MADANIYA
Donald Trump en Arabie saoudite:
L’adoubement de l’artisan du «Muslim
Ban»
par les pétromonarchies sunnites
René Naba
Mercredi 17 mai 2017
« Il est dangereux d’être ennemi de
l’Amérique, mais il est deux fois plus
dangereux d’être son ami ».
Dicton Arabe
Donald Trump effectue le 19 Mai 2017 une
visite officielle en Arabie saoudite,
son premier déplacement à l’étranger qui
apparaît comme devant marquer
l’adoubement de l’artisan du «Muslim
Ban» par les pétromonarchies sunnites.
Du Royaume des fils d’Abdel Aziz au
Royaume des Fils de Salmane
Le
«Muslim Ban», mesure phare de
l’administration, est le décret anti
immigration signé par le président
américain le 30 janvier 2017 interdisant
aux réfugiés et à sept pays musulmans
d’entrer sur le sol américain.
Soixantaine trois millions de dollars
ont été allouées à la réception du
président américain, dont la visite
devrait donner lieu en outre à un sommet
islamo-américain devant préluder à un
pacte tacite entre les pétromonarchies
et Israël face à l’Iran.
La
caution du gardien des Lieux Saints de
l’Islam à l’égard de la politique
xénophobe du président américain, qui va
à l’encontre du tollé suscité par cette
mesure sur le plan intérieur américain
et que sur le plan international, va
s’accompagner d’une abdication des
pétromonarchies à l’égard de la question
palestinienne, et sa substitution par ce
pacte tacite qui devrait, dans l’esprit
de ses concepteurs, devrait bouleverser
les rapports régionaux en contrepoint de
la percée russe en Syrie et de la montée
en puissance de l’Iran.
Empêtrée
en Syrie et au Yémen, en proie à une
vive agitation intérieure, le Roi
Salmane espère, en contrepartie de cette
mutation diplomatique, obtenir
l’acceptation de l’administration
américaine des mutations successorales
intervenues au sein de la dynastie
wahhabite. Un «deal win win», selon les
concepteurs de cette transaction, le
propre fils du Roi, Mohamad Ben Salmane
et la garde rapprochée de Donald Trump.
L’achat
d’un yacht d’une valeur de cinq cents
millions de dollars par le fils du Roi
Mohamad Ben Salmane, se superposant aux
pertes humaines et matérielles au Yémen,
ont suscité une vague de protestation
sur les réseaux sociaux, s’indignant de
la docilité de la famille régnante
saoudienne à l’égard des Diktats
américains. L’un des mots d’ordre le
plus usité aura été «nous ne devons pas
vivre en fonction des agendas de Londres
ou de Washington».
Sous
Salmane, le «Royaume des fils d’Abdel
Aziz tend à devenir le Royaume des fils
du Roi Salmane», selon l’expression de
l’influent éditorialiste arabe Abdel
Bari Atwane, directeur du site «Ar Rai
Al Yom».
Deux ans
après son arrivée au pouvoir, le Roi
Salmane, octogénaire, a placé ses
propres fils aux principaux rouages de
l’État, au détriment des autres
composantes de la dynastie wahhabite, y
compris sa famille souche- le Clan
Sidéiry-: Mohamad, prince héritier du
prince héritier, son fils Khaled, un
jeune pilote de 28 ans sans la moindre
expérience diplomatique, ambassadeur aux
États Unis, son 3eme fils, vice
gouverneur de La Mecque, haut lieu de
l’Islam.
Pour le
lecteur arabophone, sur ce lien les
mutations dynastiques en Arabie et les
troubles sociaux qui se sont ensuivis.
http://www.raialyoum.com/?p=665969
Un deal
scellé par un important contrat
militaire de l’ordre de 300 milliards de
dollars sur dix ans, destiné à renforcer
les capacités balistiques et navales du
royaume saoudien face à l’Iran, tout en
«préservant la supériorité militaire
israélienne dans la zone» selon un
membre de l’administration américaine.
La
transaction militaire comporterait des
armes prohibées par Barack Obama,
notamment des bombes à fragmentation,
abondamment utilisées par l’Arabie
saoudite dans la guerre qu’elle mène
depuis trois ans au Yémen et prohibées
par le Droit international. A charge
pour le Royaume et ses alliés sunnites
d’en finir avec cette guerre avant fin
2017, selon les indiscrétions filtrées
dans la presse arabe.
