Les 7 du Québec
Stratégie et tactiques des Gilets
jaunes
Robert Bibeau

Mercredi 19 décembre 2018
Un mouvement
populaire spontané
Le mouvement
populaire spontané des Gilets
jaunes marque le début d’un
temps nouveau en politique
contemporaine, un renouveau à la fois
antisystème capitaliste et
antiréformiste bourgeois; ce courant
de pensée ayant contaminé aussi bien la
«gauche» racoleuse et rafistoleuse des
pots cassés du capital, que les «Indignés
– Nuit debout – Occupy Wall Street»
et autres agitations de la
petite-bourgeoisie offusquée du peu de
considération que lui accorde le grand
capital et ses laquais politiciens de
toute obédience.
Le mouvement
militant des Gilets jaunes
émergeant spontanément de la base
prolétarienne – ceux «d’en bas» –
rejette à la fois – la gauche – le
centre – et la droite bourgeoise –. Ce
mouvement répudie les polichinelles de
tout bord qui se partagent le pouvoir
politique depuis un siècle, en
alternance de collaboration de classe
sous les ordres des patrons, les vrais
maitres du pouvoir économique, politique
et médiatique. Voilà ce qui est nouveau
et donne un indice de l’avance de la
conscience de classe prolétarienne sur
«l’avant-garde» gauchiste ou droitiste
(fasciste ou populiste). Cette
conscience de classe immanente est le
fruit des expériences vécues par les
prolétaires du monde entier depuis les
balbutiements du mouvement ouvrier
autour de la Première, de la 2e,
puis des 3e et 4e
Internationales; à l’occasion des deux
grandes guerres; en Mai-68 et lors des
soulèvements populaires arabes plus
récents. Expérience de lutte en ce
temps-là toujours «encadrée» par les
organisations de la gauche et/ou de la
droite traditionnelle, pseudo
représentants de la classe, et qui se
sont chargés chaque fois d’aménager une
voie de sortie permettant aux larbins du
système de négocier au nom de leurs
patrons une sortie en tromperie côté
cour ou côté jardin.
Le subconscient de
la classe prolétarienne est tellement
imprégné de ces souvenirs amers que
l’unanimité se fait aujourd’hui parmi
les prolétaires en gilets jaunes pour
refuser toute organisation, toute
représentation, toute délégation de
pouvoir, ce que le régime décrie avec
véhémence et que la petite-bourgeoisie
infiltrée dans le mouvement tente de
contrer. Espérons que ce que
l’avant-garde n’a pas encore compris la
classe prolétarienne se le tiendra pour
dit.
L’appel des
petits-bourgs et des politiciens
professionnels pour transformer le
Mouvement en organisation politique, ou
de congédier l’Assemblée nationale, ou
de convoquer une Constituante, d’initier
le Référendum d’Initiative Citoyenne
(RIC-sic), ou de participer aux
mascarades électorales bourgeoises qui
n’ont rien donné depuis un siècle passé,
n’ont pas trouvé d’échos auprès des
militants prolétariens engagés… Ces
propositions démocraticodémagogiques
n’appâtent que les bobos et leurs
sous-fifres qui aimeraient ainsi
reprendre la main sur le Mouvement afin
d’en monnayer l’enlisement. Quelle forme
prendra éventuellement l’organisation
des gilets jaunes en colère, nous ne le
savons pas, mais nous savons toutefois
que la base devra absolument s’assurer
de conserver en tout temps la haute main
sur ses porte-paroles et de ne jamais
permettre le vedettariat parmi ses
porte-paroles.
L’unique
objectif stratégique du Mouvement
Le mouvement est né
autour d’un objectif stratégique
qui a fait consensus dans son expression
militante même s’il parut confus au
début. Il est sain que de nombreux
militants formulent leurs récriminations
et participent ainsi à l’élaboration du
plaidoyer commun qui malgré l’aspect
cacophonique du début s’unifie au fur et
à mesure de la lutte concrète. Les
revendications «réformistes» ont été peu
à peu balayées sous le tapis pour ne
laisser qu’un seul objectif stratégique
différemment formulé.
L’objectif
stratégique des Gilets jaunes
est de défendre le pouvoir d’achat des
salariés étranglés par le système de
profit anémié. En d’autres termes,
leur objectif stratégique est de
maintenir, sinon d’augmenter, la valeur
et le prix de leur force de travail.
C’est d’emblée une revendication de
résistance de classe prolétarienne même
si les prolétaires qui animent le
mouvement ne savent pas l’exprimer en
ces termes, ce qui importe peu, sauf
pour les gauchistes dogmatiques. Cet
objectif stratégique est par essence
révolutionnaire, puisque la crise
économique systémique du capitalisme
rend sa satisfaction impossible.
