MADANIYA
Radioscopie-France,
36 ans après la
«Marche des Beurs». 1/5
René Naba
Vendredi 30 août 2019 A Rachid Taha in
Memoriam
«Français tous les
jours, Algérien toujours», feu follet du
métissage culturel et du brassage
humain, un parfait représentant du
«Coran alternatif».
Cette radioscopie a
été effectuée à l’occasion de la
commémoration du 1 er anniversaire du
décès de Rachid Taha, coïncidant avec la
célébration du 36 me anniversaire de la
«Marche pour l’Egalité et contre le
Racisme», désigné par les médias sous le
vocable de la «Marche des Beurs».
Avec 1,4 millions
de morts, 900 000 invalides, la France
déplorera la perte de 11 pour cent de sa
population active du fait du premier
conflit mondial (1914-1918), auxquelles
il conviendrait d’ajouter les dégâts
économiques: 4,2 millions d’hectares
ravagés, 295.000 maisons détruites,
500.000 endommagés, 4.800 km de voies
ferrées et 58.000 km de routes à
restaurer enfin 22.900 usines à
reconstruire et 330 millions de m3 de
tranchées à combler. Une saignée
amplifiée vingt ans plus tard par une
nouvelle saignée de trente ans, d’une
ampleur comparable, avec la II me guerre
Mondiale (1939-1945), la Guerre
d’Indochine (1945-1955) et la guerre
d’Algérie (1954-1960), réduisant
considérablement les capacités de
d’autoreproduction des Français. Plus
d’un demi-siècle d’hémorragie à jet
continu (1914-1962) rendra la France
exsangue. Là réside l’origine du «grand
remplacement», dans le bellicisme
français et nul part ailleurs.
Que pense de tout
cela Eric Zemmour, le puriste
franchouillard au prénom si Viking, qui
s’étrangle de rage à l’énoncé du prénom
Hapsatou, mais demeure muet comme carpe
à la déclinaison des prénoms tout aussi
exotiques que Gilad, Gad, Arieh, Ilan,
Haïm, Dov, Yossi, William, qui
fleurissent pourtant dans les annuaires
français? Honte à Thierry Ardisson pour
sa passivité devant cette ineptie
racialiste. L’ancien animateur de
l’émission «Tout le Monde en parle»,
aura été, paradoxalement, le seul à ne
pas avoir parlé de cette imposture.
Libération de Paris
1944 : Pourquoi il n’y avait presque
aucun Noir dans les défilés de la
victoire ?
La réponse est
simple car les lointains prédécesseurs
d’Eric Zemmour ne supportaient tout
bonnement pas le prénom Hapsatou.
https://www.youtube.com/watch?v=k5m7vueKdPE
Fin de la note RN
De la théorie du
Grand Remplacement: Une théorie d’une
grande foutaise.
Purgeons le débat.
Et d’un même élan, les démagogues,
falsificateurs et imposteurs de tous
acabits.
Forgée par les
nostalgiques de la grandeur française
des «temps bénis des colonies», la
théorie du «Grand Remplacement» apparait
rétrospectivement comme un corollaire du
déclassement de la France au rang des
puissances mondiales. Le camouflage
d’une fuite en avant. D’un évitement de
responsabilité.
L’équation
démographique qui en constitue le
soubassement idéologique relève, elle
aussi, d’une grande foutaise. A
l’épreuve des chiffres, elle ne résiste
pas non plus à l’analyse.
Cette
psychorigidité nostalgique trouve
d’ailleurs sa concrétisation la plus
pathologiquement aberrante dans la
présence d’un «lobby pied noir» en
France, seul pays parmi les anciens
grands empires coloniaux occidentaux à
disposer d’un tel groupe de pression
anachronique, alors que les anciens
colons français d’Algérie ont dans leur
quasi-totalité rejoint l’au-delà, 70 ans
après l’indépendance de l’Algérie.
Contrairement au Royaume Uni, qui
disposait d’un plus grand empire
colonial que la France, où jamais un
lobby des nostalgiques de l’Empire des
Indes ou de l’Afrique anglophone, n’a
existé, dont le Commonwealth, de
surcroît, -(52 membres, le tiers de la
population mondiale)-, ne dégage
d’ailleurs pas les forts relents de «la
France à fric». Contrairement aussi à
l’Espagne et au Portugal, les deux
autres puissances coloniales
européennes.
