Venezuela
Orwell renvoyé au vestiaire
Thierry Deronne
Vendredi 7 mars 2014
Dans un
quartier huppé de Caracas, mises en
scène destinées à l’opinion publique
internationale. L’image de ces jeunes "guarimberos"
d’extrême droite, alliée à l’occultation
des marches pacifiques d’une majorité de
vénézuéliens pour défendre leur vote, a
produit une inversion du réel sur les
petits écrans du monde entier.
L’arroseur
arrosé. Cete photo prise le 4 mars dans
le quartier riche d’Altamira montre
l’agression de journalistes de
médias
privés vénézuéliens
(dont l’un est jeté au sol) et d’agences
de news comme AFP, EFE ou Reuters par
les militants d’extrême droite qu’ils
faisaient pourtant passer pour des
"démocrates".
Caracas,
février 2014. Manifestation pacifique
exigeant le respect du résultat des
élections et la fin de des efforts de
déstabilisation par les États-Unis,
image occultée dans les médias
occidentaux.
C’est sous
l’effigie d’un chaviste pendu haut et
court que la dirigeante de droite María
Corina Machado tient un discours dans
l’État de Tachira (région sous influence
des paramilitaires colombiens et des
puissantes mafias de la contrebande
d’aliments et de carburant, où ont
débuté les violences de février 2014).
Dès juin 2013 une conversation
téléphonique révélait les contacts de
María Corina Machado avec le
gouvernement des États-Unis. On l’entend
insister sur la nécessité
d’organiser un nouveau coup d’État
précédé de "confrontations non-dialogantes"
(sic).
A
Valencia, dans le centre du pays, des
étudiants de droite pendent les effigies
de militants bolivariens, dans le plus
pur style du paramilitarisme colombien
ou des cartels mexicains.
En
transformant les violences de l’extrême
droite vénézuélienne en "révolte
populaire", en rhabillant en
"combattants de la liberté" des jeunes
issus des classes aisées et nostalgiques
de l’apartheid des années 90, c’est
d’abord contre les citoyens européens
que l’uniformisation médiatique a sévi :
la majorité des auditeurs, lecteurs et
téléspectateurs ont accepté sans le
savoir une agression visant à annuler le
choix des électeurs et à renverser un
gouvernement démocratiquement élu. Sans
démocratisation en profondeur de la
propriété des médias, la prophétie
orwellienne devient timide. L’Amérique
Latine est assez forte et solidaire pour
empêcher un coup d’État comme celui qui
mit fin à l’Unité Populaire de Salvador
Allende mais la coupure croissante de la
population occidentale avec le monde
risque un jour de se retourner contre
elle-même.
T.D.,
Caracas, mars 2014
Le dossier Amérique latine
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