Chaque euro d’augmentation du salaire
devra être pris dans la caisse des
profits du capital en perdition. En ces
temps de grave crise économique où le
système capitaliste s’apprête à
imploser, une telle revendication
salariale est potentiellement
insurrectionnelle, car le capital ne
bénéficie d’aucune marge de manœuvre, ce
que Macron le thuriféraire
des banquiers est venu confirmer mardi
dernier à la télévision française par
des promesses creuses et trompeuses. Si
le prolétariat français sent que le
moment est propice, de telles promesses
bidon l’amèneront à durcir ses positions
et à maintenir ses revendications
légitimes puisque c’est sa survie
physique en tant que classe sociale qui
en dépend. Les ouvriers militants le
disent carrément «On ne vit plus avec
ces salaires de misère, on survit à
peine».
Une variété de
tactiques de lutte
Un objectif
stratégique de cette importance se
décline selon une variété de tactiques
de combat. Examinons quelques-unes des
tactiques de guerre de classe
qu’instinctivement le Mouvement a mises
en œuvre spontanément.
Première
tactique inédite : Blocage des voies de
circulation dans l’objectif de bloquer
l’économie, c’est-à-dire la circulation
du capital et donc de bloquer sa
profitabilité. Contrairement aux
sempiternelles marches-parades de
carnaval où l’on supplie le suzerain de
l’État des riches de daigner porter
attention à ses ouailles affamées, cette
tactique est potentiellement
insurrectionnelle en s’attaquant
directement au capital, à ses profits,
la sève qui le maintient en vie.
Rappelez-vous cette procession des serfs
russes allant implorer la charité du
tsar, le Petit père des peuples, et qui
furent massacrés par milliers. Le mythe
réformiste-rédempteur à la vie dure
parmi la go-gauche soi-disant marxiste.
À l’époque, les bolchéviques menaient la
cérémonie sacrificielle, aujourd’hui
c’est la CGT/CFDT/FO/SUD qui mènent ce
bal intemporel.
L’été dernier, les
cheminots lors de leur grève partielle
avaient tâté de cette tactique de
blocage des transports des travailleurs
et du fret, indice que la tactique
insurrectionnelle de bloquer l’économie
faisait son chemin dans le subconscient
de la classe prolétarienne française, la
plus militante du continent européen.
Les
manifestations de résistance radicale
Une tactique
complémentaire s’est vite imposée pour
renforcer et radicaliser la tactique de
blocage de l’économie. Contrairement aux
manifestations de types
«parades-processions-manifestations
d’immolation» débilitantes qui répandent
le pessimisme dans le mouvement et le
démobilise, les manifestations de
résistance, très militantes des
Gilets jaunes, à Paris et en
province, ont l’utilité de démontrer la
pugnacité des militants, leur
détermination et surtout de galvaniser
les troupes prolétariennes sur les
barrages après chaque «Acte»
insurrectionnel spontané. Sans compter
que ces casses permettent de peaufiner
l’expérience de guérilla urbaine
prolétarienne. Cependant, le blocage de
l’économie – de la circulation des
marchandises et donc des profits – est
la tactique de lutte décisive sur le
front économique de la lutte de classe
et devra être renforcé. Le blocage des
transports de marchandise et de
travailleurs ainsi que des raffineries
de pétrole mettra l’État terroriste
bourgeois à genoux en même temps que ses
patrons du grand capital.
La grève
générale arme ultime du prolétariat
Un lecteur de notre
webmagazine réplique : «La grève
générale est l’arme ultime des
travailleurs sur le front économique de
la lutte de classe» ce qui est tout
à fait exact. La grève générale stoppe
la circulation générale du capital et
étrangle l’accumulation sectorielle des
profits. Mais de nos jours, où leur
économie est tellement dépendante du
transport des marchandises et de la
circulation des travailleurs salariés
(le capital variable) il existe
différentes façons d’amorcer une grève
générale. En bloquant les transports de
marchandises (biens et services) et la
circulation des travailleurs vers les
lieux d’exploitation de la force de
travail salariée on obtient le même
résultat que par la grève d’ateliers,
d’usines et de chantiers avec la perte
de salaire en moins pour les paumés des
autoroutes bloquées et de la SNCF
paralysée. Si les cheminots n’étaient
pas paralysés par leurs bureaucraties
syndicales, ils pourraient relancer leur
mouvement de grève – mais en continuité
et illimitée cette fois –, avec les
Gilets jaunes finis
l’innocuité des grèves larvées.
Alors que quelques
gilets jaunes égrènent la litanie de
leurs revendications réformistes, les
ministres du gouvernement Macron savent
eux que leur gouvernement fantoche est
en sursis. Qui ne sait pas mâter la
plèbe ne mérite pas de gouverner pensent
les gouverneurs du grand capital
international.