Unique grand pays
européen à l’articulation majeure des
deux «penchants criminels de l’Europe
démocratique», -la traite négrière et le
génocide hitlérien-, la France est aussi
le seul pays au monde à exiger d’une de
ses colonies une indemnité compensatoire
à la rétrocession de son indépendance
(Haïti). Bref: Le seul pays au monde
dont le comportement erratique est aux
antipodes de la rationalité cartésienne
dont il se revendique.
Le grand
remplacement est ainsi donc une grande
foutaise en ce que la stigmatisation du
«métèque» pour combler les frustrations
de l’orgueil national malmené ne saurait
occulter la responsabilité accablante du
commandement politique et militaire
français depuis deux siècles et son
cortège de malheur qui confère à la
France le déshonneur d’assumer quatre
capitulations en un temps record.
Non seulement
contre ses rivaux occidentaux, mais
également contre les peuples basanés du
tiers monde dit «sous-développés». A
Waterloo (1815) contre les Anglais; A
Sedan (1870), contre les Allemands, A
Montoire 1940), de nouveau contre les
Allemands, mais également à Dien Bien
Phu (1954), face aux Vietnamiens, puis,
dans la foulée, le traumatisme algérien,
record absolu parmi les grandes
puissances occidentales, qui explique la
relégation de la France à l’échelle des
nations. Loin de résoudre le problème,
l’occulter ne ferait que l’aggraver et
l’évacuer ne ferait que l’empirer. Dans
le cas d’espèce, la France est bel et
bien responsable et coupable, et non,
selon la théorie française du fusible,
«responsable mais non coupable, voire
même dans certaines franges de l’opinion
«ni responsable ni coupable».
Que l’on ne se
leurre pas. Quoiqu’elle fasse,
quoiqu’elle dise, la collaboration avec
le nazisme demeurera une souillure
morale indélébile. Un point noir de
l’Histoire de France.
La responsabilité
pleine et entière de l’élite française.
Une responsabilité exclusive, sans la
moindre implication ni des Arabes, ni
des Africains, ni des Asiatiques,
chrétiens, Musulmans ou Bouddhistes
voire même agnostique ou athée dont la
présence en France s’est justifiée par
les impératifs de reconstruction d’un
pays deux fois détruit en un
demi-siècle: 1914-1918/ 1930-1945.
Avec son élégance
légendaire, Donald Trump ne s’est pas
fait faute de le rappeler dans son
langage châtié: «Ils commençaient à
apprendre l’allemand à Paris avant que
les Etats-Unis arrivent. Payez pour
l’OTAN ou rien ! », a-t-il écrit sur
Twitter.
Donald J. Trump✔@realDonaldTrump
Emmanuel Macron
suggests building its own army to
protect Europe against the U.S., China
and Russia. But it was Germany in World
Wars One & Two – How did that work out
for France? They were starting to learn
German in Paris before the U.S. came
along. Pay for NATO or not!
Marcel Gauchet, un
historien lucide, en déduira que «la
France en 1940 a brutalement cessé
d’être une grande puissance».
Rachid Taha
«Français tous les
jours, Algérien toujours», ce feu follet
du métissage culturel et du brassage
humain opérera un retournement de
situation rarissime, qui confine au
trait de génie, pour puiser dans le
répertoire français une chanson du
terroir «Douce France» de Charles Trenet
en vue de magnifier son pays d’accueil,
au grand dam des nostalgiques de
l’empire, renvoyant aux Français de
souche l’image réfractée de leur
société, une image tricolore certes mais
selon une déclinaison chromatique
différente (White, Black, Beur), plus
conforme à l’histoire de France.
Il en fera le chant
de ralliement à la «Marche des Beurs»,
impulsant, en 1983, une prise de
conscience de la réalité «Beur de
France», conférant aux basanés exclus de
la société d’abondance une visibilité
jamais atteinte auparavant.
