Les 7 du Québec
De la guerre monétaire à la guerre
boursière
vers la guerre nucléaire
Robert Bibeau

Mercredi 28 décembre 2016
http://www.les7duquebec.com/...
C’est un lieu
commun de constater que l’économie
impérialiste est désormais mondialisée
et globaliser si bien que la hausse des
cotes de la bourse ; l’équilibre des
balances commerciales ; les déficits
budgétaires gouvernementaux ; les
réserves monétaires et les taux de
change ; les taux d’intérêt directeurs
des banques centrales sont autant
d’indicateurs interdépendants dont les
effets s’entremêlent et se
démultiplient. Tous ces indices
reflètent l’état de santé des forces
productives et des moyens de production
dans chaque économie nationale et dans
l’économie impérialiste mondiale. Ainsi,
suite à l’élection de Donald Trump,
45e Président des États-Unis,
les cambistes ont constaté une tendance
à la hausse des marchés boursiers et ils
affirment que cela confirme une reprise
de l’économie impérialiste mondiale (1).
Surprise sur les
marchés.
Les places
financières ont réagi de manières
dispersées au lendemain de l’annonce de
la victoire de Donald Trump. Les
Asiatiques ont reculé : plus de 5% de
perte pour les indices Nikkei à
Tokyo et Hang Seng à Hong Kong.
Les Européennes ont boudé oscillant
entre -0,4% à Madrid et +1,99% à Zurich,
le BEL20 et le CAC40 s’appréciant de
respectivement +1,42% et +1,49%. C’est
contre toute attente la réaction des
marchés américains qui a surpris. Alors
qu’ils vivaient dans la crainte d’une
stagflation, d’une guerre
commerciale avec la Chine, et des
prétentions isolationnistes de Donald
Trump, l’homme d’affaires aura
finalement donné tort à tous les
analystes et à toutes leurs prévisions
alarmistes, ce que nous avions anticipé,
car au-delà des écrans de fumée
médiatiques, Donald était l’homme de
l’establishment financier américain tel
que nous l’avions annoncé (2).
« Non seulement
Wall Street n’a pas enregistré les
reculs prédits, mais a enchainé les
hausses. Au lendemain de l’élection,
l’indice total du marché américain Dow
Jones Wilshire 5000 (noté W5000)
clôturait en hausse de 1,41%, l’indice
des 30 « blue chips » américaine Dow
Jones Industrial Average (noté DJI)
gagnait 1,40%, tandis que l’indice des
valeurs technologiques Nasdaq (noté
IXIC) se contentait d’un gain de 1,11%.
Deux semaines après l’élection, les
gains enregistrés depuis le 8 novembre
s’établissent à respectivement +4,13%,
+3,77% et +3,71% pour ces trois indices »
(3).
L’or résiste et les
industriels de l’armement recueillent le
pactole.
Dans le même temps
l’or résistait dans son rôle de valeur
refuge et s’appréciait de plus de 5%,
signe que les investisseurs ne partagent
pas l’optimisme des boursicoteurs. Mais
les secteurs de l’armement seraient les
grands gagnants, car ces indices
boursiers performent davantage que tous
les autres. Ainsi, Le New York Stock
Exchange Arca Defense Index, composé
de 26 firmes parmi les plus puissantes
de l’industrie aux États-Unis, dont les
« Big Six » (Lockheed Martin,
Boeing, Raytheon, General Dynamics,
Northrop Grumman et L-3
Communication). Établi avec valeur
de référence de 500 points le 28
septembre 2001 – quelques jours après
les attentats – il atteint 3 776,70
points le 22 novembre 2016, ce qui
correspond à une appréciation de 655%
depuis sa création il y a quinze ans.
Le 9 novembre 2016, à la fermeture de
Wall Street, l’effet Trump a propulsé
l’indice de l’armement DFI à +6,49% en
une séance. Et la hausse s’est
poursuivie, fixant la plus-value à
15,05% en deux semaines (4).
Finalement, celui
que les analystes présentaient comme un
vecteur de paix, le comparant à
Hillary Clinton la criminelle de
guerre, serait en réalité le fauteur de
guerre espéré par l’establishment et
l’industrie de l’armement qui auraient
habilement dissimulé leurs intérêts
secrets ? Il n’en est rien cependant !
