sur leurs habitants (quelques applaudissements)
et il a détruit les hôpitaux et les établissements scolaires
dans une agression contre la bande de Gaza où il a transgressé
les droits de l’Homme d’une manière sans précédent à notre
époque et qui a ébranlé la conscience (une
autre tentative pour remercier le Cheikh Tamimi, mais il
poursuit son discours)...
Votre sainteté le Pape, je vous
exhorte au nom du Dieu l’Un et l’Unique de condamner ces
crimes et d’exercer une pression sur le gouvernement israélien
pour qu’il cesse son agression contre le peuple palestinien (une personne visiblement
fâchée se lève et remonte l’auditorium pour partir), de libérer des
milliers de détenus des cellules de la colonisation, de démolir
le mur de l’apartheid, de démanteler les colonies, de rendre les
terres confisquées à leurs propriétaires, d’arrêter de détruire
les maisons à Jérusalem et d’expulser ses habitants afin de
réaliser la paix juste qui rend les droits aux ayants droits, et
de reconnaître les droits du peuple palestinien dans sa liberté,
son indépendance et le droit du retour des Palestiniens à leurs
foyers dont ils étaient expulsés (la même personne qui voulait partir il y a une minute était
apparemment revenue, car on la voit de nouveau montant avec plus
de détermination pour sortir, mais un organisateur essaie de la
dissuader),
et de créer enfin l’état palestinien indépendant avec Jérusalem
comme son capitale éternelle.
Votre sainteté le Pape, le succès du dialogue interreligieux
implique la condamnation de toute insulte adressée au prophète
de la miséricorde Muhammad (PBSL), à la religion musulmane et à
l’ensemble des Prophètes et des Messagers, ainsi qu’aux livres
saints que Dieu leur a révélés.
Je réitère mon souhait de bienvenue à votre égard dans Jérusalem
le centre du miracle du Voyage nocturne et de l’Ascension, et
qui a une place importante dans la foi d’un milliard et demi de
musulmans et plus de deux milliards de chrétiens dans ce monde (le Patriarche s’approche du
Cheikh pour qu’il s’arrête) à qui il incombe de défendre son statut et son identité.
Je vous remercie et que la paix soit avec vous (applaudissements
soutenus).
Le pacte d’Omar accordé aux habitants d’Elia, al-Quds, en l’an
637
« Au nom du Dieu, le Miséricordieux, le Tout Miséricorde.
Voici ce que donne l’esclave de Dieu, Omar, Commandeur des
Croyants, en guise de protection aux gens d'Elia :
Il leur donne la protection pour eux-mêmes et leurs biens, pour
leurs églises et leurs croix, leurs malades et leurs innocents
ainsi que toute leur communauté, que leurs églises ne soient ni
habitées ni détruites, qu'elles ne soient ni dépouillées ni
diminuées, qu'on ne touche ni à leurs croix ni à leur argent,
qu'ils ne subissent pas de contrainte à cause de leur religion,
qu'on ne porte pas atteinte à l'un d'entre eux, qu'aucun juif
n’habite avec eux à Elia (une condition de capitulation
exigée par le patriarche de Jérusalem sachant que la ville fut
plus ou moins interdite aux juifs par les Romains et puis les
chrétiens depuis l’insurrection juive de Bar Kokhba contre les
Romains en l’an 135, et que les chrétiens gardaient encore en
mémoire la participation des juifs avec les Perses au massacre
des chrétiens et la destruction des églises après la prise de
Jérusalem en 614 par les Perses. Cependant des sources
historiques confirment qu’Omar
autorisa des juifs à s’installer à Jérusalem dans leur
propre quartier, Ndr).
Aux gens d'Elia de s'acquitter du tribut comme le font ceux des
autres cités.
Il leur appartient d'expulser les Romains et les malfaiteurs.
Quiconque parmi ces derniers décide de quitter la ville est
assuré de notre protection pour lui-même et pour ses biens
jusqu'à ce qu'il atteigne son lieu de sécurité, et qui veut y
rester sera protégé, il n'aura qu'à s'acquitter du tribut comme
les autres gens d'Elia.
Et ceux parmi les gens d'Elia qui désirent partir avec les
Romains en emportant leurs biens et en délaissant leurs
oratoires et croix, ceux-là sont assurés de notre protection
pour eux-mêmes et pour leurs églises et croix jusqu'à ce
qu'ils rejoignent leur lieu de sécurité.
Ceux parmi les autochtones, gens de la terre, qui se
trouvaient là, ils peuvent rester s'ils le désirent, il leur
incombe de s'acquitter du tribut à l'instar des gens d'Elia,
s'ils le veulent, qu'ils partent avec les Romains, ou qu'ils
reviennent auprès des leurs, rien ne leur sera pris avant la
récolte.
Par le contenu de cet écrit, nous engageons le serment de Dieu
et la garantie de Son Envoyé ainsi que celle des califes et des
croyants auprès de tous ceux qui s’acquittent du tribut.
En furent témoins Khaled Ibn al-Walîd, ‘Amr Ibn al-‘Aç, ‘Abd er-Rahmân
Ibn al-‘Awf, Mu’âwiya Ibn Abî Sufyân.
Ecrit et prêt à l’application en l’an quinze de l’hégire (soit
637 après JC) ».
Traduction et commentaires par Yad-la-Joie
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