Ce faisant, il
veillera à ce que la France qui se
revendique comme «la Patrie des droits
de l’Homme» ne soit pas exclusivement
que la «Partie de la déclaration des
droits de l’homme» et que son pays
d’adoption qui se vit comme «le phare de
l’humanité» ne soit réduit à projeter
qu’une lueur fuligineuse.
Contre le
dogmatisme ambiant véhiculé par le
djihad dans la guerre anti soviétique
d’Afghanistan (1980-1989), Rachid Taha
usera de l’arme de la dérision, de la
transgression et de la subversion, se
revendiquant du «Coran alternatif»,
terme sacrilège à l’époque auprès de
nombreux de ses coreligionnaires, pour
suggérer une voie de dépassement à
l’étouffoir dogmatique, générateur de
zombies criminogènes des zones
périphériques des métropoles
européennes.
La «Marche pour
l’égalité et contre le racisme» est une
marche antiraciste qui s’est déroulée en
France du 15 octobre 1093 au 3 décembre
1983. Il s’agit de la première
manifestation nationale du genre en
France.
A l’attention de
Barbara Lefebvre, afin de combler son
ignorance abyssale: l’auteur de ce texte
est un bilingue français arabe, qui
maitrise la langue arabe enseignée dans
les écoles de la République sans que
cela n’ait affecté pour autant la
qualité de sa maitrise de la langue
française
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2018/09/11/31003-20180911ARTFIG00266-l-arabe-n-a-pas-a-etre-enseigne-a-l-ecole-publique-des-le-primaire.php
Le contre
argumentaire se trouve sur ce lien «Plus
d’arabe que de gaulois dans la langue
française «https://www.franceinter.fr/culture/plus-d-arabe-que-de-gaulois-dan-la-langue-francais
Du déclassement
de la France du rang des grandes
puissances.
Au début du XX me
siècle, la France se trouvait à la tête
d’un des deux grands empires mondiaux à
égalité avec le Royaume Uni. Un siècle
plus tard, au XXI me siècle, la France
est reléguée au rang de la 7me puissance
économique mondiale, supplantée par la
Chine et l’Inde, deux anciennes colonies
européennes, ainsi que par le Japon et
l’Allemagne, les deux grands vaincus de
la 2me Guerre mondiale (1939-1945).
Une tendance
accentuée par le décrochage en juin 2019
de huit pays de l’Afrique occidentale du
Franc CFA, le socle du rayonnement
international de la France, et leur
ralliement, sous l’égide du Nigéria, à
l’ECO la nouvelle monnaie panafricaine.
Pis, en Europe, son
espace vital, la France exerce désormais
une fonction suppléante par rapport à
l’Allemagne, et, en Afrique, dont la
France en fut longtemps le fardeau, elle
est désormais surpassée par la Chine,
les Etats Unis, voire même l’Inde, à
l’arrière-plan d’une économie atone,
d’une croissance en berne, d’une
paupérisation accélérée de la population
et d’un délitement social, alors qu’en
contre champs, les dividendes versés au
grand patronat flambent et que la fraude
fiscale, marque d’incivisme, atteint le
chiffre faramineux de 100 milliards
d’euros en 2018, en augmentation de 20
milliards d’euros par rapport au dernier
recensement de 2013.
Cf à ce propos
http://www.lefigaro.fr/vox/politique/le-lent-declin-de-la-puissance-francaise-en-europe-20190704
La France est « de
loin le plus grand payeur de dividendes
en Europe » (+3,1% à 51 milliards de
dollars).
Selon un rapport de
l’ONG Oxfam publié lundi 14 mai 2018 et
intitulé “CAC 40: des profits sans
partage”, les groupes du CAC 40 ont
redistribué à leurs actionnaires les
deux tiers de leurs bénéfices entre 2009
-année de la crise financière mondiale-
et 2016, soit deux fois plus que dans
les années 2000. Cela a conduit ces
entreprises à ne laisser “que 27,3% au
réinvestissement et 5,3% aux salariés”,
ajoute OXFAM qui dénonce des choix
économiques qui nourrissent une
“véritable spirale des inégalités”.
La France est
désormais sur un siège éjectable au sein
du directoire du Monde.