Nous l’avons largement expliqué dans des
textes précédents, un chef d’État n’a
pas la capacité de développer une
politique différente de celle de ses
prédécesseurs (sauf pour des détails
mineurs) et quel que soit le vainqueur
des mascarades électorales, la politique
d’une nation est tracée par l’évolution
des indicateurs économiques que nous
évoquions plus tôt : Taux de change,
dette souveraine, équilibre budgétaire,
balances commerciales et des paiements,
productivité du travail, endettement des
ménages, taux d’intérêt, taux de profit
moyen, etc. Donald Trump ou
Hillary Clinton à la présidence,
aucune de ces variables fondamentales
n’aurait changé le 8 novembre dernier.
Alors, comment expliquer la remontée des
cours boursiers et de la valeur du
dollar plombé ?
C’est que Donald
Trump accède au pouvoir en déclarant
qu’il fera des tas de dépenses en
armement, en infrastructure (1,800
milliards USD), et qu’il réduira
d’autant les impôts et les autres
revenus de l’État aggravant le déficit
budgétaire américain déjà effarant (ce
qu’Hillary aurait fait si elle avait été
élue). Il ajoute qu’il bloquera ou du
moins tentera de nuire aux importations
de produits chinois et mexicains sur le
marché américain. De plus, comme nous
l’avions annoncé, la Réserve Fédérale
américaine accède à la demande du
capital de hausser le taux directeur,
renchérissant le loyer de l’argent,
alors que les entreprises et les ménages
sont grevés d’emprunts.
« Les
investisseurs s’attendent à ce que la
Réserve fédérale américaine relève ses
taux à l’issue de la réunion de son
comité de politique monétaire des 13 et
14 décembre. Ils surveilleront
attentivement toute indication sur la
trajectoire à venir de la politique
monétaire » (5).
Quelles seront les
conséquences de ces décisions
catastrophiques ?
Ces décisions
feront augmentés les prix aux
États-Unis, réduisant le pouvoir d’achat
de la classe prolétarienne déjà
surendettée et sous-payée, ce qui
comprimera les marchés de consommation,
ce qui signifie des perspectives de
profits à court terme pour la classe
capitaliste, les banquiers et les
rentiers, et une baisse des ventes à
terme pour la Chine qui exporte
fortement aux États-Unis d’où une baisse
de la valeur du Yuan que les marchés
boursiers ont anticipée comme l’atteste
ce cambiste:
« Nous sommes en
ce moment à 6,90 yuans pour un dollar,
même si le yuan devait baisser jusqu’à
7,25 contre le dollar, la dépréciation
ne serait que de 4% par rapport à ses
niveaux actuels quand le yen a cédé 16%
contre la devise américaine au cours des
cinq dernières semaines » (6).
La Chine sait tout cela et comprend
qu’elle doit laisser dégringoler la
valeur de sa devise, la rendant moins
attractive pour les investisseurs, mais
de toute façon le pays croule sous
l’épargne des Chinois thésaurisateurs.
Les capitalistes chinois opèrent de
manière ordonnée et contrôlée d’où leur
intervention modérée afin que la chute
de leur devise soit progressive jusqu’à
un seuil ou l’Amérique ne pourra pas les
forcés à descendre plus bas sans mettre
le dollar en péril sur le marché des
changes internationaux. « Les
autorités chinoises ont clairement dit
qu’elles jugeaient une dépréciation de
leur devise nécessaire tout en prévenant
qu’elles veilleraient à ce que le
processus ne soit pas désordonné »
(7).
Incidemment, la
hausse du dollar a l’effet d’une bascule
et permet de réduire la chute du yuan.
Ce que les banquiers et les
boursicoteurs américains ne semblent pas
réaliser c’est que cette hausse du
dollar restreint les perspectives
d’exportation pour les entreprises
américaines dont les installations de
production sont situées aux États-Unis.
Cette hausse de la devise est par contre
avantageuse pour les entreprises
américaines dont les installations sont
à l’extérieur du pays, qui peuvent ainsi
rapatrier leurs profits libellés en yuan
ou en yen qui se renchérissent une fois
transformées en dollars. Cet avantage
est maintenant réduit à néant avec
l’euro qui s’échange au pair depuis
quelque temps. Tout cela ne fera pas
croitre l’emploi aux États-Unis et ne
remettra pas « America First,
Great Again ! » comme le
promettait le multimilliardaire
démagogue (8).
