Hassan Nasrallah : la cause
palestinienne
et la mosquée Al-Aqsa sont
en danger mortel
Samedi 16 décembre 2017
Discours du
Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed
Hassan Nasrallah, le 7 décembre 2017,
suite à la décision de Donald Trump de
reconnaître Al-Quds (Jérusalem) comme
capitale d’Israël
Louange à Dieu,
Seigneur des Mondes, et que les prières
et les salutations soient sur notre
Maître et Prophète, le Sceau des
Prophètes Abul Qasim Muhammad b.
Abdillah, sur sa famille excellente et
purifiée, sur ses compagnons choisis et
fidèles ainsi que sur l’ensemble des
Prophètes et Envoyés.
Que la paix soit
sur vous tous, ainsi que la Miséricorde
et les Bénédictions de Dieu.]
Le sujet de mon
intervention de ce soir est la décision
américaine récente annoncée hier par le
Président des Etats-Unis d’Amérique
quant à sa reconnaissance d’Al-Quds
(Jérusalem) comme capitale d’ « Israël »
entre guillemets, (ou plutôt) de
l’entité sioniste.
Mais avant de
commencer (mon propos), je me dois,
alors que nous sommes toujours dans
l’ambiance de ces commémorations bénies,
d’adresser mes félicitations à
l’ensemble des musulmans du monde à
l’occasion de l’anniversaire de la
naissance du Plus Grandiose des
Prophètes ces jours-ci, le Sceau des
Prophètes, Muhammad b. Abdillah, paix et
bénédictions de Dieu sur lui et sur sa
famille, ainsi que la naissance bénie de
son descendant l’Imam Ja’far al-Sadiq,
paix sur lui.
O mes frères et
sœurs ! Comme cela a été dit hier dans
plus d’un endroit du monde arabe et
islamique, nous avons le sentiment
d’être face à une nouvelle Déclaration
Balfour, une seconde Promesse Balfour.
Est-ce une coïncidence ou un calcul,
(exactement) 100 ans après la première
Déclaration Balfour, une seconde
Promesse Balfour nous frappe.
Je souhaite parler
de trois points à ce sujet, avec (toute)
la concision possible, malgré le grand
nombre de points qui devraient être
développés à ce sujet. Le premier point
concerne la compréhension (de la nature
et de l’ampleur) des dangers de cette
décision américaine, et de certains des
dangers qui s’y ajoutent. Le second
point évoquera certaines causes et
conséquences de cette décision
américaine, à savoir ce qu’elle
signifie, ce qu’elle démontre et ce
qu’elle révèle. Le troisième point sera
la prise de position qui s’impose. Et
enfin une conclusion.
Premièrement, en ce
qui concerne la compréhension des
dangers entraînés par la décision
américaine. Si nous comprenons l’ampleur
des dangers entraînés par cette
décision, cela constituera un
encouragement pour nous tous à agir et à
assumer nos responsabilités, et
également, par ailleurs, à ne pas
écouter les voix qui vont s’élever dans
les prochains jours, lorsque chacun fera
part de sa position, je m’attends à ce
que nous entendions des voix dans le
monde arabe et islamique qui affirmeront
que ce qui s’est passé n’a pas
d’importance ou de valeur, qu’il ne
s’est rien passé (qu’il n’y a pas de
quoi s’inquiéter), et par conséquent,
(nous entendrons malheureusement) des
démentis quant à l’importance et aux
dangers de cette décision.
En considérant les
dangers (impliqués par cette décision),
une brève introduction : nous savons
tous que l’ennemi israélien, cette
entité et ses dirigeants, par principe,
ne respectent pas les résolutions
internationales – c’est quelque chose de
prouvé et d’établi, il suffit de
considérer l’ensemble des résolutions
internationales (s’appliquant à Israël)
–, ils ne respectent pas les conventions
internationales, ils ne respectent pas
les accords internationaux, et ils ne
respectent même pas les accords qu’ils
ont eux-mêmes (élaborés et) signés.
Leurs intérêts priment sur tout et ont
toujours le dernier mot. Et ils ne
respectent même pas ce qu’on appelle la
communauté internationale ou la volonté
internationale. Ils se moquent de ce que
disent les pays arabes, les pays
islamiques, les pays européens – oui,
même les européens –, les Russes, la
Chine, l’Amérique Latine, le Canada ou
l’Australie. Pour cette entité, la seule
chose qui importe fondamentalement, ce
sont les Etats-Unis d’Amérique et la
position américaine. C’est (une réalité)
bien connue.