Si l’on se projette
dans une démarche prospective, une
nouvelle percée d’un pays émergent
entraînerait l’éviction irrémédiable de
la France du G7, le groupe des 7 pays
grands pays industrialisés, qui fait
office du directoire économique du
Monde, suscitant, par contrecoup, une
pression considérable sur le bien-fondé
de son statut de membre permanent du
Conseil de Sécurité de l’ONU, disposant
d’un droit de véto.
Un statut
difficilement justifiable alors que
l’OTAN est représenté par trois membres
permanents (Etats Unis, Royaume Uni,
France), assorti du droit de veto. Ce
qui induirait une pression en faveur
d’une meilleure représentation des
autres continents.
Retour sur ce bilan
calamiteux.
Du «Grand
Remplacement» et de la fable fardeau de
l’homme blanc et autres balivernes.
L’arrivée à
maturité de la 3me génération issue de
l’immigration a coïncidé avec le
développement de la théorie du «grand
remplacement» chère à Renaud Camus et
Eric Zemmour, qui redoutaient la perte
de la pureté immaculée de la blancheur
de la population française du fait d’une
prétendue invasion barbare de leurs
anciens colonisés, feignant d’ignorer
que l’Europe, du fait de la
colonisation, a opéré le plus important
bouleversement démographique de la
planète.
Et la modification
démographique de la population française
a surtout résulté du bellicisme
français, de son instinct de domination
et de colonisation, surajoutée à la
grosse saignée infligée à sa population
tout au long du XXe siècle (1er guerre
mondiale, II me guerre mondiale, Dien
Bien Phu, Algérie), la privant de sa
capacité d’autoreproduction génésique
trans-générationnelle.
La colonisation
le plus important bouleversement
démographique de la planète.
Substrat
idéologique à la théorie du «grand
remplacement», l’équation démographique
constitue, elle aussi, une grande
foutaise. A l’épreuve des faits, elle ne
résiste ni à l’analyse ni à la
comparaison historique.
En un curieux
cheminement, un curieux croisement:
Alors que l’Africain était extirpé de
ses racines par les colonisateurs de la
Sénégambie pour se projeter au-delà des
océans en vue de contribuer à la
prospérité du Nouveau Monde, à titre
gracieux, taillable et corvéable à
merci, Anglais, Français, Espagnols et
Portugais au XVVII- XIX e siècle, puis
les Italiens, les Irlandais, les
Libanais et les Syriens, au XX me
siècle, étaient conduits à l’exode sous
l’effet des contraintes économiques.
Un mouvement
parallèle: Le Noir allait peupler
l’Amérique, quand le blanc se
substituait à lui sur son continent,
faisant venir des «basanés» comme
intermédiaire entre colonisateurs et
colonisés.
Pour aller plus
loin sur ce sujet, Cf à ce propos «Du
Bougnoule au sauvageon, voyage dans
l’imaginaire français» René Naba
-Harmattan 2000, particulièrement le
chapitre II, «Les colonies, avant-goût
du paradis, arrière-goût d’enfer»
https://www.renenaba.com/les-colonies-avant-gout-du-paradis-ou-arriere-gout-denfer/
Du très «Grand
Remplacement» de dimension tri
continentale
En une lointaine
préfiguration du flux migratoire
méditerranéen et son cortège de
«travailleurs immigrés» de l’époque
contemporaine, au rythme de 500 000
expatriés par an en moyenne pendant 40
ans, de 1881 à 1920, 28 millions
d’Européens auront ainsi déserté
l’Europe pour peupler l’Amérique, dont
20 millions aux Etats-Unis, huit
millions en Amérique latine, sans
compter l’Océanie (Australie, Nouvelle
Zélande), le Canada, le continent noir,
le Maghreb et l’Afrique du sud notamment
ainsi que les confins de l’Asie, les
comptoirs enclaves de Hong Kong, de
Pondichéry et de Macao.
Cinquante-deux
millions (52 millions) d’expatriés, soit
le double de la totalité de la
population étrangère résidant dans
l’Union Européenne à la fin du XX me
siècle, un chiffre sensiblement
équivalent à la population française.
Principal
pourvoyeur démographique de la planète
pendant cent vingt ans, l’Europe
réussira le tour de force de façonner à
son image deux autres continents,
l’Amérique dans ses deux versants ainsi
que l’Océanie et d’imposer la marque de
sa civilisation à l’Asie et l’Afrique.