La ministre
Penicaud, dans une novlangue
indescriptible, vient de jeter de
l’huile sur le feu, sur LCI : »Un
coup de pouce au SMIC, on sait que ça
détruit des emplois, donc ce n’est pas
la bonne méthode » déclame-t-elle à
l’encontre de son patron. Tout est dit
par ceux-là mêmes qui sont chargés de la
maintenance du système en déroute. Le
système économique capitaliste est
incompatible avec la survie de la classe
prolétarienne. Sous ce mode de
production déclare la ministre lucide :
« si vous augmentez les salaires et
accordez assez aux ouvriers pour
survivre, vous détruisez leurs emplois
et les enfoncés dans la misère ».
Alors, messieurs dames de la go-gauche,
la question se résume donc à ceci : « faut-il
sauver le système capitaliste ou faut-il
sauver le prolétariat français ? »
Quand tout aura été dit et que tout aura
été consommé, les Gilets jaunes, par
eux-mêmes, sans l’aide d’une avant-garde
de la go-gauche ou de la droite
«fasciste ou populiste» comprendront que
la défense de leur pouvoir d’achat (du
prix de vente de leur force de travail)
les mène directement à la confrontation
antagoniste avec le capital pour leur
survie individuelle et collective.
Rendue au paroxysme de cet affrontement
insurrectionnel deux voies s’ouvriront
au prolétariat – celui du réformisme
petit-bourgeois – et quelques avantages
éphémères seront concédés comme au temps
du CNR – que le capital reprendra
aussitôt –; ou alors la Révolution
prolétarienne détruira définitivement ce
mode de production moribond et créera
les conditions de l’édification d’un
nouveau mode de production sans
salariat, sans monnaie, sans profit et
sans prolétariat.
La répression et
les rafles de lycéens à Mantes-la-Jolie
Cette ignominie a
un nom, elle s’appelle une « rafle
policière et politique », l’étape
répressive où le pouvoir des riches
vacille et où la flicaille de l’État de
droit bourgeois, sans le savoir, recrute
des militants résistants en faveur de
l’insurrection populaire. (1) Il ne
reste qu’à dénoncer cette infamie sans
nom contre les adolescents de
l’insurrection populaire. Nous
approchons du point de retournement où
le pouvoir bourgeois empêtré dans ses
contradictions insolubles basculera dans
la répression sauvage
contre-insurrectionnelle. Tout ceci fait
dire à un camarade que le temps est venu
après tant de rafles réactionnaires, de
détentions arbitraires et d’arrestations
politiques, de réclamer la libération
des prisonniers politiques en gilets
jaunes. « Pas de rencontre ni de
discussion avec le gouvernement tant que
nos camarades sont en détention
! » « Libérez nos camarades » (2)
Les mots d’ordre
des petits-bourgeois
Comme à l’habitude,
un mouvement hétéroclite voit les
petits-bourgeois frustrés de ne pas
accéder à la notoriété avancer leurs
pions et revendications. Et voici que
fusent : «Macron démission», «Convoquons
les États généraux» «Constituante
républicaine», «refondons la République
capitaliste nationaliste», «En avant
pour le RIC» et cent autres fadaises
réactionnaires. Le prolétariat sait bien
lui que si demain Sarkozy, Juppé,
Hollande, Mélenchon ou une autre potiche
des riches était appelée aux affaires
rien ne changerait aux «affaires». Le
grand capital a voulu ce thuriféraire de
chez Rothschild qu’il se démerde avec ce
valet jupitérien. Le prolétariat ne
négocie pas avec une porte-mallette, il
veut débattre avec le patron, qu’il
sorte de sa réunion de conseil
d’administration.
Les « casseurs »
sont des nôtres
Ne vous laissez pas
berner par la propagande policière et
politique à propos des soi-disant
«casseurs» diffusée par les médias à la
solde du grand capital. Les soi-disant
«casseurs» sont des Gilets jaunes qui
sont à bout – qui en ont ras le bol (les
gens incarcérés suite aux rafles
policières le prouvent). Il n’y a qu’une
sorte de Gilets jaunes – des
prolétaires exaspérés qui en ont assez
et qui résistent au matraquage répressif
de l’État terroriste. Les petits-bourgs
qui ont peur de la violence devraient
rester à domicile, on n’a pas besoin
d’eux dans les manifs de résistance. Et
que les bobos effrayés cessent d’argüer
que le prolétariat français rejette les
gilets jaunes qui résistent au
matraquage et qui «cassent», car c’est
faux. Les prolos sans gilet jaune
soutiennent les prolos en gilet jaune
qui combattent l’État policier. La
violence du patronat on la vit
quotidiennement en usines, dans les
ateliers et sur les chantiers.
NOTES
-
https://web.facebook.com/philippe.berard.121/videos/2354231101318859/?t=0
-
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs/liberez-nos-camarades/
Reçu de Robert Bibeau pour
publication
Le sommaire de Robert Bibeau
Le
dossier politique
Les dernières mises à jour

|