Et par conséquent,
durant les décennies passées, les
gouvernements successifs de l’ennemi ont
essayé de prendre possession d’Al-Quds,
de s’en emparer, à tous les égards :
humainement, au niveau des habitants,
des lieux saints, à tous les niveaux.
Mais les gouvernements américains
successifs également, au prétexte d’être
les garants de la paix, de parrainer les
négociations, de veiller
(impartialement) à respecter l’équilibre
entre les pays de la région, entre
Israël et ses alliés arabes, etc.,
autorisaient parfois de manière limitée,
et parfois interdisaient, les mesures
israéliennes (d’accaparement graduel)
d’Al-Quds. Par exemple, en ce qui
concerne le processus d’expulsion
progressive des Palestiniens d’Al-Quds,
petit à petit, parfois les Etats-Unis
détournaient le regard et permettaient
ces expulsions – comme on dit, ils
fermaient les yeux –, et parfois ils les
interdisaient et prenaient une position
(contre). Tout avançait dans ce cadre
(de faux-semblants). En ce qui concerne
la construction de colonies, même chose,
elle se faisait petit à petit : parfois
ils s’y opposaient, parfois ils la
facilitaient, parfois ils détournaient
le regard. En ce qui concerne
l’appropriation de maisons et de biens
des Palestiniens, même chose. En ce qui
concerne l’avancée progressive vers la
mosquée Al-Aqsa, même chose. Ainsi, la
position américaine constituait une
protection ou un encouragement, d’une
manière ou d’une autre, faisant en sorte
qu’Israël ne s’empare pas (ouvertement
et) d’un seul coup de toute la ville, et
que le projet sioniste à Al-Quds ne
s’accomplisse pas complètement (d’un
seul coup mais graduellement).
Si nous sommes
attentifs (aux données de) cette
introduction, nous comprendrons le
danger de la nouvelle décision
américaine. Car que leur a dit Trump ?
Il leur a dit : « Cette (ville)
d’Al-Quds, toute entière, Ouest et
Est, est à vous, c’est votre terre,
c’est votre capitale. Elle est soumise à
votre souveraineté. » Par conséquent,
c’est fini, l’encouragement tactique
américain, qui s’expliquait par la
diplomatie, la politique des
(pseudo-)négociations, de la mesure et
de l’équilibre des positions entre
l’entité sioniste et les pays arabes et
islamiques, tout cela s’est écroulé
hier, abattu par un coup fatal.
Maintenant, le gouvernement ennemi,
Netanyahu et son parti, n’ont plus
d’obstacles face à eux, après cette
position américaine. Et cela nous amène
à entrer dans quelques détails au sujet
des dangers. Je vais les énumérer de
manière progressive, jusqu’au plus grand
danger.
Premièrement, les
habitants palestiniens d’Al-Quds Est :
quel sera leur sort après cette décision
américaine ? Est-ce que la nationalité
israélienne leur sera imposée ? Comme
pour les Palestiniens de 1948 ? Ou
est-ce qu’ils seront expulsés ? Etc.,
etc., etc. Qu’est-ce qui les attend ? Si
par le passé il y a avait des limites au
sujet de l’expulsion des Palestiniens
d’Al-Quds, après cette décision,
les portes sont ouvertes (à tout).
Deuxièmement, quel
est l’avenir des biens des Palestiniens
à Al-Quds ? Par le passé, on a vu dans
les médias de (tragi-)comédies
israéliennes : ils s’emparaient d’une
maison ici, de deux maisons là, ils
construisaient une maison ici ou là,
tantôt au prétexte de violations de la
loi, d’absence de permis de construire,
etc., etc. Mais maintenant, quel sera le
sort de ces biens ? L’accaparement (par
Israël) ? La destruction ? Car
maintenant, en ce qui concerne la
souveraineté, c’est terminé, il n’y a
plus aucune interdiction américaine, et
les Israéliens se comporteront avec une
souveraineté totale. Donc les biens des
Palestiniens, leurs maisons, leurs
propriétés, leurs champs, leurs terres à
Al-Quds (sont tous sous menace imminente
d’accaparement ou de destruction).