«Maître du monde»
jusqu’à la fin du XX me siècle, elle
fera de la planète son polygone de tir
permanent, sa propre soupape de
sécurité, le tremplin de son rayonnement
et de son expansion, le déversoir de
tous ses maux, une décharge pour son
surplus de population, un bagne idéal
pour ses trublions, sans limitation que
celle imposée par la rivalité intra
européenne pour la conquête des matières
premières.
En cinq siècles (XV
me–XX me), 40 pour cent du monde habité
aura ainsi peu ou prou ployé sous le
joug colonial européen. Prenant le
relais de l’Espagne et du Portugal,
initiateurs du mouvement, la
Grande-Bretagne et la France, les deux
puissances maritimes majeures de
l’époque, posséderont à elles seules
jusqu’à 85 pour cent du domaine colonial
mondial et 70 pour cent des habitants de
la planète au début du XX me siècle,
pillant au passage, le Portugal et
l’Espagne l’or d’Amérique du sud,
l’Angleterre les richesses de l’Inde, la
France le continent africain.
La Grande-Bretagne
revendiquera cette responsabilité au
titre du «fardeau de l’homme blanc»
exalté par Rudyard Kipling, la France,
au nom de sa «mission civilisatrice»,
corpus philosophique inaltérable de la
pensée française pendant des décennies
au-delà des clivages politiques et
religieux, thématique qui fera l’objet
de toutes les déclinaisons dans un
florilège littéraire extravagant et une
débauche d’initiatives toutes aussi
extravagantes, dont les plus
invraisemblables auront été les «zoos
humains» des expositions coloniales.
Nains
brachycéphales, bossus dolichocéphales,
géants macrocéphales, nègres albinos,
indigènes callipyges, cannibales
canaques, toutes les déclinaisons de la
morphologie humaine seront ainsi
exhibées pendant une cinquantaine
d’années dans les principales villes
françaises, sans la moindre retenue,
pour exalter la splendeur coloniale de
la France et théoriser, par contrecoup,
l’infériorité des métèques.
A raison d’une
manifestation tous les 18 mois, 38
expositions ethnologiques, dont 30 pour
le seul jardin d’acclimatation de Paris,
seront alternativement organisées à
Paris, Marseille et Lyon pendant plus
d’un demi-siècle, de 1877 à 1931 dans
une vaste entreprise qui relevait tout à
la fois de l’opération de relations
publiques et de l’action psychologique.
Nul ou presque ne
résistera au mirage de l’œuvre
pacificatrice de la France. Pas même un
visionnaire tel Alexis de Tocqueville
par ailleurs si lucide théoricien de la
«Démocratie en Amérique» qui légitimera
les boucheries comme «des nécessités
fâcheuses auxquelles tout peuple qui
voudra faire la guerre aux Arabes sera
obligé de se soumettre»;
Ni Jules Ferry,
père de l’école laïque, la matrice de la
III me République qui revendiquera pour
«les races supérieures (…) le droit de
civiliser les races inférieures», ni
même un vénérable humaniste de la
dimension de Léon Blum, premier chef du
gouvernement socialiste de la France
moderne, artisan des premières conquêtes
sociales sous le gouvernement du Front
Populaire (1936).
Rares seront les
voix discordantes au choeur laudateur de
la France coloniale. Guy De Maupassant,
en pionnier, ironisera sur la
«singulière conception de l’honneur
national» des Français.
Louis Aragon, André
Breton et Paul Eluard demanderont le
boycott des expositions coloniales,
dénonçant cette escroquerie
intellectuelle dans un manifeste
intitulé «Ne visitez pas l’exposition
coloniale». Peine perdue: l’expo de 1931
fera 33 millions de profits rien qu’en
six mois.
Symboles oubliés de
l’époque coloniale, totalement refoulés
de la mémoire collective occidentale,
«étape majeure du passage progressif
d’un racisme scientifique à un racisme
populaire», les «exhibitions
anthropo-zoologiques», en mettant en
perspective la «spectacularisation de
l’autre» par un savant dosage
d’individus exotiques et des bêtes
sauvages, auront donné naissance à bien
des stéréotypes encore en vigueur à
l’époque contemporaine. Ils
contribueront ainsi puissamment à
façonner l’identité occidentale et
l’imaginaire des Occidentaux.