La hausse des cours
boursiers aux États-Unis est spéculative
puisqu’aucune augmentation de la
production n’a été enregistrée aux É.-U.
depuis le 8 novembre dernier, au
contraire, et l’on peut anticiper que la
hausse du loyer de l’argent entrainera
la faillite de millions de foyers
américains – semblable à ce que le pays
a connu en 2008 – incapables de
rencontrer leurs paiements, d’où une
baisse des ventes, des surplus
d’inventaires et des faillites
d’entreprises incapables d’écouler leurs
produits, et ultimement une baisse des
profits généralisés, y compris pour
d’entreprises américaines établies en
Chine.
Autre effet
dévastateur résultant de l’augmentation
de la valeur du dollar, la dette
souveraine américaine gonflera d’autant
puisque l’intérêt sur les obligations ne
fera qu’augmenter (la Réserve fédérale
achetant elle-même les obligations dont
personne ne voudra, accroissant ainsi la
quantité de dollars de pacotilles en
circulation), le déficit budgétaire en
hausse réclamant pourtant des emprunts
croissants. Cette conjoncture
catastrophique poussera dans le sens
d’une dévaluation drastique du dollar
après une remontée spectaculaire suite à
une spéculation boursière frénétique
comme avant chaque krach boursier.
Enfin, comme nous l’annonçons depuis un
an, suivra une dévaluation du dollar en
pagaille, flouant ainsi tous les
créanciers de l’Amérique sauf ceux qui
auront su se débarrasser de leurs
dollars plombés.
« De plus, même
si Japon a ravi à la Chine le rang de
premier détenteur de bons du Trésor
américains selon des données officielles
publiées jeudi 15 décembre et détenait
en octobre 1 131,9 milliards de dollars
contre 1 115,7 milliards accumulés
par la Chine continentale (hors Hong
Kong), Pékin garde un levier de
pression sur le financement de
l’endettement américain » (9).
Il est possible que
les Chinois aient terminé de se
débarrasser de leurs dollars au moment
de la grande dévaluation dans quelques
années, prouvant que ce sont des
investisseurs avisés, mais les Chinois
seront quand même en difficulté puisque
leur marché de prédilection se sera
effondré d’où les capitalistes chinois
se tournent déjà vers leur marché
domestique… et les marchés africains et
asiatiques.
Conclusion.
En tant que
prolétaires révolutionnaires nous
n’avons aucun intérêt en jeux dans cette
guerre monétaire et boursière, mais nous
savons que dans ce conflit entre une
vieille puissance impérialiste
déclinante, alignant 100 millions de
prolétaires en décroissance, et 310
millions de consommateurs surendettés,
et une nouvelle puissance impérialiste
émergente, alignant 500 millions de
prolétaires en croissance et 1,3
milliard de consommateurs aux épargnes
surabondantes, il est facile de prévoir
qu’elle puissance gagnera cette guerre
impérialiste, mais à quel prix ?
NOTES
(1) Par
Luc Mampaey est le directeur du GRIP.
http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/trump-et-wall-street-anticipations-positives-pour-le-secteur-de-larmement/
(2)
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/trump-un-president-comme-les-autres-donald-sen-va-ten-guerre/
et aussi http://www.les7duquebec.com/7-au-front/fute-le-proletariat-americain-comment-instrumentaliser-une-potiche/
(3) Par Luc
Mampaey est le directeur du GRIP.
http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/trump-et-wall-street-anticipations-positives-pour-le-secteur-de-larmement/
(4) Par Luc Mampaey est le directeur
du GRIP.
http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/trump-et-wall-street-anticipations-positives-pour-le-secteur-de-larmement/
(5)
https://investir.lesechos.fr/traders/forex-infos/la-baisse-du-yuan-revient-hanter-les-marches-1620385.php#57emqAUS442pVoGs.99
(6) http://www.boursorama.com/actualites/enquete-le-yuan-a-la-baisse-avec-le-dollar-et-les-sorties-de-capitaux-e510052236dbdb909c05d3430fa99b5f
(7)
http://investir.lesechos.fr/traders/forex-infos/la-baisse-du-yuan-revient-hanter-les-marches-1620385.php
(8)
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/trump-un-president-comme-les-autres-donald-sen-va-ten-guerre/
(9)
http://www.boursorama.com/actualites/enquete-le-yuan-a-la-baisse-avec-le-dollar-et-les-sorties-de-capitaux-e510052236dbdb909c05d3430fa99b5f
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