Troisièmement, par
le passé, si une colonie était
construite, cent ou deux cents maisons,
et que les voix (de protestation) des
Européens s’élevaient, que les
Américains leur disaient « Fermezla » et
« Restez tranquilles », maintenant, nous
allons assister à un mouvement de
colonisation massif et rapide, sans
aucun obstacle et sans aucune limite à
l’intérieur de l’Est d’Al-Quds et dans
toute l’agglomération de la ville
d’Al-Quds.
Quatrièmement,
Al-Quds va s’étendre davantage en
direction de la Cisjordanie, sous
l’intitulé du « Grand Al-Quds ». Demain,
tout ce qui avoisine Al-Quds sera
intégré au « Grand Al-Quds ». Et cela
sera même acté dans les négociations,
s’il peut encore y avoir des
négociations.
Et à ce niveau – en
ce qui concerne les habitants, les
propriétés, les maisons et les colonies,
la colonisation, tout ce qu’ont fait les
Israéliens durant des décennies, ils
feront bien davantage en une période de
temps très restreinte. Et c’est là un
grand danger.
Cinquièmement, et
on arrive également aux plus grands
dangers, le sort des lieux saints de
l’Islam et du Christianisme. Auparavant,
Al-Quds avait un statut spécial, reconnu
par la communauté internationale, etc.
Maintenant, que reste-t-il de ce statut
spécial ? Rien du tout. La souveraineté
sur les lieux saints musulmans et
chrétiens, selon la reconnaissance
américaine, appartient aux Israéliens.
Et ils sont libres de faire ce qu’ils
veulent. Et nous entendons depuis le
début, et durant ces dernières années,
des voix qui s’élèvent, affirmant que
c’est l’occasion historique de
reconstruire le Temple [juif de Salomon,
ce qui implique la destruction de la
mosquée Al-Aqsa], et de réaliser les
projets sionistes à cet égard. Après
cette déclaration, on peut en toute
franchise affirmer que les lieux saints
musulmans et chrétiens sont en grand
danger, qu’on doit tirer la sonnette
d’alarme, mais ce qui est en plus grand
danger encore, c’est la mosquée Al-Aqsa
elle-même. La mosquée Al-Aqsa elle-même.
Que personne ne soit surpris si un jour,
avec tout ce qui se passe dans le monde,
on se réveille un matin et qu’on
s’entende dire qu’il y avait des cavités
sous la mosquée Al-Aqsa, qu’on ne sait
pas ce qui s’est passé, qu’un tunnel a
été creusé ou un mur détruit et que la
mosquée a été (accidentellement)
détruite, ne nous en voulez pas
Mesdames, Messieurs. Cela peut se
produire n’importe quelle nuit, à
n’importe quel instant. Donc le sort
même des lieux saints musulmans et
chrétiens, surtout la mosquée AlAqsa,
(est gravement menacé).
Sixièmement,
l’avenir de la cause palestinienne dans
son ensemble. Car Al-Quds est le cœur
même de la cause palestinienne, son
socle, son Axe, son fondement. Lorsque
de fait, Al-Quds est retirée de cette
cause, qu’en reste-t-il ? Il n’en reste
rien. Aujourd’hui, que dit Trump aux
Palestiniens et au peuple palestinien,
aux communautés arabe et islamique et au
monde entier ? « Il n’y a plus de
cause palestinienne. C’est terminé. Il y
a des individus Palestiniens, certains
sont présents à l’intérieur de
(l’entité) ‘Israël’ d’après leurs
termes, certains sont à l’extérieur, il
faut trouver une solution. Voyons donc
où on peut les loger, les installer,
peut-être qu’on peut les emmener en
Jordanie ou leur donner le Sinaï
(égyptien), leur donner une sorte
d’autonomie administrative. Et que faire
de ceux qui sont à Gaza ? » Telle est
(toute) l’étendue de la question.
Mais quant à la
cause palestinienne, le cœur et le
fondement de la cause palestinienne
qu’est AlQuds, en ce qui concerne les
Etats-Unis, cette question a pris fin
hier. Et cela même pour ceux qui croient
en la voie des négociations (ce qui n’a
jamais été le cas du Hezbollah). Et à
plus forte raison pour l’avenir de
l’Etat palestinien indépendant dont la
capitale est la sainte Al-Quds. Que
reste-t-il d’Al-Quds pour les
Américains, qui puisse être négocié et
obtenu (pour capitale de la Palestine) ?