La grande
saignée de la population française et
l’arrivée des premiers travailleurs
immigrés en France.
Le tableau
paradisiaque du temps béni des colonies
va voler en éclats avec la Grande
Guerre.
Première rupture
géostratégique majeure de l’époque
contemporaine, la Première Guerre
mondiale (1914-1918), saignée humaine,
gâchis économique, provoquera, sur le
plan de la géostratégie, un déclassement
progressif de l’Europe au profit des
Etats-Unis, sur le plan démographique,
un renversement des flux migratoires, et
sur le plan de la psychologie des
Européens, le rude apprentissage du
phénomène exogène, de la culture de
l’altérité, la négation de
l’égocentrisme, une véritable révolution
mentale.
Avec 1,4 millions
de morts, 900 000 invalides, la France
déplorera la perte de 11 pour cent de sa
population active du fait du premier
conflit mondia (1914-1918), auxquelles
il conviendrait d’ajouter les dégâts
économiques: 4,2 millions d’hectares
ravagés, 295 000 maisons détruites, 500
000 endommagés, 4.800 km de voies
ferrées et 58.000 km de routes à
restaurer et 22 900 usines à
reconstruire et 330 millions de m3 de
tranchées à combler. Une saignée
amplifiée vingt ans plus tard par une
nouvelle saignée de trente ans, d’une
ampleur comparable, avec la II me guerre
Mondiale (1939-1945), la Guerre
d’Indochine (1945-1955) et la guerre
d’Algérie (1954-1960), réduisant
considérablement les capacités de
d’autoreproduction des Français. Plus
d’un demi-siècle d’hémorragie à jet
continu (1914-1962) rendra la France
exsangue. Là réside l’origine du «grand
remplacement», dans le bellicisme
français et nulle part ailleurs.
Les premiers
travailleurs immigrés, des Kabyles,
arriveront en France dès 1904 par petits
groupes, mais la 1ère Guerre Mondiale
provoquera un effet d’accélérateur
entraînant un recours massif aux
«travailleurs coloniaux» auxquels se
superposeront les renforts des champs de
bataille comptabilisés sous une autre
rubrique.
Durant la première
décennie du XX me siècle, la France
comptait déjà 1,1 millions d’étrangers
en 1906, soit 2,7 pour cent de la
population. Vingt ans après, le chiffre
doublait avec 2,5 millions étrangers,
dont 1,3 millions de travailleurs
d’Europe, et d’Asie et d’Afrique
recensés en 1926.
L’indigène lointain
cède la place à l’immigré de proximité.
De curiosité exotique que l’on exhibe
dans les zoos humains pour glorifier
l’action coloniale française, le
mélanoderme deviendra progressivement
une donnée permanente du paysage humain
de la vie quotidienne métropolitaine.
Sa présence sera
vécue comme une contrainte, exacerbée
par la différenciation des modes de vie
entre immigrés et métropolitains, les
fluctuations économiques et les
incertitudes politiques du pays
d’accueil.
Paradoxalement,
dans la période de l’entre-deux guerres
(1918-1938), la France va favoriser la
mise en place d’une «République
Xénophobe», matrice de l’idéologie
vichyste et de la «préférence
nationale», alors que son besoin en main
d’œuvre est criant. Bien que contribuant
à sortir la France de son champ de
ruines, les travailleurs immigrés seront
tenus en suspicion, pistés au sein d’un
grand «fichier central».
Soumis pour
l’obtention de la carte de séjour à une
taxation équivalant parfois à un demi
mois de salaire, source de revenus
complémentaire pour l’Etat français, ils
seront de surcroît perçus comme porteurs
d’un triple péril: Péril économique pour
leurs concurrents français, péril
sanitaire pour la population française
dans la mesure où l’étranger
particulièrement les Asiatiques, les
Africains et les Maghrébins étaient
présumés porteurs de maladies, péril
sécuritaire pour l’état français.