La neutralisation de la Loi JASTA
Ce
contrat, dont la première tranche de 100
milliards de dollars sera finalisé à
l’occasion de la visite officielle du
président américain être finalisé en
2017, devrait permettre de maintenir un
considérable bassin d’emploi au complexe
militaro industriel américain.
L’objectif sous-jacent de ce «contrat du
siècle» serait de neutraliser les effets
de la Loi JASTA, adoptée en septembre
2016, par le Congrès américain,
autorisant les ayants droits à
poursuivre le Royaume saoudite pour sa
responsabilité implicite dans les raids
talibans contre les Symboles de
l’hyperpuissance américaine, le 11
septembre 2001.Quinze des 19 pirates de
l’air étaient de nationalité saoudienne.
Une mise en veilleuse de ce contentieux,
à tout le moins le long de la mandature
de Donald Trump.
La
Mairie de New York, réclame à elle seule
un dédommagement de 95 milliards de
dollars en compensation de la
destruction des tours du World Trade
Center, des destructions annexes et les
pertes humaines des services publics
(pompiers, policiers). Au total, le
préjudice américain est estimé à près de
trois trillions de dollars (trois mille
milliards de dollars).
Pour s’épargner les foudres américaines
et écarter les soupçons sur son possible
rôle de parrain financier du terrorisme
islamiste, l’Arabie saoudite a mis en
faillite le firme Ben Laden, le
conglomérat de la famille du fondateur
d’Al Qaida, en lui imputant la
responsabilité d’une chute de grue à La
Mecque. De concert avec son allié du
Qatar le Royaume a en outre obtenu de
Jabhat An Nosra de Syrie, la filiale
syrienne d’Al Qaida, de renoncer à sa
franchise et de se doter d’un nouveau
nom dans une opération classique de
blanchissement sur le modèle opéré en
France tant par Elf Aquitaine désormais
Total, ou encore le parti gaulliste,
passé du RPR, à l’UMP aux «Les
Républicains» (LR), au gré des scandales
politico financiers qui ont émaillé la
vie politique française.
Salmane, pionnier dans la
normalisation des pétromonarchies avec
Israël.
Sous
l’impulsion de Salmane, à l’époque
Gouverneur de Ryad, les pays arabes ont
pratiqué une normalisation rampante avec
Israël concomitante de l’annexion
rampante de la Palestine; une
normalisation rampante du côté arabe
proportionnelle à la montée en puissance
du mouvement du boycottage d’Israël sur
le plan mondial.
L’Iran a
servi de prétexte à la normalisation de
facto entre Israël et les
pétromonarchies du Golfe. La connivence,
d’abord souterraine, est désormais
publique.
Moujtahed, le gazouilleur le plus
redouté du royaume saoudien pour la
fiabilité et la corrosivité de ses
informations, en a fait état dans une
série de révélations.
«Salmane
a eu des contacts avec les sionistes dès
la décennie 1980. Il a été le précurseur
en ce domaine au sein de la famille
royale saoudienne. Le gouverneur de
Riyad avait des contacts réguliers à
l’époque par l’entremise de ses
protégés, Ousmane Al Omeir et Abdel
Rahmane Ar Rached, les deux premiers
rédacteurs en chef de son journal amiral
«Al Charq Al Awsat»
Le Roi Salmane, principal collecteur
de fonds du djihadisme afghan
Parallèlement, Salmane, propriétaire de
cet important groupe de presse, «Saudi
Research and Marketing ltd», a ainsi
orchestré pendant plus de 30 ans, à
travers la totalité des 15 périodiques
de son empire médiatique les campagnes
de collecte de fonds au profit des
«arabes afghans», les ancêtres des
djihadistes salafistes, tant en
Afghanistan, qu’en Bosnie-Herzégovine,
qu’en Tchétchénie, qu’au début du
printemps arabe contre la Syrie.
À
journées faites, sur de pleines pages,
Al Charq Al Awsat mentionnait, dans la
pure tradition de l’économie
ostentatoire, les contributions des
donateurs dans un style qui incitait à
l’émulation. Des annonces reprises, au
diapason, par les autres publications du
groupe : Arab News, Al Majalla, Urdu
News, Arrajol, et Al Iqtissadiyah.
Ainsi
donc pour la survie de son trône et la
pérennité de sa propre famille, le Roi
Salmane fragilise l’économie de son pays
et brade la Palestine, jadis «la cause
sacrée des Arabes», fait infamant, à la
date commémorative du centenaire de la
proclamation de la promesse Balfour. La
marque d’un autisme politique absolu.
Pour aller plus loin sur ce sujet
Le sommaire de René Naba
Le
dossier Arabie saoudite
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