Indépendamment (des différences entre
ceux qui) revendiquent la Palestine
(toute entière) de la Mer (Méditerranée)
au fleuve (Jourdain), qui acceptent les
frontières de 1967 de manière permanente
ou qui acceptent les frontières de 1967
de manière provisoire, les Palestiniens
sont unanimes sur le fait que la
capitale de l’Etat palestinien, quelle
que soit son étendue, doit être Al-Quds
Est. Aujourd’hui, les Américains ont
rayé cela de manière définitive.
Les Américains, les
(prétendus) parrains des négociations et
garants des accords – lorsqu’ils
aboutissaient –, déclarent à nous tous
et aux Palestiniens qu’Al-Quds ne fait
pas partie des négociations, que c’est
terminé, que ce n’est pas un sujet de
débat, de négociation ou même de
discussion. Si les négociations se
poursuivent, il faudra parler d’autres
choses, mais (en aucun cas) d’Al-Quds.
Qu’est-ce que cela signifie ? Pour ceux
qui sont intéressés par les négociations
et par ce qu’on appelle « le processus
de paix », en toute clarté et en toute
franchise, certains l’ont déclaré, hier,
Trump a tiré la balle ultime (et fatale)
sur ce processus. Et certains ont même
déclaré que c’était un processus mort-né
dès le départ, mais que Trump a eu le
courage d’annoncer son décès. Mais il y
a peut-être encore, dans le monde arabe,
des gens qui insistent pour affirmer
qu’il est encore en vie.
Un autre danger –
et je conclurai (le premier point)
là-dessus – également en ce qui concerne
ce qui se trouve en dehors d’Al-Quds,
lorsque les Etats-Unis ont l’audace de
s’en prendre à ce qui est le plus cher
aux Palestiniens, aux Arabes, aux
musulmans, aux chrétiens, aux mondes
arabe et islamique, et de s’en emparer
ainsi – je parle d’Al-Quds –, demain,
que sera donc le sort de la Cisjordanie
? Que sera le sort du Golan (territoire
syrien occupé) ? Des fermes de Cheb’a et
des collines de Kafar Chouba
(territoires libanais occupés) ? Et de
toute autre chose ? Lorsqu’ils ont
l’audace de s’en prendre à ce qui t’est
le plus cher, le plus saint, sans rien
craindre, sans prendre le moindre
élément en considération, comment se
comporteront-ils donc avec ce qui lui
est incomparable en sainteté, en
importance, et (pèse infiniment moins)
sur les aspects de la civilisation, des
sentiments (nationaux), de la religion ?
Et c’est pourquoi toutes les autres
causes qui sont l’objet d’une lutte avec
l’ennemi israélien seront menacées,
surtout si on se tait face à cette
dangereuse décision. Ce ne sont que
quelques-uns des dangers, énoncés de
manière rapide.
Maintenant, si on
s’arrête et qu’on y réfléchit posément,
qu’on y consacre un peu de temps, 24
heures, deux ou trois jours, que les
gens s’assoient et y réfléchissent
(ensemble), on découvrira beaucoup
(d’autres) dangers contenus dans cette
décision, surtout si elle ne rencontre
que le silence, car au-delà de ce qui
touche au conflit israélo-arabe, l’un
des plus grands dangers est que les
Américains n’aient plus aucune retenue
ou limite (pour) tout ce qui se trouve
dans le monde arabe et musulman. Car la
communauté qui se tait face au viol
d’Al-Quds, arrachée de force à son
histoire, à sa civilisation, à son cœur,
à sa raison, à son âme et à ses
sentiments (les plus profonds) est une
communauté qui peut abandonner n’importe
quelle autre chose, qu’elle ait un lien
avec le conflit israélo-arabe ou avec
toute chose qui susciterait les
ambitions ou la convoitise de
l’administration américaine.
Abonnement newsletter:
Quotidienne -
Hebdomadaire
Les avis reproduits dans les textes
contenus sur le site n'engagent que leurs auteurs.
Si un passage hors la loi à échappé à la vigilance
du webmaster merci de le lui signaler. webmaster@palestine-solidarite.org