Les cotations
boursières des travailleurs coloniaux
Près de deux cent
mille «travailleurs coloniaux» (200 000)
seront ainsi importés d’Afrique du Nord
et du continent noir par de véritables
corporations négrières, telle la
«Société générale de l’immigration»
(SGI), afin de pallier la main d’œuvre
française principalement dans le
bâtiment et l’industrie textile en
remplacement des soldats français partis
au front. Dans la cohorte de
travailleurs immigrés, venus d’abord
principalement d’Italie et de Pologne,
les Maghrébins feront l’objet d’une
attention spéciale de la part des
pouvoirs publics.
Un «Bureau de
surveillance et de protection des
indigènes nord-africains» chargé de la
répression des crimes et des délits» est
constitué le 31 mars 1925.
Un bureau spécial
rien que pour les Maghrébins, précurseur
du «service des questions juives» que le
pouvoir vichyste mettra en place en 1940
pour la surveillance des nationaux
français de «race juive» ou de
confession israélite» durant la Seconde
Guerre mondiale. L’intitulé de l’office
en dit long quant à l’opinion du
gouvernement français et de ses
intentions à leur égard.
Le phénomène ira en
s’amplifiant avec la 2me Guerre Mondiale
et les trente glorieuses années de
l’après-guerre (1945-1975) qui suivirent
la reconstruction de l’Europe, où le
besoin de «chairs à canon» et d’une main
d’œuvre abondante à bas prix
provoqueront un nouveau flux migratoire
égal en importance au précédent.
A l’épreuve des
faits, la théorie du «Grand
Remplacement» aura été finalement la
«Théorie du Grand N’importe Quoi»; une
lecture exclusivement européocentriste,
occultant, par ignorance, les paramètres
de la problématique du bouleversement
démographique de la planète, dont
l’Europe, particulièrement la France,
auront été les grands initiateurs.
«La France a une
part d’Afrique en elle. Et sur ce sol de
Provence, cette part fut celle du sang
versé. Ils ont fait l’honneur et la
grandeur de la France. Ils sont des
milliers à s’être sacrifiés pour
défendre une terre lointaine, une terre
souvent inconnue, une terre jusqu’alors
jamais foulée, une terre à laquelle ils
ont à jamais mêlé leur sang».
L’aveu tardif, bien
tardif, du président français Emmanuel
Macron, est tombé, le 15 Août 2019, à
l’occasion du 75me anniversaire du
débarquement de la Première armée
d’Afrique en Provence, laquelle avec ses
175.000 soldats de l’outre-mer colonial,
a maintenu la France au rang de grande
puissance.
Que pense de tout
cela Eric Zemmour, le puriste
franchouillard au prénom si Viking, qui
s’étrangle de rage à l’énoncé du prénom
Hapsatou, mais demeure muet comme carpe
à la déclinaison des prénoms tout aussi
exotiques que Gilad, Gad, Arieh, Ilan,
Haïm, Dov, Yossi, William, qui
fleurissent pourtant dans les annuaires
français?
Honte à Thierry
Ardisson pour sa passivité devant cette
ineptie racialiste. L’ancien animateur
de l’émission «Tout le Monde en parle»,
aura été, paradoxalement, le seul à ne
pas avoir parlé de cette imposture.
Que pensent de tout
cela Renaud Camus et Georges Bensoussan,
lesquels plutôt que de se lamenter sur
«les territoires perdus de la
République» devraient se lamenter sur le
fait que la République se soit perdue
dans ces territoires-là, en se les
appropriant indûment, bafouant au
passage les principes fondateurs de la
République.
«Nous vaincrons
parce que nous sommes les plus forts»,
claironnait le coq gaulois, vantard,
quand le lion britannique, invincible,
promettait, non sans courage, «Du sang,
du labeur, des larmes et de la sueur».
La classe.
Fanfaronnade
fatale. Droit dans le mur en klaxonnant.
Avec en prime le sabordage de sa propre
flotte de guerre. Pitoyable.
Qu’il est malsain
de touiller les remugles des fosses
septiques de l’Histoire. Nauséabonde
l’odeur qui s’y dégage. Dans la mémoire
vive des peuples, les blessures ne
cicatrisent jamais.
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