Venezuela
Comprendre la défaite d’un coup d’État
et…
des médias internationaux
Thierry Deronne
Nicolas
Maduro, le 10 mars, lors de la remise de
diplômes à 2500 nouveaux médecins
intégraux communautaires. Actuellement
on compte 20 mille 538 étudiant(e)s de
cette carrière dans six universités
nationales. Le président a annoncé la
récupération de 24 hôpitaux publics et
un budget de 1492 millions de bolivars
pour la construction et la réparation de
centres de santé de la mission "Barrio
Adentro".
Mercredi 12 mars 2014
Un des objectifs de l’extrême
droite était de faire "le nécessaire"
pour substituer le processus d’une
démocratie participative par l’image
mondiale d’un État répressif. Mais alors
qu’on a rempli partout les yeux de la “répression-au-Venezuela”,
les 90 % des vénézuéliens se sentent
étrangers à cette réalité virtuelle.
Pourquoi ? Parce qu’ils vivent en paix
sur la quasi-totalité du territoire. A
l’Ouest et au centre de Caracas, habités
par la majorité populaire, pas de
violences, pas de journalistes, pas de
pixels pour la voix off : “Venezuela",
"révolte", "répression”.
On a montré
des marches de l’opposition, parties des
quartiers riches. Mais sous le vernis
obligé de slogans “sociaux” ou
“populaires” il n’y a que le triple
désir de ceux qui n‘acceptent pas la
défaite électorale : économie
privatisée, apartheid social, obéissance
aux États-Unis. Dans le même temps, les
médias ont caché les mobilisations des
travailleurs pétroliers, des étudiants
bolivariens, des mouvements de femmes,
des fédérations paysannes, des personnes
âgées, des organisations communales, des
communicateurs populaires, des médecins
intégraux comunautaires pour défendre la
poursuite du programme choisi par la
majorité. Occultées, les mesures prises
lors des rencontres entre ces collectifs
sociaux et le gouvernement pour
refinancer le système des hôpitaux
publics, les projets portés par les
organisations comunales, les allocations
sociales ou la production agricole. Rien
sur les centaines de millions de
bolivars destinés à concrétiser les
objectifs approuvés par les électeurs
et le fait que
80 % des étudiants et des travailleurs
du secteur universitaire suivent les
cours et travaillent normalement.
Sur 67 universités publiques, seuls 5
conseils universitaires se sont
prononcés en faveur de la suspension des
cours.
Le 9 mars
à Caracas, Maduro rencontre des
mouvements communaux venus de tout le
pays et annonce l’octroi de 2400
millions de bolivars pour qu’ils
puissent réaliser leurs projets
socio-productifs ou de construction de
logements.
12 mars, à
Caracas. Marche d’étudiants de milieu
populaire pour défendre les institutions
démocratiques face aux violences de
l’extrême droite.
Une des impasses auxquelles a mené
l’uniformisation médiatique à partir des
années 80 est que l’Amérique Latine
n’apparaît plus que dans la
fragmentation humanitaire, éphèmère
(victimes indigènes, drames humains,
écologiques, etc..) ou lorsqu’un pic de
désinformation épouse un programme de
déstabilisation (comme celui qui vient
d’échouer). Hors de ces instants et de
ces “morts sur commande”, les 99 % du
temps et les 99 % de l’espace d’un
continent restent hors de portée de
l’occidental.
Si les médias
renouaient le lien avec les intérêts des
citoyens, redevenaient attentifs à ce
que “le peuple discute avec le peuple”
(Sartre, fondant “Libération”), ils
informeraient sur ce qui fait qu’ici, le
mot “politique” retrouve son sens alors
qu’il indiffère la majorité des
occidentaux. La construction d’un État
participatif au Venezuela n’attire pas
micros et caméras. Elle apporte pourtant
les clefs : enjeux et contradictions
d’une révolution pacifique face à des
obstacles tels que la déflagration
urbaine post-pétrolière (qui porte plus
à l’isolement du consommateur qu’á la
production et à la solidarité) ou
l’hégémonie des médias privés (qui
dénigrent la sphère publique).
Il y a
quelques jours, au cours d’une réunion
de l’Organisation des États Américains
(OEA), jusqu’ici soumise aux États-Unis,
29 pays ont voté une déclaration de
solidarité avec les efforts de paix du
gouvernement Maduro – seuls les
États-Unis, le Canada et Panama ont voté
contre. Avec les positions de l’UNASUR,
de l’ALBA, de la CELAC et du MERCOSUR le
Venezuela compte sur une unité qui fait
son chemin : dimanche, le Salvador a élu
président Salvador Sanchez Ceren, plus à
gauche que son prédécesseur, et désireux
d’adhérer à l’ALBA; la nouvelle
présidente du Chili, Michelle Bachelet,
a annoncé le 7 mars “son soutien sans
restrictions au gouvernement bolivarien
du Venezuela” et son refus
“d’appuyer des initiatives contraires au
verdict des urnes ou des actions
violentes visant à déstabiliser un
gouvernement démocratiquement élu”.
L’UNASUR se réunira sous peu pour –
explique le président équatorien Correa
– “prendre position sur base de la
vérité, et la vérité est que c’est le
gouvernement légitime du Venezuela qui
est persécuté, que Nicolas Maduro est
humaniste, qu’il ne serait jamais
capable de réprimer son peuple, et qu’on
tente de le déstabiliser”.
T.D.,
Caracas, 12 mars 2014
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